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Dr Arezki Akerkar. Maître de conférences à la Faculté d'économie de Béjaïa : «Seule une action collective permet de mieux gérer la crise sanitaire»
Publié dans El Watan le 06 - 05 - 2020

Le Dr Akerkar, maître de conférences à la Faculté d'économie de Béjaïa revient dans cet entretien sur la gestion de la crise sanitaire en Algérie. Selon lui, cette gestion impose une action collective impliquant des acteurs de statuts divers, allant de l'Etat central et ses différentes institutions, en passant par les acteurs économiques, les associations, jusqu'au simple citoyen.
Entretien réalisé par Hafid Azzouzi

-Pouvez-vous nous expliquer comment voyez-vous la gestion, en Algérie, de la crise sanitaire provoquée par le coronavirus ?
Selon la nouvelle conception médico-sociale de la santé telle que définie par l'OMS, la santé n'est pas uniquement l'affaire des médecins et des professionnels ; elle relève de la responsabilité de tout le monde. Une action collective impliquant des acteurs de statuts divers, allant de l'Etat central et ses différentes institutions, en passant par les acteurs économiques, les associations jusqu'au simple citoyen, s'impose.
C'est dire que face à cette pandémie, nous ne serions en sécurité que si toutes ces parties prenantes s'engagent dans une action de solidarité agissante. L'Etat, avec ses différentes institutions, est censé être l'acteur central dans la gestion de cette crise, comme le montre l'expérience des pays qui ont vécu cette pandémie avant l'Algérie (Chine, Corée du Sud, Allemagne, etc.).
En l'absence d'un traitement miracle, la solution la plus indiquée jusqu'à présent et qui a donné ses preuves partout dans le monde demeure le confinement total de la population afin de stopper la propagation du virus et éviter le débordement des hôpitaux avec l'afflux massif de malades. Des pays comme le Venezuela, ou encore la Tunisie et le Maroc, même si leur situation sanitaire n'a pas atteint des seuils alarmants, ont vite pris des mesures appropriées, dont le confinement total de leurs populations.
Le cas du Venezuela, pays pétrolier, avec un mode de gouvernance comparable à l'Algérie, est à méditer. Ce pays où le virus s'est propagé bien des semaines après l'Algérie, est déjà à près de deux mois de confinement. Juste après la détection de deux cas positifs, le gouvernement a vite décrété un état d'urgence sanitaire, en mettant en quarantaine les personnes suspectées et en isolant le pays du reste du monde à travers la fermeture de toutes les frontières.
Plus encore, le gouvernement a mobilisé les services de sécurité, qui ont isolé les régions et quartiers touchés des autres, avec le filtrage des autoroutes, la fermeture de tous les commerces sauf les stratégiques. Le gouvernement a exigé également que tous les paiements soient en ligne et par carte de crédit. Aussi, le système Patria, mis en place par le gouvernement Maduro, assure à toute famille nécessiteuse une aide alimentaire ou médicale à domicile.
Le gouvernement a interdit aussi le licenciement des travailleurs, en distribuant une allocation pour l'ensemble de la population tout en assumant le versement des salaires pour les petites et moyennes entreprises industrielles. Or, force est de constater qu'en Algérie, bien que le gouvernement a pris certaines mesures visant à limiter la propagation de la pandémie, elles demeurent toutefois insuffisantes et interviennent tardivement. De nombreux observateurs parmi la population s'interrogent sur le pourquoi le pouvoir algérien ne s'est pas servi des expériences des pays déjà touchés avant l'Algérie pour prendre des mesures appropriées. Les propos d'une représentante du ministère de la Santé sont révélateurs.
Interrogée sur le pourquoi le gouvernement tarde à décréter le confinement total vue la vitesse de la propagation du virus, elle fait signifier que «comparativement à d'autres pays, si on enregistre 10, 12 ou 24 cas, ce n'est pas une vitesse où on voit 300 cas par jour …», sachant qu'en Algérie, au-delà de 2000 contaminations à l'échelle nationale, la situation échappe totalement au contrôle du personnel médical vu l'état catastrophique de nos hôpitaux.
Le gouvernement a tardé à fermer les frontières nationales en laissant entrer des voyageurs en provenance des pays où le virus circule fortement. La population, qui afflue massivement dans les magasins durant ce mois du ramadhan, qui règle ses courses avec la monnaie fiduciaire, favorise également la propagation du virus, faute de la mise en œuvre par le gouvernement du payement en ligne ou par carte de crédit. Récemment, après une certaine stabilisation de la situation sanitaire, le gouvernement a procédé à l'allègement du confinement et à la réouverture des activités commerciales depuis le début du mois du ramadhan, ce qui a provoqué un relâchement de la population et fait repartir la courbe de nouveaux cas à la hausse, ce qui a contraint le gouvernement à faire marche arrière en décidant de refermer de nouveau les commerces.
Heureusement que pour l'instant, le virus se propage moins rapidement en Algérie, comparativement à beaucoup de pays. Mais en cas de hausse du nombre de contamination, durant ce mois du ramadhan notamment, les établissements hospitaliers, qui manquent considérablement de moyens humains, matériels et logistiques, à cause d'une politique de santé défaillante, ne seraient pas prêts à accueillir l'afflux massif de malades qui arrivent au même moment en situation de détresse respiratoire. Selon les spécialistes, les hôpitaux algériens ont commencé à subir une saturation à partir de 2000 patients hospitalisés et seront complètement débordés au-delà.
