Préparatifs du concours de recrutement au grade d'"éducateur d'animation de la jeunesse" au profit des wilayas du Sud    APN-PARLACEN: examen des moyens de renforcement de la coopération et de l'échange d'expertises    IATF 2025 en Algérie: Un leadership économique au service du développement du continent    Agression sioniste contre Ghaza: la famine peut encore être contrôlée par un cessez-le-feu    Agression sioniste: le PAM appelle à "une action urgente" face à la famine à Ghaza    Pluies orageuses et rafales de vent sur plusieurs wilayas du pays samedi après-midi    MAE britannique: Le blocage par l'entité sioniste de l'aide humanitaire à Ghaza est un scandale moral    Oran : clôture de la 14e édition du festival culturel national de la chanson Raï au théâtre en plein air "Hasni Chakroun"    Bientôt un groupe de travail entre Sonarem et MCC (China Metallurgical Group Corporation)    Vendre la division du travail et le séquençage stratégique    De la nourriture dans les entrepôts attend le feu vert de l'occupant sioniste    Des centaines de centres de santé et de nutrition fermés    Algérie A' : le sélectionneur national libère Akram Bouras    Championnats arabes d'athlétisme (U18) : 18 pays ont confirmé leur participation au rendez-vous de Tunis    CHAN-2024 : Soudan – Algérie Deux formations amies pour une finale    La grande station de Koudiet Eddraouch à El Tarf entre en production à pleine capacité    En fort déclin sur les 20 dernières années    Poursuite des recherches d'un porté disparu par noyade    Un parc de bus vétustes qui met les voyageurs à rude épreuve    Tout contrat doit évaluer les opportunités et les risques    Le ministre de la Culture et des Arts préside l'ouverture    « Le raï... entre mémoire, marginalité et modernité », thème d'une conférence à Oran    Célébration du double anniversaire du 20 août 1955-1956    Salon Africa Lounge à Yokohama: le stand algérien suscite l'intérêt des entreprises japonaises    Domestic Airlines: lancement du premier vol Alger-Tamanrasset lundi prochain    CHAN 2024: première séance d'entrainement de la sélection algérienne à Zanzibar    De nouvelles réformes législatives pour renforcer la culture et les arts en Algérie    Khenchela : la dépouille mortelle du moudjahid Belkacem Hagass inhumée au cimetière de la commune d'El Hamma    Haltérophilie/Championnat d'Afrique (cadets/juniors): l'Algérie termine sa participation avec 23 médailles dont six en or    Lancement de la 5ème édition des caravanes médicales à destination des Hauts Plateaux et du Grand Sud    Secousse tellurique de 3,0 degrés dans la wilaya de Tébessa    Foot/ CHAN-2024 (décalé à 2025): la sélection algérienne à pied d'oeuvre à Zanzibar    Khenchela: Ouverture de la 2ème édition du festival culturel de la chanson et de la musique chaouies    Le message du Général d'Armée Saïd Chanegriha    Merad rend visite à des familles de victimes à Biskra et Ouled Djellal et leur présente ses condoléances    Chute d'un bus dans l'Oued El Harrach Les dépouilles mortelles de 3 victimes inhumées au cimetière de Biskra    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Kippa oui, voile non
La chronique de Maurice Tarik Maschino
Publié dans El Watan le 28 - 11 - 2013

Dans les années cinquante, il n'était pas rare de côtoyer, dans les amphithéâtres de la Sorbonne, des bonnes sœurs coiffées d'une cornette : personne n'y trouvait rien à redire. Il était également fréquent de croiser dans les rues des prêtres vêtus d'une soutane noire, comme il arrivait d'être bloqué quelques instants, lors d'une fête religieuse, par une procession de chrétiens : personne n'y trouvait rien à redire. Mais il a suffi à Sirine de porter un bandeau frontal qui laissait apparaître les deux tiers de sa chevelure et une jupe longue pour que, sur décision du conseil de discipline, où siégeait une majorité d'enseignants de gauche, elle soit interdite de cours, puis renvoyée.
