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Merakchi : «Le général Lamari m'a menacé de m'envoyer à Aïn M'guel en cas de défaite face à l'Egypte»
Publié dans Le Buteur le 03 - 08 - 2009

«J'ai fait 2 ans de prison en France pour avoir asséné un coup de tête à un Français qui m'a traité de sale Arabe»
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Commençons par la fin : que vous est-il arrivé récemment à l'USM El Harrach où l'entraîneur Boualem Charef vous voulait, mais les supporters s'étaient opposés avec force ?
Il faut rétablir les choses dans leur contexte. Ce ne sont pas les supporters qui m'ont refusé. Je n'ai nullement ressenti une hostilité de leur part, bien au contraire. J'ai été très bien accueilli par eux. Le seul qui s'est opposé à ma venue est le quidam qui s'est autoproclamé président du comité des supporters, le nommé Doumi, qui a mené une campagne contre ma personne pour des raisons que j'ignore jusqu'à présent. Il est même allé jusqu'à tenter de m'agresser. Lorsque j'étais à l'USMH en 2994, je ne le connaissais même pas. Ayant bien vu que j'allais être ciblé tout au long de la saison, quelles que soient mes performances, j'ai décidé de faire mes bagages et de rentrer chez moi, surtout que j'avais constaté que l'entraîneur Charef n'était plus aussi déterminé à me garder, car ne supportant certainement pas toutes les pressions exercées sur lui à cause de moi.
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Vous a-t-on refusé à l'USMH sous prétexte que vous êtes relativement âgé ?
Ces gens doivent savoir que je ne suis pas vieux. Je suis né en janvier 1976, ce qui veut dire que je n'ai que 33 ans. Donc, je suis plus jeune que des dizaines de joueurs qui évoluent encore en Division 1. Je me demande depuis quand l'âge détermine le niveau d'un joueur. Ce qui me chagrine, c'est que j'étais sûr de pouvoir apporter un plus à l'USMH après m'être adapté au jeu avec le groupe, surtout avec Djabou avec qui j'ai vite trouvé mes marques.
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On dit que Charef est votre ami et que son désir de vous recruter répondait à des intérêts personnels…
Ceux qui connaissent bien Charef ne croiront certainement pas ces racontars. S'il y a bien un entraîneur rigoureux qui ne met jamais les sentiments en avant, c'est bien lui. S'il a demandé mes services, c'est tout simplement parce qu'il connaît mon potentiel et ce que je peux apporter à l'équipe.
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Vous aviez joué à El Amria la saison passée. Pensez-vous pouvoir apporter quelque chose à une équipe de Division 1 ?
Avec El Amria, j'ai retrouvé les terrains après une longue absence. J'ai pu quand même terminer la saison en étant le buteur de l'équipe. Plus même : j'ai eu le prix du fair-play car je n'ai écopé d'aucun avertissement tout au long de la saison. Beaucoup de joueurs et de supporters adverses avaient pourtant tout fait pour me provoquer, mais Merakchi a beaucoup changé. Désormais, je me contrôle et me mets au-dessus de ces considérations. Je suis même le premier à intervenir pour mettre un terme aux accrochages et aux débuts de bagarre. A la fin de la saison, j'avais comme ambition de jouer à un plus haut niveau et à mettre mon expérience pour aider des jeunes à s'aguerrir au poste d'avants de pointe. L'USMH aurait pu être une belle opportunité, mais cela ne s'est malheureusement pas concrétisé.
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Vous avez eu une expérience plutôt malheureuse à l'USMH où vous aviez raté l'accession lors de la dernière journée face à l'OMR El Annasser. Que gardez-vous de ce passage ?
Ce qui s'était passé lors de cette expérience m'a encouragé à accepter l'offre de Charef pour revenir à l'USMH. Rater l'accession durant la dernière journée est un souvenir plus qu'amer pour moi. J'aurais aimé contribuer à ramener l'USMH à sa vraie place, mais cela n'a pu se faire. Je dis sans hésitation que cet échec incombe entièrement à l'entraîneur de l'époque, Chaâbane Merzekane, dont les choix tactiques durant le match face à l'OMR ont été mauvais. Il a sorti le moteur de l'équipe, Abacha, ce qui s'est révélé handicapant. De même, il m'a fait sortir, ce qui a permis aux défenseurs chargés de me marquer de monter vers l'attaque. Je pense que le match aurait pu prendre une autre tournure si Merzekane avait su bien le gérer.
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Revenons au commencement. Comment ont été votre enfance à Aïn Témouchent et vos débuts dans le football ?
Je n'ai pas eu une enfance facile. Je ne suis pas né avec une cuillère d'argent. J'ai vu le jour dans une maison recouverte de tôle. J'ai vécu des conditions sociales extrêmement difficiles. Mon père était très sévère et c'est ce qui a influé sur ma relation avec lui. Il était dirigeant au club Zedouria de Aïn Témouchent et c'est ce qui explique que la plupart de mes frères sont passés par ce club. Il était donc évident pour moi aussi d'en faire de même. Ainsi, et contrairement à beaucoup de gens, la voie du football a été plutôt un choix de ma famille.
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Qui a été le premier à croire en votre talent ?
Mon premier entraîneur, Kouider Afif. Il était lui aussi dirigeant au club. A l'instar de mon père, il était très sévère avec moi et m'entraînait sur le modèle militaire. Petit, il m'emmenait aux champs près de la maison et m'incitait à courir pour améliorer ma condition physique. Je m'entraînais comme un commando. Il ne me laissait en paix qu'une fois que mon maillot complètement trempé de sueur. Il en a été ainsi durant cinq ans. El Hadj Afif a été le premier à croire en mon talent. Il m'a dit que j'allais être un grand avant-centre. Il l'a même dit à mon père qui était devenu président du Zedouria. Il m'a entraîné dans les jeunes catégories et il ne pardonnait pas la moindre petite faute. Je me rappelle que lorsque j'étais cadet, il nous avait frappés avec une cravache dans le vestiaire, après que nous eûmes perdu face à El Amria par 3 à 2, alors que nous menions au score 2 à 0 grâce à un doublé que j'avais inscrit.
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Du Zedouria, vous êtes passé au premier club de la ville, le CR Témouchent. Quels souvenirs gardez-vous de ce club ?
J'avais brillé au Zedouria en étant le meilleur buteur dans toutes les catégories. J'ai quitté le club difficilement, car on ne voulait pas me laisser partir. J'étais très ambitieux, car El Hadj Afif m'a beaucoup motivé. Cependant, la mission n'était pas facile pour moi et pour Arafat Mezouar que j'ai croisé lors de son arrivée au CRT en provenance de Hammam Bouhadjar. Nous étions jeunes et il n'était pas facile, à ce moment-là, de déloger Belaïdi en attaque et Belahrouz ou El Hachemi au milieu du terrain. C'était de grands joueurs et Mezouar et moi n'avons jamais pensé pouvoir gagner notre place. Nous étions toujours remplaçants, plusieurs semaines durant, moi avec le maillot portant le numéro 14 et lui avec celui portant le numéro 15, si bien que nous mettions ces maillots avant même que l'entraîneur ne donne l'équipe rentrante. Cela nous amusait parfois. Puis, petit à petit, lorsque l'entraîneur nous incorporait, nous changions le cours du match, nous imposant au fil des rencontres. Je me rappelle d'un but inscrit par Mezouar contre Bellouti, alors gardien de but de Mostaganem. Bellouti a un gabarit impressionnant, mais Mezouar a pu le tromper d'un tir fulgurant des 35 mètres. C'est ce but qui lui a ouvert le chemin de la gloire puisque des dirigeants de l'ASMO, présents au stade pour le superviser, l'ont fait signer illico.
