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Amina Tyler. Femen tunisienne : Je crains de voir ma Tunisie sombrer dans un islamisme comme celui de l'Afghanistan ou de l'Iran
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Publié dans El Watan le 17 - 05 - 2013

La lycéenne tunisienne Amina, qui avait publié sur internet des photos d'elle seins nus barrés des slogans «Mon corps m'appartient, il ne représente l'honneur de personne» ou encore «Fuck your morals», à la manière du groupe féministe Femen, raconte à El Watan Week-end la violence qui s'en est suivie.
-Comment avez-vous fait connaissance avec le mouvement Femen ? Et quels ont été vos motifs pour avoir adhéré et défendu cette cause ?
J'ai aperçu une photo des Femen ukrainiennes à Paris sur ma page d'accueil de facebook au mois de juillet et la photo a attiré mon attention, car j'ai aimé cette forme de féminisme exhibitionniste qui, à mes yeux, n'est pas utilisée à des fins pornographiques ou un simple acte gratuit de vulgarité, mais comme un acte porteur d'un message en faveur de la cause féminine. C'est ce qui m'a motivée à publier une photo pour soutenir le mouvement Femen, mais après une mûre réflexion tout en mesurant l'ampleur des conséquences d'un tel acte.
-Et quelles en ont été les conséquences ? Estimez-vous que vous payez cher le prix de votre acte ?
J'ai reçu des menaces de mort de salafistes réclamant la lapidation, l'égorgement ou encore que l'on verse de l'acide sur mon visage. Ma page facebook a de même été piratée et remplacée par le drapeau salafiste avec des propos forts dégradants à mon égard, où l'on me traitait, entre autres, de fille de rue et de femme impudique ayant conclu un pacte avec le diable, et où on qualifiait mon acte d'atteinte aux bonnes mœurs et aux valeurs de l'islam. J'ai même dû changer mon numéro de téléphone. Les menaces étaient incessantes, mais elles ne m'effraient pas et je ne compte pas baisser les bras.
-On a entendu dire que votre famille vous a séquestrée.
Suite à plusieurs jours d'absence – j'avais cherché refuge chez une connaissance–, je suis sortie boire un café avec une amie qui a contacté ma mère pour lui apprendre où je me trouvais. Nous étions assises à la terrasse d'un café à Tunis, lorsque, soudain, mon cousin est arrivé. En me voyant, il s'est précipité sur moi, me jetant à terre et me traînant devant tout le monde. Il m'a forcée à monter dans une voiture avec les mains derrière le dos. Une fois rentrés au domicile de mes parents, il m'a frappée violemment. Mon père est intervenu pour l'arrêter et lui demander de me lâcher.
Ma séquestration a duré plus de trois semaines et j'ai vécu un réel cauchemar. On m'a emmenée de force chez le psychiatre qui m'a prescrit des antidépresseurs. On a de même tenté de m'isoler chez ma grand-mère à Kairouan, la ville sainte de Tunisie, où on m'a imposé des séances d'exorcisme et où deux femmes âgées, pieuses, ont voulu vérifier si j'étais toujours vierge. Je n'avais ni téléphone ni accès à internet. Après plusieurs jours de captivité, j'ai eu le droit de récupérer le téléphone, mais tous mes dires et actes étaient sévèrement surveillés. Je n'avais pas le droit de quitter la maison et même devant les journalistes français qui m'ont interviewée, je ne pouvais pas m'exprimer librement, car mon père était présent.
-Vous êtes une femme libre aujourd'hui, comment avez-vous pu échapper aux griffes de votre famille et vous enfuir ?
Après un mois de captivité, un vendredi, mes parents se sont rendus à un enterrement et pour la première fois, je suis restée seule avec ma grand-mère. Alors qu'elle était au téléphone et que la porte de la maison était ouverte, je me suis dit que c'était l'occasion ou jamais de prendre la fuite. J'étais pourtant en pyjama et en claquettes. Je me suis enfuie malgré un sentiment de peur et j'ai pris le métro vers Tunis et sur l'avenue Bourguiba, j'ai par hasard, croisé une amie. J'en ai profité pour rentrer chez elle et contacter Inna, porte-parole du Femen en France, en lui dévoilant tout ce qui s'est passé dans un entretien sur skype.
