Une bande de jeunes excités a brûlé, lundi dernier, au beau milieu de la ville de Béjaïa, un autobus de l'Etub (la régie communale de transport urbain). Profitant de la tension générée par la grève des commerçants, ces énergumènes ont mis le feu au car pour, soi-disant, dénoncer l'inquiétante baisse du pouvoir d'achat des ménages. Quel rapport ? Ce véhicule d'utilité publique, récemment sorti des ateliers de la Snvi à Rouiba, offre plus de confort, d'hygiène et de ponctualité aux usagers par rapport aux tacots incertains des transporteurs privés. Le trajet dans le bus bien entretenu de l'Etub coûte seulement 15 dinars, alors que le tarif du concurrent privé est de 20 dinars. Paradoxalement, cet acte idiot nuit aux intérêts des usagers et des petites gens, en particulier, à l'image de la région et de tout le pays. Non, il ne s'agit pas d'accabler davantage les auteurs pitoyables de ce regrettable forfait, c'est juste pour dire que le propre de l'homme est de tirer les bonnes leçons de ses propres expériences pour pouvoir progresser dans la vie. Dans un passé pas très lointain, des agités similaires avaient saccagé et démoli des équipements et des biens publics dans la même ville. Il a fallu attendre longtemps avant que les autorités concernées ne puissent renouveler ces infrastructures élémentaires. Les habitants en avaient beaucoup souffert entre-temps. Un supplice inutile, gratuit. La bonne morale et le civisme veulent que de tels agissements intempestifs soient totalement bannis et unanimement combattus. Faut-il ajouter que cette violence aveugle et stupide a aussi emporté tous les abribus de la ville ? Pour combien de temps encore doit-on attendre le bus sous la pluie ? La bassesse a, ensuite, débordé pour se transformer en pillage de biens publics et privés. Non, ces actes indignes n'honorent pas ceux qui les ont commis ou inspirés. Les photos diffusées par les médias et partagées sur les réseaux sociaux donnent une image négative de toute la région. De telles scènes grotesques ne doivent plus se répéter ni à Béjaïa ni partout ailleurs en Algérie. De nombreuses organisations de la société civile ont dénoncé ces actions de vandalisme et ces vols caractérisés. Elles ont appelé les concernés au calme et à la sérénité. Des associations se sont aussi démarquées ouvertement de cette «sauvagerie». Cependant, toutes ces déclarations bien intentionnées ne suffisent pas pour disculper ces mêmes organisations et autres associations qui n'ont pas su encadrer cette jeunesse laissée-pour-compte. Inutile de se voiler la face, ces espaces de la citoyenneté agissante ont failli à leur devoir. Ils ont, eux aussi, une grande responsabilité dans cette triste déchéance. Transformés en râteliers ont l'on vient se servir au lieu de servir leurs concitoyens, les partis politiques, les syndicats, les unions professionnelles et les associations ont bradé ce qu'ils avaient de plus noble, leur mission de conscientisation et de mobilisation des citoyens. C'est à eux qu'il incombe de substituer une culture militante, pacifique et pleinement engagée, pour disqualifier les fauteurs de troubles, les maraudeurs et les corrompus. Leur défection et leur faillite, conséquences directes de leurs propres travers, ont ouvert la voie grande devant les vauriens, les casseurs et pilleurs. C'est en quelque sorte leur échec à eux tous. K. A.