Début de la campagne moisson-battage dans les wilayas du nord, indicateurs annonciateurs d'une récolte abondante    Ligue 1 Mobilis (28e journée): les résultats complets et classement    Mouvement partiel dans le corps des directeurs de la Protection civile    Concours Gourmand World Cookbook Awards: le livre "Le couscous, racines et couleurs d'Algérie" en finale    Algérie-UE : tirer le meilleur parti des ressources disponibles pour renforcer les relations commerciales    Les performances de la troupe "Arokass" de Djanet, parmi les principales attractions de l'Exposition universelle d'Osaka    Fédération algérienne des sports aquatiques : ouverture des candidatures pour les postes techniques    Pétrole et gaz : rebond des prix, portés par des facteurs géopolitiques, économiques et climatiques    La numérisation du secteur de l'enseignement supérieur a contribué à l'amélioration des œuvres universitaires    CNRC : le nouvel organigramme et la numérisation au centre d'une réunion au ministère du Commerce intérieur    Mme Hamlaoui reçoit le DG de l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie    Nâama: inhumation du Moudjahid Daifallah Mohamed    Tourisme: l'importance de l'adoption de la modernisation et de la numérisation dans la gestion soulignée    Ghaza : 500 personnalités roumaines signent une lettre exigeant l'arrêt du génocide sioniste    Retour du premier contingent de hadjis des wilayas du Sud-est    La présidente de la Fédération européenne des journalistes appelle la Commission européenne à prendre des mesures urgentes pour protéger les journalistes à Ghaza    L'UNRWA qualifie d'"humiliant" le modèle de distribution de l'aide humanitaire à Ghaza    Voile/Equipe nationale (Laser) : huit athlètes en stage de préparation à Alger Plage    L'AFC veut investir en Algérie    La victoire était à la portée des Fennecs !    Cherki entre dans une nouvelle dimension à Manchester City    Comment la diplomatie peut-elle être une solution à l'immigration clandestine ?    La Protection civile lance un appel urgent à la vigilance    «Ce que nous voyons à Ghaza est tellement douloureux, ça me fait mal dans tout le corps»    Les dockers du port de Marseille refusent de les embarquer !    Mascara rend un hommage vibrant au martyr Ali Maâchi    L'expérience du Ksar de Tafilelt mise en lumière à l'Expo-2025 au Japon    Une nouvelle ère de rigueur pour l'investissement    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    Les conséquences pour le monde    29 millions de personnes vivent l'instabilité    L'Algérie est en mesure de relever toute sorte de défis !    Témoin des atrocités coloniales dans les zones rurales    Unité des rangs et actions héroïques ancrées dans la mémoire nationale    La baguette normale devient un luxe    Une série d'accords signés entre l'Algérie et le Rwanda    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Boussaâd Ouadi ou la passion du livre
Rencontre avec un libraire- éditeur
Publié dans Le Midi Libre le 21 - 10 - 2007

Par quelles voies devient-on éditeur de livres ? Comment une vie vouée à l'homme bascule dans la production de nourritures spirituelles ? Boussaâd Ouadi nous le dit simplement : «Il suffit d'aimer les gens».
Par quelles voies devient-on éditeur de livres ? Comment une vie vouée à l'homme bascule dans la production de nourritures spirituelles ? Boussaâd Ouadi nous le dit simplement : «Il suffit d'aimer les gens».
Koraichi, Mouloud Mammeri, Djaout, Ali Maroc, Aziz Chouaki, Mimouni, Ahmed Bounab, Flammarion, Le Poitevin, Gallimard, Marie Josèphe, Malika Hachid, Abdelmadjid Méziane, Kateb Yacine, Assia Djebbar et Nawal Saâdaoui, Farid Mammeri, H'mida Layachi, Djillali Khellas, Merzak Beghtache, Slim, Hatier et Casterman, Françoise Verny, Haddadou, tous ces noms sont liés aux œuvres de l'esprit et de l'art.
Ils savent découvrir et faire aimer ce qu'ils aiment ; pour cela il faut une âme d'élite, un cœur passionné et un dévouement sans faille pour promouvoir ceux en qui on croit.
Comment devient-on éditeur après avoir occupé des fonctions de gestion des ressources humaines et de formation puis de gestionnaire des œuvres sociales dans le secteur public économique ?
Boussaâd Ouadi répond : «Recevoir un manuscrit, en apprécier le contenu et le style, le souffle qui l'anime, rendre cette trouvaille, cette pépite, accessible au plus large public est un métier qui me passionne. Je me représente comme un pont …» Cette image existe dans «l'éducation sentimentale» de Gustave Flaubert qui consacre quelques pages, sans rapport avec le sujet du livre, dans lesquelles il dresse le portrait d'un ouvrier qui fait en quelque sorte le passeur d'idées pour d'autres qui ont besoin de ces richesses pour être meilleurs sinon pour se savoir vivants.
