Des pluies orageuses dimanche après-midi sur trois wilayas du Sud du pays    Le film "Dounia" présenté en avant-première à Alger    Pour explorer les différentes destinations touristiques et les services d'hébergement disponibles    La Guerre mondiale est bien lancée...    Clôture du Festival de la femme sahraouie    Deux navires à destination de la Palestine occupée, le Magic Seas et Eternity C, coulés    Les choses sérieuses commencent...    Djokovic éliminé, nouvelle finale Alcaraz-Sinner    Karaté Do/Championnat national: large domination du MC Alger    Face à la profonde restructuration de cette filière, au niveau mondial, quelles perspectives pour l'industrie de voitures en Afrique ?    La communication au sein de l'association    Une plateforme numérique dédiée aux sites historiques    Ali D (FOREALID) et Moundjed Wali unissent leurs talents pour porter la musique algérienne vers la scène internationale    Natation/Championnat national d'été: le CRB domine la 1ère journée    La Radio algérienne honore les lauréats du concours national du Malhoune    Basket/Championnat arabe 2025 (préparation): large victoire de l'Algérie devant le Koweït (108-55)    Le président sahraoui appelle l'ONU à honorer ses engagements en faveur de la décolonisation au Sahara occidental    In-Salah : début de l'activité annuelle des "bains de sable" à Foggaret-Ezzoua    63e anniversaire de l'Indépendance : Bouzred salue le rôle souverain des Douanes dans la protection de l'économie nationale    Le bond qualitatif accompli par l'Université algérienne la propulse en tant que locomotive de développement    Saison estivale: arrivée du premier groupe d'enfants de la communauté nationale à l'étranger à Alger    Chaib et Hidaoui participent à une rencontre virtuelle au profit des jeunes de la communauté nationale à l'étranger    Gara Djebilet : un projet stratégique pour renforcer l'économie nationale et générer des emplois    Le musée itinérant de la police algérienne fait escale à Oran    Port de Mostaganem: croissance de 51% de l'activité commerciale durant le 1er semestre    Nécessité de veiller au strict respect des mesures de prévention face à la hausse des températures    Le Premier ministre visite les pavillons de plusieurs pays frères et amis    Sedjati 3e au 800 m, Moula 6e    Agression sioniste à Ghaza : l'UNRWA appelle à mettre fin aux atrocités et au cycle de l'impunité    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 57882 martyrs    L'opération "commando" de juillet 1957 à Mascara: une épopée dans l'histoire de la lutte armée contre le colonisateur français    Les dattes primeurs entre abondance de l'offre et chute des prix    Sortie de promotions de l'Académie militaire de Cherchell    Le rôle du documentaire historique dans la dénonciation des crimes coloniaux souligné    Confiance totale en nos capacités et en nos ressources    A peine installée, la commission d'enquête à pied d'œuvre    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La réunion du CNRA du Caire, l'anti-congrès de la Soummam
Publié dans El Watan le 20 - 08 - 2017

A l'intérieur vient de s'ouvrir la réunion du Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA) issu du Congrès de la Soummam, tenu une année plus tôt. Présidée par Ferhat Abbas, assisté de Mohamed Seddik Benyahia, la séance plénière du CNRA, ouverte en début de soirée, réunit 22 membres sur les 34 que compte le Parlement de la Révolution. Motif : désigner un remplaçant à Larbi Ben M'hidi assassiné en mars par les paras. «Krim, puissamment secondé par Boussouf, provoqua une réunion du CNRA. Le motif était normal, il fallait désigner un remplaçant de Ben M'hidi», précise Saâd Dahlab dans ses mémoires, Mission accomplie. Les autorités égyptiennes, qui accueillaient la délégation de l'extérieur, assuraient la logistique.
Fathi Dib, chargé des affaires algériennes au sein des services de renseignement, souligne que depuis le 1er août, les participants au Congrès étaient au Caire, à l'exception de ceux qui avaient été empêchés par les circonstances ou leurs responsabilités. «En accord avec le docteur Debaghine, les lieux d'hébergement des participants et le lieu du congrès avaient été choisis en secret afin d'assurer toute la sécurité voulue. Le congrès avait duré quatre jours…», signale l'interlocuteur égyptien des «frères» du FLN. Les travaux de réunion ordinaire du CNRA ont eu lieu entre les 20 et 28 (PV disponible in Mohammed Harbi, Les Archives de la révolution algérienne).
