L'accord, qualifié d'«historique» par le gouvernement, a été signé jeudi à Conakry par des responsables de l'opposition et de la majorité, en présence de représentants du gouvernement, de diplomates et du représentant spécial du secrétaire général de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest, Mohammed Ibn Chambas. Il porte sur la composition de la Commission électorale nationale (CENI), le fichier électoral et l'organisation des locales, selon les participants à la rencontre. «Je suis très heureux qu'enfin la classe politique guinéenne puisse arriver à signer ce qu'on peut dire, sans fanfaronnade, un accord historique», a indiqué le ministre de la Justice, Cheick Sako. Le climat était tendu depuis plusieurs mois entre le pouvoir et l'opposition autour du calendrier des prochains scrutins arrêté en mars par la CENI, qui prévoyait une présidentielle en octobre et des locales en 2016. Les opposants ont contesté ce programme et réclamé la tenue des locales avant la présidentielle. Ils ont organisé depuis avril plusieurs manifestations, généralement interdites, qui se sont soldées par plusieurs morts et des dizaines de blessés. «Nous avons procédé à la signature entre le gouvernement et l'opposition sur les trois sujets en négociation depuis deux mois, à savoir la CENI, le fichier électoral et les élections locales», a expliqué l'ex-Premier ministre et opposant, Sidya Touré. Selon cet accord, l'opposition doit désigner deux personnes pour remplacer deux de ses commissaires à la CENI, décédés. La CENI est formée de 25 commissaires dont dix du pouvoir et dix de l'opposition. Un audit du fichier électoral doit également être fait avec la présidentielle du 11 octobre. L'opposition conteste la fiabilité de ce fichier et reproche au pouvoir de l'avoir gonflé dans les zones qui lui sont présumées favorables. Les deux parties se sont aussi entendues pour désigner les responsables de 128 communes sur les 335 de la Guinée, ayant toutes plus de 10 000 habitants. Cette désignation se fera sur la base des résultats à la proportionnelle des législatives de 2013. L'opposition a exigé des changements de personnel dans les communes pour éviter, selon elle, des interventions au profit du pouvoir lors de la présidentielle. Les communes de Guinée sont dirigées par des délégations spéciales, exécutifs communaux provisoires désignés par le pouvoir, faute de scrutin à cet échelon depuis 2005. Lumignon d'espoir Les organisations et la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest, présentes à la réunion, «se félicitent de la signature de l'accord politique issu du dialogue interguinéen entamé depuis le 18 juin 2015», a déclaré Mohammed Ibn Chambas. Des responsables de la majorité, de l'opposition et du gouvernement se sont déjà entendus en juin pour annuler le chronogramme sur les élections locales, programmées pour 2016. Le principal opposant, l'ex-Premier ministre Cellou Dalein Diallo, a fait remarquer que cet accord fait suite à plusieurs autres conclus. «Pour la paix dans le pays, nous avons décidé de faire des concessions en espérant que les engagements pris cette fois-ci vont être appliqués par le gouvernement et la CENI», a-t-il ajouté. Sidya Touré a aussi espéré que l'engagement «pourra être respecté» par les signataires pour une présidentielle sans contestation. Le président Alpha Condé, élu en 2010, a déposé mercredi son dossier de candidature à la Cour constitutionnelle pour le scrutin. Les prétendants au fauteuil présidentiel ont jusqu'au 1er septembre pour se faire enregistrer. Opposant à tous les régimes précédents, A. Condé est le premier chef d'Etat démocratiquement élu de cette ex-colonie française, indépendante en 1958 et qui était jusqu'à son élection dirigée par des pouvoirs dictatoriaux.