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Qui serons-nous demain ?
Diversité culturelle. Un enjeu planétaire
Publié dans El Watan le 22 - 02 - 2007

L'uniformisation culturelle mondiale est déjà là. Face à ce phénomène planétaire, porté par la mondialisation, la Convention de l'Unesco sur la diversité culturelle est sur le point d'être mise en œuvre. Indispensable, généreuse, sera-t-elle un autre vœu pieux de l'humanité ?
De Jules Verne à Philip K. Dick, les auteurs de science-fiction se sont souvent avérés d'étonnants visionnaires, dépassant par l'imagination la science des futurologues. Plusieurs de leurs descriptions romanesques ont trouvé ultérieurement des applications plus ou moins fidèles. Et dans le monde qu'ils décrivent, chacun à sa manière, on est souvent frappé par le monolithisme des sociétés futures, l'industrialisation des modes de vie, voire des individus, la normalisation de l'existence et la perte de toute diversité. Sans même parler des sombres perspectives d'utilisation du clonage, le déficit de diversité s'accompagne presque toujours d'une absence de liberté. C'est « 1984 » de Georges Orwell où Big Brother contrôle la vie mais aussi les pensées de chacun. Ecrit en 1948, le roman peut se « voir » aujourd'hui à travers plusieurs phénomènes : les systèmes d'écoute des grandes puissances, la Toile Internet, le stockage massif d'informations personnelles dans des banques de données, etc. Au plan économique, la concentration est entrée dans une telle phase d'accélération qu'elle dessine un monde déjà présent, dominé par une poignée de multinationales dont beaucoup ne sont pas loin du monopole mondial, alors même que le système libéral se prévaut de la libre initiative et de la concurrence. Cette mondialisation n'est pas seulement économique. Les produits distribués à l'échelle internationale, identiques à Valparaiso, Sétif ou Bangkok, génèrent des modèles de consommation, des façons de vivre même, par leurs usages, mais aussi par les campagnes planétaires de publicité, de plus en plus énormes en moyens et impacts, avec une tendance marquée à la disparition de l'adaptation locale des messages. Peu importe que ce soit une blonde blafarde qui vante un shampooing en Afrique équatoriale ou dans la péninsule indienne. On ne se soucie plus de savoir si les consommateurs locaux s'identifieront ou non à cette icône. On sait qu'à travers la concentration mondiale des réseaux de communication (TV satellites notamment), ils n'ont pas d'autre choix et que de toute manière, par une acculturation déjà amorcée à l'ère coloniale, ils finiront par se projeter sur un impossible fantasme. Et, disent certains publicistes, n'est-ce pas le propre d'un fantasme que d'être inaccessible, la seule possibilité essentielle étant l'achat du produit. Les publicités donc véhiculent, suggèrent, impriment des images dans des milliards de cerveaux « disponibles », pour reprendre l'expression du patron de la chaîne française TF1, et, avec ces images, des valeurs comportementales et culturelles. Parallèlement, le même phénomène de concentration se réalise au plan de la production, de la diffusion et de la consommation culturelle et artistique. Derrière chaque discipline artistique, des industries culturelles puissantes veillent à ce qu'une poignée d'œuvres seulement connaissent une destinée mondiale. Deux ou trois films, quatre ou cinq livres, six ou sept albums de musique, etc. ans ce tableau, volontairement sommaire pour décrire une tendance, les cultures nationales ou locales tentent, ça et là, de résister et y parviennent parfois. On peut citer à titre d'exemple le livre d'Anouar Al Aswany, L'Immeuble Yacoubian, et le film qui en a été tiré, qui se sont imposés en Egypte et dans le monde arabe, avec de belles percées en Europe. De même, le film Marock de la réalisatrice Leïla Marrakchi qui a supplanté Da Vinci Code dans les salles marocaines. Il y a aussi bien sûr le cinéma indien qui, avec environ 700 films par an et près de vingt millions de personnes vivant de son industrie, reste une exception. Sinon, la règle, du moins pour les pays du Sud, ressemble plus à celle de l'Algérie où la sortie de 22 longs métrages pour Alger, capitale de la culture arabe nous paraît comme une performance et une aubaine, le drame étant qu'elle l'est effectivement.
