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«Rien fait, rien vu, jamais connu»
Affaire autoroute Est-Ouest : les accusés accordent leurs «violons»
Publié dans La Tribune le 30 - 04 - 2015

Après les révélations fracassantes faites au troisième jour du procès de l'autoroute Est-Ouest, par Mohamed Khelladi, l'ex-directeur de la direction des projets nouveaux (DPN) qui avait mis en cause l'ensemble des accusés ainsi que Béjaoui et le ministre Amar Ghoul, hier, au quatrième jour, les auditions qui se sont poursuivies ont toutes été assez brèves en raison de la stratégie choisie par les accusés.
Ces derniers se sont rétractés devant le juge Hallali soutenant que l'ensemble de leurs déclarations, devant la police judiciaire ou encore devant le juge d'instruction, sont fausses. Pour certains, c'est en raison de la torture infligée par les éléments du DRS, d'autres ont évoqué le stress et la fatigue en raison des auditions intensives à des heures tardives. En résumé, les mis en cause qui ont été entendus, affirment ne pas se connaître, n'avoir pas reçu de commissions et être des «victimes» de mauvais traitements.
Le premier à être appelé à la barre, c'est Addou Tadj Eddine. Ce dernier, lors de son audition par la police judiciaire et dans les PV du juge d'instruction, avait avoué que Chani, qu'il a connu en 2008, lui avait demandé d'être son intermédiaire auprès de Khelladi afin que ce responsable du projet de l'autoroute Est-Ouest accepte d'offrir des facilitations aux Chinois. Ce que Tadj a accepté en contrepartie d'une somme d'argent. Il avait également avoué avoir joué le rôle d'intermédiaire pour permettre à plusieurs entreprises étrangères (INC SM, IGIS, Condoti et Pizzaroti) de bénéficier de contrats en Algérie en contrepartie de commissions. C'est encore Addou Taj qui a parlé de l'accusé en fuite Kouidri Tayeb comme étant le prête-nom du ministre Amar Ghoul et pour lequel il a perçu une commission auprès de l'entreprise française Igis. Il a parlé du fils d'Aboudjerra Soltani qui aurait intervenu auprès de Ghoul pour SNC Lavalin. Addou Tadj a enfin mis en cause son neveu Sid Ahmed en avouant que ce dernier a également perçu des commissions en vendant des informations qu'il a récupérées auprès du directeur de la planification du ministère des Travaux publics, Hamdane Salim Rachid, inculpé dans cette affaire.
Mais, hier, face au juge Hallali, Addou Tadj commence par parler de son parcours avant d'annoncer, exactement comme l'avait fait, auparavant le principal accusé Chani Madjdoub, qu'il se rétractait pour l'ensemble de ses déclarations «devant la police judiciaire et lors des auditions devant le juge d'instruction». «Il n'y a rien de vrai dans toutes ces déclarations, la seule chose que moi j'ai reconnu, c'est d'avoir évoqué avec le ministre Amar Ghoul le cas de SNC Lavalin et il a refusé. J'ai apposé ma signature sur un PV déjà rédigé.» Le juge demande : «Donc tout ce qu'a raconté Khelladi avant vous n'est pas vrai. Khelladi a bien dit que vous avez appelé Chani le jour de son arrestation pour qu'un piège lui soit tendu à l'aéroport». L'accusé rétorque : «Khelladi raconte ce qu'il veut parce qu'il n'a pas subi ce que nous avons subi lors de notre arrestation par le DRS. Lui, il a reçu un traitement royal». «Pourquoi donc ?», lance le président de la séance. «Justement, on se le demande», dit Addou Tadj avant de continuer à se rétracter : «Je ne connais ni le colonel Khaled ni Tayeb Kouidri, ni personne. C'est chez le DRS que j'ai entendu parler d'eux pour la première fois. Chani, je l'ai vu pour la première fois à Serkadji, dans la cellule numéro 8 que nous avons partagé.» «Et Sacha ?», demande à nouveau le juge. «Sacha de son vrai nom Boussaid Nasseredine, oui je l'ai présenté au téléphone à Khelladi pour qu'il l'aide à envoyer son fils handicapé à l'étranger. Ils se sont échangés leurs numéros de téléphone et je ne connais pas la suite», répond Addou Tadj. Le juge l'interroge alors sur la raison qui a poussé Sacha à payer les déplacements de Khelladi en Chine et en France. L'accusé soutient ne pas être au courant et insiste, «je ne connais aucun des accusés en dehors de mon neveu Sid Ahmed que je n'ai pas revu depuis le 30 août 2003, le troisième jour du décès de mon frère». Le procureur général prend la parole et demande à Tadj s'il a des documents ou un registre de commerce qui prouve que c'est un homme d'affaires. Ce dernier répond par l'affirmative assurant que sa défense a tous les documents. Le représentant du ministère public insiste, «avez-vous une entreprise qui a des échanges avec des entreprises étrangères ?». «Oui, elle a été créée en 2007-2008. J'en avais d'autres auparavant», affirme Addou Tadj qui sera de suite contredit