Aminatou Haidar, la militante sahraouie des droits de l'homme, qui observe une grève de la faim, sur l'île de Lanzarote, aux Canaries depuis le 16 novembre dernier, n'est pas rentrée chez elle, à Laâyoune occupée, vendredi soir. Au risque d'une crise diplomatique avec l'Espagne, le Maroc, la puissance occupante du Sahara Occidental, a fait volte-face. Il a stoppé à la dernière minute le plan de vol de son avion qu'il avait autorisé dans un premier temps. «Nous avions les permis pour voler comme pour atterrir à Laâyoune», explique Augustin Santos, le chef de cabinet du ministre espagnol des Affaires étrangères Miguel Angel Moratinos. Comme pour atténuer la crise avec Rabat, il laisse entendre qu'un plan de vol n'a pas été déposé dans les délais. Ce prétexte a volé en éclats hier. « Nous avons demandé une nouvelle autorisation, en bonne et due forme, et elle a été refusée», déclare Mme Délia Blanco, une députée socialiste espagnole à la chaîne d'informations en continue espagnole CNN+. Selon plusieurs analystes, cette rebuffade malgré les insistances espagnoles a semé les germes d'une tension entre Rabat et Madrid comparable à celle suscitée par le voyage du roi d'Espagne Juan Carlos à Melilla, en 2007, voire à la crise de juillet 2002 quand des militaires espagnols ont délogé des soldats marocains déployés sur l'îlot de Perejil. La presse madrilène parle de mépris. El Mundo exige «une ferme réponse diplomatique» à cette «gifle». Plus d'une centaine de personnes, dont de nombreux artistes de renom et d'hommes politiques espagnols ont manifesté samedi à l'aéroport de Madrid Barajas pour demander au gouvernement de faire pression sur le Maroc afin que la militante sahraouie, puisse retourner à laâyoune occupée, d'où elle a été expulsée le 14 novembre « le plus tôt possible, car son état de santé se dégrade de plus en plus ». Certains ont même demandé l'intervention du roi Juan Carlos pour mettre fin à cette situation qui «échappe à la diplomatie espagnole». Mis dans l'embarras à quelques jours du retour dans la région de Christopher Ross, l'envoyé personnel du secrétaire général de l'Onu, pour relancer les négociations directes, le Maroc crie à la manipulation. Sans aller jusqu'à renier l'existence de Mme Haidar, son ministère des Affaires étrangères qui semble étonné de l'aura de la militante sahraouie et du soutien à la cause qu'elle défend, se recroqueville sur lui-même. «Aminetou Haidar a renié son identité et sa nationalité, et après toutes ses provocations depuis le 13 novembre à l'aéroport de Laâyoune, elle doit assumer, seule, les conséquences juridiques et morales qui résultent de ce comportement» déclare Taïeb Fassi Fihri à la Chambre des représentants. Le crime de la militante sahraouie ? Avoir dit : «Comme mère, je pense toujours à mes enfants, mais je préfère que mes enfants vivent sans mère mais avec dignité». Avoir refusé le fait colonial marocain? Comme Rabat n'a de réponse à apporter ni à la grève de la faim d'Aminatou qui a ébranlé Ban Ki-moon, le Secrétaire général des Nations unies, ni aux pressions internationales, elle ressort ….l'Algérie. Elle demande à ceux qui veulent sauver la Gandhi sahraouie de faire pression sur l'Algérie et le Polisario. Peine perdue. Une délégation du Comité national algérien de soutien au peuple sahraoui s'est rendue à Lanzarote pour exprimer le soutien et la solidarité de la société civile algérienne au « symbole de la lutte pour les droits de l'homme et du combat pour la dignité et la liberté » et « dénoncer une énième violation des droits de l'homme par le Maroc dans les territoires sahraouis occupés ». M. Mohamed Abdelaziz, le Secrétaire général du Front Polisario, qui a reçu des communiqués d'indignation et de dénonciation des différentes organisations internationales, a enregistré hier la réaction de Jean Ping, le président de la Commission de l'Union africaine. Il a exprimé la préoccupation de l'union africaine quant à la situation des droits de l'Homme dans les territoires sahraouis occupés et exhorté le régime marocain à permettre à la militante sahraouie Aminatou Haidar de retourner dans son pays ».
