Pour l'heure, aucun gagnant n'est encore sorti des urnes, même si le parti laïque Nidaa Tounès, un favori, se dit optimiste et que son concurrent direct, le parti islamiste Ennahda, l'autre favori, après avoir refusé de pronostiquer une victoire ou, encore moins, une défaite, ait reconnu du bout des lèvres la possibilité d'être passé en deuxième position. Toutefois, de nombreux observateurs et les principales forces politiques s'accordent sur l'improbabilité pour aucun parti d'avoir la majorité pour gouverner seul, cela au regard du mode de scrutin -la proportionnelle au plus fort reste- favorisant les petites formations, et ce sont 1 329 listes de partis, de coalitions et indépendantes qui se partageront les voix des électeurs. Dès lors, les alliances s'imposeront. Ennahda, qui a dû quitter le pouvoir début 2014 après une année de gestion marquée par les crises et, surtout, la montée du terrorisme islamiste, se dit prêt à une alliance de circonstance avec son plus virulent opposant, Nidaa Tounès. Mais ce dernier ferait tout pour éviter une alliance avec ce mouvement qu'il a toujours qualifié d'obscurantiste, et prévoit, en cas de victoire, de s'allier avec des partis idéologiquement proches, même s'il n'a pas complètement tourné le dos à une collaboration avec les islamistes. Mais, quelles que soient les alliances qui se constitueront, elles signeront indiscutablement une naissance sans douleur de la démocratie en Tunisie. Transition réussie, pour le plus grand bien du pays, et de la région. L'Algérie, qui a toujours été aux côtés de la Tunisie, qui s'est d'ailleurs réjoui du déroulement des élections législatives, a félicité les Tunisiens pour leur maturité politique et leur sens de la responsabilité, et a renouvelé son soutien au pays et peuple frères. «L'Algérie s'engage, à cette occasion, à continuer à apporter son plein soutien à la Tunisie sœur, décidément engagée sur la voie de la stabilité et de la prospérité», a déclaré, hier, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abdelaziz Benali Cherif. Stabilité et prospérité qui ne peuvent que rejaillir sur la région. Le caractère transfrontalier de la situation politique et économique de la Tunisie avait amené le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, à proposer de contribuer, sur le plan politique d'abord, au rapprochement des vues et à l'aplanissement des différents entre les différents acteurs et formations politiques. C'est dans cette perspective qu'il s'entretiendra avec les deux leaders, Rached Ghannouchi d'Ennahda et Béji Caïd Essebsi de Nidaa Tounès, qu'il avait invité successivement à Alger. L'Algérie sera également présente aux côtés de la Tunisie sur le plan économique avec l'octroi de crédits à la Banque centrale tunisienne et l'engagement sur le terrain de l'investissement dans le cadre d'un partenariat gagnant-gagnant. Ainsi, à l'invitation de son homologue tunisien, Mehdi Jomaa, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, accompagné du ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a participé à la Conférence internationale sur l'investissement «Investir en Tunisie, start-up démocratie» qui s'est tenue à Tunis en septembre dernier. Par cette invitation officielle et cette participation, Tunis et Alger entendaient matérialiser les relations «privilégiées» entre les deux pays. Les opérateurs économiques et les investisseurs, publics et privés, n'auront plus qu'à exploiter cet avantage relationnel, qui est renforcé par le rapprochement des deux peuples, pour diversifier le partenariat bilatéral et renforcer les liens commerciaux. Quant aux secteurs à investir, les deux parties ont l'embarras du choix, ça va de l'électronique au textile, en passant par la formation, le BTP, l'hôtellerie et la restauration agroalimentaire, la haute technologie, l'industrie... Les conditions pour la concrétisation de cette coopération sont presque toutes réunies, et si quelques écueils subsistent encore ou apparaissent, ils peuvent aisément être aplanis, car il y a une volonté politique des deux côtés d'ouvrir la voie au partenariat pour un développement économique en duo, au moins, en attendant que le duo s'élargisse aux autres pays de la région, et se renforce face aux autres blocs économiques. La promotion des partenariats régionaux, notamment avec les pays limitrophes, est en effet un chapitre dans le programme économique du Président, qui prévoit à ce titre le développement des échanges basés sur les avantages comparatifs. Tunis a montré ses dispositions pour s'inscrire dans cette dynamique. Il suffirait de réduire quelques fractures pour cet ensemble qu'est l'Union du Maghreb arabe (UMA) devienne un acteur influent sur la scène politique et économique continentale, voire mondiale. L'Algérie et la Tunisie ont enclenché la dynamique, il faut espérer qu'elle ne s'arrêtera pas à ce duo gagnant. H. G.