Un déferlement de haine s'était propagé sur les réseaux sociaux contre la minorité des Rohingyas, décrite comme un groupe d'immigrés illégaux et méprisables. La violence est devenue le maître mot contre cette minorité livrée à elle-même. Si les témoignages sont contradictoires sur le déclenchement des violences, une action coordonnée semble être privilégiée par les observateurs. «La façon systématique et méthodique avec laquelle les quartiers ont été rasés suggère, clairement, une certaine forme de préparation par des éléments radicaux», avait indiqué Jim Della-Giacoma - qui dirige, depuis 2009, le projet Asie du Sud-est de Crisis Group et supervise une équipe répartie entre l'Indonésie, la Thaïlande et le Timor. Pour ainsi dire, c'est un véritable nettoyage ethnique qui est perpétré en Birmanie à l'encontre de la minorité musulmane rohingya sous l'œil du Haut-Commissariat aux réfugiés et dans l'indifférence générale. Nombre d'acteurs portent une part de responsabilité dans cette tragédie, notamment, les autorités birmanes et la communauté internationale. Les premières par implication directe, la seconde par passivité. Il y a lieu de noter que malgré les restrictions sévères imposées par les autorités aux visites d'observateurs internationaux dans l'Arakan (que le régime birman actuel appelle Rakhine, subdivision administrative de la Birmanie située sur la côte occidentale du pays), la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH) a pu recueillir des informations, de première main, dans plusieurs dizaines de villages de l'Est et du Nord de cet Etat, ainsi que des témoignages dans les camps de réfugiés au Bangladesh. Le 28 mars précisément, au terme d'une mission de quatre jours au Myanmar, le Directeur des opérations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), John Ging, avait exprimé sa préoccupation devant l'impact humanitaire des tensions interconfessionnelles dans ce pays. «Des dizaines de milliers de personnes déplacées à cause de la violence dans l'Etat de Rakhine sont actuellement exposées à une menace imminente avec l'arrivée de la mousson», a indiqué M. Ging dans un communiqué de presse. «Nous devons agir immédiatement pour empêcher une tragédie prévisible. De nombreux camps de déplacés se trouvent dans des zones à basse altitude qui se trouvent être inondées chaque année», avait-il prévenu. Lors de ses entrevues avec des responsables gouvernementaux, M. Ging a souligné la nécessité urgente d'octroyer des terrains sûrs pour l'établissement de camps et de garantir la liberté de mouvement des habitants. Par ailleurs, il a plaidé pour la promotion accrue de la coexistence pacifique entre les groupes ethniques. «L'an dernier, j'ai souligné l'impact des violences interconfessionnelles sur les réformes impressionnantes lancées dans le cadre de la démocratisation, du renforcement de la paix et des réformes économiques et le risque qu'elles font courir sur le plan humanitaire», avait rappelé M. Ging.