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D'un enfer à l'autre
«La géographie du danger» de Hamid Skif
Publié dans Le Midi Libre le 07 - 02 - 2008

Les situations appréhendées par Hamid Skif à travers l'intériorité du personnage central de son dernier roman, sont d'un réalisme quasi journalistique. Il faut dire que l'écrivain, vivant selon ses propres dires, «en transit temporaire» à Hambourg depuis1997, a été très à l'écoute des sans papier de la ville.
Les situations appréhendées par Hamid Skif à travers l'intériorité du personnage central de son dernier roman, sont d'un réalisme quasi journalistique. Il faut dire que l'écrivain, vivant selon ses propres dires, «en transit temporaire» à Hambourg depuis1997, a été très à l'écoute des sans papier de la ville.
«La géographie du danger» c'est cette carte des lieux à éviter que tout bon clandestin doit connaître par cœur sous peine de tomber dans les rets des chasseurs de faciès. Et un bon clandestin, c'est quoi ? Un chat gris sur un mur de pierres : il ne doit pas faire tache. Car, nous apprend le héros-narrateur qui semble avoir fait ses classes chez Victor Serge(1890/1947), «un clandestin se reconnaît à son teint», famélique, «à l'état de ses chaussures », crottées, et à sa manière caractéristique de se tenir. Initié par des passeurs plus cyniques l'un que l'autre, le héros, en fuyant la faim de son enfer natal, ne sait pas qu'il va vers l'enfer de toutes les faims.
Les situations appréhendées par Hamid Skif à travers l'intériorité du personnage central de son dernier roman, sont d'un réalisme quasi journalistique. Il faut dire que l'écrivain, vivant selon ses propres dires, «en transit temporaire» à Hambourg depuis1997, a été très à l'écoute des sans papier de la ville. Leur état d'âme plus proche de celui du gibier traqué que de l'envahisseur conquérant est magistralement mis en scène par la plume subtile de l'auteur.
Une identité soluble
dans la misère
Un personnage sans nom quitte un pays sans nom pour une terre sans nom. Les personnages d'outre-mer portent cependant, des prénoms typiquement français et l'on reconnaît l'Algérie ou en tout cas un pays maghrébin dans les souvenirs du narrateur. «Je n'ai plus de nom, plus de prénom, rien que des pseudonymes. Les patronymes que je m'attribue sont fonction de l'employeur (…). J'habite les lieux de ma métamorphose. Les langues importent peu. Il suffit de connaître les mots du dictionnaire des esclaves : travail, pas travail, porter, laver, gratter, vider, charger, décharger, couper, casser, monter, nettoyer, démonter, peindre, clouer, arracher, repos, manger, payer, silence, se cacher, se taire, partir, venir, finir, ne plus revenir, combien ? …»
Le lecteur découvre une suite de personnages liés à plusieurs mondes enchevêtrés à travers les soliloques de ce jeune chômeur, ingénieur électronicien de formation. Après avoir «brûlé» par le détroit de Gibraltar, il se planque dans le noir d'«une chambre de bonne louée sous un faux nom par un sympathisant des causes perdues». Ayant fait une quantité de «petits boulots» désormais rendus impossibles par des lois implacables appliquées avec un zèle passionnel, le héros ne peut plus que se cacher. «Après le garçon de ferme, j'ai fait le boy dans des maisons, le plongeur dans les restaurants, le soigneur de chiens malades, l'éleveur de coccinelles pour un protecteur de la nature et le manœuvre dans les cuves d'une centrale atomique, en réprimant la furieuse envie d'exhiber mon diplôme d'ingénieur de peur que les employeurs ne montrent les crocs. Plus tu es instruit, plus on t'écrabouille. C'est partout pareil. Là-bas, en organisant le syndicat des chômeurs diplômés, j'avais affronté les mêmes crispations. La différence, c'est qu'ici je peux manger. Manger quoi à vrai dire ? Ma vie.»
