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Combien de divisions ?
Publié dans La Tribune le 14 - 01 - 2009

Il y a près de soixante-dix ans, au cours de la Seconde Guerre mondiale, un crime odieux fut commis dans la ville de Leningrad. Pendant plus de mille jours, une bande d'extrémistes, appelée «l'Armée rouge», a pris les millions d'habitants de la ville en otages et provoqué les représailles de la Wehrmacht allemande dans les centres de population à l'intérieur de la ville. Les Allemands n'ont eu d'autre alternative que de bombarder la population et d'imposer un total blocus qui a causé la mort de centaines de milliers de personnes.
Quelque temps avant cela, un crime semblable avait été commis en Angleterre. La bande à Churchill se cachait dans la population londonienne, utilisant les millions de citoyens comme bouclier humain. Les Allemands ont été obligés d'envoyer leur Luftwaffe et de réduire la ville en ruines. Ils ont appelé cela le Blitz. C'est la description qui serait faite dans les livres d'histoire aujourd'hui –si les Allemands avaient gagné la guerre.
Absurde ? Pas plus que les descriptions quotidiennes dans nos médias qui répètent ad nauseam : les terroristes du Hamas utilisent les habitants de Ghaza comme «otages» et exploitent les femmes et les enfants comme «bouclier humain», ils ne nous laissent aucune alternative que de procéder à des bombardements massifs, dans lesquels, à notre grand regret, des milliers de femmes, d'enfants et d'hommes désarmés sont tués et blessés. Dans cette guerre, comme dans toute guerre moderne, la propagande joue un rôle majeur. La disparité entre les forces, entre l'armée israélienne –avec ses avions, ses hélicoptères de combat, ses drones, ses navires de guerre, son artillerie et ses tanks– et les quelques milliers de combattants du Hamas légèrement armés, est peut-être de un à un million. Sur le plan politique, le fossé entre eux est encore plus grand. Mais en termes de propagande de guerre, le fossé est
presque infini. Presque tous les médias occidentaux ont au début répété la ligne de propagande officielle israélienne. Ils ont presque entièrement ignoré la version palestinienne de l'histoire, et n'ont fait aucune mention des manifestations quotidiennes du camp de la paix israélien.
La raison avancée par le gouvernement israélien («l'Etat doit défendre les citoyens contre les roquettes Qassam») a été acceptée comme la pure vérité. L'autre version, selon laquelle les lancements de Qassam sont des représailles contre le siège qui affame le million et demi d'habitants de la bande de Ghaza, n'a pas du tout été mentionnée.
C'est seulement quand les horribles scènes venant de Ghaza ont commencé à être montrées sur les écrans des télévisions occidentales que l'opinion publique mondiale a commencé à changer. Certes, les chaînes occidentales et israéliennes n'ont montré qu'une toute petite partie des événements meurtriers qui apparaissent 24 heures sur 24 chaque jour sur la chaîne arabe Al Jazira, mais une photo d'un enfant mort dans les bras de son père terrifié est plus forte qu'un millier de phrases bien structurées du porte-parole de l'armée israélienne. Et c'est ce qui est décisif à la fin.
La guerre, toute guerre, est le royaume des mensonges. Si on en appelle à la propagande ou à la guerre psychologique, tout le monde accepte l'idée qu'on a le droit de mentir pour son pays. Celui qui dit la vérité prend le risque d'être traité de traître. L'ennui est que c'est pour celui qui la porte lui-même que cette propagande est la plus convaincante. Et après, vous vous convainquez qu'un
mensonge est la vérité, vous falsifiez la réalité, et vous ne pouvez plus prendre de décisions rationnelles.
Un exemple de ce processus entoure l'atrocité la plus choquante de cette guerre : le bombardement de l'école de l'ONU Fakhura dans le camp de réfugiés de Jabaliya.
Dès après que l'événement eut commencé à être connu dans le monde, l'armée a «révélé» que des combattants du Hamas avaient tiré des obus de mortier depuis l'entrée de l'école. Pour preuve, ils ont fourni une photo aérienne qui montrait en effet l'école et le mortier. Mais peu de temps après, le menteur officiel de l'armée admettait que la photo datait de plus d'un an. En bref : une falsification.
Par la suite, le menteur officiel a déclaré que «nos soldats étaient ciblés de l'intérieur de l'école». Il fallut à peine un jour pour que l'armée soit obligée d'admettre vis-à-vis d'un agent de l'ONU que c'était un mensonge aussi. Personne n'a tiré de l'intérieur de l'école, et aucun combattant du Hamas ne se trouvait dans l'école, qui était pleine de réfugiés terrifiés.
Mais cette reconnaissance n'avait plus vraiment d'impact. Entre-temps, les Israéliens avaient été complètement convaincus que les combattants du Hamas «tiraient de l'intérieur de l'école», et les présentateurs de télévision avaient annoncé cela comme un fait. Il en va de même pour les autres atrocités. Chaque bébé est transformé, en mourant, en terroriste du Hamas.
