Il fallait s'y attendre, car ce n'est pas une surprise ! Il n'était donc guère étonnant de voir le gouvernement d'Abdelmadjid Tebboune mettre beaucoup d'énergie et de détermination dans cette entreprise d'assainissement à laquelle il s'est attelé depuis sa nomination. Et c'est encore moins étonnant de le voir agir avec autant d'ardeur et de motivation, car il a été justement désigné pour cela. Il s'agissait donc de nettoyer les écuries d'Augias qui sentaient tellement fort qu'il n'était plus possible de rester passifs devant le degré d'insalubrité et de putréfaction atteint par la gestion des affaires et des biens publics ! Rappelons-le alors : le successeur du débonnaire et laxiste (doux euphémismes) Abdelmalek Sellal, a été nommé pour cela par le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika. Il est donc muni d'une feuille de route claire, et avec une exigence de résultats. Et cette feuille de route a été très largement approuvée par les deux chambres du Parlement. En clair, le Premier ministre, dûment investi par le chef de l'Etat, agit ainsi en toute légitimité, et avec l'appui manifeste de la représentation politique nationale. Il ne règle par conséquent aucun compte personnel, mais s'évertue à mettre de l'ordre dans les comptes publics. Et s'il a mis en place les groupes de travail adéquats qui y regarde, au plus près, il fallait donc commencer notamment par ce qui est le plus gros, le plus flagrant et le plus préjudiciable au Bien commun, à savoir l'état réel du respect des obligations contractuelles par le premier groupe de BTP du pays, en l'occurrence l'ETRHB d'Ali Haddad que la rumeur publique, qui a tendance à enfler, faisait passer pour un intouchable, un incontournable, un super privilégié qui jouirait d'une protection nucléaire suprême. Et qui, de ce fait, pouvait se permettre de faire n'importe quoi. De fouler, en toute impunité, les lois de la République qui ne seraient faites finalement que pour les autres, c'est-à-dire ceux qui n'ont rien à se reprocher et qui auraient donc tendance à les respecter ! Mis en demeure de se mettre en conformité et de rendre des comptes à qui de droit, c'est-à-dire au gouvernement, la réaction de l'intéressé n'a pas tardé et, franchement, elle n'est guère étonnante ! Dans une attitude impulsive, il est même allé jusqu'à demander le départ du Premier ministre, puis de mobiliser ensuite la centrale syndicale UGTA et quelques organisations patronales, sensées défendre une victime expiatoire. C'est à dire un patron emblématique, objet d'un présumé acharnement politique qui serait l'œuvre d'un Premier ministre empêcheur de tourner en rond, trouble-fête et rabat-joie ! Mais pourquoi donc, symboliquement, Ali Haddad a été le premier entrepreneur privé à être rappelé à ses obligations contractuelles ? Tout simplement, parce que c'est celui qui a le plus bénéficié, et très largement, de la manne de la commande publique, en obtenant les plus gros marchés en matière d'infrastructures publiques. Il a donc plus d'obligations que les autres. Et il a suffi alors de juste jeter un coup d'œil sur l'état d'avancement des projets qui ont été confiés à l'ETRHB pour s'apercevoir de l'énormité des choses ! Et c'est même inouï, incroyable à admettre ! 20 projets au total depuis 2011, répartis dans 16 wilayas, sont à l'arrêt ! Pis encore, le groupe n'a pas le minimum de moyens, l'expertise et les capacités managériales pour les réaliser. D'où le recours absolument excessif, et contraire à la loi, à la sous-traitance étrangère, précisément avec des Espagnols, des Turcs, des Chinois ou des Portugais, avec, à la clé, les inévitables surcoûts et leur corolaire, la surfacturation ! Et l'on apprend aussi que l'ETRHB n'est pas en mesure de répondre dans le délai imparti de 6O jours aux mises en demeure publiques. On apprend aussi que le Groupe aurait bénéficié de contrats pour un montant global de 4 milliards de dollars, et qu'il aurait reçu déjà le 1/4 en guise d'avances. Et on sait par la même occasion que les banques publiques ne sont plus disposées à le financer comme elles le faisaient avant. Bref, on découvre au final, et ce n'est guère une surprise, que l'ETRHB est un géant en carton-pâte, au même titre qu'un vulgaire Tonic Emballage ou qu'un ridicule Khalifa ! Mais tout géant en papier journal qu'il est, Ali Haddad a tout de même profité du beurre, de l'argent du beurre et du fermier qui le produit ! Notamment en achetant en décembre 2011, un des joyaux de l'hôtellerie de luxe espagnole, l'Hôtel Palace (ex-Ritz) de Barcelone. Aginyo Invesiones y Gestiones Inmobiliarias, S.L., société qui appartient à Ali Haddad, l'a acheté à la société espagnole Inmobiliaria Sarasate pour 67,6 millions d'euros, pour le proposer à la vente en 2013, pour 62 millions d'euros. Dans ce cas, donner tort à Abdelmadjid Tebboune et au chef de l'Etat qui l'a investi, es qualité, serait un blasphème, un acte antipatriotique même ! N. K.