La planète se refroidit
Le mouvement de concentration touche même des pays aux traditions culturelles établies. En France, par exemple, un seul groupe, Lagardère, contrôle 60 % de la production du livre et 70 % de sa distribution. Enfin, un rapport du PNUD a établi que quatre cinquièmes des flux culturels mondiaux proviennent de 13 pays seulement ! En somme, si nous ne sommes pas encore en train de vivre les prédictions de Georges Orwell, nous n'en sommes pas loin. De plus, il faut considérer le phénomène du point de vue des générations, ce qui n'a pas encore été mis en évidence par des enquêtes internationales. La structure démographique mondiale est parfaitement lisible : l'humanité est avant tout au Sud et très jeune. Et dans les nouvelles générations des continents concernés, les modèles mondialisés se sont profondément ancrés, touchant aux produits culturels consommés mais aussi aux comportements, langages, modes vestimentaires et même alimentaires. Les Mac Mokhtar ou Mac Omar qui ont fleuri à Alger puis dans toutes les villes du pays en sont une illustration, sans doute amusante, mais porteuse de graves questions sur le devenir de la culture algérienne, art culinaire compris. Dans cinquante ans, sans faire de science-fiction ni de catastrophisme, que restera-t-il dans nos quartiers et villages des expressions culturelles nationales quand celles-ci sont déjà fortement compromises et certaines plus que d'autres, telles que la littérature ou la peinture, les musiques seules continuant à disposer encore d'une vitalité et d'une présence plus populaires mais tout aussi relatives ? Ces interrogations qui touchent l'ensemble de la planète, des scientifiques et des intellectuels ont commencé à les soulever au moins à partir des années 1960. Les anthropologues, chargés d'étudier les peuples dits primitifs, ont été les premiers. Depuis, l'Amazonie, la Papouasie et autres lieux réputés inviolés de la planète ont connu le rouleau compresseur d'une « civilisation » mondiale qui semble ne pas envisager de progrès possible hors de la modélisation de l'humanité à l'image des produits manufacturés. Et aujourd'hui, plus personne n'est épargné. Il est remarquable que les experts en sciences humaines n'aient commencé à être entendus que lorsque les dégâts ont atteint une phase critique, un peu comme les météorologistes et sismologues aujourd'hui qui ont gagné le droit d'être considérés qu'après deux cyclones ravageurs, un tsunami et tant de catastrophes. Si au plan des climats, la planète se réchauffe, on peut dire qu'au plan culturel, elle s'est refroidie, comme si les degrés ajoutés aux thermomètres étaient inversement proportionnels aux pertes en exubérance créative, foisonnement des expressions et richesse culturelle de l'humanité. La disparition des langues en est la meilleure illustration (voir encadré). La problématique a fini par apparaître au grand jour, suscitant un mouvement d'idées qui a conduit à l'adoption, le 2 novembre 2001, par l'Unesco de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle. Dans un texte de référence issu du document Bilan et Stratégies (1946-2004), l'instance a reconnu ses erreurs d'appréciation : « Le changement majeur (…) est celui qui résulte de l'accélération du processus de mondialisation, non prévue lors de la dernière stratégie à moyen terme, (…) qui a entraîné un bouleversement, non seulement dans l'ordre économique et technologique, mais aussi les mentalités et la façon de concevoir le monde. » La Déclaration s'appuie ainsi sur une réévaluation à la hausse des « risques d'homogénéisation et de repli identitaire » et s'engage en faveur d'une « féconde diversité des cultures ». Le 20 octobre 2005, à Paris, la Déclaration, transformée en Convention, a été approuvée par 148 pays, avec quatre abstentions et deux oppositions : celles des Etats-Unis et d'Israël. Selon les termes mêmes de la Convention, celle-ci entrera en vigueur trois mois après le dépôt du 30e instrument de ratification. L'évènement est prévu le 18 mars prochain au siège de l'Unesco puisque 35 ratifications