Région n Les contes aurésiens – dont nous allons commencer cette série – se déroulent dans de grandioses paysages faits de forêts profondes. Les Aurès est l'une des plus célèbres montagnes de l'Algérie, pour avoir été le point de départ de la lutte de libération nationale. Elle est aussi célèbre, depuis l'antiquité, pour son combat contre les envahisseurs étrangers. c'est le pays de Koceyla et de la fière Kahina dont le souvenir se perpétue jusqu'à nos jours… Les Aurès, qui sont restés en grande partie berbérophones, ce sont aussi de beaux paysages. En raison de son étendue, on note, une variété de structures géologiques, de climats et de végétation, qui s'étagent depuis les sommets du massif jusqu'aux piémonts sahariens. Alors qu'au sommet règne le climat méditerranéen avec un hiver très froid et une végétation riche ; le piémont est le domaine des steppes au climat aride avec des gels rares en hiver et de fortes températures en été. Entre ces deux zones extrêmes, prenne place la zone des forêts, notamment les cédraies, au nord-est du massif et celle de chênes verts au nord et la zone des maquis et des garrigues. On classe à part, dans le piémont, les oasis, îlot de végétation d'à peine quelques kilomètres, éparpillées dans le désert, et qui doivent leur existence au contrôle des sources et des oueds. Ce qui a fait la célébrité des Aurès ce sont ses forêts, hélas, aujourd'hui endommagées par la guerre de libération ainsi que la transhumance. Au XIXe siècle, elles recouvraient la moitié du massif, avec des forêts de cèdres, qui occupent le nord-est du massif et les flancs nord du Djebel Mehmel, les plus beaux arbres se trouvant sur le Chélia, mais aussi sur les djebels Aïdel et Chenntgouma. Il y a aussi la forêt de chênes verts, qui prend le relais, toujours sur le massif nord de la précédente, la forêt de pins d'Alep, dans la partie est et le versant sud, qui, en dépit des dégradations subies, occupe encore un espace très important. La seule forêt des Beni Melloul occupe 80 000 hectares ! Selon les témoignages des auteurs du XIXe siècle, des lions peuplaient le djebel Chélia et leurs rugissements parvenaient dans les vallées. On comprend que dans ce paysage, fait de forêts et de bêtes sauvages, l'imagination de l'homme ait créé un grand nombre de légendes et de contes. Comme ailleurs, dans les contes algériens, l'ogre et surtout sa femelle – en berbère tamza – peuplent un grand nombre de récits. Aujourd'hui encore, les personnes âgées (mais aussi des jeunes) font cette recommandation à ceux qui font des randonnées dans les forêts. — attention aux ogres ! On explique (comme en Kabylie d'ailleurs) que l'invention des fusils et de la poudre a chassé beaucoup d'entre eux sur les plus hautes cimes, mais certains se cachent encore dans les grottes et les forêts touffues. Et puis, il y a le témoignage de nombreuses personnes qui prétendent avoir été attaquées par des ogres. On vous montrera même des cabanes – en fait, des cabanes de bergers abandonnées – et on vous dira : «voici une de leurs résidences !» En fait, si les ogres existent dans les Aurès, c'est avant tout dans les contes et les légendes… Voici quelques contes de cette prestigieuse région d'Algérie (à suivre...)