Sayoud instruit d'accélérer la réalisation des projets du secteur des ressources en eau    Le wali instruit les entreprises chargées de la réalisation au respect des délais    Face aux nouvelles mutations énergétiques régionales et mondiales    Le veto américain prolonge le génocide    Des abus graves contre les écolières    Ligue 1 Mobilis (5e journée) L'OA et le MBR creusent l'écart et confirment leurs ambitions    inter-régions : La FAF prolonge le mercato estival jusqu'au 30 septembre    L'Algérien Yasser Triki termine 4e en finale    Développement notable et perspectives prometteuses pour la filière pomicole    Arrestation de deux individus en possession de 1.000 comprimés psychotropes à Ammi Moussa    Bendouda inspecte les travaux de réhabilitation et le projet de numérisation des manuscrits    La 20e édition a attiré un public nombreux    Imene Ayadi remporte le prix du meilleur court-métrage de fiction avec «Nya»    Rentrée scolaire: plan sécuritaire préventif et campagne de sensibilisation sur la prévention et la sécurité routières    Belmehdi reçoit le cheikh de la zaouïa Belkaïdia El-Hebria    CAUCT: organisation à Alger de la 2e édition d'Art pour la paix    Attractivité économique: l'Algérie dans le top 3 des pays africains    Le FLN organise une conférence de formation sur la diplomatie partisane    Mondiaux d'athlétisme 2025: les podiums de samedi    Attaf signe à New York l'accord relatif à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer    Rentrée scolaire: environ 12 millions d'élèves regagnent dimanche les bancs de l'école    Oran : des formations au langage des signes aux étudiants en médecine    Athlétisme/Mondiaux-2025 : l'Algérien Djamel Sedjati remporte la médaille d'argent sur 800 m    L'attaque des fermes à Tighenif : une stratégie pour asphyxier l'économie coloniale française    Bouden reçu à Kuala Lumpur par le nouveau SG de l'AIPA    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 65.208 martyrs et 166.271 blessés    Chargé par le président de la République, Attaf arrive à New York pour participer aux travaux du segment de haut niveau de l'AG de l'ONU    L'Algérie rejoint officiellement l'AIPA en tant qu'unique membre observateur    Basket / Championnat arabe des clubs féminins/Finale : le GS Cosider décroche la médaille d'argent    Exposition d'Osaka : poursuite des journées portes ouvertes sur la stratégie nationale de développement des énergies renouvelables et de l'hydrogène vert    Le Conseil de sécurité de l'ONU échoue à adopter un nouveau projet de résolution à cause du véto américain    Le président de la République préside une réunion du Haut Conseil de sécurité    Une bande spécialisée dans le vol de véhicules neutralisée à Aïn Tedeles    L'échec du Conseil de sécurité à adopter une résolution en faveur de Ghaza, un affront de plus qui entache la conscience de l'humanité    M. Bouden participe en Malaisie aux travaux de l'AG de l'Assemblée interparlementaire de l'ASEAN    El Bayadh Décès du Moudjahid Kherrouji Mohamed    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le missionnaire de l'Ahaggar
Publié dans El Watan le 15 - 11 - 2005

Idlès, Amguid, Hirafouk, Tihihaout, Mertoutek, toponymes à consonance amérindienne de prime abord, sont en fait, des localités et hameaux du Grand Sud algérien. Avec Tintarabin, elles relèvent de Tazrouk chef-lieu de daïra, qui culmine à 1800 m au cœur de l'Ahaggar.
