Des policiers et des militaires congolais ont réprimé hier matin à coups de gaz lacrymogènes et des tirs de sommation une manifestation à Beni, au dernier jour du deuil national en mémoire de plusieurs dizaines de civils tués par des rebelles ougandais dans cette ville de l'est de la République démocratique du Congo (RDC). Les forces de l'ordre ont chargé à 10H30 (08H30 GMT) des centaines de manifestants protestant sur la principale artère qui mène à la mairie de Beni contre l'inaction des autorités contre les violences touchant la région. Au moins six manifestants ont été violemment interpelés, jetés sans ménagement dans une jeep militaire pour être conduits vers une destination inconnue. Des drapeaux du parti présidentiel, le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) ont été brûlés, tout comme, au grand marché de Beni, une effigie du président congolais Joseph Kabila. Le territoire de Beni et ses environs sont en proie à une série de massacres principalement à l'arme blanche, ayant causé la mort de plus de 650 personnes depuis octobre 2014. La dernière tuerie d'envergure a vu 51 civils tués dans la nuit de samedi à dimanche dans des quartiers nord de Beni, à la lisière du parc de Virunga, repaire des rebelles ougandais de Forces démocratiques alliées (ADF), selon un bilan de la société civile de Beni. Le gouvernement évalue de son côté le total des morts à 42. La société civile de Beni avait décrété trois journées ville morte à partir de lundi. Les manifestants avaient noué autour de leurs têtes des étoffes tatouées Amani (paix, en swahili), pour clôturer le deuil. En visite-éclair à Beni mardi, le Premier ministre congolais Augustin Matata a été hué par la foule qui l'a appelé à la démission, en accusant les autorités de n'avoir pas protégé la population contre ce danger bien identifié. Le gouvernement congolais et la Mission de l'ONU en RDC (Monusco) attribuent ces tueries aux rebelles des ADF. Une version partiellement remise en cause par des experts qui imputent également une part de responsabilité à des soldats de l'armée régulière. Pas d'obsèques officielles pour les victimes Les familles de plusieurs dizaines de personnes tuées le weekend dans un massacre attribué à des rebelles ont enterré leurs défunts sans attendre des obsèques officielles, selon les responsables locaux. La population a récupéré hier (lundi) les corps des leurs pour les enterrer, a déclaré le maire de Beni Edmond Masumbuko, qui a ajouté que l'Etat a pris en charge les corps qui ont été abandonnés. Quatre corps seulement étaient encore conservés mardi à la morgue de Beni, alors que dimanche 36 corps y avaient été déposés par l'armée et la population. Un deuil national de trois jours a été décrété par le gouvernement, dont le chef s'est rendu mardi sur place. Mais, dès dimanche, certaines familles avaient refusé de placer les dépouilles mortelles de leurs proches à la morgue, en vue d'organiser leurs deuils en privé. Ils avaient refusé que le gouvernement les enterre alors qu'ils ne les avaient pas sécurisés de leur vivant, déclarait Teddy Kataliko, membre de la coordination de la société civile de Beni. Un total de 51 civils ont été tués dans la nuit de samedi à dimanche dans des quartiers nord de Beni, à la lisière du parc de Virunga, repaire des rebelles ougandais de Forces démocratiques alliées (ADF), selon un bilan de la société civile de Beni. Le gouvernement évalue de son côté le total des morts à 42.