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Mama. La première édition du FIAC s'achève : Aimer voir
Publié dans El Watan le 20 - 02 - 2010

Plus de 20 000 visiteurs à cette exposition internationale qui s'achève dans 9 jours. De l'émotion, du sens et de la créativité à découvrir encore.
C'est la première fois que le Mama, (Musée national d'art moderne et contemporain d'Alger), organise une grande exposition qui ne soit pas liée à un méga-événement, preuve que l'institution, née à la faveur d' « Alger, capitale de la culture arabe 2007 », commence à s'installer dans le durable. La première édition du FIAC (Festival international d'art contemporain), qui s'étale sur trois mois, était donc, de ce point de vue, une première pour le jeune musée. Son vernissage, le 17 novembre dernier, coïncidant avec le fameux match Algérie-Egypte, était passé inaperçu. Le directeur du Mama, Mohammed Djehiche, se souvient d'ailleurs avec amusement que même les artistes exposants, venus du monde entier, avaient abandonné leurs œuvres pour se mêler à la foule en liesse de la rue Larbi Ben M'hidi, scandant avec des accents mexicains, belges, camerounais, marocains, iraniens, français, indiens ou autres les slogans à la gloire des Verts.
Les passions qui avaient marqué cette épopée footballistique et médiatico-politique n'ont pourtant pas poussé le Mama à s'aligner sur les outrances égyptiennes qui avaient conduit à l'éviction de l'artiste algérienne, Zineb Sedira, de la Biennale d'Alexandrie. Celle-ci expose d'ailleurs au FIAC, aux côtés des artistes égyptiens, Mahmoud Khaled et Mona Marzouk d'Alexandrie, comme de Maha Maamoun du Caire. Un beau pied de nez à la bêtise et à la haine qui n'ont pas droit de cité dans la culture. En dépit du contexte très foot, puisqu'il y eut ensuite l'épisode angolais, le FIAC d'Alger a réussi à attirer plus de 20 000 visiteurs à ce jour et compte atteindre 25 000 à sa clôture. La mise en place d'un comptage des entrées a permis de relever des moyennes de 200 visiteurs/jour en semaine et de 500 à 600 les samedis. Bien sûr, cela ne représente pas même 0,5% de la population algéroise. Bien sûr aussi, cela peut paraître bien pâle à côté des centaines de milliers de visiteurs qu'attirent les expositions des grandes institutions muséales du monde.
Mais ce serait faire fi de toute raison que de négliger l'encouragement manifeste d'un tel score. « Nous sommes vraiment enchantés de ces résultats, affirme notre interlocuteur. La création d'un espace réservé à l'art contemporain est une ancienne demande des artistes. La ministre de la Culture l'a entendue et cela a donné naissance au Mama. Mais il reste à gagner le public et, justement, le premier objectif que nous poursuivons est de promouvoir une action pédagogique sur l'art contemporain. Les Algériens et Algériennes sont beaucoup plus curieux et ouverts qu'on ne le pense et il suffit d'aller vers eux. Nous recevons des visiteurs de tous âges, toutes conditions, tous niveaux culturels et cette diversité est une formidable expérience, rare dans le monde, que nous préservons par la gratuité. » Nous avons pu le vérifier avec la dévouée guide, Aïdel, jeune diplômée des beaux-arts, en rencontrant deux petites collégiennes. C'est la deuxième fois qu'elles visitent l'exposition. Qu'est-ce qui les pousse à venir ? Haussement d'épaules, gêne pour répondre, puis l'une s'enhardit : « On aime voir, Monsieur. » Aimer voir, c'est là que se trouve toute l'histoire de l'art. En deux verbes et une mimique, tout est dit. Nous sommes dans la salle de l'Iranienne Bita Fayyazi de Téhéran. Un lit métallique renversé, des bébés projetés dans l'air, des plaques d'acier au sol. Nos deux petites essaient de comprendre, sollicitent la guide qui s'apprête à répondre.
Je m'interpose pour leur demander ce qu'elles voient et ressentent. Réponse : « Une catastrophe ? Un séisme ? Une explosion ? C'est mal. Comme la guerre. » Soit exactement ce que l'artiste de Téhéran voulait signifier. Pour M. Djehiche, cela confirme que l'on entoure souvent l'art contemporain d'une sorte de mythologie : « Certains pensent qu'il y a des codes ésotériques autour de cet art. C'est vrai qu'il demande un effort d'interprétation, qu'il sollicite l'interrogation et c'est cela, peut-être plus que ses formes et pratiques, qui le distingue des arts précédents. Or tout un chacun, en fonction de son expérience de la vie, de son éducation, etc. est autorisé et capable de le ressentir et de l'interpréter. Bien sûr, certaines œuvres sont plus hermétiques que d'autres. Mais en général, l'art contemporain s'inscrit dans l'actualité. Il demande que le spectateur se libère de ses inhibitions et se permette de penser librement. »
Les œuvres exposées illustrent bien ce propos. Conçues par une quarantaine d'artistes du monde, elles ont été regroupées à partir du thème de la Terre, « dans sa compréhension la plus large, avec ses interprétations philosophiques, écologiques, humaines, éthiques… ». Les artistes ont été laissés libres de se positionner dans ce vaste sujet et ils ne s'en sont pas privés. C'est cette diversité, vaguement centrée, qui donne tout son intérêt à la manifestation, son foisonnement de sujets et de supports, bien que l'on remarque une prédominance de l'art-vidéo qui déséquilibre légèrement la scénographie. La direction du Mama en est consciente, mais le temps imparti à la préparation, débutée en plein Panaf', n'a pas toujours suffi. De plus, l'organisation de telles expositions doit affronter de belles surprises.