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C'était un joueur particulier, n'est-ce pas ?
Je l'ai connu jeune. Il avait fait montre de grandes capacités. C'était un très bon joueur, même s'il n'a rien fait avec la sélection nationale. C'est sa mentalité qui a fait qu'il ne réussisse par en sélection.
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Expliquez-vous…
Le problème de Mezouar est qu'il surestime ses qualités au point de se croire le meilleur. Il n'a jamais réussi en équipe nationale parce qu'il se croyait meilleur que Saïb. Il se croit même plus fort que Zidane. S'il jouait aux côtés de Lampard et qu'on lui demandait qui est le meilleur, il dirait que c'est lui. Je ne dis pas cela pour diminuer de sa valeur. Mezouar est un grand joueur, il n'y a pas de doute là-dessus.
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Vous aviez quitté le CRT pour rejoindre l'ES Mostaganem. Pour quel motif ?
J'ai quitté Témouchent à cause d'une parole que m'a dite un dirigeant. L'ESM me proposait 25 millions de centimes. J'ai dit à la direction du CRT que j'étais prêt à rester si elle m'offrait la même somme. Je ne voulais pas quitter ma ville. Or, lors d'une réunion à laquelle assistaient mon père et El Hadj Afif, un dirigeant du CRT m'a dit : «25 millions, on les donne pour un grand avant-centre.» J'ai alors répondu : «Dans ce cas, je ne resterai pas ici même pour 2 milliards !» Je suis ainsi parti à l'ESM que j'ai réussi à propulser en Division 1 et auquel j'ai fait gagner 800 millions de centimes grâce à mon transfert en Turquie.
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Que retenez-vous de votre passage à l'ESM ?
A ma signature dans ce club, le président était Belkhirat. Il avait décidé d'organiser une réunion pour présenter les nouveaux joueurs aux anciens. Je me souviens que chaque nouveau joueur avait pris la parole : Lahmar et Megueni, venus du RC Relizane, Belhocine arrivé de l'USM Sétif, Mokadem du GC Mascara… C'était tous des noms connus, contrairement à moi. J'étais au club pour me faire un nom. J'avais la lourde responsabilité de remplacer Meçabih qui venait d'être transféré au MCO et qui était vénéré à Mostaganem. Nous étions donc six ou sept nouveaux joueurs et Belkhirat nous a présentés. Puis, il nous a posé à tous une question intelligente : «Pourquoi êtes-vous venus à l'ESM ?» L'un d'entre nous a répondu qu'il était là pour travailler, l'autre pour progresser… Lorsque mon tour fut venu de répondre, je sentais tous les regards braqués sur moi. Des regards goguenards qui semblaient se moquer de cet inconnu qui devait remplacer Meçabih. Je me suis donc levé et, d'un ton sûr, j'ai demandé : «Depuis combien d'années l'ESM n'est plus en Division 1 ?» On m'a répondu : «Depuis 32 ans.» J'ai alors déclaré : «Je suis venu pour faire accéder l'ESM en première division et l'aider à occuper une place honorable. Je serai également meilleur buteur du groupe Ouest et lorsque je quitterai le club pour devenir professionnel, je vous laisserai beaucoup d'argent.»
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Vous avez réalisé tout cela ?
Oui, j'ai fait tout ce que j'avais promis. J'ai terminé ma première saison avec l'ESM avec le titre de meilleur buteur de la poule Ouest avec l'accession en prime. La saison d'après, j'ai laissé le club en troisième position à mon départ pour la Turquie avec 800 millions comme indemnités de transfert. Ne croyez pas, cependant, que j'avais déclaré ça aux supporters par conviction ! Je l'ai dit par défi, comme un pari. J'aime lancer les défis.
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Ce sont des anecdotes amusantes. En avez-vous d'autres ?
J'en ai à la pelle. En voici une concernant mon entraîneur Bekakcha lors d'un match contre le SC Mecheria. Nous étions en deuxième division et nous occupions la deuxième place derrière le SC Mecheria que nous devions battre chez lui, dans un match décisif, pour accéder en Division 1. La mission n'était pas simple vu que notre adversaire avait une bonne équipe et de bons joueurs, à leur tête les frères Adjdir. La veille du match, nous étions à l'hôtel et Bekakcha m'a lancé, en présence du président Belkhirat : «Si tu es vraiment un attaquant, tu dois nous ramener la victoire demain.» Cette phrase m'a énervé et je lui ai rétorqué : «Je ramènerai les trois points, mais il faut que tu paries avec moi.» Je lui ai lancé le défi de parier la prime de la victoire (3 millions de centimes) plus un sac de sports et des équipements. S'il y avait nul ou défaite, je perdais.
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Vous avez gagné le pari ?
Je n'oublierai jamais ce jour. Nous sommes entrés sur le terrain alors que le stade de Mecheria était tout rouge, aux couleurs du club local. Je me rappelle que c'était le père de Tasfaout, qui y est originaire, qui avait donné le coup d'envoi de la partie. O était menés au score après un but de Adjrid, puis Megueni a égalisé sur un tir puissant des 30 mètres. Le match se dirigeait vers un score de parité. Alors que l'arbitre s'apprêtait à siffler la fin de la rencontre, l'arrière droit Kiaf m'a adressé un centre, j'ai contrôlé le ballon et frappé instantanément. Le terrain était en tuf et je me souviens qu'en frappant, la poussière a empli la surface, si bien que le gardien de but adverse n'a vu que de la poussière, alors que le ballon était entré. Là, Bekakcha a perdu connaissance, non pas de bonheur (il rit aux éclats), mais parce qu'il avait perdu la prime et le sac de sport. Je me suis aussitôt dirigé vers lui en lui disant que lorsqu'il veut parier, il doit le faire avec des gamins et non pas avec des hommes comme moi. Cela dit, j'ai renoncé à mon gain et lui ai laissé la prime et le sac.
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A l'ESM, vous avez évolué aux côtés de joueurs connus, comme Abdellatif Djender. Avez-vous une anecdote à nous raconter de lui ?
Savez-vous pourquoi Djender n'a pas fait une grande carrière ? C'est pour une raison bien simple : il est myope. C'est pour ça qu'il gâchait beaucoup d'occasions. C'était ça mon problème avec lui. Il n'a pas réussi aux côtés de Belloumi et vous voulez qu'il réussisse à mes côtés ? Une fois, nous sommes allés à Boufarik affronter le WAB. Imaginez qu'il a dribblé presque tous les joueurs du WAB et, arrivé près de moi, il m'a driblé moi aussi et, sans s'en rendre compte, il est sorti du terrain jusqu'à arriver près d'un panneau publicitaire. Je lui ai alors dit : «Tant que tu y es, continue jusqu'à Mostaganem
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Smaïl Diss était-il avec vous à l'ESM en cette période ?
Oui. Il était jeune, mais il était curieux comme tout, quoi que je fisais partie de ceux qui l'avaient encouragé dans ses débuts. Je me souviens une fois lorsque j'étais resté à discuter avec une fille jusqu'à 04h00 au téléphone d'un hôtel à Chéraga. Tout le monde le savait. Le lendemain, il m'a dit : «Alors, tu étais de permanence ?» Cela m'a mis dans une colère noire et je lui ai dit : «Si tu ajoutes un seul mot, je te bannis de Mostaganem !» Le président Belkhira était présent et il lui a confirmé que ma menace était exécutoire. Cependant, la chose la plus insolite qui me soit arrivée à Mosta a été avec l'entraîneur Tedj Bensaoula.
