Problématique n Y a-t-il une différence entre la littérature produite par un homme et celle produite par une femme ? Il y a lieu de dire, en effet, que l?approche de la réalité par un homme n?est pas celle que peut avoir une femme. D?ailleurs, les constantes propres aux femmes écrivains sont liées à leur propre expérience racontée en tant que femme. Dans ce cas, peut-on parler vraiment de littérature féminine ? Et jusqu'où peut-on aller dans l'écriture en tant que femme ? «Dans la fiction, estime Malika Mokadem, rien ne dit que c'est une femme qui écrit» car «il est possible de se mettre dans la peau d'un autre, qu'il soit homme ou femme, et raconter», c'est-à-dire écrire. Cet avis est partagé par d?autres femmes écrivains comme Maïssa Bey ou encore Nadjia Abid qui, elles, ne tranchent pas, cependant, la question de l'existence ou non d'un style d'écriture féminin mais se défendent de «cataloguer la créativité». Toutes s?accordent à dire que «c?est le regard des autres qui donne une spécificité à cette écriture de femmes». Elles trouvent «que certains auteurs hommes peuvent parler de la sensibilité féminine mieux que les écrivains femmes». Cela revient à dire que la différence ne réside pas dans l?écriture mais plutôt dans la sensibilité ? et également l?esthétique. Ce qui fait donc la différence entre une littérature dite «masculine» et une autre dite «féminine», c?est bien les sentiments et la subjectivité. Quant à la question de savoir jusqu'où peut-on aller en tant que femmes dans l'écriture, Maïssa Bey dira «elle (la question) est de savoir si on a le droit, en tant que musulmane, de tout dire», pour répondre que «dans l'écriture, il faut aller jusqu'où l'on juge que c'est nécessaire». L?écriture est un acte libérateur, une épreuve salvatrice. Les femmes écrivent parce qu?elles ressentent ce besoin pressant de dire et de faire entendre leur voix, une voix souvent étouffée dans la vie quotidienne. Maïssa Bey dira : «Je suis venue à l?écriture poussée par le désir de redevenir sujet et pourquoi pas, de remettre en cause, de front, toutes les visions d?un monde fait par et pour les hommes essentiellement.» L?écriture devient alors un comportement réactionnaire, un acte de rébellion par lequel les femmes-écrivains se soulèvent pour manifester leur révolte et faire face à ces voix qui s?élèvent, contre elles, pour les faire taire. Elles écrivent pour dire non à la régression, pour dénoncer les dérives dramatiques auxquelles elles assistent quotidiennement.