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Un cinéma en prise avec le monde
Bilan du 61e Festival de Cannes
Publié dans La Tribune le 29 - 05 - 2008


De notre envoyée spéciale à Cannes
Dominique Lorraine
Le délégué général du Festival, Thierry Frémaux, l'avait annoncé d'entrée : «C'est un festival de début de cycle, qui ouvre un cycle de 10 ans. Il épouse les changements du cinéma et essaie d'éviter le repli sur soi.» Le festival a-t-il tenu ses promesses ? Bien qu'il n'y ait eu aucune grande révélation comme Stranger than Paradise de Jim Jarmush (1983), road-movie contemplatif, tourné en noir et blanc, qui décroche la Caméra d'or ou, comme en 1986, avec Nora Darling n'en fait qu'à sa tête, le premier film de Spike Lee, la 61e sélection est riche de sa diversité et de sa qualité. Petite rétrospective thématique de cette cuvée 2008
Criminalité
Gomorra (grand prix) de Matteo Garrone, adapté du livre de Roberto Saviano, inquiétante plongée dans l'univers de la mafia calabraise d'affaires. La vie ne vaut rien pour les maffieux (les cadavres s'y ramassent à la pelle) mais rien ne vaut la vie pour ceux qui décident de s'échapper de cet univers criminel. Un film efficace et salutaire qui marque le renouveau du cinéma social en Italie dans la veine de Francesco Rossi (Main basse sur la ville) Johnny Mad Dog, antithèse du précédent, réalisé par le Français Jean-Stéphane Sauvaire, un film à l'américaine sur les enfants soldats au Liberia. Johnny le chien fou et ses accolytes tuent à tour de bras tous ceux qu'ils rencontrent : femmes, enfants, vieillards. Sans morale et sans sensibilité. Le film se complaît dans la description des massacres sans aucune réflexion. Question : que fait ce film en sélection officielle, à moins que le producteur, le cinéaste Matthieu Kassovitz, ait fait pencher la balance en sa faveur ?
Effigie avers/revers
Che du cinéaste américain Steven Soderbergh, portrait en deux parties du héros de la révolution cubaine interprété par l'acteur américain d'origine portoricaine, Benicio Del Toro, prix d'interprétation masculine. D'abord, à la fin des années 1950, dans la forêt cubaine où Fidel Castro et Che Guevara mènent habilement leur guérilla pour renverser le pouvoir du dictateur Fulgencio Batista jusqu'à l'arrivée victorieuse à La Havane. Le récit alterne les scènes de la longue marche avec une entrevue qu'a accordée le Che, par la suite, à une journaliste tout en étant parsemée de segments du discours du révolutionnaire à l'ONU en tant que ministre de l'Industrie. Puis, huit années plus tard, quand le Che décide de quitter son poste de ministre à Cuba pour retourner faire la révolution sur le terrain. Son nouvel objectif : une grande révolution latino-américaine dont la première étape serait la Bolivie. Le Che y laissera finalement sa vie, capturé puis exécuté, en 1967, par des contre-révolutionnaires boliviens. Un portrait de l'homme derrière la légende, présentant le Che comme un combattant et un politicien idéaliste, mais aussi comme un être très humain et fragile.
Il Divo (prix du jury) de Paolo Sorrentino, un autre portait avec une grande maîtrise et une grande inventivité de Giulio Andreotti, 89 ans, surnommé tout à tour «l'inoxydable», «le pape noir», «l'homme des ténèbres», politicien le plus complexe et le plus ambigu d'Italie qui, depuis cinquante ans, est au cœur de la scène politique.
«J'éprouve de la curiosité pour ce personnage qui est le symbole du pouvoir en Italie, explique le réalisateur. Sulfureux, indéchiffrable, énigmatique, Giulio Andreotti a eu une responsabilité politique certaine pour ce qui est du dysfonctionnement du pays, et pénal pour d'autres faits plus graves. Andreotti fait tout pour cultiver la dualité, répétant à l'envi que son film préféré est Dr Jekyll et Mr Hyde !»
Les frères
Il y a les frères Cohen, Joel et Ethan, Palme d'or en 1999 pour Barton Fink et trois fois prix de la mise en scène à Cannes : en 1991 pour Barton Fink, en 1996 pour Fargo et, en 2001, pour The Barber, l'homme qui n'était pas là.