Célèbre par la ziara de Moulay Abdallah, saint homme des lieux, elle est la capitale de la sultanine. Le cépage de ce délicieux petit raisin sans pépins aurait été transplanté par un père-blanc, dit-on. Ces localités ont été « abandonnées » par leur t'bib, jeune médecin de santé publique. Ils les a quittées, après plus d'une décennie de coexistence, pour enfin rejoindre sa Kabylie natale. Le docteur Youcef a choisi Idlès, au début des années 1990, pour exercer son art. Idlès, gros bourg qui tend à l'urbanité, est le chef-lieu d'une commune de quelques milliers d'âmes. Son territoire est aussi vaste que 2 ou 3 wilayas du nord du pays. Confiant le centre de santé à l'un de ses collaborateurs, il passait le plus clair de son temps à sillonner ces immensités pour traquer la maladie, engendrée le plus souvent par le dénuement social. Son chauffeur infirmier guide, Aberrahmane et le 4X4 ambulance de 1995, constituent généralement son arsenal opérationnel. Petit de taille, vif, grosse tête (bien faite) agrémentée d'yeux bleus opalins de paysan de Haute Kabylie. Ses atours coutumiers, jean's élimé, camisole professionnelle, espadrilles et chèche noir autour du cou, le distinguaient du reste des habitants. Son accent kabyle truculent ajoutait un zeste pétillant à la langue targuie qu'il pratiquait couramment. L'automne est là, les nomades sont rentrés. Ils reviennent de « nulle part » pour s'installer dans la vallée de Tihihaout, herbeuse pour les troupeaux, en cette période de l'année. Le docteur Youcef organise un raid sanitaire. Les médicaments usuels, les vaccins dans la glacière, les briques poreuses à chlore destinées à renouveler celles déjà immergées dans les puits, les couvertures, les victuailles, l'eau et le carburant sont embarqués la veille. Le départ se fera au point du jour, la première étape s'arrêtera à Amguid, située à 230 km d'Idlès, elle-même à près de 240 km au nord-est de Tamanrasset. La piste chaotique et poussiéreuse sera longue et éprouvante. Le périple durera près d'une dizaine de jours. Le véhicule brinquebalant, conduit par Abderrahmane, aura à son bord, en plus du médecin, un agent de l'antenne communale et parfois un garde communal. Le roulage durera toute la journée, il sera marqué par quelques haltes, au hasard des bivouacs. A la nuit tombée, les lumières d'Amguid générées par des plaques solaires, scintillent au loin. Le plus gros point lumineux est la caserne du Groupement des gardes frontières (GGF). Amguid fait la jonction entre le Tassili N'ajjer et le Tassili Ahaggar et relie la frontière algéro-nigérienne à Hassi-Messaoud par une piste, que seuls les initiés peuvent emprunter. Le capitaine Youcef, commandant du poste, sera l'hôte de l'équipée, homme affable et hospitalier, il lui offrira le gîte et le couvert. Au village, c'est l'allégresse, le t'bib est là, demain ce sera la consultation. Les femmes et les enfants porteront leurs meilleurs atours vestimentaires. Ahmed l'infirmier ramènera un mobile Thouraya, pour permettre à Youcef de rassurer sa famille à Idlès. Il n'y a ici que la radio de l'antenne communale, pour communiquer avec le monde extérieur. Le téléphone satellitaire appartient à un riche « négociant ». La première journée se passera à Amguid, tout y passe : vaccination des enfants, visites pré et postnatales chez les mamans, les malades chroniques, ainsi que les vieilles personnes pour un « bilan de santé ». Le tour de l'école viendra après, les nouveaux élèves en premier lieu. Le « ratissage » étant fait, c'est au tour des points d'eau d'être revisités. Les briques contenant du chlorure de chaux, pour la désinfection de l'eau, seront remplacées par de nouvelles. Au petit matin, le moteur diesel du véhicule est lancé pour le préchauffage ; l'équipe quitte Amguid. Le véhicule roulera dans un lit d'oued sur une quinzaine de kilomètres, avant d'entamer « l'escalade » de la montagne. La piste rocailleuse fait geindre les structures du 4x4, les corps sont ballottés, les chèches qui masquaient le visage sont rabattus sur le menton, il n'y a plus de poussière. Le prochain acacias servira à élaguer quelques branches, pour la préparation du thé rituel. Après la pause, le voyage reprend, le désert s'éveille. De temps en temps, des gazelles s'élancent apeurées ou des mouflons prudents et hors de portée sur une butte rocheuse, scrutent le véhicule. Des oiseaux à panache noir et blanc virevoltent d'arbre en arbre. L'aigle royal, les ailes déployées, plane haut pour mieux situer sa proie. A quelque 40 km du point du départ, un hameau de z'ribas (huttes) se dresse sur un plateau de pierraille, quelques arbres rabougris