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« Ouvrir l'espace politique à tout le monde »
Abdelkrim Bahloul. Cinéaste algérien
Publié dans El Watan le 11 - 03 - 2011

Après les Journées cinématographiques de Carthage (Tunisie), les Festivals de Namur (Belgique) et Angoulême (France), Abdelkrim Bahloul a encore une fois été primé pour sa fiction Voyage à Alger au 22e Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), qui s'est clôturé le 5 mars courant. Le film a décroché, entre autres, le prix du meilleur scénario et celui de la meilleure interprétation féminine pour l'actrice Samia Meziane. Malheureusement, ce film, qui fait une carrière respectable dans les festivals, n'a toujours pas été présenté au public à Alger.
Ouagadougou. De notre envoyé spéciale


Comment est née l'idée du film Voyage à Alger ?
En 2007, Bachir Derrais, le producteur, m'a contacté à la faveur de la manifestation«Alger, capitale de la culture arabe» pour me dire qu'il était possible d'avoir des fonds pour réaliser un film sur un homme politique important dans l'histoire de l'Algérie. Je lui ai dit que j'avais un projet de film sur Frantz Fanon qui traînait depuis des années. Il m'a alors suggéré l'idée d'une rencontre avec Boumediène. A partir de là, j'ai pu écrire le scénario en une semaine et il a été accepté par le commissariat de la manifestation. Malgré cela, nous avons galéré pour avoir de l'argent pour terminer la réalisation du film. En France, l'avance sur recettes nous a été refusée au motif qu'il était préférable que la fiction soit tournée en arabe. Nous avons tourné à Alger, dans le train entre Oran et Alger, et à Saïda, sur les terres de mes parents. Sami Ahedda, qui a campé le personnage du jeune Kadirou, devait avoir le rôle depuis le début. Ce n'était pas le cas pour Samia Ameziane. Le rôle de la veuve de chahid devait être joué au départ par Souad Massi. Elle n'a pu le faire, car elle était en tournée musicale. Un bien pour un mal, Samia Meziane, qui a fait le doublage pour le film Dix millions de centimes de Bachir Derrais et qui a joué dans Taxi El Medjnoun de Belkacem Hadjadj, a eu le rôle. C'est une star, il n'y a aucun doute ! Si Voyage à Alger est dans les festivals, c'est à 90% grâce à elle. Pour le rôle de Kadirou, nous devions prendre un enfant pouvant parler les deux langues. Sami Ahedda est de père marocain et de mère bretonne. Il a appris l'algérien de Saïda alors qu'il parlait à peine la langue arabe.

Il y a une scène marquante dans le film, celle, finale, de l'arbre au milieu d'un champ…
J'écris les scénarii comme des romans. J'ai commencé le scénario de Voyage à Alger en écrivant : «Dans la nuit couleur de cendres, l'arbre a été le seul témoin de l'assassinat du père.» C'est sous cet arbre, qui représente la beauté, la redjla, l'Algérie, que le père est fusillé par les soldats français. La mère, qui a réussi à garder son logement, reste veuve et isolée. Elle constate autour d'elle que c'est l'été, c'est sec. Elle est seule face à cet arbre immense qui égale le courage de son époux et celui de tous les Algériens qui ont libéré le pays. Mais sa vie de femme est finie. Kadirou dit qu'on a peut-être gagné mais on laissé une partie de notre vie et de notre jeunesse et des centaines de milliers de morts.

Le film n'a pas prétention de réécrire l'histoire, mais pose néanmoins une question essentielle, celle de personnes venues après l'indépendance récupérer «les fruits de la guerre» alors qu'elles n'ont pas pris part aux combats…
Il y a eu une tentative de spoliation de la victoire du peuple algérien par certains. Il y a eu, certes, un élan populaire qui a suivi l'indépendance, mais il y a eu aussi des affairistes et des prédateurs suffisamment intelligents qui ont pris part à la ruée sur les biens laissés par les Français. Ceux-ci n'ont rien fait durant la guerre de Libération. Où est Soundouk al tadhamoune (la caisse de solidarité créée par Ben Bella après 1962, ndlr) ? Cet argent a été volé, un scandale. L'OAS a causé la panique à l'indépendance. Celle-ci s'est faite dans la brutalité sans aucune organisation, aucune transition. Il y a eu exode, d'un seul coup, de ceux qui faisaient fonctionner l'Algérie. A l'indépendance, peu d'Algériens, en raison de l'analphabétisme, étaient à même de gérer un pays. Les anciens maquisards sont rentrés chez eux sans attendre quoi que ce soit. A l'époque, on avait confiance en l'ALN. On a tendance à critiquer le rôle des armées dans les dictatures, mais il y a des moments où l'armée se range du côté du peuple. C'était le cas au début des années 1960. Après, l'armée est devenue la seule force organisée dans le pays parce qu'il n'y a pas de démocratie en Algérie. On place le président qu'on veut pour gérer l'argent des hydrocarbures. Nous n'avons pas d'Assemblée parlementaire réellement plurielle. L'armée a la charge de maintenir la stabilité politique pour que les affaires continuent… A part les hydrocarbures, l'Algérie ne produit rien. C'est la faute au système et à sa façon de gouverner. Cela doit changer à travers un mouvement démocratique pluraliste élargi à tous les Algériens.

