Artiste textile autodidacte, simple, austère et discret, Salah Khaldi n'est pas bavard quand il s'agit de parler de sa personne. Il affirme, modestement, qu'il préfère laisser ses œuvres s'exprimer. D'ailleurs, il n'aime pas non plus paraître publiquement dans des expositions. Evoquant son exposition abritée récemment par l'institut culturel français de Constantine (ICF), il dit clairement : «Je suis venu à Constantine par affinité, et si je suis à l'ICF c'est par pur hasard.» Il nous a confié en aparté que cette exposition fait suite à une première présence à l'ICF de Annaba, sur les conseils de ses amis qui l'ont poussé à montrer ces «véritables merveilles» au public. Pour certains initiés, le travail accompli par cet artisan-artiste est très original des points de vue technique et esthétique, même si Salah Khaldi refuse toujours d'être classé comme artiste. «Cela me fait peur de me dire que je suis artiste, c'est plus fort que d'être un savant», confie-t-il devant de nombreux curieux, qui découvrent pour la première des œuvres réalisées d'une main experte, avec dextérité, où des fils aux couleurs vives s'entrecroisent, s'entrelacent, se chevauchent dans une sorte de chorégraphie où elles rencontrent en balade des morceaux de tissus, revalorisés dans des tableaux expressifs tirés des imagés nichées dans son subconscient, soutenus par des supports métalliques ou en bois. «C'est un travail basé essentiellement sur l'improvisation où je m'inspire surtout des traditions et des gestes de nos artisans auxquels je rends un grand hommage, car sans eux et leur héritage, on ne serait rien», poursuit-il. Natif de Guelma, titulaire d'un diplôme en bâtiment, Salah Khaldi affirme qu'il n'a suivi aucune formation artistique. «J'ai appris la technique dans les années 1990 en me documentant et en suivant ma tante qui faisait du tissage dans sa maison», nous a-t-il révélé. A force de manipuler les fils et les tissus, il finira par cultiver une passion obsessionnelle pour ce nouveau mode d'expression, qu'on pourrait appeler «l'artisanat artistique» ou «l'art artisanal». «Ce sont pour moi des aventures qui se réinventent en se nourrissant de la sensibilité et de l'émotion», dira-t-il avec la modestie d'un artisan. Une façon pour lui d'apporter un plus à un patrimoine matériel puisé des richesses inépuisables de son pays.