L'écriture contre la folie
«Le lieu est censé être occupé de temps à autre par mon bienfaiteur. Michel Delbin, étudiant en géologie, aimerait prospecter, un jour, dans mon pays.»
Au gré des maigres provisions que son ami, lui-même en difficulté financière, lui fournit, le héros de plus en plus affamé se repasse le scénario de sa jeune existence. Après Michel, il n'a qu'une seule amie, sa plume. Pour ne pas sombrer, il épie ses voisins de l'immeuble d'en face et écrit. De longues missives à des amoureuses imaginaires et des récits de son cru. Il reconstitue également la vie de son ancêtre, le marabout Cheikh El-Okbi transmise par les récits que lui en a fait son vieux père qui a usé ses os à des labeurs d'esclave. Des personnages du passé le hantent : Zoreta, une jeune fille «voyou» à laquelle le lie une amitié d'enfance, ses anciennes petites amies, ses copains de quartier… Tirée de ses expériences les plus récentes, il narre la vie de Hassan Papillon et Kamel-la-braguette, qui en courtisant de l'autre côté de la Méditerranée des mémères esseulées, ont fait rêver ceux de sa génération : «Toute une jeunesse s'est fait avoir par leur factice épopée. Le soir, le cul sur le trottoir, la bouteille de mauvais vin vidée, nous évoquions leur réussite en rêvant de ressembler un jour à ces gigolos de fête foraine.»
Cet ouvrage, où passe comme un souffle katébien, recèle les échos amplifiés d'une violence multiforme : celle familiale ou répressive qu'a fuie le jeune homme et celle, inattendue qu'il retrouve de l'autre côté de la mer. Cela lui confère une tonalité générale très sombre malgré un style alerte et un rythme soutenu. Avec une authentique verve méditerranéenne, une juxtaposition de misères humaines est décrite, entrebâillant la porte du bonheur à travers la fuite ou/ et la rébellion. «Puisque je suis déjà mort, ils ne peuvent me tuer», écrit le narrateur qui emprunte le célèbre mot d'ordre des marcheurs de 2001. Jusqu'à l'issue inévitable : quand le héros est pris, se sachant condamné à être tué, il décide de fuir de manière définitive cette fois-ci.
Comme
Claire Etcherelli
et André Brink
«Je rentre chez moi ce soir. Je me jetterai du train, parce que je n'ai pas la tête qu'il faut et que mon ombre fait de l'ombre au crocodile qui me fait face, qui aimerait bien gagner ses galons au supermarché de la haine et qui ne rêve que de se faire un clandestin, un bougnoule, un autre métèque. S'il faut qu'il en crève un, ce sera ce soir ou jamais.»
C'est la dernière phrase du roman qui s'achève en vrai brise- cœur alors que le héros, pris d'une lassitude suicidaire, avait fini, en se dévoilant à un vieux couple de ses voisins, par rencontrer Nicole, la veuve de leur fils avec qui il connaît enfin, un bonheur sursitaire. Les deux jeunes gens sont pris au piège de lois qui rendent leur mariage quasi-impossible. Situation digne du temps d' «Elise ou la vraie vie» le roman de Claire Etcherelli publié en 1967 et qui relate la rencontre et la séparation définitive lors d'une rafle, d'Arezki et Elise, un couple algéro-français, pendant la guerre d'Algérie. L'ouvrage offre également au lecteur l'occasion d'une irrésistible réminiscence de «Au plus noir de la nuit» publié en 1974 par l'auteur afrikaner, André Brink. A l'époque de l'apartheid en Afrique du Sud, Joseph Malan, un acteur noir est arrêté, torturé et condamné à mort pour avoir aimé une blanche. Enfermé dans sa cellule, il écrit son histoire et celle des siens. Précédant le héros de Hamid Skif qui ne retrouve une identité qu'avec Nicole, le condamné à mort avait écrit : «Quand je suis avec toi, je sais qui je suis (...). Parmi tous les rôles que j'ai joués, tous ceux que je jouerai encore, il y en a un que j'aimerai jouer vraiment, et c'est le seul que je ne jouerai jamais (...) Joseph Malan. Mon rôle. Un homme. Un être humain. Tu es la seule qui m'ait rendu la chose possible». «La géographie du danger» qui débute par le récit du passage des frontières dans une ambiance digne des marches forcées des prisonniers des camps nazis, s'achève sur un voyage en train vers la mort. Entre les deux, le héros aura