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Adieu maître
Publié dans El Watan le 09 - 12 - 2016

Le malouf de Constantine est orphelin. Ce genre musical qui fait partie des trois grandes écoles de la musique andalouse en Algérie vient de perdre l'un de ses derniers grands maîtres. Un pilier qui s'est éteint, mercredi soir, dans un hôpital parisien à l'âge de 88 ans des suites d'une longue maladie. Une grande perte pour la culture algérienne, qui survient sept jours après celle du grand maître du chaâbi Amar Ezzahi.
Mohamed Tahar Fergani, connu et reconnu en Algérie et dans le monde, n'a pas uniquement la stature d'un cheikh incontesté, mais il demeure une icône et une grande école de la musique andalouse. Les Constantinois l'auront remarqué ces derniers mois. El Hadj était très fatigué. Il avait été hospitalisé dans un établissement parisien suite à des soucis de santé. Malgré son âge avancé, il tenait toujours à assister à différentes manifestations culturelles, surtout lorsqu'il s'agissat de malouf.
On l'a bien vu lors de la dernière édition nationale abritée en 2015 par le Théâtre régional de Constantine, où il était présent pour encourager tous ces jeunes talents prometteurs qui ont tenu le relai à la bonne source, et qui œuvrent pour la pérennité d'un art très prisé par les mélomanes, jeunes et anciens, et qui a été jalousement défendu par les grands maîtres depuis plusieurs générations. A chaque occasion, il ne cessait de prodiguer conseils et orientations.
Il veillait toujours pour que ces jeunes talents apprennent le malouf sur des bases solides. Du haut de ses 88 ans, il était toujours un homme élégant, courtois, généreux, bienveillant et d'une grande modestie. La dernière apparition publique du grand Mohamed Tahar Fergani remonte à juillet 2015 à l'occasion de la manifestation «Constantine, capitale de la culture arabe», durant laquelle il a été honoré, au même titre que son père Hamou et son frère Mohamed Seddik, qui ont reçu un hommage posthume. Il rejoindra les autres maîtres du malouf, Abdelmoumene Bentobbal et Abdelkader Toumi, disparus respectivement en 2004 et 2005.
Les débuts d'un jeune prodige
Il est difficile de résumer la vie et l'œuvre de Mohamed Tahar Fergani. Il faudra tout un livre pour parcourir une carrière riche et prodigieuse, qui s'étale sur 70 ans pour un homme qui a consacré tout son talent à un art qu'il chérissait beaucoup. De son vrai nom de famille Reggani, Mohamed Tahar est né le 9 mai 1928 à Constantine. Il aura l'immense chance de grandir dans une famille de musiciens et de chanteurs. Déjà son père, Cheikh Hamou Fergani (1884-1972), était un chanteur et compositeur très connu à l'époque, et qui s'est illustré surtout dans le style hawzi.
Dans la famille, il y avait aussi son frère Mohamed Seddik, sa sœur aînée Fatma Zohra, plus connue sous le nom de Zhor, surnommée la Diva du malouf, mais aussi sa sœur jumelle Zoulikha qui a dirigé un orchestre de Banoutate. Mohamed Tahar commencera dans sa jeunesse par apprendre la broderie sur du velours, appelée «el medjboud», pour la confection de la gandoura constantinoise. Un métier très prisé dans l'antique Cirta, mais qu'il abandonnera pour sa nouvelle passion musicale. Il fera ses premiers pas dans le monde de la musique en apprenant à jouer de la flûte de roseau appelée el fhel ou djawak. «J'apprenais el fhel avec Kaddour Darsouni ; on descendait du côté du rocher et on faisait les répétitions ensemble», se rappelait-il.
