Pour éviter des remous sociaux notamment dans le Sud, région sensible avec la situation de la région sahélienne, la question de l'exploitation du gaz de schiste doit être l'objet d'un débat reposant sur les arguments, pour ou contre, associant des experts de l'énergie et non des généralistes qui ne connaissent pas ce dossier complexe, et la société civile dont les associations chargées de la protection de l'environnement. Les premiers puits utilisant cette méthode ont été fracturés avec succès aux Etats-Unis. Nous avons la fracturation exothermique non hydraulique (ou fracturation sèche) qui injecte de l'hélium liquide, des oxydes de métaux et des pierres ponce dans le puits ; la fracturation à gaz pur peu nocive pour l'environnement est surtout utilisée dans des formations de roche qui sont sensibles à l'eau à maximum 1 500 m de profondeur ; la fracturation pneumatique qui injecte de l'air comprimé dans la roche-mère pour la désintégrer par ondes de choc, n'utilisant pas d'eau, remplacée par l'air mais utilisant certains produits chimiques en nombre restreint ; enfin la stimulation par arc électrique (ou la fracturation hydroélectrique) qui libère le gaz en provoquant des microfissures dans la roche par ondes acoustiques, utilisant selon les experts pas ou très peu d'eau, ni proppants ou produits chimiques, mais nécessitant beaucoup d'électricité. 3. Neuf précisions sur le gaz de schiste Premièrement, la fracturation nécessaire à l'exploitation du gaz de schiste est obtenue par l'injection d'eau à haute pression (environ 300 bars à 2 500/3 000 mètres) contenant des additifs afin de rendre plus efficace la fracturation, dont du sable de granulométrie adaptée, des biocides, des lubrifiants et des détergents afin d'augmenter la désorption du gaz. Deuxièmement, la rentabilité du gaz de schiste implique d'analyser les coûts variables selon les gisements incluant les coûts de transport (les Etats-Unis étant canalisés), de l'évolution des prix très volatils, de l'évolution du mix énergétique mondial dont la part des énergies substituables dont les énergies renouvelables, des pays concurrents, et pour le gaz, ne pouvant pas parler d'un marché de gaz comme celui du pétrole (marché segmenté géographiquement), les canalisations représentant en 2024 environ 65 % de la commercialisation mondiale, le GNL donnant plus d'autonomie dont le prix est supérieur de 2 à 3 dollars au GN, allant vers 50 % à l'horizon 2030. Troisièmement, il faut savoir d'abord que le gaz de schiste est concurrencé par d'autres énergies substituables et que les normes internationales donnent un coefficient de récupération moyen de 15/20 % et exceptionnellement 30 %, l'exploration pouvant mener à la découverte de milliers de gisements mais non rentables financièrement, les réserves se calculant selon le couple prix international des énergies et coût. Quatrièmement, il faut perforer des centaines de puits pour avoir 1 à 2 milliards de mètres cubes gazeux par an, plus de 1 000 puits pour dépasser plusieurs dizaines de milliards de mètres cubes gazeux, chaque puits ayant un volume de production spécifique. Cinquièmement, la durée de vie d'un puits ne dépasse pas cinq années, devant se déplacer vers d'autres sites, assistant à un perforage sur un espace déterminé comme un morceau de gruyère. Sixièmement, pour s'aligner sur le prix de cession actuel, devant tenir compte de la profondeur pour la technique traditionnelle de la fracturation hydraulique (le coût n'est pas le même pour 600 mètres ou 2 000/3 000 mètres supposant le bétonnage), le coût du forage du gaz non conventionnel d'un puits devrait être de moins de 5/7 millions de dollars pour être rentable, alors que selon les experts, pour l'Algérie dans la situation actuelle du fait du cout des canalisations donc fonction de la distance. Septièmement, l'exploitation de ce gaz implique de prendre en compte que cela nécessite une forte consommation d'eau douce, et en cas d'eau saumâtre, il faut des unités de dessalement extrêmement coûteuses, notamment les techniques de recyclage de l'eau. Huitièmement, il faut prévoir les effets nocifs sur l'environnement (émission de gaz à effet de serre), la fracturation des roches pouvant conduire à un déséquilibre spatial et écologique. Et en cas de non-maîtrise technologique, elle peut infecter les nappes phréatiques au Sud, l'eau devenant impropre à la consommation avec des risques de maladies comme le cancer. Neuvièmement, toute compagnie étrangère pour investir dans le gaz de schiste nécessitant de lourds investissements, dans les sites d'exploration et les canalisations vers les sites d'exploitation, exigent la stabilité sociale et poseront forcément l'assouplissement de la règle des 49/51 % contenue dans la loi des hydrocarbures. Quelle conclusion ? Si l'Algérie veut aller vers l'exploration du gaz de schiste, elle doit s'appuyer sur un co-partenariat incluant des clauses restrictives avec des pénalités en cas de non-respect de protection de l'environnement et la formation des Algériens. Pour éviter des remous sociaux notamment dans le Sud, région sensible avec la situation de la région sahélienne, la question de l'exploitation du gaz de schiste doit être l'objet d'un débat reposant sur les arguments, pour ou contre, associant des experts de l'énergie et non des généralistes qui ne connaissent pas ce dossier complexe, et la société civile dont les associations chargées de la protection de l'environnement. En dernier lieu, étant une question de sécurité nationale, seul le Conseil national de l'Energie sous la haute autorité du président de la République composé des plus hautes autorités du pays, est habilité à trancher sur ce dossier sensible. Abderrahmane Mebtoul Pr des universités Expert international