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De l'abstentionnisme actif
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Publié dans El Watan le 24 - 06 - 2017

Les Algériens ont avant, et peut-être plus que tous les autres pays du monde arabe, voire musulman, pris le chemin des urnes. Ils l'ont fait bien avant l'indépendance. Ils l'ont fait femmes et hommes, affiliés au collège indigène ou citoyens à part entière.
C'est dire qu'en la matière, notre expérience est appréciable… Pourtant, depuis un certain temps, les joutes électorales, quelles qu'elles soient, ne nous emballent plus, tant le niveau d'indifférence de la population à leur égard, aussi bien lors des campagnes que par l'acte de voter lui-même est on ne peut plus patent.
En témoignent les taux d'abstention aux élections législatives, non pas ceux avancés par l'opposition, mais bien ceux annoncés par le Conseil constitutionnel, lesquels, depuis 2002, caracolent au-dessus de 50% pour culminer en 2017 à plus de 70% (votes blancs et bulletins nuls inclus), s'érigeant ainsi en une réelle tendance lourde dont il serait hasardeux de ne pas en prendre la mesure, ne serait-ce que sur le plan de la représentativité.
Cette abstention, qui consacre dans un certaine mesure une rupture entre un pays réel et un pays virtuel, n'est pas sans porter en son sein les germes d'une recomposition déjà entamée du paysage politique, que le pouvoir va devoir subir à défaut d'avoir pu, ou su, la susciter. Il est en effet dans l'histoire de toute nation de ces soubresauts qui résonnent comme des appels à une renaissance dans l'ordre, pour autant que l'intelligence politique s'en saisisse. De telles opportunités historiques, le Mouvement national a su les faire siennes pour inverser le cours de l'histoire dans le sens qu'il lui a imposé.
Pareille réaction ne saurait être assimilée à un caprice démocratique comme on en voit dans les pays occidentaux. En la matière, le parallèle relève d'une vision autant étriquée que partiale des choses, tant la notion de citoyenneté, de part et d'autre, est autrement appréhendée et les prismes de la pensée politique au niveau populaire sont différents.
Pour notre cas d'espèce, il s'agit bien d'un véritable mouvement qui ne devrait laisser, en toute logique, indifférent tout observateur de la scène politique nationale, a fortiori ceux qui président au destin de ce pays, tant est qu'il était notamment attendu des dernières élections d'être, à la faveur de la nouvelle Constitution, les joutes du renouveau démocratique. Force est de constater que ce ne fut pas le cas.
Pareille posture est en soi révélatrice, si ce n'est d'un mépris manifeste du peuple de la chose politique telle qu'elle lui est servie, de l'existence de contradictions majeures qui agitent la société et la «travaillent» en profondeur. Ceci ne saurait, de par sa nature, quel que soit le système électoral en place, ne pas interpeller au plus haut niveau les pouvoirs publics et la classe politique dans son ensemble. Cette interpellation prend une signification toute particulière dans un système électoral tel que le nôtre, où le rapport entre l'électeur et l'élu est direct, voire personnalisé, où la dimension morale prédomine plus que partout ailleurs.
Partant de ces considérations, on peut estimer que cette abstention, de par son ampleur, est davantage à appréhender comme une forme ostensible de désistement collectif réfléchi d'un droit citoyen fondamental, constitutionnellement consacré. Il suffit pour s'en convaincre d'accorder l'attention qu'il mérite au contenu des réseaux sociaux pendant la dernière campagne pour y percevoir les signes objectifs d'un abstentionnisme actif, voire militant, qui n'est pas sans dénoter une attitude collective consciente et concertée.
Sauf à être inconscient et faire preuve d'irresponsabilité manifeste, tant d'indices devraient, en toute logique, inviter à une réflexion profonde sur les tenants et les aboutissants d'un pareil comportement aussi manifestement négatif et potentiellement porteur de signes avant-coureurs qui ne prêtent en aucune manière à l'optimisme. En effet, pareille attitude ne saurait ne pas présager l'existence d'un malaise, si ce n'est, plus grave encore, d'une forme de désapprobation et de rejet populaires autant de la classe que de l'action politiques en tant que telles, dont il conviendrait de rechercher les causes, car il y a potentiellement péril en la demeure.