étaient déjà prêtes en décembre dernier, notamment après l'adhésion collective de la Communauté européenne. Depuis le début, les USA se sont fermement opposés à la Déclaration comme à la Convention. Ils n'ont pas lésiné sur les moyens de pression, allant jusqu'à brandir la menace de revenir sur leur décision de retourner à l'Unesco après 19 ans d'absence. La question vaut près de 135 millions de dollars, soit la contribution américaine au budget de l'organisme onusien (22 %) ! Pour l'instant, ils se sont contentés d'exercer leur formidable lobbying mondial et d'arguer sur la qualité et la précision du texte. A l'origine de leur position : les enjeux commerciaux. Louise Oliver, ambassadeur auprès de l'Unesco, l'a exprimé clairement, reprochant aux adeptes de la diversité de se cacher derrière ce concept à des fins pécuniaires : « Il s'agit d'une politique commerciale élaborée par des ministres de la Culture. » Les USA craignent en effet que des pays puissent se servir de la Convention pour établir des barrières commerciales contre les exportations américaines de produits culturels. Une prolongation du bras de fer autour de la notion d'exception culturelle qui avait tourné essentiellement autour du cinéma et que les pro-diversité auraient voulu dépasser car exception suppose règle. Le match se jouait jusque- là au sein de l'OMC où par exemple, l'Europe, France en tête, a bataillé pour exclure l'audiovisuel du libre-échange en l'inscrivant sur une liste d'exemption du traitement national.
Rien n'est gagné
L'exception culturelle a sauvé jusque-là le cinéma européen en permettant l'octroi de soutiens conséquents qui, en dix ans, ont entraîné une augmentation de 26 % de la production de longs métrages (pour la France, 73 %), tandis que le cinéma américain a diminué de 5 %. Mais ce qui agace aussi les USA, c'est que les taxes prélevées sur les productions étrangères, et donc américaines d'abord, servent à financer à 75 % les films européens ! Aujourd'hui, les USA souhaitent à la fois vider de sa substance la Convention sur la diversité culturelle et ramener le débat sur le terrain des institutions commerciales c'est-à-dire à l'OMC ou sur le plan des relations bilatérales ou de petits pays ne font pas le poids devant la superpuissance. Partout, la diplomatie américaine et la Motion Picture Association of America, regroupant les grands studios, agissent sans relâche pour renverser la dynamique encore théorique de la Convention. Un travail de proximité avec des arguments de poids comme la mise en place au Vietnam d'un réseau de salles. Rien n'est gagné donc. Tout n'est pas clair non plus. Des analystes signalent que la gigantesque vague d'uniformisation culturelle que vit le monde n'a pas été inventée par les USA, même s'ils en sont les principaux bénéficiaires et entendent le rester, mais qu'elle relève de la dynamique de l'histoire aujourd'hui mondialisée. D'autres soulignent que l'hégémonie américaine est en lutte contre des sous-hégémonies régionales et que la diversité culturelle ne concernera que les puissants. La plupart enfin se demandent comment donner corps à des recommandations qui, toutes, s'inspirent d'une vision généreuse de la culture dans le monde mais apparaissent, pour beaucoup, limitées à l'énonciation de principes, hormis peut-être celle sur la création d'un Fonds international pour la diversité culturelle. Autre question de fond : comment assurer la diversité à l'échelle mondiale si celle-ci n'est pas assurée dans les cadres régionaux et nationaux ? Enfin, l'espoir enthousiaste que suscite la Convention ne risque-t-il pas de buter sur la puissance astronomique de l'économie, entraînée dans la folle spirale de la mondialisation qui semble échapper même à ses tenants. Ce serait l'histoire du pot de terre, orné de signes ancestraux, contre le fer des coffres-forts, sans autre symbole que leur dureté. Mais, toutes les grandes actions ont eu besoin d'abord d'une idée. Pour l'instant, la diversité culturelle est déjà une belle et grande idée.


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