Rien ne dit que les incidents du mois d'octobre n'ont pas poussé le président centrafricain, Faustin Archange Toudéra, à redescendre sur le terrain. Les incidents qui se sont soldés par des morts montrent que la République centrafricaine (RCA) n'a pas encore été entièrement sécurisée. Certes, ces dérapages sont différents des exactions à grande échelle perpétrées par la Séléka après sa prise du pouvoir en 2013 dans le sillage de la chute du président François Bozizé. De même, ces glissements n'ont aucune commune mesure avec les excès des milices anti-balaka qui avaient été formés à la suite de la Séléka et qui avaient plongé le pays dans une spirale de tueries intercommunautaires. Ce nouveau regain de violence suscite néanmoins des inquiétudes. Parce qu'il montre que des armes circulent toujours et que des groupes armés peinent toujours à se soumettre au processus de Désarmement, démobilisation, réinsertion(DDR) initié par le chef de l'Etat centrafricain avec l'appui de la Mission multidimensionnelle des Nations unies pour la stabilisation de la Centrafrique (MINUSCA). L'une des bandes armées réfractaires au DDR est le groupe d'auto-défense 50 /50. Prétendant être l'une des factions héritières de la Séléka et croyant agir en légitime défense contre les anti-balaka, ce groupe revendique la parité des droits pour la minorité musulmane qui représente 15 à 20 % de la population centrafricaine, avant de se soumettre au DDR .Du côté des anciens anti-balaka , ce genre de propos est aussi tenu. Ayant bâti sa gouvernance sur la réconciliation nationale, la paix et la reconstruction, le président Faustin Archange Touadéra estime à juste titre que ceux qui ramaient encore à contre-courant doivent changer de cap pour se conformer au sens de la marche de la RCA qui se reconstruit dans l'union des cœurs et des esprits. Tel est le fondement de sa vision. C'est aussi le sens de sa récente tournée africaine et le but de son déplacement à Bruxelles. De ce point de vue, la conférence des donateurs de ce jeudi 17 novembre à Bruxelles et celle de la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale du 30 novembre prochain sont déterminantes dans le processus de consolidation de la paix et de la reconstruction centrafricaines. Les ONG humanitaires suspendent leurs activités Face aux attaques et aux braquages perpétrés contre leurs locaux, des organisations humanitaires ont décidé de suspendre temporairement leurs activités à Batangafo, une ville du centre-ouest du pays. Jusqu'au 21 Novembre, les populations de Batangafo en Centrafrique ne pourront pas bénéficier de l'ensemble des services des organisations humanitaires. Celles-ci protestent contre l'insécurité galoppante dans leurs zones d'activités. Mehdi Ben Khelifa, chef de mission du Conseil danois pour les réfugiés, précise les raisons de cette décision: "Sur quatre ONG qui ont une base à Batangafo, trois en huit jours ont été brutalement attaquées par des hommes armés. Elles ont été en fait braquées, cambriolées au milieu de la nuit sans réaction des forces de la mission des Nations Unies qui n'est pas très loin. On voulait un peu dénoncer cet état parce qu'on ne peut continuer à travailler si on n'est pas en milieu protégé." Dans la nuit du mercredi 3 au jeudi 4 novembre dernier, le bureau de l'ONG Oxfam a été la cible d'attaques armées. De l'argent, du matériel informatique et d'autres biens ont été emportés au passage par des individus non encore identifiés. L'arrêt des activités de ces ONG est un coup dur sanitaire pour les 23.000 déplacés que compte la ville. Mais Julia Serramitjana, chargée de communication d'Oxfam en Centrafrique rassure qu'il ne s'agit que d'une suspension partielle d'activités: "En fait, il s'agit de la suspension des activités non essentielles. C'est-à-dire on continue à travailler sur les choses plus basiques. On ne laisse pas la population à l'abandon. Mais on arrête les activités supplémentaires du programme. Mais il s'agit seulement des activités non essentielles." Les travailleurs humanitaires en Centrafrique doivent faire face à un énorme défi sécuritaire. L'International NGO Safety Organisation, basée à Londres, a dénombré plus de 3000 incidents sécuritaires contre les ONG dans le pays depuis le début de l'année.La mission des Nations unies en Centrafrique, que nous avons jointe, nous a informé être en train de mener des consultations avec les organisations concernées afin de définir les mesures à prendre.