Cela n'est pas facile, n'est pas à la portée du premier venu. C'est à la faveur de la restructuration des entreprises, au début des années 80, que Boussaâd Ouadi décide de quitter le secteur public et de tenter sa chance dans le privé. La chance a un nom : Flammarion. «C'était à l'occasion de la première foire du livre organisée par Abdelmadjid Méziane, alors ministre de la Culture. Je vois un homme jeune qui transporte dans lesbras des paquets de livres, qui les dispose en un stand, les déballe et les range. Nous entamons une conversation qui n'est jamais terminée ; mais dont la première restera à jamais gravée dans ma mémoire, car elle est ce que les gens nomment la passion mais qui la dépasse pour devenir une noble servitude. M. Flammarion me montre un livre d'art représentant des icônes de Russie, ces images saintes dédiées à des saints et saintes peintes pour exprimer la dévotion et l'amour christique. Ce recueil de photographies était réalisé grâce au courage de ce monsieur qui a frappé à la porte des décideurs de l'URSS pour pouvoir réaliser son objectif. Le livre a connu un succès mondial, mais le mobile de Flammarion n'était pas l'argent, c'est la passion des icônes!» Des icônes, Lacan dira que ce sont des tableaux qui nous regardent.
Sur le chemin de l'édition, Boussaâd a fait des rencontres qui lui ont balisé les voies de la connaissance et de l'humain. Ainsi Le Poitevin lui a fait découvrir les peintures rupestres et cela a réveillé ou même avivé le registre de l'identité d'où les rapports privilégiés avec Mammeri, Haddadou, Hachid et d'autres encore. Il a une anecdote sur chaque création, chaque femme ou homme de lettres et de sciences.
De Françoise Verny, directrice de collections chez plusieurs grands éditeurs, il dira qu'elle «est foisonnante comme Kateb Yacine» ; un peu comme une manière de politesse, non «plutôt comme une don oblatif, que seuls quelques humains peuvent atteindre.»
Il révélera ce que l'on oublie, à savoir que Laphomic, le premier éditeur privé, a édité Mammeri, Mimouni, Assia Djebbar. «J'ai moi-même fabriqué le premier livre PAO. Celui de Aziz Chouaki intitulé Baya». Il vous apprend que Slim, le bédéiste, a beaucoup travaillé sur ordinateur et envisageait la création de dessins animés dans le style des Mangas japonais et cela avec l'aide de Olivetti et du centre culturel italien.
Editeur, il retrouvera l'histoire ancienne de l'Algérie et des berbères avec Mammeri et Hachid bouclant un cercle vertueux depuis ses premiers pas en compagnie de Le Poitevin. Une anecdote sur la grammaire kabyle proposée par Mammeri à la Sned est la réponse de la Société nationale d'édition et de distribution : «Nous avons le regret de ne pas donner suite, etc,» signé par le département de langues étrangères ! », il dit que l'humour devient tragique.
Boussaâd Ouadi décide de quitter Laphomic et de créer sa propre maison d'édition. Ce sera EDIF, aventure à laquelle il associe deux amis qui auront chacun un tiers de l'affaire sans avoir apporté un seul dinar. Ils le mettront en minorité peu de temps après car leurs deux parts réunies leur donnaient la majorité !
Qu'à cela ne tienne, il reprend la librairie des Beaux arts en gérance et découvre «le métier le plus difficile qui soit». N'empêche qu'il repique à l'édition en créant INAS. Il publie à l'occasion du Salon international du Livre d'Alger un récit de Mohamed Benchicou qui traite du monde des prisons.
«La seule façon de développer la lecture publique, ce sont les bibliothèques et un réseau plus dense de la distribution. Pour cela il faut que la part des éditeurs en matière d'investissements soit couverte grâce à la multiplication du nombre d'exemplaires par au moins dix.»
A propos du rôle de l'Etat, il dira que tous les ministres de la Culture qui se sont succédé ont mis sur pied des programmes formidables… qui ne se sont jamais réalisés. Un miracle est toujours possible !
Boussaad Ouadi a lui aussi une passion : celle de participer à l'éclosion des idéaux les plus élevés de l'humanité. Il croit que nous en sommes capables.
Koraichi, Mouloud Mammeri, Djaout, Ali Maroc, Aziz Chouaki, Mimouni, Ahmed Bounab, Flammarion, Le Poitevin, Gallimard, Marie Josèphe, Malika Hachid, Abdelmadjid Méziane, Kateb Yacine, Assia Djebbar et Nawal Saâdaoui, Farid Mammeri, H'mida Layachi, Djillali Khellas, Merzak Beghtache, Slim, Hatier et Casterman, Françoise Verny, Haddadou, tous ces noms sont liés aux œuvres de l'esprit et de l'art.
Ils savent découvrir et faire aimer ce qu'ils aiment ; pour cela il faut une âme d'élite, un cœur passionné et un dévouement sans faille pour promouvoir ceux en qui on croit.
