Un appel est lancé pour l'implication dans la dynamique théâtrale des critiques académiques qui doivent «s'approprier les espaces afin de nourrir les débats de leurs connaissances en partageant leurs visions avec les scénographes, les metteurs en scène et le comédien qui sont au cœur de toute création théâtrale», dira un metteur en scène Dans le cadre des rencontres scientifique de la 11e édition du Festival national du théâtre professionnel (Fntp-2016), une rencontre-débat a été animée autour de la thématique «Le rapport entre la scénographie et la mise en scène» par l'universitaire spécialiste du théâtre, Ahmed Cheniki, le scénographe Abderahmane Zaaboubi et le metteur en scène Haïder Ben Hocine. Ahmed Cheniki souligne que la scénographie existe depuis les Grecs, mais que c'est seulement ces vingt dernières années qu'elle a sa place dans la création théâtrale. Il précise que la problématique de la scénographie ne se pose pas dans sa définition, mais dans la relation qu'il y a entre la scénographie et la mise en scène. Il précise qu'à un moment donné le scénographe était considéré comme un auxiliaire. Mais, le constat est que la majorité des expériences que l'on a eu par la suite, le scénographe est devenu, l'élément essentiel de l'organisation de l'espace et cela sans faire abstraction de la temporalité. Car celui qui organise ces deux éléments est le scénographe. Il a jouté que certes parfois il Y a eu des conflits de prérogatives entre le scénographe et le metteur en scène, mais les deux sont condamnés à gérer les lieux de l'espace théâtrale. Ainsi, même si, sur le plan administratif celui qui organise l'espace c'est le metteur en scène, sur le plan technique il y a gestion commune des lieux d'articulation de l'espace théâtral qui fait appel a plusieurs langages. Abderahmane Zaaboubi, talentueux scénographe qui a marqué de son empreinte plusieurs créations théâtrales pose pour sa part la problématique les véritables bases du concept de la scénographie. Après avoir présenté un historique de l'évolution de la scénographie depuis l'époque grecque à travers les grands noms du théâtre universel, il explique que le scénographe a pour principale mission la conception de l'espace. En prenant comme exemple Peter Brooke, il souligne qu'il y a quatre éléments essentiels «premièrement, il suffit d'avoir un espace, c'est un espace réel, il ne s'agit pas d'espace de dramaturgique. Deuxièmement, le comédien physiquement parlant est une masse qui occupe l'espace, donc c'est aussi un élément scénographique. Troisièmement, la vue qui fait appel à la lumière est aussi un élément scénographique. Et quatrièmement, celui qui voit, en l'occurrence le spectateur est aussi un élément scénographique car il n'est pas dans l'espace de la mise en scène ou de la dramaturgie.» Après avoir expliqué les différents éléments de la scénographie, Abderahmane Zaaboubi souligne que «la problématique qui se pose est qu'est ce que l'on apporte de nouveau en tant que théâtre algérien ?, et j'incite les présents à réfléchir sur cela. Une des crises du théâtre algérien est aussi une crise de la perception scénographique car le théâtre algérien doit être construit sur une structure dramaturgique purement algérienne. Abdelkader Alloula a essayé de créer le concept du théâtre algérien à travers la mise en scène de la Halqua. Mais, ce qui l'a trahis c'est la scénographie car on ne peut pas faire de la Halqua dans l'espace frontale de la scène à l'italienne». Pour sa part, Haïder Ben Hocine confie d'«après mon expérience, selon les dernières productions, des différents théâtres régionaux, la scénographie a surtout raconté la rue algérienne pour ne pas dire une reproduction de la rue algérienne». Il ajoute : «Personnellement, je m'identifie plus au comédien qu'au metteur en scène. Et la remarque que je fais de ce point de vue, c'est que lors de ces productions la scénographie a accaparé l'espace. Les dispositifs de la lumière ést aussi assez lourd et froid dans la plupart de cette production. Concernant le mouvement de sortie et d'entrée dans l'espace scénique c'est aux critiques d'analyser cela et au final on se rend compte que tout a été travaillé sauf l'interprétation du comédien.» Ben Hocine, explique aussi que la scénographie est tout un processus depuis le prospectus jusqu'au spectacle en passant par les accessoires, le maquillage, les costumes en précisant : «Hélas, la scénographie a été victime de la mort des petits métiers et artisans du théâtre qui pouvaient donner de la valeur plastique à la création scénographique. Au final la véritable victime de cela c'est le comédien et le public.» Les deux intervenants ont également lancé un appel pour l'implication des critiques académiques dans la dynamique théâtrale. A ce propos, le metteur en scène souligne qu'«il s'agit de s'approprier les espaces afin de nourrir les débats de leurs connaissances en partageant leurs visions avec les scénographes, les metteurs en scène et le comédien qui sont au cœur de toute création théâtrale». S. B.