-Et maintenant, comptez-vous militer en Tunisie ou poursuivre votre militantisme à l'étranger loin des menaces de mort ?
J'aimerais tout d'abord reprendre les cours à l'école, mais en Tunisie, je ne peux pas poursuivre mes études car aucun lycée ne veut m'accepter. Mon objectif est faire mes études en France et retourner en Tunisie, car j'aime mon pays. Et je ne compte pas renoncer au militantisme pour la cause féminine dans mon pays, car je n'ai peur de personne et je n'ai pas peur de mourir.
-Est-ce que d'autres femmes en Tunisie se sont alliées à votre cause ?
Des personnalités tunisiennes défendent mes droits, bien qu'elles n'adhèrent pas à mes idées, mon mode d'action et trouvent mon militantisme trop radical. L'avocate des droits de l'homme, Chokra Belhaj Hmida, a défendu ma cause et mes droits depuis le début et on se voit régulièrement. Par ailleurs, de nombreuses jeunes filles m'envoient des éloges sur facebook, et même dans la rue, un grand nombre de Tunisiennes me font part de leur admiration et me disent qu'elles veulent s'allier à ma cause et devenir des Femens.
-Comment définissez-vous votre militantisme pour le mouvement Femen ?
Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il ne s'adresse pas uniquement aux chauvins ou aux conservateurs qui perçoivent la femme comme une poupée entre leurs mains ou un objet de soumission. Je m'adresse avant tout aux femmes en les incitant à acquérir une indépendance qui les libère de l'omnipotence et de la domination masculine, afin qu'elles puissent être maîtres de leurs actes, de leur destin et non se laisser dicter par les hommes un code vestimentaire ou une ligne de conduite.
-Quel message avez-vous voulu transmettre avec les slogans sur votre poitrine ?
J'ai voulu défendre l'idéologie des Femen contre les diktats de la religion qui vont à l'encontre des droits de la femme. Je suis contre l'islam qui asservit la femme et c'est pour cela que je me suis auto-déclarée athée il y a deux ans. Ma prise de conscience s'est en réalité opérée en Arabie Saoudite, où j'ai vécu de l'âge de 8 ans à 13 ans. J'ai vu de mes propres yeux la condition de la femme dans un pays arabe qui se dit islamique. Je n'ai pas voulu me fier au modèle saoudien. J'ai préféré lire le Coran et je me suis rendu compte que cet islam radical, tel qu'il est pratiqué dans des pays comme l'Afghanistan, l'Iran, le Pakistan ou encore les pays du Golfe, correspond à ce qui est écrit dans le Livre Saint. Je me suis donc dit que je ne pouvais adhérer à un islam qui asservit la femme et qui ne leur accorde pas le droit d'expression. La différence majeure entre le régime en place régi par les islamistes et la dictature de Ben Ali, c'est que les femmes étaient libres. Et si j'ai ressenti le besoin de publier ces photos, c'est aussi pour protester contre la volonté des salafistes de forcer la femme à porter le niqab.
-Comment avez-vous trouvé le courage d'entamer cette lutte en Tunisie ?
Je dois avouer que le film iranien The stoning of Soraya m'a ouvert les yeux. De nombreuses femmes m'inspirent dont Inna, du mouvement Femen. Mon rêve le plus ardent est de me battre pour les droits de la femme dans les pays arabes, parce que je veux faire évoluer les choses et permettre de véritables changements, bien que le contexte actuel ne soit pas propice pour un mode d'action aussi radical que le mien. Ma plus grande crainte est de voir ma Tunisie sombrer dans un islamisme comme celui de l'Afghanistan ou de l'Iran.
*Journaliste freelance et militante féministe tunisienne


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