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Le journaliste Zoheïr Aït Mouhoub victime d'une «barbouzade»
Il subit unharcèlement policier depuis une année
Publié dans El Watan le 15 - 08 - 2012

Le journaliste Zoheïr Aït Mouhoub, 29 ans, reporter à El Watan Week-end, subit un véritable harcèlement policier depuis une année.
Intimidations, filature, fouille au corps, interrogatoires inopinés, «visites» à domicile, interpellation musclée à quelques encablures de son quartier : le journaliste Zoheïr Aït Mouhoub, 29 ans, reporter à El Watan Week-end, subit un véritable harcèlement policier depuis une année. Dernière affaire en date : le 31 juillet dernier, il est surpris par quatre individus à bord d'une Polo noire qui l'interpellent en pleine rue Didouche Mourad. Son délit ? Ses enquêtes au vitriol qu'il publie depuis ses débuts dans l'hebdo d'El Watan, et où il s'attaque aux milieux d'affaires, à la corruption d'Etat, aux lobbies de l'importation, à la mafia de l'informel, aux mœurs peu scrupuleuses de nos tycoons et autres magouilles du landerneau «politico-trabendiste». Des enquêtes qui, le plus souvent, mettent en cause, en filigrane, de hautes personnalités du sérail. «J'ai observé que chaque fois que je sortais une enquête importante sur les trafics en haut lieu, ils réagissaient systématiquement.» Premier acte. 29 juin 2011. Cité AADL, Bab Ezzouar. Trois individus au «comportement policier» tentent d'agresser notre confrère. «J'avais publié peu avant une enquête sur l'Ansej (sous le titre : L'argent de l'Ansej aux mains de la mafia in El Watan Week-end du 10 juin 2011, ndlr). Ce 29 juin 2011, trois individus m'ont pris en chasse, et j'ai dû me réfugier devant l'hôtel Mercure. Je me suis abrité sous les caméras de vidéosurveillance pour me protéger. Ces trois types me surveillaient en fait depuis trois jours. Le lendemain, j'ai déposé plainte à la sûreté de daïra de Dar El Beïda. Quatre mois plus tard, j'ai reçu une note du procureur concluant à un constat d'infructuosité.»
«Ils voulaient connaître mes sources»
Deuxième acte. Nous sommes le 9 février 2012. Il est 16h. «Un gars se présente en bas de mon immeuble et me dit ‘An amn', (je suis de la sécurité). Il a ajouté : j'aimerais t'interroger sur certaines de tes sources et de tes relations. J'ai dit : vous n'avez pas à m'interroger comme ça. Si vous avez quelque chose à me dire, vous n'avez qu'à me convoquer au commissariat.» «Durant cette période, je faisais une enquête sur les scénarios des législatives», précise Zoheïr Aït Mouhoub. «Ce jour-là, j'étais malade. J'étais alité. Le soir, vers les coups de 23h, deux individus se sont présentés à mon domicile. Cette fois encore, ils se disaient ‘amn' (sécurité). Ils étaient en civil. Ils étaient venus sans mandat aucun. Ils voulaient connaître mes sources sur un article précis intitulé : ‘Appel du 17 septembre : une manipulation d'Etat' (El Watan Week-end du 23 septembre 2011, ndlr). Il n'était évidemment pas question pour moi de les leur livrer. Ma priorité est la protection de mes sources, sinon, je ne ferais pas ce métier. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui m'ont poussé à ne pas médiatiser ces affaires. Je ne voulais pas être amené, au cours de l'enquête, à dévoiler mes sources.» Zoheïr avance d'autres arguments pour expliquer le silence qu'il s'est imposé suite à ces deux agressions policières : «D'abord, je ne voulais pas que les gens se disent : il se fait de la pub, il veut passer pour le héros de la liberté d'expression. A part ma rédaction, personne n'était au courant.
Ma mère était malade et je ne voulais pas qu'elle se fasse du mouron. Pour moi, cela fait partie des aléas du métier.» Et d'ajouter : «Chaque fois que je fouinais dans les magouilles du système et le business de nos dirigeants, et tout particulièrement quand ça touchait le sommet de l'Etat, je recevais systématiquement ce genre de visites. C'étaient des menaces à peine voilées.»
