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La gauche latino-américaine à l'épreuve de la démocratie
Chavez en était le leader et l'avant-garde
Publié dans La Tribune le 08 - 03 - 2013

La disparition de Chavez soulève la question de la continuité pas seulement au Venezuela mais dans tous les pays latino-américains dont les peuples ont mis leur destin entre les mains d'une gauche soft néanmoins franchement anti-impérialiste et anti-capitaliste.
L'évolution de la situation au Venezuela, à la suite des élections anticipées qui se tiendront dans un mois, sera un indice sur la nature du choix des Vénézuéliens à savoir s'il s'agit du choix d'un homme ou d'une alternative et d'un programme. En effet, l'avènement de Chavez n'est pas un hasard. Ce sont des dynamiques sociopolitiques qui l'ont propulsé au devant de la scène vénézuélienne. A l'instar de beaucoup d'autres pays d'Amérique latines, le Venezuela a été traversé par des troubles politiques et a connu des mouvements de guérilla marxiste d'extrême gauche.
Mais cette violence révolutionnaire, restée marginale, n'a pas perturbé l'alternance au pouvoir des deux grands partis que sont l'Action démocratique et le Parti démocrate-chrétien. En raison de la croissance économique due aux revenus du pétrole, le pays connut une modernisation rapide. Mais le modèle économique ne permit ni la diversification ni une répartition équitable des richesses. Le malaise social s'accrut dès la fin des années 1980. En février 1989, l'augmentation brutale des prix à la consommation dans le cadre d'un
programme d'austérité et de mesures de rigueur déclencha de vives protestations et des émeutes sanglantes à Caracas et dans plusieurs villes. En fait, ces troubles sociaux connaîtront des périodes de répit sans jamais s'arrêter définitivement. En 1992, deux
tentatives de coup d'Etat militaire ont été réprimées, mais le pouvoir est resté fragilisé. Le président Carlos Andrés Pérez Rodriguez (mandats de 1974 à 1979 et de 1989 à 1993) a été suspendu de ses fonctions en mai 1993, après que le Sénat eût décidé de le faire passer en jugement pour détournements et abus de fonds publics. En décembre 1993, Rafael Caldera a été élu à la présidence du pays (pour une seconde fois): il a suspendu les garanties constitutionnelles dans l'intention d'enrayer la crise financière et économique et de mettre fin à l'agitation sociale. En juin 1996, le Venezuela a signé avec le Fonds monétaire international (FMI) un accord de réajustement économique impliquant la hausse des prix des produits de première nécessité et la privatisation de certaines entreprises comme la Corporación de Guyana, l'un des grands complexes industriels publics du pays. La croissance a redémarré en 1997 grâce à la hausse des cours du pétrole et l'inflation se maintint autour de 40 %. Mais le pays traversait une crise politique majeure et la paupérisation de la population s'accentuait. En décembre 1998, l'ex-lieutenant-colonel Hugo Chavez Frías, auteur d'un coup d'Etat raté en février 1992 (ce qui lui avait valu deux années de prison) et devenu «héros» des défavorisés, a facilement remporté l'élection présidentielle, alors que les deux partis qui se partageaient le pouvoir depuis plus de quarante ans ont été liquidés. Sa propre coalition, le Pôle patriotique (une dizaine de partis de gauche et nationalistes), a obtenu 32 % des voix lors des élections législatives de novembre 1998. Investi des pouvoirs de président de la République en février 1999, il a annoncé le début du «processus révolutionnaire démocratique et pacifique» et a affirmé son intention d'en finir avec la corruption et le «néolibéralisme sauvage», de redresser l'économie du pays et de «refondre la République». Chavez avait promis de rendre le pouvoir au peuple en mettant fin au système corrompu accaparé par les deux grandes formations qui avaient signé un accord dans les années soixante pour se partager les responsabilités à la tête de l'Etat. Dès son investiture, Chavez a annoncé la couleur : il a refusé de jurer fidélité à la Constitution de 1961 et a annoncé la convocation d'une assemblée constituante. Il est aisé de comprendre l'opposition farouche de l'opposition classique qui ne reconnaissait pas le droit du peuple de modifier la