Après des débuts en 1946 dans l'orchestre de Omar Benmalek, alors qu'il avait à peine 18 ans, Fergani est attiré par le chant oriental qu'il dit avoir apprécié avant le malouf. Une reconversion qui le pousse à reprendre les chansons de Mohamed Abdelouahab et Oum Keltoum au sein de l'association Touloûe El Fedjr. Une expérience de courte durée, puisqu'il reviendra vite aux sources du malouf. Ses débuts en 1949 seront remarquables, où il obtiendra le 1er prix dans un concours de musique organisé à l'occasion d'une kermesse à Annaba. Le jeune prodige entamera alors ses premiers pas en 1951 avec son père Cheikh Hamou, qui lui apprendra le hawzi.
Il aura également pour maître le grand cheikh Hassouna Ali Khodja, qui lui prodiguera des enseignements des zdjoul, avant de faire l'apprentissage de la nouba et du hahdjouz avec cheikh Abderrahmane Kara Baghli, plus connu sous Baba Abeid, puis de cheikh Abdelkader Toumi.
Ayant une voix de ténor et une mémoire prodigieuse, Mohamed Tahar Fergani fait une percée fulgurante. Il enregistre déjà son premier disque dans les années 1950. Ses talents de chanteur et de virtuose du violon, qui deviendra son instrument favori, feront de lui un artiste attitré lors des multiples fêtes familiales et des soirées, ainsi que des concerts animés dans différentes occasions officielles.
Une carrière de maître
Il faut dire aussi que toutes les conditions étaient réunies pour que le jeune Mohamed Tahar devienne un phénomène musical à Constantine et en Algérie. Après l'indépendance, il continuera de parfaire sa formation musicale, en puisant dans le répertoire andalou, en côtoyant les maîtres Dahmane Benachour de l'école d'Alger, et Abdelkrim Dali de l'école de Tlemcen. Avide d'apprendre et d'assouvir sa soif, il réussira à maîtriser tous les genres de la musique andalouse, en apprenant également des centaines de poèmes.
Il fera sensation dans les années 1970 en interprétant avec brio les perles du répertoire musical constantinois, dont on citera les chansons Dhalma, El Boughi et la mémorable Galou Laârab galou, qui raconte l'histoire tragique de Salah Bey. Une interprétation inimitable, qui fera désormais sa notoriété, et que nul n'a pu égaler à ce jour. El Hadj Fergani est resté durant des années un maître incontesté et incontestable du malouf, au point de devenir une référence.
Si le chaâbi avait son Cardinal à Alger avec El Hadj M'hamed El Anka, Mohamed Tahar El Fergani sera désormais le Cardinal du malouf à Constantine. En plus des centaines d'enregistrements et des émissions de la radio et de la télévision, dont l'inoubliable émission «Rasd ou Maya» animée par Leïla, et tournée dans le décor du prestigieux palais Ahmed Bey, El Hadj Fergani a porté la renommée du malouf dans plusieurs pays à travers ses tournées dans le monde arabe, en Europe et même en Asie.
Avec lui, ce genre musical est arrivé jusqu'à Tachkent en Ouzbékistan. Il a laissé un très riche héritage qu'il faudra préserver pour les générations futures. C'était son vœu le plus cher. «Nous avons eu beaucoup de chance de côtoyer ce grand maître de la musique andalouse ; nous avons énormément appris de lui lors de nos différentes rencontres à l'occasion des festivals nationaux ou internationaux. Personnellement, j'ai toujours ressenti de l'émotion en écoutant chanter El Hadj Tahar Fergani ; ce sont moments intenses», a témoigné à El Watan Smain Hini, président de l'association El Inchirah, lors d'une rencontre organisée, il y a quelques années, au théâtre régional de Constantine.
«Mon père a servi la culture algérienne en général et le malouf en particulier pendant 70 ans. Son vœu le plus cher est que toute son œuvre, qu'il a accomplie durant cette riche carrière pour la sauvegarde de cet art soit mise en valeur, préservée et portée à la connaissance des gens pour que sa mémoire soit toujours vivante dans les esprits», dira son fils cheikh Salim Fergani, digne héritier de son père. On ne peut pas dire plus pour saluer la mémoire de ce grand maître-école, qui a de tout temps été fidèle au malouf et toujours égal à lui-même.


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