Chaque mosquée bombardée devient instantanément une base du Hamas, chaque immeuble d'habitation une cache d'armes, chaque école un poste de commande terroriste, chaque bâtiment du gouvernement civil un «symbole de l'administration Hamas».
Ainsi, l'armée israélienne garde sa pureté et reste «l'armée la plus morale du monde». La vérité est que les atrocités sont le résultat direct du plan de guerre. Il reflète la personnalité d'Ehoud Barak –dont le mode de pensée et les actions sont ce que l'on appelle «aliénation morale», un trouble sociopatheL'objectif réel (à part gagner des sièges aux prochaines élections) est de mettre fin au gouvernement Hamas dans la bande de Ghaza. Dans l'imagination de ses concepteurs, Hamas est un envahisseur qui a pris le contrôle d'un pays étranger.
La réalité est bien sûr toute autre. Le mouvement Hamas a obtenu la majorité dans des élections éminemment démocratiques qui ont eu lieu en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et dans la bande de Ghaza. Il a gagné parce que les Palestiniens étaient arrivés à la conclusion que l'approche pacifique du Fatah n'avait rien obtenu d'Israël –ni gel de la colonisation, ni libération des prisonniers, ni aucun pas en direction de la fin de l'occupation et de la création d'un Etat palestinien. Le Hamas est profondément enraciné dans la population pas seulement comme mouvement de résistance qui lutte contre l'occupant étranger, comme l'Irgun et le groupe Stern dans le passé mais aussi comme organisation politique et religieuse qui fournit des services dans les domaines social, éducationnel et médical.
Pour la population, les combattants du Hamas ne sont pas un corps étranger, mais les fils des familles de la bande de Ghaza et d'autres régions de Palestine. Ils ne «se cachent pas derrière la population», la population ne les considère que comme ses défenseurs.
Donc, toute l'opération est basée sur de fausses hypothèses. Transformer sa vie en enfer ne conduit pas la population à se soulever contre le Hamas mais, au contraire, à l'unir derrière le Hamas et à renforcer sa détermination à ne pas se rendre.
La population de Leningrad ne s'est pas dressée contre Staline, pas plus que les Londoniens ne se sont retournés contre Churchill. Celui qui donne l'ordre d'une telle guerre avec de telles méthodes dans un territoire si densément peuplé sait qu'il causera des massacres de civils. Apparemment cela ne l'a pas troublé. Ou il a cru qu'«ils changeront de voie» et que «cela engourdira leur conscience», de sorte qu'à l'avenir ils n'oseront plus résister à Israël.
Une autre priorité pour les donneurs d'ordres de la guerre était de réduire au maximum les victimes parmi les soldats, sachant que l'état d'esprit d'une large partie de l'opinion pro-guerre changerait s'il y avait de telles victimes. C'est ce qui est arrivé dans la première et la seconde guerres du Liban.
Cette considération joue un rôle particulièrement important parce que toute la guerre fait partie de la campagne électorale. Ehoud Barak, qui a remonté dans les sondages dans les premiers jours de la guerre, savait que son score chuterait si des images de
soldats morts défilaient sur les écrans de TV.
Donc une nouvelle doctrine a été utilisée : pour éviter des pertes parmi nos soldats, tout détruire sur leur passage. Les auteurs de cette idée n'étaient plus seulement prêts à tuer 80 Palestiniens pour sauver un soldat israélien, comme c'était le cas, mais 800. L'économie de victimes de notre côté est le commandement premier qui cause un record du nombre des victimes civiles de l'autre côté.
Cela signifie le choix conscient d'une sorte de guerre particulièrement cruelle –et c'est son talon d'Achille.
Un homme sans imagination, comme Barak (son slogan électoral : «Pas un brave type, mais un leader»), ne peut pas imaginer comment les braves gens à travers le monde réagissent aux actions comme l'assassinat de familles entières, la destruction de maisons sur la tête de leurs habitants, les cortèges de garçons et de filles dans leur linceul blanc prêts à être inhumés, les reportages sur les gens qui trouvent la mort au bout de plusieurs jours parce que les ambulances n'ont pas pu arriver à temps, l'assassinat de médecins et d'infirmiers en route pour sauver des vies, l'assassinat de chauffeurs de l'ONU apportant de la nourriture. Les images des
hôpitaux, avec la mort, les morts et les blessés étendus ensemble sur le sol par manque de place, ont choqué le monde.
Aucun argument n'est assez fort après l'image d'une petite fille blessée gisant sur le sol, se tordant de douleur en criant «Maman ! Maman !» Les commanditaires de la guerre ont pensé qu'ils arrêteraient la diffusion de ces images en empêchant la couverture de la presse.
