Le géant italien de l'énergie Eni, durement affecté par la chute des cours du pétrole, a enregistré en 2015 une perte nette de 8,8 milliards d'euros et annoncé une réduction de ses dépenses d'investissement pour 2016. Cette lourde perte, qui fait suite à un bénéfice net de 1,29 milliard en 2014, est une surprise puisque selon le consensus Factset Estimates, les analystes tablaient sur un bénéfice net de 526 millions d'euros. Sur le seul quatrième trimestre, la perte nette s'élève à 8,46 milliards d'euros. Du côté du résultat net ajusté, indicateur très suivi par le marché qui exclut des éléments volatils comme l'effet stock, le groupe a enregistré une perte de 696 millions d'euros contre un bénéfice de 2,2 milliards en 2014, dont une perte de 379 millions au dernier trimestre. Eni est directement touché par l'effondrement des cours du pétrole, qui ont chuté de 70% en un an et demi, passant de 110 dollars le baril en juin 2014 à 33 dollars aujourd'hui, en raison d'un excès d'offre. Le groupe italien a annoncé que sa production d'hydrocarbures avait progress é de 10% en 2015 à 1,76 million de barils par jour. Au quatrième trimestre, elle a augmenté de 14%, à 1,88 million de b/j, le niveau le plus élevé enregistré depuis cinq ans. Pour 2016, Eni s'attend à ce que le prix du brut continue à rester faible en raison de déséquilibres structurels conduisant à une offre excédentaire, et des incertitudes renouvelées entourant l'évolution future de la demande à moyen et long terme. En conséquence, le groupe a revu à la baisse ses prévisions de cours du brut dans son plan stratégique 2016- 2019, faisant notamment passer le prix de référence à long terme de 90 à 65 dollars. RENEGOCIATION DE CONTRATS Dans ce contexte, Eni a décidé de réduire ses dépenses d'investissement en 2016 de 20% sur un an à taux de change constants, en reformulant et en reprogrammant des projets, en étant de plus en plus sélectif concernant l'exploration et en renégociant des contrats de fourniture à long terme. Ces initiatives devraient avoir un impact limité sur notre plan d'augmentation de la production à court et moyen terme, a précisé le groupe, qui table pour 2016 sur une production au niveau de 2015. Son directeur général Claudio Descalzi a souligné qu'Eni poursuivrait sa transformation, qui verra le groupe se concentrer sur son coeur d'activités pétrole et gaz et être encore mieux organis é. Eni a cédé en janvier 12,5% de Saipem au Fonds stratégique italien (FSI), une opération qui a conduit à la déconsolidation de cette filiale et lui a permis d'empocher 4,8 milliards de dollars nets, a-t-il indiqué. La chute des cours affecte toutes les compagnies du secteur, à des degrés divers. L'espagnole Repsol a vu ses pertes nettes atteindre 1,22 milliard d'euros en 2015 et la britannique BP est passée dans le rouge, avec une perte nette de 6,5 milliards de dollars. Royal Dutch Shell a de son côté vu son bénéfice net divisé par plus de sept, à 1,9 milliard de dollars. Le français Total, qui a vu son bénéfice net grimper de 20%, mais son résultat net ajusté reculer de 18%, va réduire ses investissements. Face à la baisse des cours, Eni avait été la première compagnie pétrolière importante à annoncer, en mars, une réduction de son dividende. Le groupe a confirmé vendredi qu'il serait de 0,80 euro par action en 2015 --contre 1,12 en 2014-- ce qui a rassuré le marché, également satisfait du rebond des cours du pétrole ce vendredi et de la hausse de la production d'Eni et de ses perspectives dans ce domaine. Le groupe a en effet acquis en 2015 1,4 milliard de barils de nouvelles ressources, alors qu'il avait un objectif de 500 millions, grâce notamment à la découverte du plus grand gisement de gaz naturel jamais faite en mer Méditerranée, au large de l'Egypte. Le titre, qui a perdu quelque 10% depuis début janvier, a clôturé en progression de 5,13%, à 12,71 euros, à la Bourse de Milan, qui a gagné 2,22%.