Même s'il a la réputation d'un journaliste casse-cou, Zoheïr Aït Mouhoub n'est pas insensible à ces «barbouzades». Cela finira par l'inquiéter. «J'en suis même arrivé à quitter le domicile familial et emménager dans un petit appartement», confie-t-il. «Pour ne pas trop angoisser et prendre du recul par rapport à ces intimidations, je partais en voyage pour quelques jours histoire d'avoir les idées claires», glisse-t-il. Zoheïr relate dans la foulée les péripéties du renouvellement de son passeport qui le laissent, là aussi, perplexe. «Deux mois pour un simple renouvellement, ce n'est pas normal», assène-t-il.
«On m'a traité comme un délinquant»
Troisième acte. 31 juillet 2012. Zoheïr Aït Mouhoub rejoint son domicile après une journée fastidieuse. Il est en train d'enquêter sur la recrudescence de la violence urbaine et sa corrélation avec la grâce présidentielle au profit de certains délinquants multirécidivistes (enquête parue depuis sous le titre «Les graciés du Président récidivent», El Watan Week-end du 10 août 2012).
17h. C'est le Ramadhan. Zoheïr, rejoint par un ami, sort faire les courses et se dirige vers le marché Meissonnier. Il flâne rue Didouche Mourad et, en s'apprêtant à traverser, il remarque quatre individus à bord d'une Polo noire le dévisageant d'un regard suspicieux. Ces derniers ne se feront pas long à passer à l'acte : «Ils ont jailli de la voiture et m'ont plaqué contre le mur près du cinéma ABC sous le regard ébahi des badauds et des jeunes du quartier.» Il ne fait aucun doute que ce sont des policiers en civil, indique notre confrère : «Ils avaient des talkies-walkies et tenaient un jargon policier.» Et de poursuivre : «J'ai protesté en disant je suis journaliste. Celui qui semblait être leur chef m'a rétorqué sèchement : ‘Bâlaâ femmak !' (ferme ta gueule). ‘Makan la journaliste la oualou.' Ils ont commencé à me fouiller. J'ai dit : ‘Vous n'avez pas le droit de m'interpeller comme ça. Je suis un journaliste, pas un délinquant.' Ils m'ont bousculé de plus belle. J'ai insisté : ‘S'il y a un problème, emmenez-moi au commissariat.' Leur chef a persisté en ordonnant à ses subalternes de continuer leur besogne. Après, il a jeté : ‘Emmenez-le au commissariat !' J'ai marché en direction du commissariat. A hauteur de l'agence Nedjma, il m'a lancé : ‘Tu vas payer très cher ce que tu as fait. Taghlat, tkhallass' (tu gaffes, tu paies). Après, il m'a dit : ‘Allez, fous le camp !' Je me suis senti blessé dans mon amour-propre. J'étais profondément atteint dans ma dignité d'être ainsi malmené devant mes voisins et les gens du quartier. J'étais traité comme un délinquant !»
Comme les autres fois, à aucun moment Zoheïr n'est embarqué au poste de façon à ce qu'il prenne connaissance du «délit» dont il se serait rendu coupable pour mériter un tel traitement. Ce qui conforte la thèse du harcèlement moral et de l'intimidation.
Le message est clair : les commanditaires de cette opération veulent simplement qu'il sache qu'ils l'ont à l'œil et qu'il doit «faire attention» à ce qu'il écrit. Un procédé sorti tout droit du répertoire de la police politique sous ses pires oripeaux.
Zoheïr appelle l'un des responsables d'El Watan qui sollicite à son tour l'adjoint du chef de sûreté de wilaya. «Il a tenté de les joindre par radio afin de pouvoir les identifier, mais ils n'ont pas voulu se manifester» rapporte Zoheïr. Et de poursuivre : «Je suis rentré chez moi et j'ai essayé de contenir mon émotion tant bien que mal. Le soir, je suis sorti avec des amis.
En revenant chez moi vers 23h45, j'ai reconnu sans peine deux des quatre flics qui m'avaient agressé. Ils faisaient le guet. D'ailleurs, dès qu'ils m'ont vu, ils ont actionné leurs téléphones portables pour donner mon signalement. J'a gagné mon immeuble pour monter chez moi, et là, j'ai été surpris de les voir derrière moi. Ils m'ont suivi jusque dans la cage d'escalier. Mais ils n'ont rien dit. J'avoue que j'ai eu peur, d'autant plus qu'ils étaient certainement armés. En plus, il faisait sombre dans l'immeuble.»