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Racontez…
Jeune, je tenais toujours à apprendre aux côtés des anciens. J'étais un fan de Ali Meçabih que je considère comme étant le meilleur avant-centre que l'Algérie ait enfanté. J'ai appris de lui la force de pénétration. Il démarrait à 120km/h, s'arrêtait sec comme s'il était équipé de l'ABS, puis redémarrait à 120km/h. J'étais aussi fan de Ali Moussa dont je m'efforçais, en sélection militaire, d'imiter son jeu aérien. L'attaquant du CSC Medjbouri me plaisait également, ainsi que le regretté Gasmi que j'ai connu lorsqu'il jouait à Mecheria et que j'admirais pour sa façon particulière de reprendre le ballon avec l'arrière de la tête. La saison passée à El Amria, je m'étais entraîné pour en faire de même et j'ai réussi à inscrire 4 buts de cette façon. J'aurais aimé que l'USMH en tire profit cette saison, mais on en l'a pas voulu. En parlant de Gasmi, j'aimerais préciser qu'il était un très bon ami et que j'ai été très affecté par sa mort. D'ailleurs, je me suis empressé d'aller présenter mes condoléances à sa famille aux Eucalyptus et d'assister à son enterrement. J'admirais également Tedj Bensaoula et j'avais tout fait pour convaincre le président de l'ESM de le ramener comme entraîneur, une fois que nous avions accédé afin que je puisse apprendre à ses côtés. Belkhirat a tout de suite accepté, surtout que Bensaoula était sans club à ce moment-là. Le plus drôle est que Bensaoula, au lieu de me remercier, m'a écarté du groupe !
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Pourquoi a-t-il agi de la sorte ?
Il voulait, à travers moi, instaurer la discipline. Il croyait ainsi maîtriser le groupe. Lors du premier match, il ne m'avait pas convoqué. Au deuxième match, il m'a mis comme remplaçant. Nous étions menés au score et les supporters commençaient à perdre patience. Alors, Bensaoula s'est tourné vers moi et m'a demandé d'aller m'échauffer. J'ai refusé en lui disant : «Va toi-même sur le terrain !» J'étais en colère pour avoir été mis sur le banc. Le président Belkhirat est intervenu pour me raisonner, mais je n'ai accepté de rentrer que contre la promesse d'une forte prime. Je ne cache pas que j'agissais ainsi pour avoir une prime. Je le faisais souvent. Il m'est arrivé une fois de jouer pour une prime de 13 millions de centimes. Cependant, j'ai rarement déçu mon président. Bref, je suis rentré sur le terrain et, sur la première balle que j'ai touchée sur une passe de Megueni, j'ai mis le ballon au fond des filets. Quelques minutes après, j'ai ajouté le deuxième but. Alors, Bensaoula est venu vers moi et m'a dit : «C'est toi le maître.» Je lui ai répondu : «Ne cherche plus à savoir si je m'entraîne ou pas. L'essentiel est que je marque.» Depuis ce jour-là, il a compris ma mentalité et les choses se sont bien passées entre nous. D'ailleurs, j'ai beaucoup appris à ses côtés.
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Durant cette période, vous aviez fait partie de la sélection Espoirs et de la sélection militaire. Des anecdotes ?
Mon histoire avec la sélection nationale n'a pas été fructueuse au départ. Chez les minimes, l'entraîneur Omar Betrouni m'avait refusé sous prétexte que je ne savais pas jouer du pied gauche. Il m'avait affecté moralement, surtout que la sélection allait jouer en ouverture d'un MCA-MCO, mais cela m'a poussé à améliorer mon jeu du pied gauche. Avec les Espoirs, j'ai participé aux Jeux méditerranéens de Bari en 1997 et j'avais réalisé un très bon tournoi, si bien que Boualem Charef m'avait convoqué pour la sélection militaire. J'ai participé aux éliminatoires de la Coupe du monde militaire en inscrivant plusieurs buts face au Maroc, à la Libye et à l'Egypte. J'ai plusieurs anecdotes de cette période et je vais commencer par ce que nous avons vécu au Caire.
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Allez-y…
C'était un match sensible au plus haut niveau, à tel point que le général Mohamed Lamari s'est déplacé spécialement pour nous rencontrer à notre camp d'entraînement à Blida avant notre déplacement au Caire. Nous étions près de l'aérodrome et, nous montrant deux avions dont les moteurs tournaient pour chauffer, il nous a dit : «Vous voyez, le premier avion va vous emmener au Caire et vous ramener à vos mères dans le cas où vous réaliseriez un résultat positif. Quant au deuxième avion, c'est celui qui vous emmènera du Caire directement vers Aïn M'guel en cas de défaite.» Ces propos ont terrorisé les joueurs car nous savions parfaitement ce que voulait dire Aïn M'guel. C'est un endroit où même un oiseau, lorsqu'il y arrive, fait demi-tour.
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Comment les choses se sont-elles passées ?
Nous sommes partis en Egypte à bord d'un avion militaire. Arrivés là-bas, nous avons été surpris par les mesures de sécurité drastiques qui ont accompagné le match. Lorsque nous avons franchi un pont, nous avons vu des dizaines de camions militaires égyptiens nous accompagner, si bien que nous avons senti que nous nous dirigions vers un champ de bataille et non pas vers un stade. En entrant sur le terrain, nous avons vu que les gradins étaient pleins de militaires. Nous avions des joueurs excellents tels Boukessassa, Goual, Ali Moussa et Meftah qui était terrifié. Ne pensez pas que Meftah est courageux ! C'est un peureux comme il n'y a pas ! J'étais remplaçant et Ali Moussa titulaire. Nous étions menés au score à dix minutes de la fin du match. Nous nous voyons déjà dans l'avion nous conduisant à Aïn M'guel (rires). Alors, Charef s'est tourné vers et m'a dit que j'étais sa dernière carte. Je suis rentré à la place de Ali Moussa. J'étais inconnu des défenseurs égyptiens. Après un tir qui a percuté la transversale, il y eut la 86'. Là, nous étions toujours à Aïn M'guel. Goual a débordé et a centré vers moi. J'ai vu qu'il y avait face à moi un défenseur et le gardien de but qui me fermaient l'angle. J'ai dit : «Vous voulez me voir à Aïn M'guel, n'est-ce pas ?» J'ai alors tiré de toutes mes forces et le ballon a secoué les filets. Le gardien n'y a vu que du feu ! Je me rappelle qu'à ce moment-là, alors qu'un silence de mort régnait sur le stade, une fillette a sauté dans la tribune officielle en tenant le drapeau algérien et a crié trois fois : «Vive l'Algérie !» Prenant mon courage à deux mains, je me suis dirigé vers elle en escaladant le grillage et je l'ai congratulée sous le regard de tout le commandement militaire égyptien. Lorsqu'il s'agit de l'emblème national, je ne peux pas me retenir. Quand je vois le drapeau, je vois Boumediène et les martyrs. Je sois nationaliste jusqu'à la moelle et j'en suis fier. C'est pour ça d'ailleurs que je m'en suis pris à un militaire marocain durant notre match face au Maroc. Je n'ai pas supporté pas la hogra dont nous avons été victimes avec la complicité de l'arbitre qui a transformé une victoire en une défaite. J'ai failli être emprisonné là-bas à cause de ça.
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Quel a été le résultat du match retour face à l'Egypte ?
Nous avons perdu à Blida et cela nous a valu une sévère punition de la part du responsable de la sélection militaire, le colonel Metref, père du joueur Hocine Metref, qui était rigoureux avec nous. Nous avons été punis. C'est ainsi qu'on a eu drout à une corvée, le désherbage, chacun dans son unité. J'étais avec Moulay Haddou à Oran. Nous l'avons fait durant un mois. Si cela était chose disons facile pour moi qui suis habitué à cueillir des haricots et des pois-chiche à Aïn Témouchent, cela n'a pas été le cas de Haddou peu habitué à ces tâches.
