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Un passé glorieux, un futur incertain
Le Conservatoire central d'Alger
Publié dans La Tribune le 12 - 01 - 2012

Si la formation artistique a toujours été considérée comme la cinquième roue du carrosse, longtemps lésée et privée de prise en charge de la part de véritables décideurs, il existe une certaine catégorie de gens passionnés qui se battent au quotidien afin de transmettre leur savoir aux jeunes et cela malgré les moyens dérisoires dont ils disposent. Parmi ces personnes, nous avons eu le plaisir de rencontrer l'un des plus anciens enseignants d'art dramatique au sein du Conservatoire central de musique, de danse et de déclamation, Achour Ourais. Partageant son espace avec l'APC de La Casbah au boulevard Che Guevara et qui y a élu domicile, le Conservatoire d'Alger surprend ses visiteurs par son état délabré. Arrivé au 3ème étage, le son de la fanfare nous accueille. Rassemblés dans une classe, les musiciens d'instruments à vent sont en train de répéter, accompagnés de leur chef d'orchestre qui ne manque pas d'énergie. Notre hôte, M. Ourais, nous convie à assister à cette répétition en attendant l'arrivée de ses élèves. Professeur de théâtre depuis déjà 35 ans, M. Ourais, malgré son âge avancé, se distingue par sa passion pour son art, la même passion qui le pousse à descendre quotidiennement d'El Biar, où il réside, vers le Conservatoire pour donner le meilleur de lui-même et inculquer son savoir aux jeunes amateurs contre un salaire de misère. Très nostalgique, M. Ourais nous fait partager avec lui quelques souvenirs. Avec un gros classeur à la main, il nous dévoile les photographies des élèves de sa première promotion quand il enseignait au Conservatoire d'El Biar. «Quand je revois ces photos, je me dis qu'il est vraiment dommage que le théâtre perde des éléments brillants», dit-il. Ayant débuté sa carrière en 1978, M. Ourais rejoint le Conservatoire central en 1982. «A cette époque, il y avait de bons enseignants et de bons éléments. Le Conservatoire, ce n'est pas uniquement des murs, sa force réside en ses hommes», déclare Achour Ourais. «A l'époque, le Conservatoire disposait des moyens nécessaires pour travailler et motiver les gens, hélas on ne retrouve plus cette motivation aujourd'hui. Il y a beaucoup de gens qui prétextent le manque de budget pour justifier la dégradation de l'art, mais moi je dis que tout dépend du formateur», affirme notre interlocuteur en ajoutant : «Cette dégradation, je la vis comme une déception, cela me chagrine de perdre de bons comédiens.» Interrogé sur le plan mis en place par les autorités pour pérenniser la formation artistique, M. Ourais nous déclare que «l'Algérie ne possède pas une stratégie pour former les artistes à long terme, le théâtre devrait être enseigné à l'école dès l'âge de dix ans, je pense que c'est le meilleur âge pour commencer car l'enfant est en mesure d'assimiler». S'agissant de l'aspect financier, notre interlocuteur se dit se «désintéresser du côté matériel, je vis de ma passion et cela me suffit».