Comment devient-on éditeur après avoir occupé des fonctions de gestion des ressources humaines et de formation puis de gestionnaire des œuvres sociales dans le secteur public économique ?
Boussaâd Ouadi répond : «Recevoir un manuscrit, en apprécier le contenu et le style, le souffle qui l'anime, rendre cette trouvaille, cette pépite, accessible au plus large public est un métier qui me passionne. Je me représente comme un pont …» Cette image existe dans «l'éducation sentimentale» de Gustave Flaubert qui consacre quelques pages, sans rapport avec le sujet du livre, dans lesquelles il dresse le portrait d'un ouvrier qui fait en quelque sorte le passeur d'idées pour d'autres qui ont besoin de ces richesses pour être meilleurs sinon pour se savoir vivants.
Cela n'est pas facile, n'est pas à la portée du premier venu. C'est à la faveur de la restructuration des entreprises, au début des années 80, que Boussaâd Ouadi décide de quitter le secteur public et de tenter sa chance dans le privé. La chance a un nom : Flammarion. «C'était à l'occasion de la première foire du livre organisée par Abdelmadjid Méziane, alors ministre de la Culture. Je vois un homme jeune qui transporte dans lesbras des paquets de livres, qui les dispose en un stand, les déballe et les range. Nous entamons une conversation qui n'est jamais terminée ; mais dont la première restera à jamais gravée dans ma mémoire, car elle est ce que les gens nomment la passion mais qui la dépasse pour devenir une noble servitude. M. Flammarion me montre un livre d'art représentant des icônes de Russie, ces images saintes dédiées à des saints et saintes peintes pour exprimer la dévotion et l'amour christique. Ce recueil de photographies était réalisé grâce au courage de ce monsieur qui a frappé à la porte des décideurs de l'URSS pour pouvoir réaliser son objectif. Le livre a connu un succès mondial, mais le mobile de Flammarion n'était pas l'argent, c'est la passion des icônes!» Des icônes, Lacan dira que ce sont des tableaux qui nous regardent.
Sur le chemin de l'édition, Boussaâd a fait des rencontres qui lui ont balisé les voies de la connaissance et de l'humain. Ainsi Le Poitevin lui a fait découvrir les peintures rupestres et cela a réveillé ou même avivé le registre de l'identité d'où les rapports privilégiés avec Mammeri, Haddadou, Hachid et d'autres encore. Il a une anecdote sur chaque création, chaque femme ou homme de lettres et de sciences.
De Françoise Verny, directrice de collections chez plusieurs grands éditeurs, il dira qu'elle «est foisonnante comme Kateb Yacine» ; un peu comme une manière de politesse, non «plutôt comme une don oblatif, que seuls quelques humains peuvent atteindre.»
Il révélera ce que l'on oublie, à savoir que Laphomic, le premier éditeur privé, a édité Mammeri, Mimouni, Assia Djebbar. «J'ai moi-même fabriqué le premier livre PAO. Celui de Aziz Chouaki intitulé Baya». Il vous apprend que Slim, le bédéiste, a beaucoup travaillé sur ordinateur et envisageait la création de dessins animés dans le style des Mangas japonais et cela avec l'aide de Olivetti et du centre culturel italien.
Editeur, il retrouvera l'histoire ancienne de l'Algérie et des berbères avec Mammeri et Hachid bouclant un cercle vertueux depuis ses premiers pas en compagnie de Le Poitevin. Une anecdote sur la grammaire kabyle proposée par Mammeri à la Sned est la réponse de la Société nationale d'édition et de distribution : «Nous avons le regret de ne pas donner suite, etc,» signé par le département de langues étrangères ! », il dit que l'humour devient tragique.
Boussaâd Ouadi décide de quitter Laphomic et de créer sa propre maison d'édition. Ce sera EDIF, aventure à laquelle il associe deux amis qui auront chacun un tiers de l'affaire sans avoir apporté un seul dinar. Ils le mettront en minorité peu de temps après car leurs deux parts réunies leur donnaient la majorité !
Qu'à cela ne tienne, il reprend la librairie des Beaux arts en gérance et découvre «le métier le plus difficile qui soit». N'empêche qu'il repique à l'édition en créant INAS. Il publie à l'occasion du Salon international du Livre d'Alger un récit de Mohamed Benchicou qui traite du monde des prisons.
«La seule façon de développer la lecture publique, ce sont les bibliothèques et un réseau plus dense de la distribution. Pour cela il faut que la part des éditeurs en matière d'investissements soit couverte grâce à la multiplication du nombre d'exemplaires par au moins dix.»
A propos du rôle de l'Etat, il dira que tous les ministres de la Culture qui se sont succédé ont mis sur pied des programmes formidables… qui ne se sont jamais réalisés. Un miracle est toujours possible !
Boussaad Ouadi a lui aussi une passion : celle de participer à l'éclosion des idéaux les plus élevés de l'humanité. Il croit que nous en sommes capables.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.