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L'université en tant que sujet de l'économie de la connaissance
Contribution
Publié dans El Watan le 04 - 10 - 2020

Nous vivons à une époque de profondes mutations, qui recompose nos organisations, nos comportements, nos manières d'enseigner, et nos valeurs mêmes, qu'il s'agit de repenser les missions de l'université, soumise aujourd'hui à un changement de contexte : la modernité.
Ce changement porte plus particulièrement sur les rapports que l'université entretient avec l'enseignement, la recherche, la créativité, l'innovation, la citoyenneté, l'ouverture, et ce monde hyperconnecté appelé la quatrième révolution industrielle, celle de la convergence des technologies de la communication et des énergies renouvelables.
Cette révolution apparaît à la fois comme une opportunité et un défi pour l'université. Une opportunité, celle de faire de l'université un moteur de la «nouvelle économie» des disruptions profondes. Un défi, celui de faire rentrer l'université dans le monde au nom du principe d'accountability. L'université étant financée par les citoyens, elle doit rendre des comptes et, aussi, prouver régulièrement son utilité sociale.
économie de la connaissance : qu'est-ce donc ?
Le XXIe siècle est appelé le siècle de la connaissance, et il vient de l'augmentation rapide de son rôle dans le développement socio-économique de la société. Il y a une différence fondamentale entre l'économie de la connaissance et l'économie traditionnelle. Si cette dernière s'appuie sur l'accumulation du capital permettant la production physique des biens selon les concepts de Smith, Ricardo et Marx, l'économie de la connaissance (inventée par l'Austro-Américain Fritz Mahlup en 1983) résulte d'une relation forte entre le capital immatériel (innovation, recherche et développement, capital humain,...) et la révolution numérique. Elle s'appuie sur le principe que chacun a la capacité de faire.
La connaissance, dans une conception large, est infinie et illimitée. Elle est immatérielle, inépuisable et n'a pas de frontières étatiques ; il convient, au contraire, de la diffuser et de la partager afin de développer les compétences, de renforcer la culture de compétitivité, d'améliorer la productivité et de produire la richesse (l'exemple des open-sources est révélateur à ce sujet).
D'après Von Hippel (Massachusetts Institute of Technology [MIT]), l'accès libre à la connaissance favorise le développement de collaborations, de partages, d'échanges, développe la créativité et démocratise l'innovation. L'internet est un outil principal de cette économie qui est imprégné de l'idée de liberté et de la collaboration qui poussent à l'innovation, à la création de start-up, aux nouvelles applications, à l'«apprentissage par l'action». Avec internet, les connaissances deviennent faciles d'accès.
L'économie de la connaissance est une triade inséparable de marchés – le marché du savoir, le marché des services et le marché du travail. Son processus de développement consiste à améliorer la qualité du capital humain, à améliorer la qualité de vie, à produire des connaissances, de la haute technologie, de l'innovation et des services de haute qualité.
Peut-on mesurer l'économie de la connaissance ?
Il s'agit d'évaluer le coût d'incorporation d'une ressource cognitive dans un produit ou service. Malgré la difficulté de quantifier l'immatériel, la valeur de ce produit est composée du prix de sa production et de la valeur de sa vente. Les coûts sont fonction de la taille des investissements immatériels en recherche et développement, acquisition de propriété intellectuelle, enseignement et formation supérieurs, formation du personnel, logiciels, informations, services d'ingénierie et de conseil, marketing, publicité, amélioration de la gestion, etc. L'élaboration d'indicateurs quantitatifs de développement de cette économie est très utile.
Il existe de nombreuses approches, telles que la méthodologie (Knowledge assessment methodology [KAM]) utilisée par la World Bank Institute, le groupe d'indicateurs proposé par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), etc., qui utilisent des variables structurelles et quantitatives pour comparer et analyser les performances de l'économie d'une institution par rapport à celles de concurrents et leaders sur le marché (benchmarking).
