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Les non-voyants en ont fait leur meilleur ami
Abderahmane Amalou. Poète, auteur-compositeur, le premier à éditer ses œuvres en braille
Publié dans El Watan le 07 - 07 - 2011

«Une œuvre d'art devrait toujours nous apprendre que nous n'avions pas vu ce que nous voyons.»
Paul Valery
Sur sa carte de visite, dont une partie en braille, Abderahmane s'affiche en tant que poète, auteur-compositeur. Mais pour ceux qui le connaissent, c'est le premier et le seul homme de lettres algérien à pouvoir éditer ses œuvres en braille, au grand bonheur des non-voyants. L'engagement de notre artiste en faveur de cette frange de la société qui souffre mille et un maux pour tenter d'y être totalement intégrée, est vécu comme un sacerdoce ; une mission presque sacrée. Et lorsque nous lui rapportons les qualificatifs fort élogieux qui lui sont dédiés ici et là, Abderahmane les trouve exagérés. Modeste, il se limite à dire qu'«il contribue aux actions liées à l'aide des petites gens comme toute personne qui aime aider, partager un peu avec les autres, bref, joindre le geste à la parole».
Ses amis ne tarissent pas d'éloges à son égard. «Il fait son devoir avec un mélange de dévouement et de courtoisie, de compétence et de distance. Ton posé, il est avant tout un homme de dialogue passionné, serviable, à l'imperturbable politesse», relève avec tendresse son ami non-voyant Mouhoub Bouseksou, magistère en droit, président de l'association Ibtissama. Abderrahmane, grand sensible, a le récit autobiographique pudique et flamboyant avec du panache dans l'aveu des sentiments. Né à Kouba, le 8 juillet 1954, Amalou Abderahmane est le deuxième fils d'un commerçant natif d'Ighil Iazouzen à Azzefoun, ville natale de bon nombre d'artistes de renom.
Compositeur et interprète
Entre les années 1970 et 1980, tout en poursuivant ses études secondaires, il composa, interpréta et publia aux Editions DDA quatre chansonnettes en langue berbère dont les paroles ont été écrites par Naït Kaci Sid Ali, chanteur, parolier et animateur d'émissions à la chaîne kabyle. Dans son premier recueil de poésie libre d'expression française, Les mots, les maux, Amalou présente avec le style qui lui est propre les sujets vécus tous les jours, tels que la solitude, le mensonge le pardon où le verbe utilisé en permanence à l'infinitif dans la poésie incite le lecteur à goûter à la source des mots avec une attente confiante mélangée de doute, de rêve et d'espoir.
Le lecteur rejoint un univers dans lequel les sentiments se mêlent, s'entremêlent, s'entrechoquent, pleins de couleurs bigarrées où le poète tente avec des mots simples de dévoiler par la porte entrouverte un peu à sa manière le rapport avec l'autre, avec l'environnement où chacun, à un moment ou un autre, retrouve son refuge. Ce recueil traduit en sept langues et en braille a reçu le prix de la poésie Juba II 2010 initié par les éditions Nounou. L'émotion est toujours intacte chez le poète. Chaque jour ou presque, Amalou s'offre des moments d'extase, des exclamations jouissives...Mais le geste symbolique ô combien touchant qui l'a bouleversé est sans doute ces moments heureux vécus il y a quelques jours aux côtés des élèves non-voyants de l'école d'El Achour. La cérémonie organisée par ses soins marquée par la ferveur et l'émotion «a été, selon notre interlocuteur, une action aussi affectueuse que solidaire.» Dans une ambiance festive, Abderahmane a saisi cette occasion pour offrir aux jeunes handicapés de nombreux cadeaux, des livres, des albums, des tee-shirts et des jouets ainsi qu'un nouveau conte en braille qu'il vient tout juste de publier. Par ailleurs, la bibliothèque de l'école a bénéficié d'un don de l'ensemble des œuvres en braille du poète.
L'auteur compositeur avait, il y a quelques semaines, animé une conférence-débat sur son engagement en faveur des non-voyants sur invitation de l'institut espagnol Cervantes. Pourquoi s'est-il engagé à transcrire ses écrits en braille ? «Le manque d'ouvrages en braille m'a encouragéréaliser un de mes vieux rêves. Mettre mon savoir et mes connaissances à la disposition des non-voyants instruits et motivés par le savoir, leur faire goûter un peu ce qui se fait en poésie et en musique. En deux mots, voir par le
savoir ! Chez moi, cette attitude est spontanée, c'est un élan humain, naturel...», résume-t-il tout simplement.
Un élan humain, naturel
Imbibé de culture variée, il se considère comme un artiste complet pour qui la musique, l'écriture de chansons ou de poèmes ne sont qu'un même acte créatif. Dès son enfance, Abderahmane est attiré par les arts. «L'influence de mes parents sur moi était constructive par leur consentement silencieux : des parents sages ; ils avaient laissé libre cours à ma passion, les arts en général, mais la pratique se faisait en parallèle avec mes études».
Généreux, opiniâtre et déterminé, Abderahmane a une longue histoire avec la musique qu'il a adoptée à l'adolescence avec l'acharnement qui sied aux amoureux. Il n'a pas surgi comme ça, à la faveur d'une rengaine arrangée. Son histoire remonte déjà au début des années soixante-dix. A l'époque, il n'avait pas encore vingt ans ; l'esprit vagabond en bandoulière, il gambadait avec une belle insouciance. Sa détermination, son flair et sa curiosité le placent dans la trajectoire de ceux qui veulent savoir plus. Abderahmane en tire la philosophie qui va guider sa vie, mélange subtil de volonté et de sens de la prédestination. A une époque où les mauvais clichés s'agrippent tenacement à la réalité, pour Amalou, il ne faut pas se résoudre à admettre que la cécité rime avec mendicité et que l'aveugle dépend nécessairement des autres, de leur charité. Le regard de l'autre ne doit plus être assimilé à de la compassion. Mouhoub, président de l'association Ibtissama de Beni Ouartilene, a connu Amalou à travers un document braille. «Un ami commun nous a mis en contact. Depuis, Amalou nous accompagne dans notre combat pour l'intégration des non-voyants pour l'accès au savoir de cette catégorie en nous mettant sur le même pied d'égalité que le commun des mortels.
