La saga des rues d'Alger est intarissable. Les faits les plus incongrus s'observent, les phénomènes les plus insolites vous sautent à la gorge. Il faudrait un volumineux ouvrage pour les consigner. Mais passons. Des femmes chargées de bijoux occupent des artères de la cité pour tenir commerce. L'ambiance est fébrile. Les tractations et les marchandages plutôt ardents. La gent féminine ne résiste jamais à l'attrait de l'or qui se trimbale à ciel ouvert. Les commerçantes se transforment en vitrines ambulantes. Détail curieux et peu courant. Des jeunes gens emboîtent le pas à toutes ces négociantes et s'aventurent dans un créneau réputé réservé aux femmes. Mais on n'arrête pas le progrès. D'autant que la rue appartient à tout le monde. Il faut rappeler que l'activité fait de vieux os. Ce n'est pas une découverte récente. Des endroits fort connus des habitués se font une petite notoriété. Bien évidemment, le lecteur est en droit de s'interroger d'où vient la tranquillité quasi acquise lorsque l'on connaît les appétits voraces des cohortes de voleurs et de chapardeurs de tout acabit qui écument la capitale. Cette sérénité n'est pas le fait d'un brusque retour aux premiers âges de l'humanité. La candeur n'est plus de ce monde. Nul doute qu'un système de protection et de sécurité existe. Le lecteur doit certainement s'interroger sur la qualité de l'or mis en vente. N'y a-t-il pas volonté de gruger et de tromper la clientèle ? Il y a tout de même matière à questionnement car les bijoux ne sont pas cédés pour des prunes. D'où proviennent-ils ? Dans cette cour des miracles que sont devenues nos rues où tout se vend et s'achète, il y a toujours une potion magique qui supplée aux impondérables. Une chose est sûre : la corporation des bijoutiers ne doit pas accueillir avec enthousiasme, le micmac qui s'opère dans une splendide routine. Il ne faut s'étonner de rien, mais s'habituer à toutes ces facettes d'un négoce jamais en panne de trouvailles.