Les experts qui se sont exprimés sur ce sujet (El Watan du 1er et du 20 octobre 2012) ont émis des réserves sur les moyens d'intervention de la banque d'Algérie pour juguler l'inflation en procédant notamment par des retraits de liquidités du système bancaire et en maintenant à un niveau très bas les taux de dépôts des ménages pour freiner la consommation. Selon ces experts, cette façon d'agir réduirait la capacité des banques à octroyer des crédits à l'investissement ralentissant ainsi la croissance économique.Ma succincte intervention portera uniquement sur cette capacité des banques à octroyer des crédits et les conditions de distribution, en évitant volontairement d'évoquer les mécanismes de régulation de l'inflation et la détermination des taux de placement des dépôts par le système bancaire qui ont été largement commentés par le Professeur Djamel Belkacem, enseignant à l'Ecole supérieure de banque, dans son intervention du 20 octobre 2012 dans le même journal. Capacité des banques à octroyer des crédits L'opportunité de placement volontariste et faiblement rémunéré à travers les appels d'offres de la banque d'Algérie ne constitue nullement un obstacle pour les banques et leur capacité à octroyer des crédits à l'économie qui demeure leur mission essentielle. Aussi, cette possibilité de rentabiliser une partie de leurs ressources n'est pas une solution pérenne et ne peut se substituer ou occulter la pratique du crédit bancaire qui constitue actuellement et vu la faiblesse du taux de bancarisation la source principale de leurs revenus. Néanmoins et pour inciter les banques à rechercher la rentabilité en prenant plus de risques mesurés, la banque d'Algérie devrait réfléchir à un mécanisme pour éponger les excédents de ressources sans rémunération. Etant privées de cette rentabilité aussi faible soit-elle, les banques devraient prendre plus de risques pour assurer leur activité, couvrir leurs charges et dégager un excédent pour assurer leur pérennité.Nous verrons ci-après comment apprécier ces risques et quelles sont les mesures à prendre pour une distribution saine et efficace du crédit. I- Caractèristiques et nécessité du crédit En l'absence d'un marché financier développé et l'insuffisance des fonds propres, le crédit bancaire demeure une source importante voire essentielle de financement du cycle d'exploitation et/ou de leurs investissements des entreprises. II- Conditions nécessaires pour une distribution de crédit saine rationnelle et éfficace Tant pour la banque que pour l'entreprise, la pratique du crédit nécessite un savoir-faire et un professionnalisme avéré pour : - établir un diagnostic économique et financier ; -déterminer avec précision les besoins de financement nécessaires ; - proposer les crédits spécifiques susceptibles d'être mis en place ; - gérer convenablement les aspects liés à la gestion administrative du crédit mis en place par les banques conformément aux prévisions établies (suivi-garanties). La pratique du crédit nécessite également une connaissance approfondie, une vulgarisation et une clarification des textes liés à la réglementation à tous les niveaux de la banque et de l'entreprise. III- Relations banques / entreprises Pourquoi les relations banques/entreprises sont-elles particulièrement difficiles en Algérie ? Problème d'incommunicabilité ou d'incompréhension ? Comment améliorer ces relations et nouer un dialogue intéressant et rentable entre les deux parties ? Quels comportements doivent avoir les banquiers et les entreprises les uns vis-à-vis des autres pour arriver à se comprendre et surtout à travailler ensemble ? Il suffit que : - les banques comprennent ce qu'est une entreprise et son rôle économique ; - les chefs d'entreprise comprennent qu'une banque a des règles de prudence qu'elle doit respecter. IV- Formation nécessaire Les nombreuses actions de formation engagées par les banques ont largement sensibilisé les cadres sur l'importance du crédit bancaire et son impact sur l'économie et sur leur rentabilité. Les entreprises, notamment celles qui n'ont pas accès au marché des obligations et des actions, ne peuvent donc se permettre de négliger ce moyen de financement. Elles devraient par conséquent se soucier davantage du volet formation des cadres chargés de cette activité au sein de leur entreprise en leur consacrant un budget annuellement. A cet effet, nous préconisons des actions spécifiques, sous forme de séminaires de courtes durées sur site ou en résidentiel, qui seront animés par des consultants disposant du savoir-faire et de l'expérience nécessaires. Le programme de formation qui serait destiné aux responsables d'entreprises devrait être axé sur les objectifs suivants : - les sensibiliser sur le cadre réglementaire et prudentiel que doivent respecter les banques dans le cadre de leur activité ; - les inciter à présenter un dossier de financement selon les normes requises ; - les initier à l'analyse financière et à la pratique des ratios financiers ; - leur suggérer des techniques de financement spécifiques, adaptables aux prévisions de dépenses induites par les besoins liés aux projets d'investissements ou nés du cycle d'exploitation ou de production. V- Respect des dispositions régissant la distribution du crédit Les conditions d'octroi et de mise en place des crédits devraient être clairement définies dans les lettres de délégation de crédit et les textes subséquents. Ces conditions devraient également être portées à la connaissance et affichées au niveau des structures chargées du traitement des dossiers de crédits depuis l'analyse jusqu'à la décision en passant par les différents avis. Le non-respect des dispositions d'octroi et de mise en place des crédits devrait être traité dans le cadre des textes régissant les procédures disciplinaires de l'institution concernée. Néanmoins et en cas de préjudice causé volontairement ou non, il appartient aux organes sociaux d'en apprécier les responsabilités et de prendre les dispositions qui s'imposent, y compris la saisine de la justice en cas de nécessité.