Et, si la raison ne peut pas rendre raison de tout, elle le fait objectivement lorsqu'il s'agit de répondre à des questionnements inhérents à des comportements sociaux de masse conscients et réfléchis, pour autant qu'on se donne la peine de faire l'effort de transcender le carcan hermétique dans lequel, souvent, nous enferment nos propres certitudes. Le fil d'Ariane dans pareils cas, c'est l'histoire qui nous le tend…
Le pouvoir politique, sûr de lui et fort de ses hypothèses, a opéré des choix pour engager ses réformes avec une opiniâtreté et un caractère d'évidence, tant à leur bien-fondé qu'au processus devant aboutir à leur application qui n'admettaient aucune mise en cause. C'est ainsi que l'homologation de nouveaux partis politiques, présentée par ses initiateurs comme un gage de bonne foi du pouvoir et une réponse à des revendications prétendument citoyennes, est, sur le terrain de la réalité, appréhendée par une population dubitative, parce que fortement désabusée, et par une opinion par trop vindicative, parce que produit de son histoire, comme une forme de légalisation administrative d'associations sans ancrage tangible dans la société, perçues beaucoup plus comme des greffons à la société que comme de véritables relais politiques potentiellement capables de contribuer à l'émergence d'une réelle citoyenneté.
Une attitude similaire est à attendre à l'égard de tous les textes consubstantiels à la nouvelle Constitution. Pourtant, le pouvoir n'est pas sans savoir qu'aussi bien la consécration que la crédibilité de toute démarche politique, a fortiori réformatrice et se voulant démocratique, sont intimement liées à la nature même du processus de décision, dont les élections constituent l'un des principaux maillons, si ce n'est le principal.
Et, c'est par rapport à ces manquements anodins, d'apparence, que la défiance s'installe, car, en dernière instance, les peuples jugent davantage sur les actes que sur les intentions, les promesses et les professions de bonne foi des gouvernants et de leurs affidés. C'est parce qu'une réforme politique de cette envergure n'est potentiellement pas sans engendrer des conséquences substantielles sur le fonctionnement institutionnel et susciter des réactions et des comportements allant de l'adhésion totale à l'opposition frontale avec tout le spectre de positionnements intermédiaires, que ses initiateurs, au stade même de son élaboration, doivent veiller à sa cohérence d'ensemble.
Car, en règle générale, plus elle est cohérente, moins d'incongruités elle renferme et, partant, moins de réactions de rejet elle crée et, inversement. Il est ici d'une règle de droit constitutionnel se dégageant de l'action politique, étant entendu que tout système politique est sous-tendu par d'authentiques règles de droit dont la Loi fondamentale a vocation à en être la meilleure des expressions.
Par ailleurs, dès lors que toute démarche politique se nourrit des intentions de ses initiateurs, l'indifférence affichée par la population à l'égard de ces élections qui est, le moins qu'on puisse dire, l'expression manifeste de sa défiance par rapport au pouvoir politique — ou à ce qui en fait office — est à appréhender comme étant leur propre échec. Il serait, à mon avis, inhérent, entre autres, au modus operandi que ce pouvoir a choisi pour « réformer » le système et impulser une nouvelle dynamique à la société.
Aux lieu et place d'un débat politique réel, global et inclusif, il a opté, en termes d'ingénierie politico-institutionnelle, pour un débat fractionné dans le choix des interlocuteurs et segmenté dans la thématique. A l'évidence, ceci ne pouvait susciter, au minimum, que circonspection et défiance par rapport à ce qui en était attendu : s'agissait-il de la survie du régime en tant que tel ou du devenir de la nation et des perspectives de son évolution à court, moyen et long termes ? La réponse à l'abstentionnisme est à rechercher dans ce sillage, tant le gap communicationnel et générationnel entre les deux pôles que sont le consultant et le consulté est important.
Comment pouvait-il, en effet, en être autrement face à une génération abreuvée au discours dénonciateur, legs d'octobre 1988, et à une population marquée au fer rouge par les stigmates des années de violence que lui a imposés, sans la convaincre, encore moins la soumettre, l'islamisme radical ? Il aurait fallu en faire, en toute intelligence politique, un partenaire car, lorsque telle est la nature des rapports, la confiance prime sur tout le reste.
A contrario, on persiste à voir en ces strates générationnelles, pourtant démographiquement majoritaires, des mineurs immatures, et à se considérer investi, à leur égard, par l'histoire, du mandat de tuteur éternel. C'est de ces postulats, aux contours paternalistes, que le discours débité tire son essence et, à ce titre, il n'est pas sans porter en son sein les éléments objectifs de son rejet par une population qui lui est désormais, tout simplement, insensible.
Il ne peut en être autrement, tant les slogans scandés sonnent faux, notamment aux oreilles d'une jeunesse dont le pouvoir ne se rend pas compte qu'elle lui tourne le dos, arc-boutée qu'elle est sur elle-même, davantage préoccupée par ses propres problèmes et, surtout, totalement investie dans le développement de son propre langage, de ses propres codes et de ses propres réseaux de communication qui n'ont de virtuel que l'appréhension de ceux qui n'arrivent pas à en saisir ni le sens ni la portée, encore moins le potentiel autant mobilisateur que dévastateur qui est le leur.