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Comment s'est effectué votre départ vers le club de Genclerbirligi ?
Genclerbirligi signifie «l'enfant sportif d'Ankara». La Turquie reste un très bon souvenir dans ma vie. J'ai vraiment aimé ce pays. J'ai commencé à parler le turc de manière aisée, six mois seulement après mon arrivée. Je maîtrisais la langue au point de devenir le traducteur de Gérémi. Pour revenir à votre question, je dirai que le premier contact a eu lieu lors d'un match de l'EN olympique aux Jeux méditerranéens de Bari, en 1997. Nous avions joué contre la Turquie et leur défense avait souffert le martyr avec moi. J'avais réalisé une prestation de tout premier ordre. Le défenseur central qui devait me marquer avait été tellement impressionné par mon jeu qu'à son retour en Turquie, il a parlé de moi aux dirigeants de son club qui se sont manifestés aussitôt pour me recruter. Mais comme je devais passer mon Service national, j'étais obligé d'attendre quelques mois de plus. Le moment venu, j'avis eu de grandes difficultés pour obtenir mon passeport et l'autorisation d'aller jouer à l'étranger, des autorités militaires. J'ai dû camper pratiquement quatre jours de suite devant le bureau du Colonel Metref pour obtenir le passeport qu'il me refusait. Ce n'est qu'après lui avoir expliqué qu'il y avait 4 milliards qui m'attendaient là-bas qu'il a compris ma grande envie de tenter cette carrière professionnelle qui me tendait les bras. C'est alors qu'il m'a facilité le départ à mon grand bonheur.
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Vos débuts ont été tonitruants, paraît-il, non ?
C'est vrai. Je marquais des buts coup sur coup. Je me sentais un peu plus en confiance à chaque fois que je marquais un but. Au point de ne plus avoir de doute face aux plus grandes équipes. Comme face à Galatasaray et son armada de stars mondiales. Je me rappelle que ce match marquait le retour du gardien de but brésilien Taffarel, champion du monde 1994, et qui revenait du Mondial 1998 en France. La presse mondiale était présente et le match était très attendu de tous. Avec lui, il y avait également d'autres stars mondiales, comme Georg Hagi, le Roumain, Popescu, Filipescu, Hakan Sukkur et les autres internationaux turcs.
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N'avez-vous pas été impressionné par ces grands joueurs ?
Vous savez, Gérémi est venu me voir avant le coup d'envoi, on était sur le terrain et il m'a dit : «Qui va marquer à un tel gardien ?» Je lui ai répondu : «Tu vas voir, je vais m'en charger !» Et la fin du match m'a donné raison parce que non seulement je lui ai marqué, mais en plus j'avais marqué un doublé ! Le second but était sur une très belle tête plongeante qui a poussé Tafarel à venir me saluer en me tendant la main pour me relever. Un signe de reconnaissance que j'ai bien apprécié, surtout venant d'un grand gardien comme lui. A la fin du match, le président m'a offert une prime de 15 000 dollars. 10 000 pour la victoire et 5 000 pour mes deux buts. Vous savez, en Turquie, on offre des primes pour plein de choses, pour les buts, pour la sueur… C'est vraiment le top pour un joueur.
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On dit que vous viviez comme un roi en Turquie ; le confirmez-vous ?
Et comment ! Vous n'avez qu'à demander à Badji qui a vu de ses propres yeux comment je vivais, lorsqu'il jouait aussi en Turquie. Il était vraiment impressionné. J'avais une maison de luxe, un véhicule 4X4, Cherokee V8 que personne ne connaissait alors en Algérie. Je touchais un salaire de 30 000 dollars, ce qui était beaucoup à l'époque. En EN, il n'y avait que Saïb, Tasfaout et moi qui avions un téléphone portable. Lorsque je partais à Aïn Témouchent, les gens croyaient que j'étais devenu fou en parlant tout seul. Ce n'est qu'après avoir vu le portable que je leur ai expliqué qu'il s'agissait d'un téléphone sans fil. Pour certains, je disais même que c'était un talkie-walkie pour qu'ils comprennent. (Il rigole).
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On dit aussi que vous passiez beaucoup de temps dans les cabarets et les soirées arrosées, non ?
Ceci n'est pas vrai, car même lorsque j'étais à Mostaganem, je sortais en boîte et je veillais, mais ça ne gênait personne alors. Vous savez, moi au moins je ne suis pas hypocrite comme certains. Je ne crois pas que cela se répercutait sur mon rendement sur le terrain. Que je veille ou que je boive, cela ne regardait que moi et moi seul. Vous croyez que les autres joueurs ne fréquentaient pas ces mêmes lieux ? Je peux vous assurer que 99% des joueurs les fréquentaient. Mais ils le font de manière hypocrite. La seule différence entre eux et moi, c'est que moi au moins je ne m'en cache pas. Moi au moins j'ai réussi à qualifier l'Algérie à la CAN. Ceux qui font courir ces bruits derrière mon dos n'ont même pas pu mener l'EN à la CAN et à deux reprises même. Depuis qu'ils m'ont déçu, je ne crois plus en ces joueurs.
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Est-ce que votre vie intime était étalée dans les journaux en Turquie ?
Bien sûr, parce que les paparazzi ne lâchent rien, même en Turquie.
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Avez-vous été pris en flagrant délit par les paparazzis ?
Non, pas moi, mais mon ami, l'international marocain Abrami. Nous étions dans une boîte de nuit, lorsque j'ai vu un paparazzi nous guetter. Je lui ai dit de ne plus bouger de notre place. Mais il s'est oublié à un moment donné et il a pris une fille pour aller danser avec elle. C'est là que le paparazzi a sorti son appareil photo pour le surprendre. Ils se sont accrochés et j'ai même proposé au paparazzi 300 dollars pour qu'il ne publie pas la photo, en vain. Le surlendemain matin, elle était dans tous les journaux.
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Est-ce vrai que vous êtes sorti avec Miss Turquie ?
Oui, c'est vrai. Je l'ai rencontrée un soir dans un grand restaurant d'Ankara, situé au 15e étage d'une tour sublime qui avait la particularité de tourner sur elle-même, après minuit. Un cadre sublime, réservé à la Jet Set locale. On s'est vus et quelque chose s'est produit tout de suite dans nos regards. Je suis allé discuter avec elle et on est restés ensemble près de deux ans. Il faut souligner qu'à l'époque, je faisais partie des grandes stars du football turc.
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On dit aussi que vous avez perdu beaucoup d'argent en Turquie. Est-ce vrai ?
J'ai perdu plus d'argent en Algérie. Je dépensais pour moi et pour tout le monde autour de moi. (A ce moment, son ami Saâdallah intervient pour témoigner : «Hamid était extrêmement généreux avec tout le monde. Il ne savait pas dire non à quelqu'un dans le besoin. Il dépensait vraiment beaucoup d'argent pour aider les nécessiteux. Sa générosité n'a pas d'égale ici. Je lui ai conseillé à maintes reprises de faire attention et de mettre un peu d'argent de côté mais il ne m'a jamais écouté.» Puis Merakchi de poursuivre : Je ne regrette absolument rien de ce que j'ai fait. J'ai toujours été comme ça. Si c'était à refaire, j'aurais dépensé les 4 milliards de la même manière. Non, rien à regretter de ce côté-là.
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Parlons de votre première sélection. Meziane Ighil était le premier à vous avoir convoqué. Comment aviez-vous vécu cela ?