Constitution. Mais la réponse des électeurs était un plébiscite à la fois à la nouvelle constitution avec 77% des voix et à la démarche globale d'Hugo Chavez. A travers cette Constitution promulgué en décembre 1999, le Venezuela a ainsi institutionnalisé la «révolution bolivarienne» de son président, Hugo Chavez. Pour les partisans du OUI, il s'agissait de balayer un ancien régime inefficace et corrompu, et d'offrir «un certificat de naissance au nouveau Venezuela» en tant que «démocratie populaire et participative» inspirée de l'exemple de Simon Bolivar, héros du pays et «Libertador» de l'Amérique latine. Dans la nouvelle Constitution, la torture, la séquestration et les atteintes aux droits de l'Homme ont été prohibées, tandis que
les droits des indigènes (autonomie territoriale, éducation appropriée, interprète dans les procès, etc.) ont été, enfin, reconnus et institutionnalisés. Dans l'espoir vain de discréditer Chavez, ses adversaires s'attaquent à la dimension formelle de l'exercice du pouvoir et au langage du président. Voici à ce sujet le témoignage d'un Vénézuélien de haut rang : «Chavez ne respecte pas le protocole. Il fait exprès de mal parler. Beaucoup de Vénézuéliens ne l'aiment pas par pur snobisme. [...] Il leur fait honte, ils ont peur que le monde entier s'imagine que tous les Vénézuéliens sont comme ça.» Le recours à un langage faubourien («lenguaje barriobajero»), plus proche de la marginalité que de celui d'un homme d'Etat, a permis à Hugo Chavez de nourrir l'illusion qu'il n'était pas un usurpateur du pouvoir, mais plutôt la voix des masses populaires. Le président vénézuélien semblait adorer recourir à un langage scatologique («lenguaje
escatológico») assorti de métaphores insultantes destinées à décrire ses adversaires politiques comme des «ennemis mortels dignes d'être pulvérisés» («enemigos mortales dignos de ser pulverizados») plutôt que des adversaires avec lesquels il était possible de dialoguer. Pour en finir, l'opposition a invoqué en août 2004, une disposition constitutionnelle dans le but de destituer Chavez. Ce dernier s'y était soumis. Une fois encore, les Vénézuéliens ont écrasé l'opposition en offrant à Chavez un soutien franc et sans appel.

Les raisons de la popularité de Chavez
Chavez a été porté au pouvoir par une dynamique populaire sans précédent en Amérique latine. Les Vénézuéliens l'ont choisi pour deux raisons majeures : son anticapitalisme et son origine indienne. Ces deux facteurs vont également déterminer les choix des peuples en Bolivie et en Equateur. L'identité indienne semble se confondre avec les options politiques au profit des masses d'autant plus que les Indiens d'Amérique latine ont toujours été marginalisés.
Au-delà de ses origines, Chavez a été élu sur la base d'une vision, d'un programme, d'une alternative. Chavez a mis en place des
programmes sociaux qui ont contribué réellement à sa popularité, dont plusieurs programmes en éducation tels que les «Misión Robinson» (une campagne d'alphabétisation), «Misión Ribas» (pour les exclus du système scolaire) et «Misión Sucre» (pour les élèves du secondaire), destinés à l'alphabétisation, avec la participation de plusieurs milliers d'enseignants cubains. Ainsi, la Misión Robinson, pour l'alphabétisation des adultes, en fonction depuis le mois de juin 2003, est parvenue à alphabétiser près d'un million et demi de
personnes, selon les chiffres du gouvernement vénézuélien. Pour le président Chavez, la Misión Ribas était un acte de libération: «La Misión Ribas es un acto de liberación.» Cependant, certains reprochent aux «missions» en éducation leur faible niveau d'enseignement, notamment en raison des qualifications peu exigeantes chez les «facilitateurs» et du peu de contrôle des apprentissages. Néanmoins, pour Chavez, ces classes créaient des dynamiques communautaires susceptibles de se transformer en appuis politiques non négligeables. Chavez a voulu redonner leur voix aux pauvres de son pays. Il a voulu convaincre des gens qui n'avaient pas le
sentiment d'être des Vénézuéliens que l'Etat était le leur. Toutefois, pour atteindre cet objectif, il a décidé qu'il fallait diminuer la valeur des voix des autres Vénézuéliens, celles des riches et de la classe moyenne, ainsi que celles des entrepreneurs.