On aurait eu raison d'ignorer cette jeunesse et laisser le fossé entre elle et les gouvernants s'élargir si elle ne représentait pas la majorité écrasante de ce peuple. Aussi, serait-il dangereux de la laisser livrée à elle-même, suivant sa propre trajectoire, car il y va de notre devenir à tous. S'il fallait chercher les preuves de cette posture de dos-à-dos qui est celle du pouvoir d'un côté et de la jeunesse de l'autre, l'analyse du contenu de ce que ces réseaux sociaux offrent est on ne peut plus édifiante.
Et, s'il en fallait une autre, les résultats des dernières élections illustrent on ne peut mieux cette figure de trajectoires de deux mondes parallèles qui, bien que partageant le même espace, ne sont pas sans progresser dans deux sens opposés, s'ignorant l'un l'autre, où chacun bat la mesure qui ne fait avancer que les cohortes qu'elle «emballe».
Le clivage n'est plus entre les «nationalistes» et les «autres», comme semble le laisser transparaître le discours des partis se prévalant de la majorité, mais entre tous les «encartés», tous partis confondus, et la véritable majorité, celle des abstentionnistes, que les chiffres officiels annoncés par le Conseil constitutionnel créditent d'être représentative de pas moins de sept citoyens sur dix !
Sauf à être autiste, car sourd on répond à la gestuelle, il y a matière à voir en cela, non seulement l'expression d'une véritable déchirure dans le corps social, mais, surtout, les prodromes d'un réel désir de changement — plutôt de rupture — revêtant les allures d'une revendication pour une véritable refondation républicaine. Que les mots ne nous fassent pas peur ! Il s'agit tout simplement d'adapter la politique pour la mettre en phase avec son temps et la rendre plus attrayante pour cette majorité, pour un temps, encore silencieuse.
Somme toute, le changement et l'adaptation, dès lors qu'ils répondent à une demande populaire, fût-elle de la minorité, sont les règles fondamentales de toute gouvernance se prévalant d'essence démocratique. Cette aspiration, indéniablement légitime d'un peuple qui continue à voir, plus d'un demi-siècle après le recouvrement de son indépendance, son sang encore couler, ne saurait être, en aucune manière, appréhendée, sauf à être adepte du statu quo et de la stagnation mortifère, autrement que comme un signe révélateur de la vitalité de son corps social.
Et, c'est parce qu'en démocratie, l'indifférence est péché et son entretien est porteur de périls, qu'elle dispose, en tant que système, d'outils à même d'assurer à tout un chacun le sentiment de son existence en tant que citoyen en lui offrant les voies et les moyens pour faire part de son point de vue sur les problèmes inhérents à la gestion de la Cité. Parmi ces outils, les élections font figure de matrice principale de par leur régularité temporelle et le consensus qui les entoure quant à leur fiabilité pour garantir les transitions politiques pacifiques, pour autant que les règles d'éthique et de transparence et la loi, censées les régir, soient respectées.
A défaut, ce que confirme le corps entier de l'histoire, elles n'ont de cesse de se pervertir en alibi pour perpétuer des situations de rente politique dont, souvent, seul le pouvoir en place use et abuse, jusqu'à s'isoler irrémédiablement du peuple, avec toutes les conséquences qui peuvent découler d'une telle situation, pouvant aller jusqu'à l'effacement de l'Etat. Montesquieu avait, en son temps, déjà averti que «lorsque dans un gouvernement populaire les lois ont cessé d'être exécutées, comme cela ne peut venir que de la corruption de la république, l'Etat est déjà perdu».
En démocratie, quel que soit le système électoral en place, il doit répondre en premier à ce qu'il en est politiquement attendu par le pouvoir constitué qu'incarne le peuple… Il était attendu de ces élections de nous aider à nous entendre entre nous Algériens, à abattre le mur de la méfiance entre gouvernants et gouvernés, à rétablir la confiance entre les générations pour une meilleure synergie des actions et une transition politique en douceur, à contribuer à nous sortir de l'impasse économique, sociale et surtout politique, aux allures crisogènes, dans laquelle nous nous trouvions.
Force est toutefois de constater qu'en l'état actuel des choses, de tout cela il n'en est rien. Bien au contraire, elles nous engouffrent dans une autre impasse aux dimensions historiques. Pessimiste, me diriez-vous ? Je ne demande qu'à être démenti par cette même histoire, pour le bien-être de mon pays.


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