Et les frères Taviani, Paolo et Vittorio, Palme d'or et prix de la critique internationale à Cannes, en 1977, avec Padre Padrone. Mais aussi les frères Dardenne, Jean-Pierre et Luc comme les apôtres. Deux Palmes d'or à leur actif : Rosetta, en 1999, et, en 2005, avec l'Enfant. Ils ont raté de peu le triplé. Mais le Silence de Lorna, un émouvant portrait de femme, a reçu le prix du scénario. Une jeune Albanaise a obtenu la nationalité belge en contractant un mariage blanc avec Claudy, un junkie instable, mariage combiné par Fabio, sorte de mafieux sans scrupule. Elle doit rendre la politesse en épousant à son tour un Russe, qui veut lui aussi s'établir en Belgique, ce qui suppose de se débarrasser de l'encombrant premier époux. Lorna, sensible, sincère et émouvante, qui est le centre du récit (et le pivot de l'histoire) passe par une succession d'états d'esprit et de sentiments qui la rendent complexe. «Ce qui nous a essentiellement intéressés, c'est l'histoire d'êtres humains, de ceux qui viennent d'ailleurs, et comment, par des manières qu'on ne peut saluer, ils arrivent à obtenir ce qu'ils pensent être leur part de bonheur. Mais nous avons voulu que Lorna reste un être humain avec ses paradoxes, ses contradictions et ses silences», a expliqué Jean-Pierre Dardenne lors de la conférence de presse. Sans doute le plus beau film du festival.
Frontières
Los Bastardos du Mexicain d'Amat Escalante interroge à sa façon notre rapport à l'image et au monde qui nous entoure. A Los Angeles, comme chaque matin, Fausto et Jesùs, deux travailleurs mexicains clandestins, attendent au coin d'un terminal de bus dans l'espoir d'être embauchés. Les tâches sont ingrates et très mal payées, mais demeure la nécessité de gagner un peu d'argent. L'injustice et l'humiliation les conduisent à une violence extrême. Los Bastardos s'inscrit dans la poursuite d'un cinéma engagé et viscéral dans la continuité de Sangre et du cinéma de Carlos Reygadas. Troublant.
Le Sel de la mer d'Annemarie Jacir : Soraya, jeune femme de 28 ans, née et élevée à Brooklyn, rentrée en Palestine, et Emad, un jeune Palestinien né à Dawwayma (qui rêve de poursuivre ses études au Canada) décident de franchir la frontière israélienne pour aller voir la mer (cette mer si proche, à quinze minutes en voiture, mais inaccessible pour les habitants de Ramallah qui n'ont pas l'autorisation de se rendre à El Qods). Dans cette course à la vie, ils nous emmènent sur les traces de leur histoire en Palestine perdue.
Laissés-pour-compte
Versailles du Français Pierre Schroeller. Dans les bois, tout près du château, unhomme, Damien, vit dans une cabane, retranché de tout. Nina, sans emploi ni attaches, passe une nuit avec lui, puis disparaît en lui laissant son fils Enzo, 5 ans. Au fil des jours et des saisons, l'homme et l'enfant vont se découvrir, s'apprivoiser, s'attacher. Leur lien sera aussi fort que leur dénuement. Loin des préjugés, Guillaume Depardieu, habité par Damien et toujours excellent, décline à l'envi les obsessions de ces exclus de la société : lutter contre la faim, le froid, la saleté, la marginalité. Un bel exemple de résilience.
Les Enfants de Don Quichotte. Acte 1 Le porte-parole des Enfants de Don Quichotte a quitté les rives du canal Saint-Martin (où les sans-logis parisiens sans abri ont planté leurs tentes grâce à l'association d'entraide Don Quichotte) pour la Croisette, avec un film traitant des sans-abri et du droit au logement en France (Semaine de la critique). Augustin Legrand, qui a coréalisé ce «film militant» en famille (avec son frère Jean-Baptiste et son beau-frère Ronan Dénécé), estime que «voir ce film sera un acte citoyen et militant». Un film nécessaire qui est une arme pacifique.
Prison
Leonora de l'Argentin Pablo Trapero. Le cinéaste décrit très précisément l'univers carcéral réservé aux mères emprisonnées qui peuvent garder leurs enfants jusqu'à l'âge de 4 ans à travers le parcours de Julia, accusée (injustement) et condamnée pour le meurtre de son ami.