par le PG qui réplique : «Nous n'avons trouvé aucune trace de ces entreprises avant 2007. Pouvez-vous, cependant nous expliquer pour quelles raisons vous avez fait ces révélations devant la police judiciaire avant de les répéter devant le juge d'instruction dans un premier PV et encore dans le second ?» A ce moment, Addou Tadj se lance dans un descriptif des tortures subies pendant 19 jours dans les locaux du DRS. Il racontera, dans des termes rappelant le témoignage de Chani Madjdoub, les douches froides, le manque de sommeil...etc. et même sa présentation devant le procureur à minuit et son audition à 6 h du matin. Il finit par lâcher qu'«après tout cela, on devient conditionné, on ne sait plus ce qu'on dit ni sur quoi on signe». Malgré la dissertation, le procureur ne perd pas le fil et demande : «Une commission rogatoire a permis d'établir un versement de 6 000 euros de votre compte à celui de Sacha. Pouvez-vous l'expliquer ? ». Et l'explication semble peu convaincante. Addou Tadj dit avoir profité des soldes en France pour acheter deux montres de grandes marques à 6 000 euros et en raison d'un manque de liquidité, Sacha a payé la facture et il lui a transféré la somme pour le rembourser. «Et pour l'entreprise INC SM où vous avez déclaré avoir reçu une commission de 350 000 dollars ? Dans cette transaction, il y a un témoin que nous allons appeler à la barre et ce dernier n'a subi aucune pression ni chez le DRS ni chez le juge d'instruction. Vous avez bien versé une commission à Merabet, le témoin ?», demande le PG avec un petit sourire. «Merabet n'a aucun lien avec cette affaire, il n'a reçu ni 1% ni 20%. Le DRS me suivait et a dû le voir en ma compagnie. C'est le DRS qui a parlé de lui. Il est là et vous allez entendre son témoignage», dit, bizarrement, très confiant l'accusé qui expliquera que Merabet avait besoin de liquidités pour payer une transaction qui arrivait à échéance alors sur la demande de la DG de l'entreprise canadienne INC SM, il lui a rendu service et que cette somme lui a été remboursée. En revenant sur ses aveux ayant mis en cause son neveu Sid Ahmed, Addou Tadj a tenu à affirmer qu'il n'a eu aucun contact avec ce dernier depuis 2003 et que le seul qu'il a cité est son autre neveu Karim. Le nom de ce dernier n'étant pas dans l'arrêt de renvoi, il ne risque rien. Et alors que Addou Tadj explique qu'il n'a joué aucun rôle dans l'arrestation de Chani Madjdoub, pour la simple raison qu'il ne le connaissait pas avant Serkadji, Khelladi demande la parole. Le juge la lui accorde. Cet accusé, qui est derrière l'éclatement de toute cette affaire, expliquera à nouveau les circonstances de l'arrestation de Chani affirmant que ce dernier «n'était pas venu en Algérie pour passer l'Aïd avec sa mère comme il l'a déclaré hier faisant mine de pleurer mais parce qu'on lui a tendu un piège et c'est Tadj qui l'a appelé lui demandant de se dépêcher de venir pour récupérer ses commissions auprès des entreprises étrangères. Il y a les traces des appels téléphoniques et vous pouvez le confirmer. Si j'ai décidé de dénoncer ces malversations, c'est parce que je suis un bon citoyen, un ancien officier de la Marine et j'ai été dans la cellule de l'intelligence économique de la gendarmerie». Addou Taj regarde le juge et lâche : «Reposez lui la même question ce soir, il donnera une autre réponse.» Ainsi, en plus du fait que les accusés ont tous décidé d'enfoncer celui qui les a amenés devant la justice, ils tentent de convaincre qu'il n'a pas toute sa tête. Après l'audition de Addou Tadj s'en suivra celle des représentants des entreprises étrangères avec lesquels il a bénéficié de commissions. Le représentant du groupement portugais Coba a tenté de se disculper en affirmant que les deux projets obtenus par son entreprise en Algérie dans le cadre du projet de l'autoroute Est-Ouest l'ont été en raison de l'offre moins disante qu'elle a présentée et que Coba a recouru aux services de l'entreprise de Addou Tadj afin de bénéficier d'un accompagnement sur le plan administratif. La firme portugaise affirme avoir payé une prestation de services. Le procureur demandera à ce représentant du groupe Coba comment une entreprise basée à Panama pouvait offrir des services et un accompagnement en Algérie. Il lui demandera également la raison du paiement de prestations avant de les recevoir. «Pour montrer notre bonne foi et nos bonnes intentions», a répondu le représentant de Coba. Et le PG de s'étonner : «Pour un client avec qui vous traiter pour la première fois !» «On était un peu naïf», a laissé glisser doucement l'accusé portugais. Et cette méthode de défense a été suivie par l'ensemble des représentants des entreprises étrangères qui ont versé des commissions.