servent de séchoir à linge ou de penderie à literie. Le chef du groupe s'avance, tendant la main au médecin. La palabre s'engage en targui, le docteur Youcef est à l'aise, il prend des nouvelles des gens. Une fillette vient en courant, sa carte de vaccination à la main. Le médecin la prend dans ses bras, elle n'est pas effarouchée, elle s'agrippe à son cou. Elle a l'habitude de le voir fréquemment. Une vieille femme est examinée dans la hutte, elle reçoit un traitement. Tout le monde est « vu », la pommade ophtalmique est distribuée, ainsi que du savon de Marseille, don du Croissant-Rouge algérien. L'équipée reprend la route, il reste encore 45 km à parcourir, le soleil est déjà haut. Ces paysages lunaires ne sont pas sans danger, « les montagnes russes » sont abordées avec précaution. La moindre erreur serait fatale, la rocaille crépite sous les roues, elle risque de déporter le véhicule dans le vide. Amorçant la descente, le moteur ronfle, il supplée aux freins. Un gros lézard multicolore traverse imperturbable la piste, les bandes verticales, couleur de l'arc-en-ciel agrémenté de noir, lui donnent un air mythique. Le véhicule ralentit sa course pour s'arrêter carrément, tout le monde descend, le chauffeur seul le fera « sauter », tel un cabri. Une bande rocheuse d'un seul tenant barre la piste et fait office de marche d'escalier de près de 60 cm. L'opération est réussie, il n'est pas question de tomber en panne. Dans le cas contraire, ce sera l'attente d'un hypothétique passage d'un non moins éventuel véhicule. La piste devient à partir de ce lieu à sens unique, la marche rocheuse est infranchissable dans l'autre sens. le retour se fera par un détour sur 185 km, pour déboucher sur la « route nationale », reliant Bordj Amor Driss (Illizi) à Amguid. La traversée de la montagne s'achève sur un promontoire. Une carcasse de véhicule de type buggy est là, terrassée lors du premier rallye Paris-Alger-Dakar. En contrebas, une vallée boisée s'offre à la vue. A gauche du cadrage, un puits entouré de chameaux, à droite un minuscule bourg, fait de maisonnettes en pierre et de huttes, au milieu, une arête montagneuse ferme l'horizon. La descente s'amorce, elle durera près de 45 minutes. L'équipe attendue par les quelques habitants restés sur les lieux est accueillie avec allégresse. Le futur village a déjà sa petite école, son dispensaire qui attend l'affectation d'un infirmier déjà formé, mais dont le poste budgétaire n'est pas encore ouvert. Hadj Benaâmane, patronyme du docteur Youcef, promet de « faire quelque chose » auprès de l'administration. Après quelques examens pratiqués sur les malades présentés au médecin, l'équipe bivouaque pour la nuit. Dès le lendemain, commencera la poursuite des nomades, partis pour de nouveaux pâturages. Docteur Youcef et son équipe feront « du tente à tente ». Les points d'eau auront droit à leur brique poreuse, les enfants leur vaccination ou revaccination. Des prélèvements sanguins seront pratiqués chez les fiévreux pour le dépistage du paludisme ainsi qu'une prise de quinine en guise de traitement présomptif et d'autres gestes anodins par leur simplicité, tels que : l'application de pommade ophtalmique, le badigeonnage de plaies, parfois même des circoncisions, mais nécessairement utiles. Quand ce médecin de la santé publique intervient, c'est en fait l'Etat qui le fait et c'est hautement symbolique pour ces populations. Le t'bib sera l'attraction fugitive des bivouacs, sur une distance de quelque 200 km. Il palabrera, prendra du thé et se fera nourrir, lui et ses co-équipiers à la taguela (galette enfouie dans la braise) et au malfouf de foie de camelin ou de caprin. A l'épuisement des stocks de médicaments et de vaccins après plus d'une semaine de grande vadrouille, l'équipe reprendra le chemin du retour qui sera plus long que celui de l'aller. Plus tard, ce sera au tour des nomades et des populations éparses de Mertoulek, Hirafouk et autres groupements humains. La tutelle administrative sanitaire vient de doter le médecin d'Idlès, d'un véhicule flambant neuf.Il s'agit d'un 4X4 pick-up, double cabine, climatisé, doté d'un double réservoir pour le fuel. Docteur Youcef en est fier, il pourra mieux « hanter » ces immensités inhospitalières, qui n'ont d'égales que la générosité hospitalière des hommes bleus, gardiens du temple. Amguid, qui espérait un autre infirmier, a eu droit à un médecin belabbéssien. Y aurait-il d'autres missionnaires comme le docteur Y. Hadj Benaâmane ? Lui qui a su faire la jonction entre Lalla Khedidja et Tahat ? Je l'espère de tout cœur.

Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.