Exemple : la vidéo des Français Marion Laval-Jeantet et Benoît Mangin devait être projetée près d'un squelette de vache. C'était sans compter sur l'opposition unanime des Douanes des deux pays, naturellement plus soucieuses des risques bactériologiques que de l'imagination débridée des artistes. De même, il a fallu des trésors d'ingéniosité pour assurer la participation de Wellesley-Bourke et Douglas Argüelles dont le pays, Cuba, n'est pas desservi par le transporteur international, blocus oblige. Organiser une exposition de cette envergure et de ce type est une entreprise complexe, sollicitant plusieurs corps de métiers et institutions. L'expérience accumulée par les Algériens depuis l'Année de l'Algérie en France et les deux méga-évènements suivants a permis de capitaliser des expériences précieuses en ingénierie culturelle.
La sélection des artistes s'est effectuée selon une logique de représentativité internationale : de chaque continent et région, 3 pays ont été retenus et dans chaque pays, deux à trois artistes. Le Mama a mobilisé pour cela tous ses relais culturels et artistiques dans le monde, de même que les chancelleries présentes à Alger pour transmettre des dossiers d'artistes qui ont été examinés et validés par le comité d'organisation, composé d'artistes et de critiques. Avec l'Algérie, ce sont 18 pays qui sont représentés : Afrique du Sud, Belgique, Cameroun, Chine, Chili, Cuba, Egypte, Espagne, France, Inde, Iran, Jordanie, Maroc, Mexique, Nigeria, Palestine et Tunisie. Une belle palette planétaire qui atteste de la parfaite internationalité de l'art contemporain, mais également de l'attachement des artistes à leur héritage culturel assumé de manière explicite ou implicite.
L'Algérie est présente avec six artistes, trois vivant en Algérie et trois issus de ses communautés émigrées. Une participation plus qu'honorable d'ailleurs. Kader Attia, grand photographe et créateur d'art, coté mondialement, présente une vidéo stupéfiante, Oil and Sugar II : du pétrole coulant sur un grand cube de morceaux de sucres, terrible allégorie des errances de l'humanité et des déboires de la planète. Ammar Bouras a fait fort également avec ses douze écrans animés de vagues, la projection débordant sur le sol pour inonder symboliquement de vieilles rames de barques et des chaînes brisées. Tout à fait dans la mouvance harraga qui touche tous nos arts. Comme pour lui répondre, Miryam Aït El Hara propose des photographies géantes d'un Retour à la terre, spectaculaires représentations d'elle-même, enduite de terre. Sadek Rahim met en scène une valise étonnante, celle d'un émigré animée par projection du plafond, déversant des objets importés destinés à la famille puis chargeant des souvenirs du pays lors du retour à l'étranger, les vacances finies.
Forts également, les trois écrans qui se font face dans une salle obscure où Zineb Sedira, d'un côté, écoute ses deux parents qui racontent simultanément leur saga familiale liée à l'émigration. Une œuvre pour le moins intéressante, souvent émouvante. Avec Temps Mort, Mohamed Bourouissa montre une vidéo composée de ses échanges d'images avec un prisonnier de longue durée, chacun filmant pour l'autre ses activités ordinaires.
Mais il y a aussi tant à voir du côté des artistes étrangers. Le Palestien, Waked Sharif, présente des créations vidéo exceptionnelles, impossibles à voir sans une grande émotion. Du grand art, plein de subtilité et de sens. Il est dans l'une en kamikaze, une kalachnikov devant lui, lisant des passages des Mille et Une Nuits. L'autre consiste en un défilé de mode masculine étrange, les mannequins défilant avec des vêtements découpés laissant voir différentes parties du corps. On ne comprend pas jusqu'à ce que surgissent des images réelles et révoltantes des check-points israéliens obligeant les Palestiniens à se dévêtir en pleine rue. Avec la force d'un humour tragique, l'artiste a intitulé ce travail Chic-point. Du même niveau artistique et thématique, l'Africaine du Sud, Jodi Bebber, expose de dures photographies de la déchéance humaine, misère, drogue et prostitution, dans une sorte de no man's land pourtant peuplé d'êtres en perdition.
Du grand art aussi. On n'oubliera pas l'Indien, Avishenk Sen, dont les peintures assurent un extraordinaire mixage de modernité et de recours aux éléments du patrimoine. L'Egyptienne, Mona Marzouk, montre une vidéo qui révèle son grand talent en images de synthèse dans une représentation fantastique du monde et de ses déséquilibres explosifs. Le Belge, Eric Van Hove, né à Guelma en 1975, a créé une étonnante « machine harraga » fonctionnant au gaz butane. A voir.Il n'est pas un espace de cette FIAC qui ne mérite l'intérêt, ou la curiosité, ou l'admiration, ou la réflexion, ou l'émotion et parfois tout cela à la fois. Le Mama a réussi surtout à illustrer un art contemporain qui n'est pas celui, plein de fatuité et d'effets de mode, des grandes vedettes « people » qui se réclament de cet art à coup de milliards d'enchères. L'audace peut avoir du sens, nous dit cette exposition qu'il vous reste à rattraper avant son démontage. Alors, allez aimer voir, comme disent les collégiennes du quartier.
Mama : 25, rue Larbi Ben M'hidi. Alger-centre : de 10 h à 18 h, sauf le vendredi. Samedi : 10 h à 19 h , dernier jour : dimanche 28 février.


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