Mobilisés depuis des semaines, les partis d'opposition au Zimbabwe sont déterminés à investir la rue pour faire entendre leur voix, défiant le régime du président Robert Mugabe, et ce, en dépit d'une interdiction de manifester imposée par la police dans la capitale. Au moins dix-huit partis d'opposition, et plusieurs mouvements issus de la société civile revendiquant une réforme électorale (Nera) ont appelé à défiler dans la plupart des villes du pays, dont Harare. Un décret, publié vendredi dernier dans le quotidien d'Etat, The Herald, et signé par le grand patron de la police zimbabwéenne, Newbert Saunyama, a prohibé tout rassemblement à Harare du 16 septembre au 15 octobre. Cette décision vise, selon ses concepteurs, à « empêcher tout désordre public ». Cette interdiction n'a nullement affecté la détermination de l'opposition. Elle a maintenu son appel à manifester et annoncé avoir saisi la justice pour en obtenir l'annulation. La semaine dernière, la justice avait déjà annulé une précédente mesure qui prohibait tout rassemblement à Harare. « La Constitution et la Haute Cour garantissent la liberté de manifester pacifiquement a affirmé Promise Mkwananzi, un porte-parole du mouvement îTajamuka (Nous sommes agités) à la pointe de la fronde des dernières semaines ». « La police ne fait que promouvoir l'illégalité dans le pays en interdisant des manifestations pacifiques », a-t-il estimé. Le pays est, depuis plusieurs semaines, agité par une révolte populaire contre le régime du président Mugabe, qui a une nouvelle fois mis en garde les manifestants. « Que les partis d'opposition et tous ceux qui font le choix du chaos, du désordre et des manifestations violentes soient prévenus que notre patience a des limites », a-t-il menacé la semaine dernière. L'opposition réclame notamment des réformes en vue des élections générales de 2018. En dépit de son âge, 92 ans, Robert Mugabe compte se représenter à la présidentielle. La crise économique que traverse le pays depuis de nombreuses années, aggravée par un chômage de masse, n'a pas manqué d'exacerber la tension. Les dirigeants du pays éprouvent des difficultés à payer régulièrement les fonctionnaires suite au manque flagrant de liquidités. Pour pallier cette défaillance, le gouvernement a décidé jeudi dernier de lancer des « billets d'obligation », une monnaie locale qui doit se substituer au dollar américain dont le pays manque cruellement. Ce recours fait craindre le pire, suscitant l'inquiétude de la population et des milieux financiers qui s'attendent à une hyperinflation à l'exemple de celle qui réduit à néant le pays dans les années 2000.