Al'instar du handball, le karaté-do est une autre discipline qui tend à disparaître à Souk Ahras. Rongée par l'immobilisme et les luttes claniques, cette discipline qui drainait des centaines d'amateurs, peine à maintenir quelques dizaines d'athlètes qui s'entraînent depuis des années sous la bannière ESSA, sans objectifs précis ni perspectives d'avancement lors des passages de grade ou des compétitions. Les kimonos ne sont « exhumés » qu'en de ponctuels tournois de petite envergure, ou manifestations officielles. Pour B. Chawki, karatéka première dan et ancien compétiteur, « cet arrêt forcé est dicté par les préalables partisans et idéologiques, qui ont pris naissance dans les années 1990. Plusieurs athlètes évoluent actuellement dans des wilayas limitrophes, et ont déjà atteint le statut d'élite. L'asphyxie du karaté-do à Souk Ahras, est le résultat d'un tiraillement entre deux groupes rivaux, représentant chacun une tendance au sein d'une même section ». Lors de notre dernier passage au complexe omnisports Badji Mokhtar, une vingtaine d'élèves de la catégorie des minimes attendaient l'arrivée de l'entraîneur, et un parent nous lance tout de go : « C'est pour empêcher mon enfant de jouer dans la rue que je l'accompagne régulièrement à la salle, bien que les entraînements soient franchement sans perspective ». Les athlètes stagnent à cause du blocage de la section en ceinture bleue, les catégories juniors et séniors sont inexistantes, et aucun championnat n'a été organisé depuis des lustres. L'entraîneur Temimi Azzedine met le doigt sur la plaie : « Un karatéka ne peut évoluer que dans un climat de compétition, d'encouragement et d'émulation. Ceci ne peut se réaliser qu'avec la cohésion au sein du staff dirigeant, et l'entente avec les structures wilayales de cette discipline ». Que peut faire une telle déclaration devant un mur d'incompréhension, et l'absence d'une volonté de débarrasser la discipline de la politique qui lui colle depuis l'émergence de la nébuleuse intégriste.