Dans le film, Boumediène a un rôle positif. Après 1965, le colonel Boumediène a instauré une impitoyable dictature militaire…
Le jour du coup d'Etat, en juin 1965, j'étais à l'Ecole normale d'Oran. Je me souviens qu'on tirait partout. Les gens manifestaient, on les avait arrosés de peinture pour les reconnaître et les arrêter ensuite. Ce jour, j'avais 15 ans, j'avais compris que la révolution, l'espoir algérien, était finie. J'étais brisé et bouleversé. Faire un changement sans nous demander notre avis équivalait à la perte de l'élan de liberté qui a caractérisé l'Algérie de 1954 à 1962. Durant cette période, il n'y avait pas de peuple aussi uni, les harkis exceptés, que les Algériens. Je n'ai jamais aimé le régime de Boumediène qui nous cloîtrait et séquestrait. Nous n'avions pas droit à la parole. La sécurité militaire était partout. Nous ne pouvions pas sortir d'Algérie. Nous étions une jeunesse emprisonnée. Sur les trente personnes qui avaient eu le brevet avec moi à Saïda, dans les années 1960, trois seulement sont restées en Algérie. Les autres sont à l'étranger et ont bien réussi leur vie. La jeunesse formée par l'Algérie est partie en raison d'un régime restrictif. Les Algériens n'ont pas été préparés à demander démocratiquement des comptes au pouvoir politique. Rares sont ceux qui disent qu'ils peuvent influer sur la décision politique. Certains en sont toujours à dire : «Le gouvernement nous a dit…», sans se poser de question. Ce qui est arrivé en Tunisie et en Egypte doit également se reproduire en Algérie dans la sérénité et la paix, sans effusion de sang. Il faut qu'on ouvre l'espace politique à tout le monde. Le prix du sang nous l'avons déjà payé entre 1990 et 2000.

Sur la période des troubles des années 1990, peu de films algériens ont été produits. Pourquoi ?
N'oubliez pas que le texte liberticide et antidémocratique de la charte pour la paix et la réconciliation empêche tout débat sur les années 1990. Tous les courants devraient avoir droit à l'expression, démocrates ou islamistes, sur cette période. C'est cela la liberté. Il ne faut pas avoir peur de la parole. Rien n'empêche de revenir, à travers le cinéma ou l'écriture, sur les années du terrorisme. Pourquoi historiens et sociologues n'essaient-ils pas d'expliquer ce qui s'est passé durant ces années ? Ce texte, comme le code de la famille, n'est pas une bonne mesure. Dans Voyage à Alger, la femme est une héroïne de la vie. Quelqu'un dit à Kadirou : «Ne sois pas triste, ta mère vaut des milliers d'hommes.» Cette expression a quelque peu choqué. A 29 ans, ma mère a perdu son mari et elle nous a élevés à six. Nous avons tous eu le bac. Un pays où la femme n'est pas instruite et éclairée ne peut pas évoluer. C'est la femme qui donne les premières instructions aux enfants. Si la femme n'est pas libre dans sa tête, les enfants ne seront jamais libres.

Pourquoi les cinéastes algériens ont-ils évité de réaliser des films sur Ben Bella, Boumediène, bref, les hommes politiques qui ont une histoire liée à celle du pays ?
Quand on est cinéaste, on a envie de faire de beaux films, de belles histoires, pour permettre aux gens de passer de bons moments. Nous faisons des films à caractère politique parfois, lorsqu'on est interpellé par une situation urgente. J'aime bien faire un film d'action, avec un peu d'amour, monter le paysage algérien, faire courir la caméra, bref, une fiction broadcast à l'international. Les réalisateurs ont des dizaines de scénarii en tête mais certains veulent faire des films pour aider l'Algérie à aller vers plus de fraternité et de liberté. Les années de plomb ont quelque peu divisé les Algériens. Le sport et la culture peuvent nous ramener à la fraternité. Dommage qu'il n'y ait pas de films sur nos grands artistes. L'Algérie continue de réserver peu de moyens au cinéma. Voyage à Alger a été réalisé avec moins de 300 000 euros. Il fallait faire beaucoup d'efforts pour produire ce film. Les subventions publiques pour le cinéma devraient être multipliées par cinq. Il faut également que le ministère de la Culture récupère les salles de projection des APC et les donne en gérance au privé. Un privé qu'il est nécessaire d'aider. Il est aussi important de conclure des contrats avec les sociétés internationales de distribution pour que les films puissent sortir en Algérie en même temps qu'aux Etats-Unis par exemple. Il faut avoir aussi des salles multiplex. Cela va redonner goût aux Algériens d'aller voir les films étrangers et algériens. Il est important aussi de créer un système de vedettariat en Algérie pour que le public ait envie d'aller voir un film et voir la vedette. Le cinéma est une industrie. Pour en avoir une, il y a nécessité d'avoir une volonté politique.

- Exergue : Il est important de créer un système de vedettariat en Algérie pour que le public ait envie d'aller voir un film et voir la vedette. Le cinéma est une industrie.


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