L'ONDH : «Une police parallèle»
Zoheïr se mure chez lui et broie du noir. Même si les deux individus ne s'avisent pas de frapper à sa porte, il ne trouve pas le sommeil. «J'étais très angoissé. Je n'ai pas dormi de la nuit. Le lendemain, j'ai vu l'adjoint du chef de sûreté de wilaya qui m'a aimablement reçu. Il a été très courtois et s'est montré très professionnel. Il m'a d'emblée assuré qu'il allait prendre mon affaire en charge. Je lui ai décrit les quatre policiers, notamment leur chef, qui avait un bouc au menton. Il m'a affirmé qu'il ne faisait pas partie de ses effectifs.
Il m'a invité à faire une déposition ; ensuite, il m'a orienté vers le chef de sûreté de daïra de Sidi M'hamed qui s'est montré, lui aussi, courtois et coopératif. Il m'a assuré à son tour que je n'avais pas à m'inquiéter en m'indiquant que l'enquête était en cours. Quelque temps après, j'ai reçu un coup de fil de sa part me priant de se présenter à lui. Et là, il m'a informé que la voiture avait été identifiée, en soulignant que les quatre éléments ne faisaient pas partie de ses services. Il y avait un flou autour de l'identité de ces gens-là. Je lui ai demandé s'il s'agissait de gens relevant de la DGSN. Il a répondu non. Etaient-ils du DRS ? Là encore, il a répondu par la négative. Alors, ils relèvent de quel corps ? Du ministère de l'Intérieur ? Là, il n'a pas répondu. Il m'a simplement dit : ‘On poursuivra l'enquête et on en saura un peu plus.' Peu après, il m'a annoncé que les quatre éléments étaient au repos et que le lendemain, il allait les appréhender. Il a ajouté : ‘Demain, on vous convoquera pour une éventuelle confrontation avec ces gens-là.' J'ai attendu son appel mais je n'ai rien reçu.»
Les auteurs de cette «barbouzade» ont été aisément confondus. «J'ai appris qu'ils ont été lourdement sanctionnés», affirme notre journaliste d'investigation. «Le jeudi 2 août, j'ai eu confirmation de cette sanction. Je tiens du responsable de la sûreté de wilaya que ces quatre éléments appartiennent à la brigade spéciale des flagrants délits, précisant, qu'ils avaient reconnu les faits.»
Notons que le site web de L'Observatoire algérien des droits de l'homme (OADH) a été le premier à dévoiler cette affaire sur la Toile (http://oadh.org) tout en condamnant vigoureusement ces pratiques d'un autre âge. Le site de Yahia Bounouar n'hésite pas à parler, à ce propos, de «police parallèle» qui serait à la solde du ministère de l'Intérieur : «L'Observatoire algérien des droits de l'homme condamne avec la plus grande énergie ces pratiques odieuses contre un journaliste et exigent que la lumière soit faite sur ces intimidations.
L'OADH exige également du ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia, d'apporter à l'opinion publique nationale et internationale tous les éclaircissements sur l'existence éventuelle d'une police parallèle au sein du ministère de l'Intérieur. Qui la dirige et dans quel but ? L'OADH tient à préciser que ce n'est pas la première fois que des informations lui parviennent sur l'existence d'une telle police parallèle et rappelle que cela constituerait une atteinte très grave à la Constitution algérienne», lit-on dans le communiqué de l'OADH.
Des questions lancinantes continuent à tarauder Zoheïr après cette série de mésaventures : «La première question que je me pose est : qui sont ces gens-là ? Quelle est leur identité ? Et surtout quelles sont les raisons qui les ont poussés à me malmener comme ils l'ont fait ?» Zoheïr Ait Mouhoub insiste pour dire qu'il n'a consenti à médiatiser cette affaire que dans le but de se prémunir contre d'éventuelles représailles : «Si j'ai décidé aujourd'hui de porter ces affaires à la connaissance de l'opinion publique, c'est uniquement pour me protéger. Je sais de quoi ces gens-là sont capables. A présent, je mets les services de sécurité face à leurs responsabilités. Je ne veux plus marcher dans la rue en regardant derrière moi.»


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