Après la pause déjeuner, la séance de l'après-midi a vu l'audition du neveu de Addou Tadj, le nommé Addou Sid Ahmed. La première phrase de ce dernier est : «Tout est faux. Je n'ai rien fait. Hamdane est de ma famille.» En fait, Sid Ahmed qui est actionnaire dans l'entreprise Metalson, est accusé d'avoir obtenu des informations relatives à des projets en Algérie de Hamdane, qu'il a revendues aux entreprises étrangères moyennant d'importantes sommes d'argent. Des commissions ont été versées à Sid Ahmed Addou ainsi qu'à Hamdane, dans le compte de son épouse et ses belles-sœurs, qui sont les trois sœurs Gheraïb impliquées dans ce scandale. Sid Ahmed connaît Hamdane en raison des liens de famille qui existent entre lui et les Gheraïb. Et lors de son audition, tout en suivant la même stratégie que les autres accusés, il niera toutes ses anciennes auditions. Sid Ahmed n'ayant pas subi de torture dans les locaux du DRS, dira que les onze jours d'auditions intenses et à des heures tardives avaient causé une telle pression qu'à la fin «on ne sait plus ce qu'on dit et on signe n'importe quoi». Sid Ahmed soutiendra que les sommes qu'il a versées dans le compte des filles Gheraïb sont liées à une histoire de dette et d'héritage entre les deux familles. Il s'attaquera même au PG quand ce dernier lui fera remarquer que cette histoire de dette n'a été citée qu'une fois que les commissions rogatoires avaient confirmé les versements. «Je vous dis que c'est une dette et vous rentrez dans la vie privée des gens. C'est inadmissible». Le juge intervient demandant «pourquoi alors avoir fait toutes ces déclarations auparavant durant l'instruction. Vous avez subi des pressions ?». «Après tous ces jours d'auditions, j'étais psychologiquement détruit et fatigué», lâche Sid Ahmed Addou. Le juge appellera juste après à la barre toutes les entreprises qui ont eu à traiter avec l'entreprise Métalson où Addou Sid Ahmed est actionnaire. Les représentants de toutes ces entreprises, poursuivies pour corruption, déclareront n'avoir pas remis de commissions mais ne pourront infirmer devant le procureur général que, lors de l'enquête, les entreprises avaient présenté le dossier de consulting de Métalson qui contenait les documents de l'Entreprise du métro d'Alger (EMA). Certaines n'arriveront pas à prouver les prestations fournies par Métalson en raison de l'absence de documents à ce propos. La journée d'auditions d'hier se poursuivra avec le témoin-accusé Merabet. Ce dernier, lors de ses premières auditions, avait déclaré avoir contacté l'entreprise canadienne INC SM, dont Taj Addou a reçu une commission en milliers de dollars. Le témoin-accusé, ingénieur de formation, a bien expliqué les circonstances de la venue des experts de cette entreprise et leur intervention, il dira cependant n'être pas au courant du versement d'une commission à Tadj. Quant à la somme qui lui a été versée par Tadj par le biais de son entreprise de Panama, Merabet essayera de convaincre que c'était pour terminer de payer l'achat d'un appartement au Maroc et qu'il a remboursé cette dette. Enfin, viendra le tour de Hamdane, le directeur de la planification au ministère des Travaux publics, accusé d'avoir «vendu» des informations à Addou Sid Ahmed qui les a revendues aux entreprises étrangères leur permettant de bénéficier de projets de plusieurs milliards de dinars en Algérie. Hamdane qui ne s'exprimera qu'en langue française, ne fera pas exception à la règle. Il dissertera longtemps sur son «enlèvement» par le DRS, les conditions de sa détention et ses auditions. D'ailleurs, il demandera au juge de faire sortir sa femme et ses sœurs (les filles Gheraïb) pour qu'elles n'entendent pas son récit sur la torture. Hamdane va pleurer : «Je suis un haut cadre, je suis fonctionnaire dans une administration algérienne depuis plus de 20 ans. Je ne comprends pas pourquoi j'ai été enlevé de cette façon ni pourquoi j'ai été interrogé dans ces conditions pendant une dizaine de jours.» Dans la même logique que ses coaccusés, Hamdane dit ne pas savoir ce qu'il a déclaré ni sur quoi avoir signé surtout qu'il ne maîtrise pas la langue arabe. Hamdane, qui crie son innocence, ne cessera de répéter : «Je n'ai pas donné d'informations, je n'ai pas perçu d'argent.» Mais quand le juge lui demande d'expliquer l'origine de la grande somme d'argent retrouvée dans son domicile, ce dernier, de la même manière que Chani, ne répondra pas et se lancera dans une dissertation sans fin sur sa torture.
H. Y.


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