Photo : S. Zoheir Par A. Lemili Ce serait escamoter la véritable question de la culture, son impact sur les populations et le rapport de ces dernières à cette même culture que de ne pas évoquer une forme de ségrégation sur le fond et la forme de la politique du secteur à l'endroit des citoyens selon leur situation géographique et/ou l'importance de leur région. Mais au-delà même de cette ségrégation, ce secteur au demeurant essentiel dans une démocratie n'arrive toujours pas à se débarrasser des oripeaux du dilettantisme, si tant est que cela en soit la cause et non pas l'incompétence qui s'y est incrustée. Incompétence de l'ensemble des acteurs où qu'ils se situent, autrement dit sur les tréteaux, les plateaux de cinéma, les couloirs de la télévision, la radio, dans leur contre-champ et forcément du coté des publics en considérant qu'il existe encore un type de public.En «avançant» à reculons depuis une vingtaine d'années, la culture voyage plus vers le passé que vers un rayonnant futur. Quoique très officielle à partir de la moitié des années soixante, celle-ci a donné, comparativement à ce qui existe aujourd'hui, le nec plus ultra de sa substance en formant et fidélisant un public, du fait d'un éclectisme insoupçonné mais effectivement renouvelé et actualisé. Non ! Ceci n'est nullement une hérésie et ce ne sera qu'à la faveur d'une sorte de passage à vide que la décennie 1980-1990 entrera dans une torpeur, une période végétative imputable à des facteurs exogènes sans relation établie avec la culture, mais qui, en raison de leur nature sociétale, la pénalise à l'image d'une succession de crises économiques partielles, d'une vacuité politique nationale qui ne dira son nom qu'en 1988 et une catharsis à partir de 1990. Mais, encore une fois, cela n'allait pas durer en raison d'une instabilité sociale, politique et économique contraignant les populations à prendre leurs distances par rapport à tout ce qui était synonyme d'Epicure. Depuis cette rupture vraisemblablement irréversible, la relation entre le citoyen et la culture était devenue criante, d'autant plus avec l'absence d'activités dites traditionnelles et populairement ancrées dispensées par les salles de cinéma à 95% inactives, des représentations théâtrales épisodiques et souvent pompeuses et/ou rébarbatives, des spectacles diversifiés d'une indigence confinant à la déprime ensuite, une atrophie cérébrale chronique chez les réputés créateurs et créatifs et enfin des méga-manifestations institutionnelles généralement abhorrées par le jeune public. Enfin, le coup de grâce sera donné par l'émergence initiale de la télévision transmise par satellite et aujourd'hui par les multimédias. La culture n'est pas en mesure de satisfaire les attentes des publics parce qu'en réalité de public il n'en reste que celui auquel, vaille que vaille, se cramponnent encore quelques optimistes… des poètes même.