Mais il semblerait que la réunion n'ait duré finalement que trois heures. Tewfik El Madani, un des participants, parle d'une «réunion double». Il y a eu, précise-t-il dans ses mémoires Hayat Kifah, deux séries de réunions : l'une tenue par les militaires, et l'autre «officielle» à laquelle ont pris part tous les membres du CNRA.
Citant un témoin, Khalfa Mameri parle de «conciliables» et «d'apartés» tenus le 18 août entre les deux hommes forts, les colonels Krim et Boussouf. «C'est, toujours au Caire, le 18 août 1957, que tout s'est joué entre les deux hommes», nous dira un autre témoin. C'est au cours d'un repas organisé ce jour-là que Krim aurait dit à Boussouf, qui voulait que les «quatre de la Santé fassent leur entrée au CCE» : «Je suis d'accord pour cet élargissement de l'Exécutif du FLN», rapporte le biographie d'Abane.
L'historien Gilbert Meynier fait remonter à plus tôt les réunions préparatoires «des colonels». Reprenant un témoignage écrit par Ali Kafi publié dans le livre sur les archives de Harbi, l'auteur de L'Histoire intérieure du FLN parle de deux réunions tenues à Tunis, une première, celle du CCE à laquelle a pris part Abane Ramdane qui a présenté le bilan du CCE arrivé d'Alger, et une seconde, où les civils étaient absents.
Le «petit comité» du quartier Monfleury au sud-ouest de la ville de Tunis, où siégeaient les 3 B (Krim Belkacem, Lakhdar Bentobal et Abdelhafid Boussouf) et les colonels des Wilayas, Amar Ouamrane (IV) et Mahmoud Cherif (I), permet d'entériner les décisions qui seront présentées lors de la réunion du Caire, principalement la nouvelle composition du CCE et l'Exécutif de la Révolution. A l'ouverture de la séance, Ramdane Abane donne lecture du bilan des activités du CCE sortant. Comme l'indique le PV, ce bilan a été adopté à l'unanimité. Un succès pour Abane ? «La plupart des participants ne sont pas venus d'aussi loin pour se pencher sur un bilan tel que le ferait n'importe quel conseil d'administration, ni pour discuter d'un programme, mais pour s'assurer du pouvoir de la Révolution. Ce qui importe, ce sont les hommes et non le programme», estime Khalfa Mameri. La réunion se solda surtout par «des décisions qui renversaient les principes de la Soummam», décèle de son côté Meynier.

Œuvre renversée
Par une formule tranchante, René Glissot estime dans sa notice publiée dans Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier du Maghreb que la réunion adopte certes le rapport d'activité que présente Abane, «mais renverse son œuvre».

Le sociologue et historien Abdelmadjid Merdaci, qui signale un vice de forme, l'absence de quorum requis pour statuer en toute légalité, indique que le congrès s'est «attaché à détricoter l'essentiel des dispositifs du Congrès de la Soummam, dont la plus notable des décisions sera de remettre en cause les principes du primat du politique sur le militaire et du primat de l'intérieur sur l'extérieur». Le CNRA a, en effet, «réaffirmé» dans ses résolutions que tous «ceux qui participent à la lutte libératrice, avec ou sans uniforme, sont égaux. En conséquence, il n'y a pas de primauté du politique sur le militaire, ni de différence entre l'intérieur et l'extérieur».
Pour l'historien Mohammed Harbi, l'affirmation de l'égalité entre l'intérieur et l'extérieur paraît «plus comme une justification de l'établissement de la direction (à l'étranger) que comme une concession à Ben Bella et Boudiaf, victimes du congrès d'août 1956». Abane et Dehilès se sont abstenus sur ce point.