C'est vrai, c'est Meziane Ighil qui m'a fait confiance le premier en EN. C'était contre l'Ouganda, on avait perdu 2- 1. A notre retour, on avait fait une escale à Rome et les joueurs qui habitaient en France ont pris l'avion pour rallier leurs clubs respectifs. J'ai demandé à mon tour de prendre l'avion pour Ankara ou Istanbul, mais le secrétaire de la FAF m'a menti en disant que cette ville n'était pas desservie de Rome. Je suis allé m'informer auprès d'une des agences qui m'a affirmé qu'il y avait bien des vols pour la Turquie. C'est là que j'ai été voir le secrétaire menteur pour lui dire ce que j'en pensais. Dans l'accrochage qui s'en est suivi, Mehdi Cerbah, alors entraîneur des gardiens, est intervenu pour défendre le secrétaire, dans un vacarme pas possible. Lorsque Meziane Ighil est arrivé, je lui ai expliqué la situation et à mon grand étonnement, il ne m'a pas donné raison. Je lui ai alors dit : «Ne me rappelle plus pour les autres matchs» et je suis parti. Ils ont perdu le match suivant contre la Tunisie au stade du 5-Juillet. Ce qui a compliqué la situation et un changement de staff technique a eu lieu. Saâdane et Charef m'avaient alors contacté pour me dire qu'il nous fallait sept points et qu'ils avaient besoin de moi dans l'équipe. J'ai alors accepté de retourner en EN.
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Et quel retour ! Le match contre le Libéria reste aux yeux de beaucoup d'observateurs comme le meilleur de votre carrière en EN...
C'est vrai que j'avais bien joué ce jour-là et que tous les autres avaient rempli leur mission convenablement. Mais pour moi, mon meilleur match avec l'EN fut en Ouganda où j'avais marqué les deux buts qui nous ont permis de nous qualifier à la CAN. Concernant le match face au Liberia, je me rappelle que j'étais venu de Turquie, via Tunis. J'ai rallié la ville d'Annaba par route, mais ne me demandez pas pourquoi. Pour faire plaisir à 30 millions d'Algériens, j'étais capable de venir à pied de Turquie. J'avais fait un très grand match en marquant un doublé. Georges Weah est venu me dire à la fin du match : «Tu es vraiment un grand joueur. Ce que tu as fait est vraiment grand.» Cette une reconnaissance je ne l'oublierai jamais durant toute ma vie, car elle vient d'un des plus grands buteurs de tous les temps. Malgré cette prestation, j'ai été très déçu par la réaction de certaines personnes.
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Qui par exemple ?
Hafid Derradji pour être clair. Après ce que j'ai fait, il m'a complètement ignoré dans son émission et a préféré inviter Rafik Saïfi à «Malaïb AL âalam», parce qu'il est d'Alger. Mais moi, franchement j'attendais qu'il m'invite moi aussi qui avais fait un grand match. Même le but de Saïfi, c'est moi qui lui avais délivré la passe décisive. Derradji m'a déçu au plus haut point ce jour-là. Par la suite, j'ai compris qu'il ne me portait pas dans son cœur. Il me détestait carrément. ll l'a d'ailleurs prouvé dans ses commentaires au match retour contre la Tunisie, lorsque j'avais raté deux buts. Il s'était déchaîné contre moi.
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Il y a eu par la suite, deux faits qui ont fait beaucoup parler les gens. Le premier, les contacts avec le Milan AC et le second concerne certaines nuits au «Soleil Rouge”. Qu'avez-vous à dire ?
Pour ce qui est du Milan AC, mon manager Badi est toujours en vie. Allez lui poser la question et il vous dira bien que je n'ai rien inventé. Le championnat de Turquie est suivi par beaucoup de superviseurs des grands clubs européens. C'est donc normal que le Milan AC s'est renseigné sur moi. Mais il n'y a pas eu que Milan. Il y avait aussi le PSG, Bastia, West Ham et même le Galatasaray qui devait transférer Hakan Sukur à l'Inter. D'ailleurs Sukur en personne m'avait recommandé à ses dirigeants dans la presse turque en déclarant que «Merakchi est le mieux indiqué pour me remplacer.» Mais les problèmes que j'ai rencontrés par la suite avec mon club ont tout remis en cause.
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Un journaliste de la radio avait déclaré que Merakchi voulait dire qu'il avait des contacts avec Mila, pas Milan. Ça fait mal d'entendre cela ?
Il n'y a qu'en Algérie qu'on veut minimiser la carrière de nos joueurs. Pourquoi les joueurs africains joueraient dans les plus grands clubs européens et pas nous ? Mon ex-coéquipier Gérémi a bien signé au Real Madrid et a gagné la Ligue des champions avec le Real. C'est notre mentalité qui est pourrie. On n'y peut rien. Que voulez-vous que je vous dise ?
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Racontez-nous les détails de cette fameuse déclaration que vous aviez lancée après la victoire face au Liberia ?
J'avais dit : «L'argent d'Annaba doit rester à Annaba» parce que la prime de la victoire de ce match m'avait servi à payer la soirée qui avait suivi. On nous avait donné 2 millions. Qu'est-ce que c'est que 2 millions pour quelqu'un qui se trimbalait avec 20 dollars dans la poche ? Mezouar en est témoin. J'avais donc décidé de dépenser l'argent de cette prime gagnée à Annaba dans cette boîte de la ville d'Annaba, dénommé «Le soleil Rouge ». Il m'est arrivé de dépenser jusqu'à 100 millions en une seule soirée.
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Y avait-il d'autres joueurs de l'EN avec vous ?
Une bonne partie des joueurs étaient avec moi et les autres avaient passé la soirée dans la boîte «La Belle Etoile» avec Moussa Saïb. Je vais vous confier une chose qui ne va pas fairte plaisir à tout le monde. Mis à part, Zeghdoud et Mezouar, tous les autres joueurs de l'EN avaient consommé de l'alcool. Ils ont tous «rempli leur tête» comme on dit. Ils étaient tous contents de la victoire. Mais en fin de compte, on n'a parlé que de Merakchi. Si vous allez dans les cabarets et les boîtes de nuit d'Oran, vous trouverez beaucoup de joueurs des autres villes. A leur tête, il y a Chahloul et tant d'autres. Ils sont tous habitués à ces lieux, mais les gens aiment citer Merakchi.
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Qu'en est-il aujourd'hui de tous ces lieux de débauche ? Vous y allez encore ?
Non, Dieu merci, j'ai arrêté toutes ces bêtises. Je fréquentais des gens qui ne pensaient qu'à cette débauche. Ils m'ont induit en erreur, malheureusement. Aujourd'hui, toutes ces choses sont loin derrière moi. Je me suis rangé de manière définitive cette fois. Je ne cherche qu'à m'occuper de ma petite famille et à jouer au football.
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Avez-vous regretté ?
Totalement, profondément même. Lorsque j'ai vu mes coéquipiers qui étaient moins considérés que moi jouer dans de très grands clubs, c'est là que je commençais à regretter toute cette folie qui s'était emparée de moi. Je me dis que je suis passé à côté d'une carrière fabuleuse à cause de toute cette débauche. C'est sûr que j'ai encore des regrets.
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Pourquoi les dirigeants de Genclerbirligi ont décidé de rompre votre contrat ?
C'était ma faute. Je manquais de sérieux à cause de toutes ces soirées arrosées. Je ne m'entraînais plus aussi sérieusement qu'avant. J'arrivais en retard aux entraînements. Mon niveau de jeu baissait et les dirigeants en avaient marre de gérer quelqu'un comme moi. Ça devenait pénible pour eux et pour moi. Ils ont donc décidé de se séparer de moi. Ils ont rompu le contrat. Même au niveau de l'EN, les choses se compliquaient pour moi. Madjer voulait bien me sélectionner, mais comme j'étais sans club, on l'avait déconseillé de me sélectionner.