Il existe différents indicateurs utilisés dans le cadre d'un système de comparaison du niveau et de la dynamique de cette économie : la part des activités innovantes dans les produits et services manufacturiers, le ratio d'investissement dans la formation et l'enseignement supérieurs, la Recherche & Développement (R&D), le taux de croissance de l'employabilité dans le domaine des sciences et des hautes technologies, le volume du capital-risque, le volume du capital privé dans le financement de la R&D, le volume d'investissement étranger, le taux de chercheurs en R&D par million d'habitants, la mobilité des scientifiques et ingénieurs qualifiés à des fins d'apprentissage, le nombre de brevets d'invention octroyés dans le domaine des hautes technologies par million d'habitants, le nombre d'articles scientifiques dans le domaine des hautes technologies publiés par million d'habitants dans les revues de renommée, le nombre de projets de recherche universitaires et nationaux par million d'habitants, le nombre de thèses soutenues dans le domaine des hautes technologies, l'accélération du rythme d'innovation, l'échange international d'inventions, etc.
Quelle place de l'université dans l'économie de la connaissance ?
De par ses missions, l'université entretient, alors, un rapport organique avec la connaissance. Le rôle des universités dans le développement technologique et dans la modernisation d'une société dépend, bien entendu, de la structure et de l'environnement économiques du pays. Les universités chinoises (Shanghai Jiao Tong, Zhejiang, Tsinghua,...) et sud-coréennes (Institut coréen des sciences et de la technologie, Université nationale de Séoul, Korea University,...), à titre d'exemple, ont fait une percée impressionnante au cours des 30 dernières années en termes de développement de technologies modernes et de production de brevets d'invention.
Elles génèrent non seulement des brevets, mais reçoivent également des redevances et créent avec succès des spin-off qui attirent les investissements en capital-risque.
Ainsi, dans différents modèles économiques, les universités peuvent jouer différents rôles : infrastructures de transfert de technologies avancées (comme en Chine, en Corée du Sud), ou la formation d'écosystèmes entrepreneuriaux (comme aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne,...). En tout cas, leur mission évolue en adéquation avec les objectifs qu'on attribue à l'économie de la connaissance au niveau national ou international.
Le nouveau rôle des universités dans la société de la connaissance implique premièrement la contribution des universités au développement innovant du pays déterminée par la valeur de la propriété intellectuelle créée et commercialisée. Deuxièmement, les universités sont des institutions de l'innovation ouverte et partagée, qui résolvent le mieux le problème du transfert des connaissances dans le capital intellectuel grâce à l'utilisation des ressources de la mondialisation, de l'ouverture, du dynamisme et de mobilité humaine. Troisièmement, les universités créent elles-mêmes de nouvelles technologies et deviennent des entreprises de production de nouvelles industries technologiques.
Evolution et générations des universités
A ce jour, il n'existe pas d'approches méthodologiques unifiées pour décrire les niveaux de développement des universités. La classification des universités en fonction de l'importance de la valeur ajoutée qu'elles crééent est :
«Université 1.0» : a pour mission la transmission des connaissances, le développement des talents d'étudiants et la formation du personnel (pour les secteurs traditionnels de l'économie), et peut agir comme un ascenseur social.
«Université 2.0» : assure des missions de formation supérieure et des missions de recherche scientifique, ne gère pas la propriété intellectuelle, et est capable de commercialiser ses connaissances en R&D.
«Université 3.0» assure des missions de formation supérieure et des missions de recherche scientifique et de développement technologique. L'université 3.0 a développé la politique de commercialisation de la technologie fondée sur le principe de la propriété intellectuelle, la culture entrepreneuriale chez ses étudiants, la création des start-up, ses relations avec le monde des affaires et l'environnement socioéconomique. Aujourd'hui, les universités américaines, et parfois européennes et asiatiques, sont des universités de troisième génération.
Les diplômés du MIT ont fondé 33 000 entreprises dont le revenu total pourrait être la onzième économie du monde, et dont 76% opèrent avec succès sur le marché et fournissent 3 millions d'emplois. Les coûts de recherche annuels du MIT s'élèvent à environ 650 millions de dollars. Le MIT émet environ 300 brevets ; les revenus tirés des activités sous licence sont d'environ 70 à 90 millions de dollars par an. L'université nationale de Singapour (NUS) a un budget annuel de R&D d'environ 580 millions de dollars et émet plus de 250 brevets par an, et plus d'un tiers de ses revenus provient de son partenariat avec l'industrie (Sources : OCDE 2013).