L'autre décision importante de la session concerne la composition du nouvel Exécutif de la Révolution, le CCE, qui passe de 5 à 14 membres : neuf en exercice, dont cinq militaires et quatre politiques et cinq désignés à titre honorifique. Les quatre civils sont Abane Ramdane, Ferhat Abbas, Debaghine et Mehri. Les cinq militaires sont les chefs des cinq Wilayas : Mahmoud Cherif (I), Bentobal (II), Krim Belkacem (III), Ouamrane (IV) et Boussouf (V), la Wilaya VI n'ayant pas pu prendre part au CNRA à cause de la mort de son chef, Ali Mellah, en mai 1957.
Les membres honoraires du CCE, comme l'a voulu le triumvirat dans son comité restreint, sont les cinq historiques détenus en France (Aït Ahmed, Boudiaf, Ben Bella, Bitat et Khider) désignés parce qu'ils «ont préparé, organisé et décidé le déclenchement de la Révolution du 1er Novembre».
La prépondérance des militaires s'est affirmée à travers la décision entérinée lors de la plénière de constituer au sein du CCE un groupe dénommé «comité permanent», dont le rôle est de «gérer les affaires courantes de la Révolution».
Les anciens compagnons d'Abane, Ben Khedda et Dahlab, membres du 1er CCE, sont évincés de la nouvelle direction. Ils sont chargés d'autres missions : Ben Khedda ira représenter le FLN à Londres, alors que Dahlab hérite de l'Information. Autre décision de la réunion : l'élargissement du CNRA qui passe de 34 à 54 membres, tous titulaires désormais. Près des deux tiers parmi les membres du nouveau Parlement, devenu une «Chambre d'enregistrement» (Harbi) ou de «Parlement croupion» (Meynier), étaient officiers de l'ALN, dont les trois quarts étaient à l'intérieur. Mais, anomalie, le Conseil n'ayant pas procédé à l'élection de ses membres, ce qui relevait de ses attributions, c'est le CCE qui s'en est chargé en cooptant les membres du CNRA. Pour Meynier, la réalité du pouvoir appartenait désormais aux militaires, majoritaires.
Même le principe d'une «République laïque», comme défendu lors du Congrès de la Soummam, est remis en cause par la résolution sur «l'instauration d'une République algérienne démocratique et sociale, qui ne soit pas en contradiction avec les principes de l'islam».
Pour Harbi, sur ce point la critique de Ben Bella a «porté».
A la faveur de la réunion du Caire, c'est le retour des «novembristes», qui se sont sentis exclus par Abane, chef contesté du Congrès de la Soummam. La réunion de la capitale égyptienne ne s'est pas déroulée sans heurts entre surtout Abane, fragilisé après ses attaques contre les «féodaux», et Krim, soutenu par ses collègues colonels.
Dans cette confrontation, le chef du Congrès n'a point bénéficié du soutien de ses «amis civils», «peu soucieux d'affronter les chefs militaires», signale Benjamin Stora, qui rapportera les propos du doyen d'âge de la réunion, Ferhat Abbas. «Seul Abane essaya de s'insurger. Nous ne lui apportâmes aucun soutien», reconnaît Dahlab qui fait écho de la colère homérique d'un Abane désormais mis en minorité. Missionné pour calmer celui qui le convaincra de rejoindre le FLN, Abbas rapporte des critiques que ce dernier a tenus à l'égard des colonels : «Ce sont de futurs potentats orientaux. Ils s'imaginent avoir droit de vie et de mort sur les populations qu'ils commandent. Ils constituent un danger pour l'avenir de l'Algérie».
Véritable «coup d'Etat» pour Ahmed Bouda, qui rapporte les propos de Houari Boumediène à l'égard d'Abane ; «réaction thermidorienne», selon Abdelmadjid Merdaci, qui fait visiblement écho aux propos tenus à l'historien anglais Alistair Horne par le président tunisien Bourguiba, faisant le parallèle avec Robespierre, la réunion du CNRA Caire était un «Congrès de la Soummam à l'envers», comme le considère Mameri. Isolé par les militaires, lâché par ses compagnons civils, Abane Ramdane verra ses idées défendues une année plus tôt à Ifri Ouzelaguène remises en cause. Il sera relégué au poste de rédacteur en chef d'El Moudjahid. «Sa mise à mort physique allait suivre de peu sa mise à mort politique», résume Meynier.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.