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Puis vous signez au MCA. Pourquoi pas ailleurs ?
Parce que M Djouad m'avait couvé comme son petit frère pendant six longs mois, avant de me proposer de signer au mercato. Il y avait aussi M. Lefkir qui m'avait ramené un sac plein d'argent à Ben Aknoun pour que je signe au CRB. Mais mon envie de jouer pour le Mouloudia d'Alger était bien plus grande. Le MCA, je le compare au FLN de la guerre de libération. C'est la vitrine de l'héroïsme du sport national. Je ne pouvais pas aller ailleurs. J'ai joué huit matchs et j'ai marqué huit buts en contribuant à sauver le club de la relégation.
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A votre avis, quelles étaient les vraies raisons de l'échec de cette équipe du MCA ?
D'après ce que j'ai pu voir, tous les problèmes du MCA de cette époque étaient dus aux manigances d'anciens joueurs, à leur tête Ali Bencheikh. Je le respectais énormément avant d'arriver au Mouloudia. Il était l'un des symboles du club. Mais après ce qu'il a fait pour me saquer, j'ai compris qu'il était quelconque. Il a perdu mon estime. Tous les problèmes des clubs algériens, ce sont les anciens joueurs qui les causent. Ils veulent que tout passe par eux, comme s'il n'y avait que leur tête qui compte dans le football. Même en EN, c'est pareil. Les anciens des années 80 ont tenté de bloquer les aiguilles de la montre du football algérien lors du match de Gijon contre l'Allemagne. Comme s'il n'y avait pas d'autres époques, d'autres satisfactions.
Au MCA, j'ai été surpris de voir les anciens s'entraîner d'un côté et les nouveaux de l'autre. Ce n'est pas à ça que je m'attendais en arrivant au Mouloudia.
C'est sûr que vous avez des anecdotes à raconter sur cette époque au MCA.
Je me rappelle des bons moments que je passais avec Dob, qu'on surnommait «Capsoula». Une fois, il devait passer sur radio El Bahdja et je l'ai appelé pour lui dire qu'on n'arrêtait pas de parler de toi bien avant l'émission sportive. Pourquoi ? Parce qu'on parlait des capsules de médicaments.
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Et Benali ?
Lui, vous ne pouvez pas savoir s'il est avec vous ou contre. Mais il reste un très grand joueur. Il y avait également de très bons joueurs au MCA comme Benzerga, Slatni et le plus jeune, Wahid. Ce dernier m'a fait rire un jour en me disant : «C'est moi qui vais marquer Zidane contre la France ! » Le pauvre, il n'a pas joué une seconde et s'est contenté de courir derrière les maillots des joueurs. Ils nous ont fait honte ce jour-là. A leur tête Meftah qui a été ridicule en allant demander un autographe à Zidane.
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Et vous, n'aviez-vous jamais demandé un maillot à une star ?
Le seul joueur à qui j'ai demandé son maillot, c'est George Weah et il s'est excusé en me disant que le Liberia n'avait pas d'autres jeux de maillots. Je l'ai fait parce que c'était mon idole.
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Donc vous n'aurez jamais osé demander le maillot de Zidane ?
Zidane est, certes, une très grande star du football, mais jamais je n'aurais demandé le maillot de celui qui a embrassé le drapeau français à trois reprises. Meftah nous a fait honte en allant lui courir derrière comme un gamin de 15 ans. Même si je lui avais lancé un ballon sur le terrain, il n'aurait pas couru avec autant d'enthousiasme. Franchement, j'avais honte à sa place. Si j'avais su qu'il avait autant de ferveur, je lui aurais acheté le maillot de Zidane pour qu'il nous évite cette honte. De plus, Zidane a été décoré de la Légion du Mérite nationale algérien. Pour quel mérite ? Même si je soutiens à fond le président Bouteflika, je ne serai jamais d'accord avec une telle chose. Qui peut égaler le mérite des Moudjahidine qui ont sorti la France ? Ni Zidane, ni Belloumi ni Madjer ne peuvent les égaler.
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Au Mouloudia, on dit que vous aviez transformé votre appartement en un lieu de débauche en ramenant des filles pour faire la fête. Est-ce vrai ?
Je ne le nie pas. Mais je n'étais pas le seul à le faire. La majorité des joueurs me demandaient les clés de l'appartement pour y emmener des filles. Il s'est passé de vraies catastrophes dans cet appartement. Mais tout est retombé sur ma gueule. Cela dit, les voisins ne s'étaient jamais plaints comme le prétendaient certains.
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Vous avez réellement souhaité jouer au WAT cette saison ?
Franchement oui. J'aurais vraiment souhaité être intégré. Le Widad de Tlemcen occupe une place particulière dans mon cœur. J'y ai passé des moments inoubliables. Je ne vous cache pas que j'attendais un signe de la part des dirigeants pour me donner la chance de montrer ce que je vaux encore. J'y ai cru à un moment donné, parce que les dirigeants du WAT connaissent très bien ma valeur. Ils savent que je ne triche pas et que si je suis encore opérationnel c'est que je sais que je ne suis pas fini. Mais ils m'ont préféré Fellahi, c'est leur affaire. C'est un bon joueur et je leur souhaite bonne chance malgré tout. Avec moi, je suis sûr qu'ils ne l'auraient pas regretté. J'aurais pu leur offrir un autre titre après celui de 2002.
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Vos passages au MCO n'ont pas apporté ce que vous attendiez, non ?
A deux reprises ça été un échec total. Je n'ai rien gardé de bien à raconter de mon passage au MCO. La première fois, le clash avait eu lieu dans le vestiaire après avoir demandé à porter le numéro 11 lors d'un match amical. On me l'a refusé sous prétexte qu'il revenait de droit à Mourad Meziane. Je leur ai dit : ‘Je jouerai ce match avec le 11 et il n'y a pas de Meziane ou personne d'autre pour m'en empêcher.' Il s'agissait après tout d'un match amical. Là les gens ont commencé à dire : ‘Pour qui il se prend ce Merakchi ? Il vient tout juste d'arriver et il veut chasser un pilier comme Meziane.' J'ai alors compris que je n'étais pas le bienvenu. J'ai pris mon sac et je suis parti jouer à Mostaganem.
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Et la seconde fois ?
C'était après mon départ de Tlemcen. Je suis tombé sur un entraîneur en carton qui se prenait pour un ancien grand joueur. C'est Hervé
Revelli. Il n'arrêtait pas de parler de sa carrière à Saint-Etienne, alors que c'était un joueur quelconque. Il voulait nous bluffer avec ses histoires des Verts. C'est son frère qui faisait partie de l'équipe type, pas lui et il se servait de la notoriété de son frère pour nous embobiner. Son ignorance du football se ressentait à chaque entraînement.
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Qu'est-ce qu'il faisait mal, Hervé Revelli à l'entraînement ?
Il nous faisait courir tous les jours pendant 90 minutes. Je n'avais jamais vu de méthode pareille avant. J'ai supporté un temps, puis un jour je me suis énervé et j'ai été lui dire ce que j'en pensais.
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Que lui aviez-vous dit au juste ?
Je lui ai fait comprendre que je ne m'apprêtais pas à participer à une course de chevaux. Il nous prenait peut-être pour des athlètes kenyans préparant le championnat du monde du 10.000 mètres ou du marathon. Ça l'a vexé et il m'a privé du stage au Maroc. Et comme il n'était pas normal, ce mec m'a demandé quelques semaines plus tard d'être opérationnel et efficace de suite en championnat. Si vous privez votre joueur d'un stage de préparation, ne lui demandez pas l'efficacité de suite. Malgré cela, j'ai répondu présent d'entrée de jeu, face à l'USMA et devant un immense défenseur nommé Zeghdoud et le meilleur gardien d'Algérie, Mezaïr qui à lui seul a permis au MCO de revenir en D1. Mais ce Revelli en a décidé autrement.