Amalou nous a aussi accompagné sur le plan artistique. Il nous associe dans ses récitals-conférences où la cause des non-voyants est toujours bien défendue. Mécène, il a joué le rôle de sponsor en prenant en charge une journée consacrée à l'accès des non-voyants aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. Pour nous, Abderahmane est le symbole de la générosité de l'humanisme et du partage.
Pour son ami Yacine Mira, responsable à l'Office national des publications scolaires, chargé du braille, «Amalou a toujours contribué à la pleine intégration des handicapés dans la société. Il les accompagne dans la générosité qui est la sienne dans plusieurs de leurs activités. Son engagement désintéressé mérite d'être mis en relief».
Abderahmane a essayé de comprendre ce qui en l'homme cède à l'illusion manipulatrice à l'attitude machiavélique des puissants prêts à berner des simples gens. De tribulations sentimentales en petits drames du quotidien, le jeune Amalou s'est laissé vite séduire par ces fables humaines. Il s'adresse d'abord à lui-même pour comprendre au cœur de son for intérieur ce qui le motive, ce qui l'accompagne, ce qui le protège.
«Mon père Mohamed, homme strict et besogneux, natif d'Azzefoun, vivait entre la France et l'Algérie en sa qualité de commerçant. Pendant les vacances d'été, il nous emmenait tous au ‘‘bled'' de ses aïeux. Le séjour variait de 3 à 4 semaines. L'environnement, la beauté du site, la mer, la montagne, la forêt, les ruisseaux d'Azzefoun m'impressionnaient et m'impressionnent toujours en inspirant ma muse. Dès mon jeune âge, j'étais curieux et observateur. J'aimais ce qui se racontait, ce qui se faisait, ce qui se chantait. J'avais une chance exceptionnelle, ma grand-mère paternelle, que Dieu ait son âme, était poète. Elle transmettait oralement ce qu'elle avait appris comme poésie, proverbes et contes.
Elle composait des vers et elle aimait les déclamer lors des événements heureux. Elle chantait même en groupe lors des fêtes religieuses. J'aimais l'écouter et mon enfance se laissait bercer par elle dans l'imagination, le rêve, le voyage, le passé... J'étais happé par la poésie, mais je pratiquais la musique, l'orgue particulièrement.»
Inspiré par Azzefoun
Au sortir de l'adolescence, les souvenirs d'enfance se frayent une place privilégiée dans la mémoire. Et Azzefoun encore davantage. Azzefoun ?
Abdelmadjid Bali avait, dans la préface consacrée à l'artiste Mohamed Hilmi, magnifié cette région d'Azzefoun, vivier de tant d'artistes talentueux dont la renommée aura dépassé bien des frontières. A l'ombre du mont Tamgout, un bout de pays juché entre ciel et mer, agrippés à ses flancs villages et hameaux au destin en apparence ordinaire. Comme s'il tournait le dos à l'imposant Djurdjura et à la proche plaine du Sébaou, il scrute le bleu de l'horison, et au gré des saisons, brave la force des vents ou s'offre à leurs caresses veillant en contrebas sur Azzefoun, la porte du large. Ce bout de pays avec les rivages de Tigzirt et de Dellys livrera-t-il un jour son secret ? L'Algérie contemporaine lui doit un trésor qu'une myriade d'hommes et de femmes de culture aux talents immenses ont pour elle constitué.
Il ne faudra plus se contenter d'égrener les noms de célébrités qui en sont natives ou originaires.
Mohamed Hilmi, mais avant ou avec lui les noms d'El Hadj M'rizek, Mohamed Iguerbouchen, Cheikh Ibnou Zekri, El Hadj M'hamed El Anka, M'hamed Issiakhem, Rouiched, H'nifa, Fadhéla Dziria, Tahar Djaout, Mustapha Badie, Boudjemaâ El Ankis, Mohamed Iftisen, Mohamed Fellag, Hamidou, Abdelkader Chaou, Allaoua, Ouazib, Abderahmane Lounas... et cette énumération ne peut être exempte d'involontaires omissions. Mais aucune étude, à notre connaissance, n'a encore traité de la singularité, voire le pays des Ibahriyen, Iflissen ou Ath Djennad dans le domaine de l'art et la culture. Nul doute que de pertinents chercheurs se pencheront un jour sur tout un patrimoine constitué à lever le mystère de cette relation et révéler les fondements des gisements fertiles qui, à travers des générations, se renouvellent, se diversifient et s'enrichissent. Comment alors ne pas apprécier les sacrifices de ceux parmi ces précurseurs qui ont embrassé le métier d'artiste, bravant la rigueur des traditions ancestrales qui les poursuivaient jusqu'en ville, particulièrement à La Casbah d'Alger où une bonne partie de la population d'Azzefoun a émigré au début du siècle dernier ? Même si réprobation et parfois bannissement étaient le tribut à payer, ils ne pouvaient s'empêcher de refléter dans leurs œuvres, en filigrane ou en toute évidence, l'omniprésente influence de la Kabylie originelle qu'ils ne perdaient ni de vue ni d'âme.


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