Les journalistes israéliens, pour notre honte, ont accepté de se contenter des reportages et photos fournis par le porte-parole de l'armée, comme si c'était des informations authentiques, alors qu'eux-mêmes restent à des kilomètres du théâtre des événements. D'autre part, les journalistes étrangers n'étaient pas autorisés, jusqu'à ce qu'ils protestent et soient pris, pour des tours rapides, dans des groupes sélectionnés et contrôlés. Mais, dans une guerre moderne, un tel point de vue stérile fabriqué ne peut pas complètement exclure les autres –les caméras sont à l'intérieur de la bande de Ghaza, au centre du brasier, et ne peuvent pas être contrôlées. Al Jazira diffuse les images au fil des heures et entre dans toutes les maisons.
La bataille pour l'écran de télévision est une des batailles décisives de la guerre.
Des centaines de millions d'Arabes, de la Mauritanie à l'Irak, plus d'un milliard de musulmans du Nigeria à l'Indonésie voient les images et sont horrifiés. Cela a un fort impact sur la guerre. Beaucoup de téléspectateurs considèrent les dirigeants d'Egypte, de Jordanie et de l'Autorité palestinienne comme des collaborateurs d'Israël qui commet ces atrocités contre leurs frères palestiniens.
Les services de sécurité des régimes arabes enregistrent une dangereuse tendance parmi les peuples. Hosni Moubarak, le dirigeant arabe le plus exposé parce qu'il est près du passage de Rafah face aux réfugiés terrifiés, a commencé à faire pression sur les décisionnaires de Washington qui, jusqu'à présent, ont bloqué tout appel au cessez-le-feu. Ceux-ci commencent à comprendre la menace pour les intérêts vitaux américains dans le monde arabe et ont soudain changé d'attitude –ce qui a causé la consternation parmi les diplomates israéliens.
Les gens qui sont en état d'aliénation morale ne peuvent pas comprendre les motivations des gens normaux et deviner leurs réactions. «Combien de divisions a le pape ?» ironisa Staline. «Combien de divisions ont les gens de conscience ?» pourra demander Ehoud Barak. Comme c'est en train d'advenir, ils en ont. Pas nombreuses. Pas très rapides de réaction. Pas très fortes et organisées.
Mais, à un certain moment, quand les atrocités dépassent les bornes, et que les masses de protestataires se regroupent, cela peut décider d'une guerre. L'erreur de compréhension de la nature du Hamas a conduit à une erreur d'appréciation des résultats. Non seulement Israël est incapable de gagner la guerre, mais Hamas ne peut pas la perdre. Même si l'armée israélienne parvient à tuer tous les combattants du Hamas, jusqu'au dernier, le Hamas gagnerait. Les combattants du Hamas seraient considérés comme les parangons de la nation arabe, les héros du peuple palestinien, les modèles pour l'émulation de tous les jeunes du monde arabe. La Cisjordanie tomberait dans les mains du Hamas comme un fruit mûr, le Fatah disparaîtrait dans un océan d'oubli, les régimes arabes seraient menacés d'effondrement.
Si la guerre prend fin avec le Hamas encore debout, meurtri mais invaincu, face à la puissante machine militaire israélienne, elle ressemblera à une fantastique victoire, une victoire de l'esprit sur la matière. Ce qui restera dans la conscience du monde sera l'image d'Israël comme un monstre taché de sang, prêt à tout moment à commettre des crimes de guerre et pas prêt à accepter la moindre contrainte morale.
Cela aura de graves conséquences pour notre avenir à long terme, notre place dans le monde, notre chance de parvenir à la paix et à la tranquillité. Au final, cette guerre est un crime contre nous-mêmes aussi, un crime contre l'Etat d'Israël.
U. A.
* Uri Avnery (ou Uri Avneri), de son nom de naissance Helmut Ostermann, est un écrivain et journaliste israélien, né le 10 septembre 1923 à Bochum en Westphalie, en Allemagne.
Connu surtout pour être un militant des droits des Palestiniens et pacifiste convaincu, il appartient à une tendance de la gauche israélienne. Sa famille fuyant l'Allemagne de Hitler, il arriva en Palestine en 1933.
Il participe à la Guerre israélo-arabe de 1948 comme soldat dans l'armée israélienne dans la brigade d'infanterie Sayaret Givati également connue sous le nom de Renards de Samson. Il quitte l'armée en 1949 et devient éditorialiste pour le quotidien Haaretz. Considérant que sa liberté d'expression n'était pas suffisante, en particulier au sujet des expropriations par le gouvernement de Ben Gourion de terres appartenant aux Arabes, il quitte le journal en 1950. En 1965, il participe à la création du parti Haolam Hazeh –Koach Hadash.
Cette même année, il est élu député à la Knesset. Il restera député jusqu'en 1973 et le redeviendra de 1979 à 1981. Depuis quelques années, il écrit fréquemment pour le quotidien Maariv. Le 3 juillet 1982, pendant la guerre du Liban, il traverse la ligne de front et rencontre Yasser Arafat. C'était la première fois qu'un leader de l'OLP rencontre publiquement un Israélien en vue de discuter d'une résolution du conflit. Il crée le Bloc de la paix et reste un des plus célèbres pacifistes israéliens.


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