Tous les établissements dépendant du ministère de la Culture sont tenus de présenter un plan de travail avant de recevoir les subventions. Nous sommes stricts sur la gestion financière. Une démarche de suivi et de contrôle se fera en partenariat avec un bureau d'études public», a déclaré, lundi à Alger, Azeddine Mihoubi, ministre de la Culture, lors d'une conférence de presse pour établir le bilan de 2016. Il a annoncé une réduction du budget de 20 à 50% des activités culturelles durant 2017. En ce sens, le calendrier des festivals sera aménagé, alors que les responsables de ces manifestations sont appelés à chercher d'autres sources de financement, à travers les partenariats et les sponsorings. «L'Etat ne peut pas tout produire. Et nous n'avons empêché aucune association ou compagnie d'assurer des activités culturelles. Tout le monde doit se débrouiller pour trouver de l'argent», a-t-il appuyé. Citant le cas du Théâtre régional de Béjaïa (TRB), il a critiqué la gestion des théâtres qui dépendent de l'Etat et la politique de recrutement sans prendre en compte les limites budgétaires. «Les théâtres régionaux doivent se débarrasser de la mentalité de l'administration et de l'idée que les comédiens sont des fonctionnaires. Ils doivent revoir leur système de fonctionnement. On doit réfléchir selon la logique économique. Ces théâtres sont dans l'obligation d'avoir des entrées. En ce sens, nous préparons une feuille de route qui sera rendue publique dans une semaine. Nous allons préciser ce qui est demandé aux théâtres régionaux. Le statut de ces théâtres sera révisé», a-t-il annoncé. Ces derniers mois, l'Etat a réduit considérablement le budget de fonctionnement des théâtres. Le théâtre Abdelmalek Bouguermouh de Béjaïa (TRB), qui a perdu 50% de son budget, a été obligé de mettre fin aux contrats à durée déterminée (CDD) de 25 employés. La mesure a suscité la colère des travailleurs et des artistes du TRB qui ont organisé des sit-in de protestation aux cris de «Non à la mise à mort de notre théâtre». L'Office national des droits d'auteurs et droits voisins (ONDA) a dégagé 10 millions de dinars pour assurer le paiement des salaires. «Il y a 60 employés au théâtre de Béjaïa, alors que le théâtre de Mostaganem fonctionne avec douze salariés. Comment a-t-on recruté autant de personnes pour se trouver après dans l'incapacité de leur assurer un salaire ? Je suis solidaire avec le théâtre qui trouve lui-même des solutions à ses problèmes. Les comédiens ont des cartes d'artiste qui leur donnent beaucoup de privilèges, mais ils préfèrent être des fonctionnaires administratifs qui terminent leur travail à 17h et attendent le salaire à la fin du mois. Cette logique ne mène nulle part», a soutenu Azeddine Mihoubi. Les théâtres régionaux doivent, selon lui, trouver des sponsors pour la promotion de leurs travaux. «Il y a des pièces pour lesquelles dix à douze millions de dinars ont été dépensés, et qui n'ont été présentées qu'une ou deux fois. Cela ne se passe nulle part ailleurs. Certains ne sont même pas capables d'assurer la promotion de leurs travaux. Des travaux qui, parfois, ne sont pas éligibles à être promus. Il faut sortir du système de complaisance. Le théâtre a besoin d'une réforme dans son mode de gestion», a-t-il appuyé, annonçant l'organisation d'un débat ouvert avec les gens du théâtre et avec la presse et la révision totale des textes régissant l'activité théâtrale dans le pays. Plaintes en justice «Nous avons engagé des poursuites judiciaires contre ceux qui n'ont pas réalisé des travaux cinématographiques après avoir reçu des subventions. Certains ont pris de l'argent et ont disparu, ça ne se passera plus comme cela ! Nous sommes prêts à abandonner les poursuites si les travaux sont réalisés, même après la fin des délais. Nous voulons être souples», a déclaré le ministre. Il a confirmé la réduction des dotations affectées au Fonds de développement de l'art, de la technique et de l'industrie cinématographiques (Fdatic). Selon lui, l'Office national de la culture et de l'information (ONCI) s'est doté de cinq appareils DCP (Digital Cinema Package). «Nous avons donné notre accord pour que l'ONCI achète dix autres appareils DCP. L'opération sera graduelle pour toutes les salles du pays. Il y a des salles qui sont déjà équipées en projection numérique, comme à Béjaïa, Kherrata et Mascara. La Cinémathèque d'Alger est un cas spécial. Nous allons tout faire pour doter cette salle en DCP», a-t-il dit, précisant que la Cinémathèque d'Alger sera mise sous tutelle du Centre national de cinéma et d'audiovisuel (CNCA). L'ONCI va au fur et à mesure équiper les salles en DCP, au prorata des moyens financiers. «Nous n'avons pas d'autre choix que de doter nos salles en DCP. Une technique utilisée dans tous les pays. Nous avons chargé l'ONCI à s'occuper des activités cinématographiques au niveau national, en créant un réseau spécial. Cette opération est en cours. Un choix sera fait des salles où les projections seront possibles. Il y a des salles qui ont besoin d'être réhabilitées. Pour l'instant, nous n'allons pas construire de nouvelles salles mais utiliser celles qui existent déjà. Nous souhaitons une participation des collectivités locales pour la rénovation des salles, nous avons, à chaque fois, demandé à ce que les salles qui dépendent des APC soient cédées au secteur de la culture. Nous ne pouvons pas, légalement, intervenir dans des salles qui ne sont pas mises sous notre tutelle», a-t-il précisé, évoquant le cas de la capitale. «Il existe plusieurs salles inexploitables à Alger, pour deux raisons. La première, des salles ne sont pas suffisamment équipées pour être exploitées. La deuxième, ces salles sont gérées par les APC. Malgré l'instruction du Premier ministre (de 2013) et la loi sur le cinéma, qui ont imposé la cession des salles au secteur de la culture, certaines wilayas n'ont rien fait pour appliquer ces textes sur le terrain. Nous souhaitons trouver une formule de partenariat avec les APC pour que les salles soient mises en exploitation. Où est donc l'intérêt de garder des salles fermées? L'exploitation peut être économiquement bénéfique pour les APC», a-t-il relevé. Selon lui, les opérateurs économiques, qui investissent dans les centres commerciaux, doivent penser à la construction de multiplexes de cinéma. «Jusqu'à maintenant, ils ne pensent qu'à des locaux de grandes marques mondiales et oublient les multiplex», a-t-il noté. Il a précisé que le ministère de la Culture n'a pas exprimé de réserves sur le multiplex du centre commercial de Bab Ezzouar (Alger). «Les réserves ont été signifiées par d'autres parties sur des normes de sécurité et de protection. A mon sens, le multiplex peut être seul, mais doit faire partie d'un espace culturel. Le futur multiplex d'Alger sera construit dans un endroit culturel et touristique. Son promoteur va bientôt faire l'annonce. A Biskra, des studios et des multiplex seront construits à l'intérieur de la future cité culturelle et touristique», a annoncé le ministre. Il a souhaité que les opérateurs privés algériens investissent dans la construction de studios. «Nous sommes prêts à les soutenir. Certains investisseurs sont venus nous imposer leurs conditions. Nous ne voulons pas d'eux. Nous voulons des projets dans plusieurs régions du pays, comme Laghouat, Bou Saâda, Sidi Bel Abbès, Annaba, Oran... Les facilités fiscales existent, surtout en dehors d'Alger. Il faut en profiter. Certains veulent construire des studios à côté de la Grande-Poste», a-t-il souligné.