Cité en ouverture du très riche dossier, Islamophobie(1), que publient deux sociologues, Abellali Hajjat, professeur à l'université Paris-Ouest Nanterre, et Marwan Mohamed, chargé de recherche au CNRS, l'exemple de Sirine illustre parfaitement l'origine de l'islamophobie : loin d'être spontanée, l'hostilité à l'égard de Sirine est la manifestation d'une attitude socialement conditionnée, qui résulte de la construction politico-médiatique d'un «problème musulman». Il y a une trentaine d'années, les musulmans, comme tels, n'existaient pas. Existaient les immigrés, dont certains dirigeants, tel V. Giscard d'Estaing, redoutaient «l'invasion».
L'invasion ne s'est pas produite, mais les «élites» françaises, qui ne raisonnent plus depuis longtemps en termes de classes, ont découvert ou plutôt décidé, lors des grèves ouvrières de 1982-1983, que ces immigrés étaient musulmans. Protestant contre les licenciements massifs dont ils étaient victimes, les travailleurs maghrébins de Citroën-Aulnay et Talbot-Poissy revendiquaient, en effet, d'être traités comme leurs camarades français. Le patronat prétendit qu'ils étaient manipulés par des fondamentalistes venus du Moyen-Orient et insista lourdement sur leur appartenance religieuse.
Des ministres socialistes reprirent à leur compte ces accusations — le ministre de l'Intérieur dénonça «des grèves saintes, de musulmans, de chiites et la presse, en publiant jour après jour des photos de fidèles en prière, conforta l'interprétation religieuse des grèves. Un patronat qui stigmatise une révolte ouvrière en la taxant d'intégriste, des médias qui multiplient les articles agressifs sur l'Islam, un pouvoir politique qui fait des musulmans une catégorie dangereuse, à surveiller : c'est «une nouvelle vision du monde social qui se déploie, écrivent les auteurs, où l'appartenance religieuse est censée déterminer le comportement individuel et collectif… La construction du ‘‘problème musulman''»… s'explique avant tout par la convergence idéologique entre «élites patronales, politiques et médiatiques».
Une convergence qui, depuis plus de trente ans, ne cesse de s'affirmer. Convaincus qu'il y a une essence du musulman, les politiques se demandent dans quelle mesure ils peuvent être français, remettent en question le droit du sol (Commission sur la nationalité, Commission sur l'identité nationale) et chargent le HCI (Haut conseil à l'intégration) de veiller au respect de la laïcité. Un HCI qui, après avoir déclaré que la loi de 1905 garantissait l'expression religieuse des élèves dans les écoles, affirme aujourd'hui le contraire : entre-temps, son personnel a été renouvelé. L'étau ne cesse de se resserrer autour des (présumés) musulmans.
Interdit dans les écoles, le voile, qui n'est le plus souvent qu'un simple foulard, le sera peut-être à l'université. Il l'est déjà, pratiquement, dans toutes les entreprises, les commerces, les services publics, même les services privés ( !) — les nounous qui accueillent chez elles des enfants à la journée n'ont pas le droit de le porter — et les agressions dans la rue contre les femmes voilées ne sont que rarement et mollement sanctionnées. Dans cette sorte de fixation haineuse et névrotique sur les musulmans, les médias jouent un rôle décisif et rivalisent dans le discrédit de l'Islam : Le spectre islamique ; Islam : les vérités qui dérangent ; L'Occident face à l'Islam — autant de titres qui attirent les lecteurs, sans parler des articles et des «témoignages» sur les femmes mariées de force, battues, violées, jetées à la rue avec leurs enfants, qui permettent aux patrons de presse et d'édition de réaliser d'énormes profits.
L'islamophobie se développe d'autant plus librement que la plupart des «experts» médiatiques ont tout intérêt, pour accroître leur audience et mieux se vendre, à disqualifier l'Islam et les musulmans, et qu'en face, la contre-attaque est très rare et très molle : quel journal prendrait le risque de perdre des lecteurs en dénonçant le délire islamophobe de la société française ou les libertés que le pouvoir politique prend avec la laïcité ? Car il en prend, et révèle lui-même à quel point la laïcité est d'abord une machine de guerre contre les musulmans. Les bonnes sœurs qui interviennent dans les prisons le font toujours en habit de religieuses, et les départements d'Alsace-Moselle vivent encore sous les lois du Concordat, qui associent dans la gestion des écoles les églises chrétiennes et l'Etat. Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, qui s'indigne que des musulmanes portent le hijab, se réjouit que «les juifs de France, eux, «puissent porter avec fierté la kippa»(2).

1- La Découverte, 2013.
2- www.lepoint.fr, 24 septembre 2012.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.