Un autre exemple d'une université 3.0 est la Stanford University dont le chiffre d'affaires annuel des entreprises créées par l'université s'élève à 2,7 milliards de dollars, tandis que 90,4% de la recherche fondamentale de l'université sont transférés à la R&D commerciale. Stanford University commercialise chaque année plus de 100 licences de ses technologies, générant des revenus d'environ 90 millions de dollars par an.
Une dizaine de start-up sont constituées chaque année. Les diplômés de Stanford University ont créé des sociétés telles que Hewlett-Packard, Yahoo, Google. Les universités 3.0 sont devenues des structures ouvertes, ou hubs, qui interagissent avec les décideurs, les entreprises, et les laboratoires de recherche en réseau d'élites
«Université 4.0» : a pour mission de mettre en place la veille technologique, former pour le monde futur et fournir à l'économie de nouveaux moyens d'innovation.
Elle prépare des compétences pertinentes de l'avenir, conçoit des entreprises et utilise des technologies de prospective. L'Université 4.0 va devenir un leader dans le développement des industries de haute technologie, le transfert des connaissances en capital intellectuel en utilisant les ressources de la globalité. Ainsi, en passant de l'université 1.0 à l'université 4.0, le niveau de responsabilité publique augmente : le campus produit plus de plus-value et ne transfère pas son produit à l'économie sous forme semi-finie.
Cette transformation se manifeste par une gouvernance partagée, le développement de l'université entrepreneuriale, l'internationalisation de la formation, et l'intégration de méthodes d'enseignement actives et orientées vers la pratique.
L'université algérienne en route vers la génération 4.0 ?
L'université 4.0 est un lieu de formation, de recherche et d'innovation. Elle développe la culture entrepreneuriale et encourage l'esprit «start-up» des étudiants afin de promouvoir le développement du pays dans le contexte de la 4e révolution industrielle. Pour que l'université algérienne ait une orientation réussie vers l'université 4.0, à notre humble avis il faudrait développer les tâches clés suivantes :
1. remodeler l'université dans le sens de la prise en compte des tendances de l'économie de la connaissance (programmes, actions de recherche, système d'évaluation,...) ;
2. développer un partenariat entre l'université et le monde des affaires ;
3. préparer les étudiants aux métiers du futur ;
4. favoriser la mobilité des étudiants et des enseignants à des fins d'apprentissage ;
5. soutenir les enseignants chercheurs à développer des outils innovants en matière numérique dans leurs pratiques pédagogiques, et les faire bénéficier de formations à leur utilisation ;
6. inciter les ressources humaines dotées d'un potentiel scientifique élevé à rester dans le pays ;
7. encourager l'université à créer des entreprises pour commercialiser les résultats de ses activités intellectuelles par l'intermédiaire d'une entité nationale créée à cet effet ;
8. soutenir l'université à créer et développer les infrastructures innovantes sur son territoire (recherche, incubateurs,...) ;
9. prévoir un fonds public pour financer l'innovation ;
10. transformer les universités en centres d'écosystèmes régionaux et sectoriels, en leur attribuant la mission de développement régional et sectoriel ;
11. évaluer périodiquement l'université (assurance-qualité, audit) pour accroître sa compétitivité nationale et internationale ;
12. utiliser les outils statistiques de prospectives pour mesurer les tendances, les résultats obtenus, les écarts, les satisfactions…
Conclusion
Les secteurs-clés de l'économie de la connaissance sont l'enseignement, la science, l'innovation, et les technologies de l'information et de la communication. L'université, par son organisation et son management, doit être capable de produire et mettre en œuvre les connaissances pour les transformer en biens et services consommables, devenir novatrice, génératrice de plus-values et finalement créer de la synergie dans sa région.
Aujourd'hui, dans tous les pays développés, c'est l'université qui détermine le rythme du développement économique et du progrès scientifique et technologique. Le rôle le plus important est joué par le capital immatériel, les connaissances, la recherche et la formation.
Par le Pr Baddari Kamel
Professeur des universités,
Université Mohamed Boudiaf, M'sila
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