Portrait d'un combattant
Professeur atypique et adoré par ses élèves, Ourais se caractérise par sa technique d'enseignement anti-conformiste. «Quand j'ai un élève en face de moi, j'essaye de le pousser à donner le meilleur, je le pousse à bout parfois mais c'est pour dévoiler son potentiel et l'orienter. Il y a beaucoup de metteurs en scène qui négligent le côté créateur du comédien», affirme M. Ourais. Avec une formation étalée sur sept ans, ce qui paraît un peu long, M. Ourais se consacre chaque année à une nouvelle étape. «Au début, on procède à l'enseignement des rythmes, techniques vocales et diction. Au niveau de la seconde, on s'attaque aux déclamations de poèmes, mimes, expression corporelle et montage de scène. Par la suite, je présente des cours théoriques sur l'histoire du théâtre, on fait même des reprises des classiques algériens mais si je juge que l'élève est assez doué, je le libère au niveau de la 3ème année avec son diplôme», déclare l'enseignant.A 16h, la salle de cours réservée au théâtre commence à se remplir timidement, une dizaine d'éléments sont là. Agés de 18 à 25 ans, ces élèves nous affirment que s'ils se rendent au cours du conservatoire, c'est surtout à cause de l'absence d'autres formations. Mlle Wassila Mokrane est élève en 3ème année. «J'ai découvert un peu tardivement ma passion pour le théâtre. J'ai commencé à fréquenter la troupe de la maison de jeunes de mon quartier mais au début d'un certain temps j'ai décidé d'avoir une formation professionnelle avec un diplôme que seul le Conservatoire national délivre de nos jours. J'ai essayé d'intégrer l'Ismas mais mon niveau d'études m'a vite découragée mais je trouve aussi insensé d'imposer le bac pour apprendre le théâtre», lance l'élève. Assis sur un banc face à la scène, M. Ourais invite ses élèves à se produire sur les planches. Au menu, des extraits de pièces des classiques comme Antigone de Sophocle et des créations un peu surprenantes. Le professeur est assez exigeant, intransigeant, il scrute le moindre geste, parole de l'élève et n'hésite pas à faire des remarques. «Dans ce cours, je me sens vraiment libre», lance Wassila. Véritable militant anonyme, M. Ourais est animé par une force mystérieuse qu'il a, au fil des années, réussi à transmettre à ses élèves.

Une déception commune
Avec des frais d'inscription estimés à 800 dinars par an, le Conservatoire central s'est inscrit dans une politique de proximité visant à encourager le maximum de jeunes à s'inscrire à ses ateliers. A la fin du cours de théâtre, c'est le directeur de l'établissement qui nous reçoit dans ce bureau. Musicien de formation, M. Yassine Touati fait partie de la même école que l'enseignant, celle qui a connu les années d'or de l'art en Algérie et qui assiste presque impuissante à la dégradation de l'art, l'explosion de la violence et de la délinquance. «Le Conservatoire central a dévoilé au grand jour de grands noms que ce soit dans le domaine de la musique ou du théâtre. Nous comptons aujourd'hui plus de 600 élèves mais comme vous le constatez, nous avons un espace réduit, parfois même on libère nos bureaux pour permettre aux élèves d'avoir cours», dit-il en ajoutant : «Nous avons longuement attendu le projet d'un nouveau conservatoire, hélas, l'établissement en question a été donné à l'Institut national supérieur de musique (Insm). Nous avons aussi vécu des années difficiles, surtout durant la décennie noire, lorsque des gens ont squatté nos locaux les transformant en habitations, la plupart des archives ont été détruites d'ailleurs, heureusement qu'on a pu en sauver quelques-unes.» S'agissant de l'équipement du conservatoire, le responsable nous affirme un grand manque. «A l'étranger, le conservatoire bénéficie d'une aide interministérielle mais en Algérie, nous avons un budget restreint insuffisant pour l'achat des instruments. Notre dernier arrivage a été distribué à nos annexes fraîchement ouvertes dans des communes isolées comme Ben Talha et Sidi Moussa», affirme M. Touati. Conscient de l'importance de son combat qu'il mène quotidiennement en compagnie de ses formateurs, le directeur du conservatoire ne cache pas sa déception concernant l'état actuel de son établissement. «Ce n'est pas la motivation qui manque mais une véritable prise en charge et une revalorisation de la formation artistique et des loisirs de la part de nos décideurs. On peut sauver des milliers de jeunes de la délinquance car un artiste ne pourra jamais faire de mal à son prochain», affirme-t-il.Placé aujourd'hui sous la tutelle de l'Etablissement arts et culture de la wilaya d'Alger, le Conservatoire central d'Alger agonise dans un bâtiment vétuste et souffre du manque de considération de la part des responsables qui refusent d'y investir à long terme. Encore une fois, la culture est mise à rude épreuve, en attendant Godot.
W. S.


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