Mise en scène sobre, sans pathos et excellente interprétation de Martina Gusman. Hunger, premier film de l'Anglais Steve Mac Queen, artiste vidéaste de grand talent, consacré à Bobby Sands et à ses camarades détenus. C'est le récit dépouillé des grèves de la faim des républicains irlandais dans la prison de Maze, en 1981, pour obtenir le statut de prisonniers politiques et la mort de Bobby Sands à l'âge de 27 ans, après 66 jours de jeûne. Hunger n'est pas seulement un film sur Bobby Sands mais sur les décisions, bonnes ou mauvaises, que prennent les êtres humains et leurs conséquences…) «Je veux questionner la morale des spectateurs, je veux que l'écran soit un miroir», assure le réalisateur. A défaut d'une Palme d'or (puisque le film n'était pas en compétition et on se demande bien pourquoi), une Caméra d'or bien méritée. Les Trois singes du Turc Nuri Bilge Ceylan, prix de la mise en scène. Un chauffeur endosse la responsabilité d'un accident mortel commis par un homme politique, à la veille d'une élection régionale et écope d'une peine de prison qu'il va devoir purger. Le titre fait référence aux trois singes de la tradition japonaise : Mizaru (celui qui ne voit pas), Kikazaru (celui qui n'entend pas) et Iwazaru (celui qui ne parle pas). Un drame à huis clos sur le mensonge, la tromperie, le pardon, l'amour et la haine.
Sabra et Chatila
Valse avec Bachir, film d'animation politique dans la veine de Persépolis de Marjane Satrapi, donné vainqueur de la Palme par certains critiques. Si Ari Folman n'est pas devenu cinéaste pour exorciser son passé, Valse avec Bachir découle, néanmoins, directement de sa propre expérience lorsqu'il effectuait son service militaire dans l'armée israélienne. Le cinéaste reconnaît lui-même que cette aventure de près de quatre ans s'est imposée comme une véritable thérapie, souvent douloureuse, «un violent bouleversement psychologique». Cependant, si l'on reconnaît volontiers la qualité de l'animation, l'esthétisme du film venant du coup se heurter au sujet dramatique, la participation de l'armée israélienne au massacre de Sabra et Chatila, perpétré en septembre 1982, est minorée. «Sans doute, j'étais seul, je veux dire seul Européen avec quelques vieilles femmes palestiniennes s'accrochant encore à un chiffon blanc déchiré, avec quelques jeunes fedayin sans armes.»
«Mais si ces cinq ou six êtres humains n'avaient pas été là et que j'aie découvert cette ville abattue, les Palestiniens horizontaux, noirs et gonflés, je serais devenu fou. Ou l'ai-je été ? Cette ville en miettes, et par terre que j'ai vu ou cru voir, parcourue, soulevée, portée par la puissante odeur de la mort, tout cela avait-il eu lieu ?» a écrit Jean Genet dans Quatre heures à Chatila.
Le sport dans le temple du 7e art
Tyson de James Toback (USA). Plus d'une heure d'éléments winédits, agencés autour de documents d'archives sur ses combats, d'interviews et de photos du grand champion Mike Tyson. De ses premiers souvenirs d'enfance jusqu'à ses dilemmes actuels, le boxeur est tour à tour sombre, violent, drôle, absurde, tragique, d'une franchise désarmante.
L'athlète légendaire est aussi une figure emblématique des problèmes de race et de classe qui déchirent l'Amérique. Tyson a vu Tyson à Paris, avant la première du film à Cannes. En regardant ainsi, pour la première fois, les images de sa défaite, en 1990, contre Buster Douglas, il déclare ému : «C'est comme une tragédie grecque, constate-t-il. Le problème est que j'en suis le héros.»
Maradona by Kusturica. Le cinéaste serbe trace le portait de l'ex-star du ballon rond qui va loin dans l'hystérie religieuse (il existe même une église maradonienne !) et fait l'éloge de la joie et de la vie. On chante, on danse, on fait la fête. On est dans un grand bain de jouvence, entre folklore et humanité. Il y a de la vitalité d'un Sancho Pança chez l'espiègle Maradona. Qui conclut, cabotin, à l'heure de se souvenir de sa plongée en enfer : «Ah, Emir, quel grand joueur j'aurais été si je n'avais pas pris de la cocaïne. Quel grand joueur on a perdu ! »
Pour terminer cette chronique, un salut respectueux au grand cinéaste américain Sydney Pollack qui vient de disparaître. C'est grâce à Propriété interdite(1966), très abouti et première de ses sept collaborations avec Robert Redford, qu'il se fait remarquer. Son western Jeremiah Johnson (1972) est en sélection officielle lors du 26e Festival de Cannes.
Sydney Pollack a touché à tous les genres : drame (On achève bien les chevaux), western (Jeremiah Johnson), suspense (les Trois jours du Condor en 1975), comédie (Tootsie, 1982) ou grande fresque romanesque (le mythique Out of Africa aux sept Oscars en 1985), qui lui permettaient d'aborder le thème des libertés humaines face à la nature, aux médias ou aux institutions, credo de son œuvre cinématographique.
Revenant à son métier d'acteur, il fait deux apparitions fracassantes, dans Maris et femmes de Woody Allen et dans Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.
Adieu, maître !


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