La visite de Bouteflika dans la capitale targuie intervient dans un contexte régional délicat. Les informations faisant état de l'infiltration d'Aqmi au sein de la rébellion libyenne, déjà fortement encadrée par la mouvance islamiste de Benghazi, se confirment d'autant plus que l'élan de l'Occident commence à faiblir. Les Etats-Unis semblent avoir décidé d'arrêter leurs frappes contre les positions des loyalistes à Kadhafi alors que l'idée d'armer la rébellion est perçue par beaucoup d'Occidentaux comme un risque majeur de nature à profiter plus à Aqmi qu'aux insurgés. En tout état de cause, l'Algérie avait déjà attiré l'attention de la communauté internationale sur les conséquences d'une intervention militaire étrangère en Libye, aussi bien sur l'avenir du pays que sur la stabilité des deux régions, maghrébine et sahélo-saharienne. La situation de guerre civile en Libye constitue un terreau pour les terroristes d'Aqmi, assez aguerris pour exploiter le chaos libyen afin, d'une part, de légitimer leurs actions terroristes par le djihad contre l'invasion étrangère et, d'autre part, de renforcer leur position dans la région à travers un surarmement sans précédent. Des déclarations du président tchadien et les témoignages de Touareg maliens et nigériens convergent sur l'implication d'Aqmi dans le bourbier libyen pour récupérer des armes sophistiquées, notamment des missiles et des moyens de locomotion. La position algérienne sur la crise libyenne se justifie, au-delà des principes régissant sa politique étrangère, par l'inconséquence qui caractérise les décisions de la Ligue arabe légitimant l'ingérence occidentale et l'aventurisme de l'Occident qui fait de Kadhafi une victime et de la Libye une autre Somalie au profit d'Aqmi. Parallèlement à ses efforts au sein de l'Union africaine qui mène campagne pour sa feuille de route arrêtée le 10 mars dernier à Addis-Abeba, l'Algérie renforce la sécurité de ses frontières est avec la Libye afin de prévenir tout débordement de la crise libyenne mais surtout d'empêcher l'infiltration des éléments d'Aqmi avec les réfugiés qui fuient la guerre. A Tamanrasset, le président de la République aura l'occasion de rencontrer les populations locales dont les notables ne cachent pas les inquiétudes liées aussi bien à leur situation socio-économique qu'aux risques menaçant la situation sécuritaire dans la région sahélo-saharienne. A ce titre, l'implication des Touareg algériens dans la sécurité régionale est vitale, d'autant plus qu'ils sont plus au fait de la réalité prévalant dans un espace géographique immense qu'ils ont dompté et maîtrisé depuis la nuit des temps. A. G.