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L'USMH a été la dernière étape dans votre carrière avant de repartir en France. Pourquoi l'exil ?
Partout où je suis passé, j'ai donné le meilleur de moi-même, mais je sentais qu'il y avait toujours les mêmes problèmes qui revenaient. Les dirigeants de tous ces clubs ont été aussi ingrats les uns que les autres avec moi. Je sentais que plus je me rapprochais du pays, plus le pays me refusait. A croire que l'Algérie ne me désirait pas. Et lorsque j'étais au MCA, j'ai rencontré une fille formidable qui m'a permis de voir la vie sous un autre angle. C'est en discutant ensemble qu'on a pris la décision de partir en France.
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C'est une émigrée, non ?
Oui, elle est originaire de la Kabylie. J'ai flashé sur cette femme tout de suite et je crois que l'épouser est ce que j'ai fait de mieux dans ma vie, tellement je ne l'ai jamais regretté à ce jour. Elle m'a complètement transformé. Je lui dois au moins ça.
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Il faut dire que votre réputation à l'époque n'était pas pour rassurer les filles. N'a-t-elle pas un peu hésité ?
Au début c'est sûr qu'elle a hésité. Mais par la suite, elle a pris le temps de me connaître et elle a compris que je n'allais pas poursuivre dans cette voie indéfiniment. Ma femme adore l'Algérie. Elle a longtemps espéré mon retour au sein de l'EN pour vivre avec moi cette aventure. Mais le destin en a décidé autrement.
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Cela ne s'est pas arrangé pour vous en France, puisque vous avez été emprisonné. Racontez-nous pourquoi ?
C'est vrai. J'ai été en taule pour deux ans à cause d'une bagarre. Je n'ai pas pu maîtriser mes nerfs dans une dispute avec un Français et je lui ai asséné un violent coup de tête. Il m'a attaqué en justice et je me suis retrouvé entre les murs de la prison de Vitry.
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Pourquoi cette bagarre ?
Il m'a insulté. Il m'avait traité de sale Arabe et de sale Algérien. Là, j'ai pété un câble de suite. Il faut dire que l'alcool que j'avais consommé dans la soirée n'avait rien arrangé. Ça s'est passé trop vite. Je me suis emporté et je lui ai donné un violent coup de tête qui l'a amoché. A vrai dire, je ne pouvais pas me maîtriser dans ces conditions, en plus il s'agissait de défendre mon honneur en tant qu'Arabe et en tant qu'Algérien. Mais ces deux ans passés en prison m'ont beaucoup fait réfléchir sur ma vie.
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Qu'est-ce qu'on ressent lorsqu'on se retrouve en prison après avoir été une star. De l'humiliation ?
Vous savez, dans ce genre de situation il n'y a que la force de caractère qui peut vous sauver. Dieu merci, je suis assez solide dans la tête. Je suis capable de résister même à 2 kilomètres sous terre. Je m'adapte à tout vous savez. Ce n'est pas la prison qui allait m'abattre. En plus, je n'ai pas été en prison parce que j'ai trahi quelqu'un. J'ai tenté de défendre mon honneur comme on me l'a appris chez moi, c'est tout.
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Quelle a été la réaction de votre épouse pendant ces deux ans d'emprisonnement ?
Franchement, elle a encore grandi à mes yeux. De femme, elle a pris le statut de grande dame, si je puis dire. C'est dans des moments pareils qu'on connaît la vraie valeur de nos proches.
Ma femme a beaucoup souffert pendant cette période. Je lui en serai reconnaissant toute ma vie. Elle s'est occupée de tout pour qu'on réduise ma peine. Elle a aussi dépensé une fortune pour me trouver des avocats et me défendre. Elle a été omniprésente du début de mon incarcération jusqu'à ma sortie. Franchement, elle m'a épaté. C'est grâce à elle aussi que je n'ai pas fléchi en prison. Elle me rendait visite régulièrement et me soutenait de tout son amour.
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Et vos amis ?
Ma femme me faisait parvenir les messages de tous ceux qui avaient demandé après moi. Elle me ramenait les lettres que m'envoyaient mes amis comme Saâdallah mon manager, Ali Afif le fils de mon premier entraîneur à Zedouria, sans oublier Boualem Charef. Leur soutien et leurs encouragements m'ont permis de tenir le coup et de positiver.
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Qu'avez-vous appris de la réaction de votre épouse ?
J'ai appris que j'avais fait le meilleur choix en épousant une Kabyle pure. J'ai compris ce que voulait dire ‘vivre avec une Kabyle' et j'ai appris à respecter les valeurs de fidélité chères aux femmes kabyles. Avant de l'épouser, j'avais des idées très sombres sur les Kabyles, des clichés qu'on nous apprend bêtement sur les autres. Mais là, j'ai changé radicalement mon opinion. Je les respecte encore plus aujourd'hui parce que c'est des f'houla.
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Comment passiez-vous votre temps en prison ?
J'ai passé la majeure partie de mon temps à bouquiner. J'ai lu quelque 25 livres en deux ans. Qu'est-ce que vous croyez ? Que je suis illettré ? J'ai étudié de manière assidue jusqu'en terminale. J'étais plutôt un bon élève. Ce n'est que lorsque je commençais à gagner beaucoup d'argent en foot que j'ai délaissé mes études.
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Et par ailleurs ?
Il y avait aussi le sport. Je m'entraînais tous les jours en prison. On jouait au football jusqu'à trois heures par jour. On se faisait de ces matchs. Quel engagement ! C'était vraiment rude, très costaud. Surtout avec tous les Africains qu'il y avait. Une fois, j'avais participé à un tournoi et j'ai fini meilleur buteur.
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C'était donc paisible la prison pour vous ?
Détrompez-vous, cela est juste la façade positive que je vous livre. Il y a le revers de la médaille. C'est la prison tout de même ! La guerre des clans fait rage dans les prisons en France. J'ai été ciblé 15 jours après mon arrivée par un clan de Tunisiens qui sont venus me taquiner et me narguer. Dans la colère de mes premiers jours, je me suis énervé à tel point que tout le monde s'est retourné vers moi. Ils étaient trois Tunisiens et moi seul. J'ai sauté sur eux en criant très fort, et en me voyant bondir rageusement sur eux ils ont tenté de fuir et je les ai poursuivi dans la cour et j'ai pu en attrapé un. Je l'ai frappé tellement fort que j'ai failli le tuer. Cela m'a valu un passage par la cellule d'isolement pendant 15 jours. Mais après ma sortie, tout le monde a appris à me respecter.
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Vous avez eu votre ticket d'entrée, comme ça ?
Exactement. Les autres prisonniers ont fini par comprendre que je suis certes tranquille, un sportif qui ne cause pas de problème mais qui peut se transformer en bête féroce lorsqu'on me cherche. Ils ont tous compris que je ne craignais personne et que je reculais devant rien.
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Qu'avez-vous fait après votre sortie de prison ?
J'ai essayé de me débrouiller comme je pouvais. J'avais signé dans un petit club de Clamart dans le 92. On nous donnait 80 euros par match. J'ai aussi travaillé par-ci par-là. J'ai travaillé dans un champ de courses chez mon ami Ali Afif qui est responsable de la sécurité de tous les champs de courses en France. J'ai aussi fait soigner ma blessure au genou, tout en essayant de réapprendre à vivre une vie normale pendant un an.