vécu, une expérience quasi carcérale et quelques moments d'un bonheur de l'urgence. Ce dernier roman de Hamid Skif qui en a écrit six et plusieurs essais et recueils de poèmes, est une véritable introspection dans le monde intérieur des harragas. Il est hors de doute qu'il donnera à réfléchir à plus d'un candidat à l'exil volontaire, tout comme il interpelle tous ceux dont dépend peu ou prou la destinée d'une jeunesse victime d'illusions mortelles. Hamid Skif, de son vrai nom Mohamed Benmebkhout, est né en 1951 à Oran d'une famille originaire de Bou-Saâda. Il a derrière lui un long parcours artistique qui a débuté en 1968 lorsqu'il rejoint «Le Théâtre de la mer» qui deviendra une année après «L'Action culturelle des travailleurs». Il échappe en 1993 et 1994 à deux tentatives d'assassinat à Tipasa, alors que Tahar Djaout et Youcef Sebti font partie des premières victimes. Installé depuis 1997 à Hambourg, il prépare un livre sur Abdelkader Guermaz, artiste peintre et annonce un nouveau roman.
«La géographie du danger» de Hamid Skif
Editons APIC, Alger 2007 et Naïve, 2006, 157 pages.
«La géographie du danger» c'est cette carte des lieux à éviter que tout bon clandestin doit connaître par cœur sous peine de tomber dans les rets des chasseurs de faciès. Et un bon clandestin, c'est quoi ? Un chat gris sur un mur de pierres : il ne doit pas faire tache. Car, nous apprend le héros-narrateur qui semble avoir fait ses classes chez Victor Serge(1890/1947), «un clandestin se reconnaît à son teint», famélique, «à l'état de ses chaussures », crottées, et à sa manière caractéristique de se tenir. Initié par des passeurs plus cyniques l'un que l'autre, le héros, en fuyant la faim de son enfer natal, ne sait pas qu'il va vers l'enfer de toutes les faims.
Les situations appréhendées par Hamid Skif à travers l'intériorité du personnage central de son dernier roman, sont d'un réalisme quasi journalistique. Il faut dire que l'écrivain, vivant selon ses propres dires, «en transit temporaire» à Hambourg depuis1997, a été très à l'écoute des sans papier de la ville. Leur état d'âme plus proche de celui du gibier traqué que de l'envahisseur conquérant est magistralement mis en scène par la plume subtile de l'auteur.
Une identité soluble
dans la misère
Un personnage sans nom quitte un pays sans nom pour une terre sans nom. Les personnages d'outre-mer portent cependant, des prénoms typiquement français et l'on reconnaît l'Algérie ou en tout cas un pays maghrébin dans les souvenirs du narrateur. «Je n'ai plus de nom, plus de prénom, rien que des pseudonymes. Les patronymes que je m'attribue sont fonction de l'employeur (…). J'habite les lieux de ma métamorphose. Les langues importent peu. Il suffit de connaître les mots du dictionnaire des esclaves : travail, pas travail, porter, laver, gratter, vider, charger, décharger, couper, casser, monter, nettoyer, démonter, peindre, clouer, arracher, repos, manger, payer, silence, se cacher, se taire, partir, venir, finir, ne plus revenir, combien ? …»
Le lecteur découvre une suite de personnages liés à plusieurs mondes enchevêtrés à travers les soliloques de ce jeune chômeur, ingénieur électronicien de formation. Après avoir «brûlé» par le détroit de Gibraltar, il se planque dans le noir d'«une chambre de bonne louée sous un faux nom par un sympathisant des causes perdues». Ayant fait une quantité de «petits boulots» désormais rendus impossibles par des lois implacables appliquées avec un zèle passionnel, le héros ne peut plus que se cacher. «Après le garçon de ferme, j'ai fait le boy dans des maisons, le plongeur dans les restaurants, le soigneur de chiens malades, l'éleveur de coccinelles pour un protecteur de la nature et le manœuvre dans les cuves d'une centrale atomique, en réprimant la furieuse envie d'exhiber mon diplôme d'ingénieur de peur que les employeurs ne montrent les crocs. Plus tu es instruit, plus on t'écrabouille. C'est partout pareil. Là-bas, en organisant le syndicat des chômeurs diplômés, j'avais affronté les mêmes crispations. La différence, c'est qu'ici je peux manger. Manger quoi à vrai dire ? Ma vie.»
