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Maurice Audin, la disparition, la leçon d'Histoire de François Demerliac
Le documentaire a été projeté à la cinémathèque d'Alger
Publié dans La Tribune le 23 - 06 - 2011

Mardi dernier, la cinémathèque d'Alger projetait un documentaire inédit, Audin, la disparition, de François Demerliac. C'était aussi le 21 juin, date à laquelle 54 ans plutôt, Maurice Audin était déclaré «disparu» par les autorités coloniales. L'heure était donc à la commémoration et l'historien et chercheur Mohammed Rabah a tenu à s'exprimer avant le début du documentaire. Il a rappelé le souvenir d'un militant «encore vivant dans nos cœurs», devenu symbole d'une période historique qui continue à provoquer bien des remous. M. Rabah a aussi présenté le documentaire, diffusé pour la première fois le 28 juin 2010 sur la chaine française Sénat. Il a, par ailleurs, transmis les excuses du réalisateur absent pour «contingences familiales et professionnelles lourdes».
Maurice Audin, la disparition est une enquête. C'est-à-dire un travail d'investigation qui tente à travers les moyens qui sont la reconstitution chronologique, l'archive, filmique ou de presse, le rapport, le témoignage, de confronter deux versions des faits : Celle de la fuite de Maurice Audin, le 21 juin, lors d'un transfert de prison, et celle de sa mort, étranglé par le lieutenant Charbonnier lors d'une séance de torture, probablement entre le 11 juin 1957 date de son arrestation et le 21 juin. Les dix premières minutes du documentaire nous replongent dans le contexte de l'époque. L'armistice du 8 mai 1945, les massacres de Sétif, les prémices de la révolution algérienne. En mêlant images de propagande et témoignage d'anciens combattants de l'ALN à l'instar d'Abdelmadjid Azizi, de l'historien Mohammed Harbi, le réalisateur tente d'accentuer le contraste, celui de «l'apartheid» colonial. C'est aussi dans ce contexte de prise de conscience politique que se rencontrent Maurice et Josette Audin et qu'ils se marient en 1953. Trois ans après le déclanchement de la Guerre de Libération, en 1956, la gauche française au gouvernement vote les «pouvoirs spéciaux» en Algérie au profit de l'armée, s'installe alors un système de guerre de renseignement qui n'hésite pas à utiliser «la corvée de bois» ou la torture. Cet épisode est aussi évoqué pour marquer la désolidarisation du parti communiste français avec celui algérien, dans lequel milite le jeune couple Audin. Place aux faits, relatés principalement par Josette Audin et Henri Alleg. Le 11 juin 1957 à 11h du soir, raconte Mme Audin, un nombre important de parachutistes débarque pour arrêter Maurice Audin à son domicile. A la question de son épouse «où l'emmenez-vous ?», le lieutenant Charbonnier répond : «S'il est raisonnable, il sera là dans une heure.» Henri Alleg, alerté par l'épouse du mathématicien, se rend au domicile de ce dernier et se fait arrêter à son tour. Plan sur le centre de triage d'El-Biar, devenu lieu de détention et de torture. Le réalisateur balance entre les deux témoignages, celui de l'épouse qui raconte sa séquestration dans son appartement avec ses
3 enfants durant 4 jours, et de l'auteur de la Question, dernier à avoir vu Maurice Audin en vie, le 12 juin, à la sortie d'une séance de torture et qui aura ces mots «C'est dur, Henri». 16 juin 1957, Mme Audin fait appel à l'avocat Pierre Braun, membre de la commission de sauvegarde des droits et libertés individuelles, pour demander des explications à la police. Rien n'y fait, le pouvoir est aux mains des paras. Le 22 juin, un article de presse relate la disparition la veille du jeune militant communiste. Il se serait jeté de la jeep qui le transférait vers un autre lieu de détention et aurait été poursuivi en vain par un officier et un médecin, habitant des lieux. Le fait est filmé en reconstitution par François Demerliac. Des parachutistes en civil rendent visite à Josette Audin. «Ils faisaient les malins en parlant de mon mari à l'imparfait», confie-t-elle. La nouvelle, loin de rassurer Josette Audin, exacerbe son inquiétude. Elle porte plainte, le 4 juillet 1957, pour homicide volontaire. Sans succès. Commence alors une campagne médiatique dans le journal le Monde qui aboutira à la création du «Comité Audin» regroupant des intellectuels dont le professeur Schwartz, célèbre mathématicien qui dirigera la soutenance «posthume» de la thèse de Maurice Audin le 2 décembre 1958 à la Sorbonne, et Pierre Vidal-Naquet qui publiera, en 1958, à la veille du retour du général de Gaulle au pouvoir, l'Affaire Audin. Là, le réalisateur s'attarde sur l'ouvrage et le témoignage de son auteur pour mettre en évidence les contradictions de la version officielle. Pierre Vidal-Naquet évoque l'hypothèse d'un simulacre de fuite dans lequel un parachutiste cagoulé aurait joué le rôle de Maurice Audin en complicité avec l'officier qui l'aurait poursuivi. Seconde reconstitution. Le procès est d'abord instruit à Alger, puis transféré à Rennes, où fut jugée l'affaire Dreyfus. Entre en scène le témoignage de Robert Badinter. Il raconte les séances houleuses du procès en juin 1960, ou les «ultras» présent dans la salle en sont venus aux mains. Le 22 mars 1962, un décret amnistie «les faits commis dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre dirigées contre l'insurrection algérienne» et la cour de cassation finit par rejeter définitivement l'appel du Comité Audin en 1966. Mais Robert Badinter évoque «la vérité pour la première fois dans une cours de justice» concernant cette affaire, en 1967, avec la présentation de la première «preuve» tangible sur la mort de Maurice Audin sous la torture : Une note du garde des sceaux en émargement d'un rapport où il reconnaît les faits. Plus rien n'arrive jusqu'en 2000. L'appel de 12 intellectuels, relayé par la presse pour la réouverture du dossier, et la plainte en 2001, déposée pour «crime contre l'humanité» concernant la pratique de la torture pendant la Guerre d'Algérie apporte quelques éléments : Le chauffeur de la jeep, Yves Cuomo, reconnaît que le «prisonnier était cagoulé» et qu'il n'a donc aucune certitude quant à son identité. Mais la justice «s'est déclarée incompétente», dit avec émotion Josette Audin. Et ni Massu, ni Aussaresses ne reconnaissent les faits. Le lieutenant Charbonnier a, quant à lui, était décoré Commandeur de la Légion d'Honneur en 1976. L'Etat français n'a toujours par reconnu les faits. C'est une belle leçon d'Histoire que nous a donné François Demerliac en nous replongeant d'une manière si minutieuse et complète dans l'affaire Audin. Il est nécessaire que ce genre de travaux continue d'être diffusé ici et ailleurs et qu'au bout du compte, les questions mémorielles et historiques soient posées dans la sérénité. Il en va de l'avenir de deux peuples qui se font face.
F. B.


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