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Et comment avez-vous décidé de revenir en Algérie ?
Mon frère Sid Ahmed m'a appelé et m'a demandé ce que je faisais. Je lui ai dit que je jouais dans un petit club de banlieue et il m'a raconté ce qui se faisait dans les clubs, en
Algérie. Il m'a dit que des joueurs très modestes négocient leur prime de signature en millions de dinars. Il m'a dit par exemple que Hanitser, qui est un bon joueur par ailleurs, est sollicité de partout. Cela m'a encouragé à revenir tenter ma chance chez moi. Mais à mon grand regret, aucun club n'a voulu de moi.
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C'est à cause de votre passé ?
Sans doute. Les dirigeants de tous les clubs m'ont tourné le dos. Ils ont fait de moi un pestiféré. C'est très injuste de leur part. J'ai beau crier à tout le monde que j'ai changé par rapport au Merakchi qu'on connaissait, personne ne veut m'entendre.
Même chez moi, à Témouchent, on m'a refusé. Pire encore, même dans mon tout premier club à Zedouria on m'a fermé la porte au nez. Je n'ai trouvé grâce que dans la ville d'El Amria où j'ai pu signer une licence la saison passée. J'ai prouvé à tout le monde que j'ai changé mentalement. La preuve que je me suis assagi, c'est le trophée du fair-play que j'ai reçu. Et Dieu sait que j'avais toutes les raisons de répondre aux coups que je recevais. Les joueurs adverses voulaient à chaque match montrer leur rigidité contre Merakchi. C'est normal.
Mais je n'ai reçu aucun carton jaune pendant tous les matchs que j'ai joués. J'ai pu aussi finir meilleur buteur du club en inscrivant la bagatelle de 17 buts. Sans parler des penalties que j'ai provoqués. Je pense que pour un retour, c'est un bilan positif.
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Et à l'USMH ?
Là aussi, des gens m'ont jugé par rapport à mon passé. Certaines personnes mal intentionnées ont remonté les supporteurs contre moi. J'aurais vraiment pu apporter un plus à cette équipe. J'avais la confiance du coach, ce qui est très important pour un joueur. Mais une crapule nommée Doumi a privé les supporters de l'USMH de toutes les joies que j'allais leur procurer. Qu'ils sachent qu'avec de tels énergumènes comme dirigeants, l'USMH n'ira pas loin. Et je peux vous assurer que Boualem Charef ne finira pas la saison à l'USMH, à cause de lui. Charef fait partie des meilleurs entraîneurs en Algérie, si ce n'est le meilleur actuellement.
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Qu'allez-vous faire maintenant ?
Je m'apprêtais à repartir en France, lorsque Raouraoua a sorti cette loi qui restreint le nombre de licences à partir d'un certain âge. Mais puisqu'elle va encore changer, je me suis dit que je pourrais encore signer dans un club de division inférieure en attendant qu'un président de club de D1 décide de me donner une dernière chance de prouver que je ne suis pas encore fini. Je garde encore un petit espoir.
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Avez-vous suivi les matchs de l'EN ?
Pas trop ces derniers temps, j'ai juste vu le match contre l'Egypte et j'ai vibré comme tous les Algériens après chaque but. J'ai suivi avec bonheur la prestation de Ghezzal. C'est le buteur qui manquait à l'EN.
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Que pensez-vous de cette EN ?
Elle est très bonne et déterminée à aller jusqu'au bout. Heureusement que Saâdane a compté sur les pros d'Europe pour monter son équipe. Avec les joueurs qu'on a dans notre championnat, je pense qu'on serait déjà éliminés.
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Quel est le meilleur joueur avec lequel vous avez évolué en EN ?
Je dirai Abdelhafid Tasfaout, pour ses qualités morales et footballistiques. Je crois que vous l'avez privé injustement du Ballon d'Or lors de sa première édition. Il y a aussi juste après lui, Saïb et Dziri. Ces trois joueurs méritaient le Ballon d'Or plus que Belmadi.
Ce sont les électeurs qui lui ont donné le Ballon d'Or, en plus
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Belmadi avait fait une saison remarquable à l'OM. Mais bon, revenons à vous. Quel est le défenseur qui vous a le plus marqué dans votre carrière ?
Incontestablement, Mounir Zeghdoud. C'était l'élégance à l'état pur. Un vrai gentleman, un libero hors pair.
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Votre meilleur souvenir de footballeur ?
Mes deux buts contre l'Ouganda qui nous ont permis de nous qualifier à la CAN 2000.
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La dernière fois que Merakchi a pleuré, c'était quand et pourquoi ?
Après la défaite contre la Tunisie au match retour. J'avais pleuré à chaudes larmes après avoir raté mes deux buts. J'étais désemparé après ce match et Hafid Derradji m'a achevé en me critiquant, comme s'il avait des comptes à régler avec moi.
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Quels sont les joueurs qui vous ont soutenu dans votre situation actuelle ?
Hichem Mazaïr et Daouad Sofiane. Ce sont des frères pour moi. Ils ne me refusent rien tous les deux. Hichem me rend visite régulièrement et Sofiane, c'est lui qui m'a payé le billet pour aller tenter ma chance à El Harrach.
Je n'oublierai jamais leur aide.
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Et qui vous a fait du mal ?
J'oublie vite lorsqu'on me fait du mal.
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Que représente pour vous cette photo en compagnie de Bouteflika que vous avez accrochée à votre mur ?
J'en suis très fier. Je suis très nationaliste et de ce fait, je suis très fier de ce que le président Bouteflika a pu faire pour l'Algérie.
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Si vous deviez vous adresser au président de la République, que lui diriez-vous ?
Que je suis très fier de l'avoir comme président. Je lui dirais : «Vous êtes le meilleur président que nous ayons jamais eu, car moi je ne connais pas feu Boumediène dont on m'a dit le plus grand bien. Mais je voudrais aussi que vous mettiez l'homme qu'il faut à la place qu'il faut dans ce pays. Je ne vois pas l'utilité de mettre un agriculteur au ministère de la Jeunesse et des Sports.
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Quels noms préconisez-vous pour diriger le football algérien ?
Moi, je mettrais que d'anciens sportifs reconnus pour diriger le football. Rachid Mekhloufi comme ministre de la Jeunesse et des Sports, Saïd Amara à la tête de la FAF, Saâdane comme DTN, et pour entraîner l'EN, Madjer et Charef.
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Quel message voudriez-vous transmettre à Raouraoua ?
Je voudrais lui dire qu'avec cette loi sur la limitation d'âge, il allait anéantir la carrière de beaucoup de joueurs qui peuvent encore apporter aux clubs algériens. Heureusement qu'il est revenu sur sa décision.
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Pour Saâdane ?
Il a monté une équipe qui nous a réconciliés avec les victoires. Il est en train de faire du bon boulot et je suis sûr qu'il ne va pas s'arrêter en si bon chemin.
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Charef ?
Je ne le remercierai jamais assez. C'est un homme avec un grand H. Il m'a été d'un soutien total depuis que je l'ai connu. Je n'oublierai jamais lorsqu'il m'a dit : «Prouve-moi que tu es toujours un grand joueur malgré tout ce que tu as enduré.» Charef est un seigneur !
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Quels conseils donneriez-vous à un jeune footballeur qui connaît le début de la gloire ?
Les nuits chaudes ne mènent nulle part. Les soirées, l'alcool, les cabarets et les boites de nuit vont t'écarter de l'essentiel et tu vas te retrouver sur la paille.
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A qui voudriez-vous lancer un dernier message ?
Au wali de Témouchent pour qu'il m'aide. Je suis vraiment dans le besoin.
Entretien réalisé par
Chaouïb K.


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