En quatorze ans de règne, Chavez aura réussi à réduire de moitié le taux de pauvreté dans un des pays les plus inégalitaires de la planète. Grâce aux revenus du pétrole, il a financé de généreux programmes sociaux, il s'est attaqué aux bidonvilles, il a fait reculer la mortalité infantile et il a réussi à diminuer substantiellement le niveau d'analphabétisme. Mais, pour avoir accès à ces programmes sociaux, les pauvres devaient posséder une carte d'identité, ce qui a eu pour effet d'augmenter considérablement l'enregistrement des
électeurs dans les classes les plus favorables au président Chavez. Si l'Occident capitaliste reconnaît les réalisations et les avancées sociales du Venezuela sous Chavez, il n'en retient pas moins «son échec économique» dans la mesure où il refusait de se soumettre aux diktats des multinationales qui voulaient s'accaparer les richesses du Venezuela comme elles l'ont fait ailleurs. C'est ce qui explique l'euphorie mal dissimulée des lobbies capitalistes à l'annonce de la mort de Chavez. La presse occidentale pro libérale se frotte les mains aussi et s'attend à un changement dans un mois. D'autres analystes tablent sur l'essoufflement du Chavisme mais pas dans l'immédiat.
Selon le politologue Farith Fraija, le vice-président vénézuélien ne devrait guère être menacé lors du prochain scrutin. «Cela va être très difficile de pouvoir entrer dans une compétition électorale avec un candidat comme Nicolas Maduro, adoubé par feu le président Chavez», assure-t-il. Ce dernier n'imagine pas, non plus, de fragmentation du Chavisme en plusieurs courants. Au contraire. «Avec la mort de Chavez, c'est le Chavisme qui commence au Venezuela (...) Il n'y a pas juste la loyauté à une personne, mais aussi l'identification à un projet politique», déclare-t-il, en le comparant avec le «péronisme» en Argentine, dont se revendiquent toujours les héritiers du dirigeant nationaliste Juan Domingo Peron.
La perspective d'un changement au Venezuela dépend en fait, de la capacité des pouvoirs de gauche en Amérique latine de résister à la tentation libérale et à transcender leurs contradictions internes et les limites de leur modèle de développement. Seul, le modèle vénézuélien ne fera pas long feu. D'autant plus qu'il est attaqué de toute part, par une opposition interne compradore prête à troquer les richesses du pays contre le pouvoir qu'elle a perdu depuis quatorze ans et un environnement mondial, certes en crise, mais impitoyable avec tout pays qui se soustrait à la sacro-sainte règles de la libre entreprise et de la libre concurrence. L'avenir du Venezuela dépend de la capacité de l'Amérique latine qui s'est inscrite dans une dynamique de progrès et de souveraineté sur ses richesses, de répondre aux besoins des populations en matière de bien-être social, de liberté et de justice. «Personne ne peut reprendre le flambeau, personne n'en a les ressources ou l'ambition, mais cela ne signifie pas la fin de la gauche dans la région», estime Michael Shifter, président du Centre d'études Dialogue inter-américain, basé à Washington. Pour Riordan Roett, Chavez combinait «charisme, férocité,
franc-parler et ferveur idéologique» et «aucun des autres dirigeants de la gauche latino-américaine ne présentent ces caractéristiques, encore moins Nicolas Maduro», le vice-président du Venezuela et successeur souhaité par Chavez.
Hugo Chavez a été le grand artisan de la coopération entre pays ibéro-américains, jadis sous l'influence des Etats-Unis, en créant diverses organisations comme l'Union des Nations sud-américaines (Unasur), la Communautés des Etats latino-américains et des Caraïbes (Célac) ou l'Alliance bolivarienne des peuples d'Amérique (ALBA). Avec le soutien de la présidente brésilienne, Dilma Rousseff, il a ouvert à son pays les portes du Mercosur, le marché commun du Cône sud en 2012.
Qu'adviendra-t-il de Petrocaribe, le mécanisme de coopération pétrolière à destination des pays amis ? «Je crois que celui qui le remplacera (à la présidence du Venezuela) maintiendra ce processus pour préserver les alliances politiques», estime Paulo Velasco. L'expert de l'Université Johns Hopkins pense au contraire que le Venezuela fera preuve de pragmatisme : dans un pays rongé par l'inflation, où le tissu industriel s'est détérioré, où les infrastructures manquent, où la dette atteint 50% du PIB et qui a besoin d'investir dans son industrie pétrolière, «les Vénézuéliens vont-ils vouloir vendre leur pétrole brut à un tarif subventionné ou préfèreront-ils le vendre au prix du marché, à la Chine?», se demande-t-il. L'enjeu économique dans le contexte mondial d'aujourd'hui est certes important, mais les choix stratégiques des pays de l'Unasur le sont encore plus pour peu que ces pays développent un réel espace économique et politique régional intégré qui ne se limite pas à un échange commercial. L'avenir de toute l'Amérique latine en dépend.
A. G.


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