A cette difficulté s'ajoute le manque de moyens de dépistage systématiques des cas suspects qui circulent dans la nature d'où, le personnel médical procède seulement aux dépistages ciblés des cas symptomatiques par manque de réactifs et de centres de dépistage alors qu'un nombre important de cas infectés ne présente pas de symptômes. Face à ces mesures tardives et insuffisantes prises par l'Etat, et vu la situation catastrophique des hôpitaux algériens, d'autres acteurs ont pris conscience de la gravité de la situation en organisant des actions de solidarité afin de faire face à cette pandémie.
-Pouvez-vous nous parler justement de l'apport des opérateurs économiques et de la société civile dans la gestion de cette crise sanitaire causée par la propagation du Covid-19 ?
Du côté des acteurs économiques, des entreprises ont exprimé leur disponibilité à aider toute action visant à lutter contre le coronavirus. L'action d'Issad Rebrab, patron du groupe Cevital, est un cas illustratif de l'implication des industriels dans la gestion de cette crise sanitaire : il a ramené un nombre important de respirateurs depuis l'étranger au profit des hôpitaux algériens.
Plusieurs autres entreprises ont développé des actions de solidarité comme c'est le cas du groupe d'entrepreneurs et industriels de la wilaya de Métidja (CEIMI), qui a fait un don de 60 lits médicalisés aux hôpitaux de Blida ou encore celles développées par certaines cliniques privées qui ont mis à la disposition des hôpitaux publics des respirateurs et des lits médicalisés. Pareillement, le Groupe public Textiles et Cuirs (GETEX) ou encore des petites entreprises familiales se sont lancés dans la fabrication de masques de protection en vue de participer à l'effort national pour faire face à la propagation la pandémie.
D'autres entreprises ont mis à la disposition leurs matériels de désinfection au profit des services de wilayas pour participer à l'opération de désinfection des villes et quartiers tandis que d'autres ont ouvert leurs portes pour accueillir les SDF durant ce temps de confinement, comme la salle des fêtes Vis la joie à Béjaïa. Enfin, en l'absence de moyens de transport en ce temps de confinement, des entreprises comme le cas de certains propriétaires d'hôtels, la direction de la JSK, ou encore des entreprises privées, ont mis leurs moyens (transport, hébergement) à la disposition du personnel des hôpitaux engagés dans la lutte contre le coronavirus.
Pour sa part, la société civile, organisée dans un cadre associatif ou dans le cadre des initiatives citoyennes, reste un exemple d'auto-organisation, avec ses différentes actions de solidarité. Sur le rôle des associations, quoique leurs actions demeurent insuffisantes par rapport à leur nombre, elles s'impliquent à travers des actions de désinfection des quartiers, de sensibilisation de la population sur les dangers de la pandémie, dictent les bonnes pratiques à suivre pour limiter sa propagation et collectent du matériel médical au profit des hôpitaux. De son côté, la population, bien qu'elle n'ait pas affiché un civisme au début de la pandémie, elle prend de plus en plus conscience du fait qu'au-delà des soins médicaux, il est de son devoir de s'impliquer dans la gestion de cette crise et que la propagation du virus relève aussi de sa responsabilité.
En plus de la suspension temporaire de la révolution populaire en cours, la population développe des initiatives auto-organisées comme le montrent des volontaires dans plusieurs villages en Kabylie, à travers des actions de sensibilisation, d'isolement des villages des autres et de désinfection de l'environnement pour stopper la propagation du virus. Des comités de solidarité se sont également formés dans l'objectif de sensibiliser la population sur le danger de cette pandémie et les mesures à prendre pour éviter sa propagation.
Cependant, il est déplorable qu'après avoir montré un tel exemple d'auto-organisation et de solidarité, la population semble montrer un relâchement depuis le début du mois de ramadhan. L'afflux massif des citoyens vers les marchés et les commerces sans aucune mesure de prévention visible, suite à l'allègement des mesures de confinement, a provoqué la hausse du nombre de cas confirmés de Covid-19, qui est passé largement au-dessus de la centaine de cas par jour depuis le début du ramadhan.
Quelle leçon peut-on tirer de cette crise sanitaire ?
La pandémie Covid-19, qui continue à se propager en Algérie, révèle encore une fois l'incapacité de l'Etat à gérer les situations de crise et dévoile l'état catastrophique de notre système de santé, qui peine déjà à faire face à cette pandémie. Les mesures prises tardivement par le gouvernement ne semblent pas atténuer la pandémie, qui s'accentue de nouveau depuis les le début du ramadhan. Face aux difficultés auxquelles fait face l'Etat dans la gestion de cette crise sanitaire, on a observé qu'une action collective non concertée s'est progressivement mise en place entre les acteurs non-étatiques en dépit du relâchement observé récemment. Les Algériens semblent redécouvrir les traditions ancestrales de solidarité face à ce péril commun en s'auto-organisant pour prendre des initiatives appropriées.
Cette crise sanitaire, aux conséquences multiples, doublée d'une grave crise économique, suite à la chute drastique des prix du pétrole, devra servir de leçon pour que rien ne soit géré comme avant en Algérie. Cette période de panique, de peur et d'angoisse que nous traversons devra susciter des questions philosophiques, politiques et morales et constituer une opportunité historique qui incitera chaque acteur à se remettre en question et à revoir ses pratiques. Le gouvernement devra comprendre que seul l'Etat de droit, avec des institutions solides, permettra à l'Algérie de surmonter la crise multidimensionnelle que vit le pays aujourd'hui. De son côté, le peuple, qui a déjà affiché une certaine prise de conscience durant les évènements récents, est plus que jamais interpellé à continuer à réfléchir sur la société qu'il veut construire pour une Algérie meilleure.


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