Déjà trois ans ! Oui, trois ans que Cheikh Abdelkader Benmohamed Al Belkadi a quitté ce bas monde sur la pointe des pieds, comme il a vécu d'ailleurs : léger comme le vent, humble comme l'enseignant-poète, le professeur et le très respecté médersien et moudjahid qu'il était. A une époque où l'oubli est érigé en règle de vie, son souvenir impérissable hante toujours ceux qui l'ont connu et apprécié à sa grande et juste valeur. Comme le disait Ali Benflis, ex-Premier ministre, durant le premier mandat du président Abdelaziz Bouteflika, élève et ami du défunt qui en parle toujours avec passion et tendresse : «Evoquer aujourd'hui le souvenir de Si Abdelkader Benmohamed, convoquer la mémoire fidèle de son enseignement, rappeler son œuvre édificatrice et profonde, fruit de toute une vie d'efforts et de sacrifices, c'est en fait la mise à jour de ce terreau poétique qui a caractérisé la mission de cet enseignant-poète qui nous réunit en ce jour. D'outre-tombe, semble nous parvenir en cette circonstance, cet écho poétique dans l'interstice de deux langues. Il s'agit de celles qui furent les deux socles fondamentaux de l'institution scolaire qui a donné l'occasion à notre grande famille de se constituer, sous le parrainage bienveillant de nos illustres maîtres, parmi lesquels Si Abdelkader Benmohamed, Si Abderrachid Mostefaï, Si Sari Mohamed, Si Mohamed Lamrani, Si Mokhtar Bouchareb, Si Saïdi et bien d'autres.» Déjà trois ans, et on ne peut oublier l'itinéraire exemplaire d'un homme droit et intègre qui a consacré toute sa vie à prodiguer l'enseignement éducatif qui, aujourd'hui, a beaucoup perdu de sa sève, de ses normes et de ses repères. Abdelkader Benmohamed incarnait, au même titre que ses confrères de l'époque, un monument où se côtoyaient la pédagogie chatoyante, l'ouverture de l'esprit, la grande culture universelle, les vraies valeurs nationales et celles d'une religion tolérante héritée de l'âge des Lumières. Cheikh Benmohamed avait le verbe éloquent, la langue tout le temps poétesse et l'inspiration à fleur de peau. Au détour du moindre regard contemplateur ou sous l'effet d'une légère brise inspiratrice, le Cheikh déclamait un poème et des vers qu'il était le seul à savoir conjuguer au contexte vécu. Relater en quelques lignes son itinéraire, son œuvre et son vécu, serait un exercice périlleux que je ne saurai entreprendre. Seulement, ce modeste texte est décliné pour au moins honorer sa mémoire et la faire rappeler à tous ses proches et à ceux qui l'ont connu et apprécié, en ces temps d'oubli.