L'écriture contre la folie
«Le lieu est censé être occupé de temps à autre par mon bienfaiteur. Michel Delbin, étudiant en géologie, aimerait prospecter, un jour, dans mon pays.»
Au gré des maigres provisions que son ami, lui-même en difficulté financière, lui fournit, le héros de plus en plus affamé se repasse le scénario de sa jeune existence. Après Michel, il n'a qu'une seule amie, sa plume. Pour ne pas sombrer, il épie ses voisins de l'immeuble d'en face et écrit. De longues missives à des amoureuses imaginaires et des récits de son cru. Il reconstitue également la vie de son ancêtre, le marabout Cheikh El-Okbi transmise par les récits que lui en a fait son vieux père qui a usé ses os à des labeurs d'esclave. Des personnages du passé le hantent : Zoreta, une jeune fille «voyou» à laquelle le lie une amitié d'enfance, ses anciennes petites amies, ses copains de quartier… Tirée de ses expériences les plus récentes, il narre la vie de Hassan Papillon et Kamel-la-braguette, qui en courtisant de l'autre côté de la Méditerranée des mémères esseulées, ont fait rêver ceux de sa génération : «Toute une jeunesse s'est fait avoir par leur factice épopée. Le soir, le cul sur le trottoir, la bouteille de mauvais vin vidée, nous évoquions leur réussite en rêvant de ressembler un jour à ces gigolos de fête foraine.»
Cet ouvrage, où passe comme un souffle katébien, recèle les échos amplifiés d'une violence multiforme : celle familiale ou répressive qu'a fuie le jeune homme et celle, inattendue qu'il retrouve de l'autre côté de la mer. Cela lui confère une tonalité générale très sombre malgré un style alerte et un rythme soutenu. Avec une authentique verve méditerranéenne, une juxtaposition de misères humaines est décrite, entrebâillant la porte du bonheur à travers la fuite ou/ et la rébellion. «Puisque je suis déjà mort, ils ne peuvent me tuer», écrit le narrateur qui emprunte le célèbre mot d'ordre des marcheurs de 2001. Jusqu'à l'issue inévitable : quand le héros est pris, se sachant condamné à être tué, il décide de fuir de manière définitive cette fois-ci.
Comme
Claire Etcherelli
et André Brink
«Je rentre chez moi ce soir. Je me jetterai du train, parce que je n'ai pas la tête qu'il faut et que mon ombre fait de l'ombre au crocodile qui me fait face, qui aimerait bien gagner ses galons au supermarché de la haine et qui ne rêve que de se faire un clandestin, un bougnoule, un autre métèque. S'il faut qu'il en crève un, ce sera ce soir ou jamais.»
C'est la dernière phrase du roman qui s'achève en vrai brise- cœur alors que le héros, pris d'une lassitude suicidaire, avait fini, en se dévoilant à un vieux couple de ses voisins, par rencontrer Nicole, la veuve de leur fils avec qui il connaît enfin, un bonheur sursitaire. Les deux jeunes gens sont pris au piège de lois qui rendent leur mariage quasi-impossible. Situation digne du temps d' «Elise ou la vraie vie» le roman de Claire Etcherelli publié en 1967 et qui relate la rencontre et la séparation définitive lors d'une rafle, d'Arezki et Elise, un couple algéro-français, pendant la guerre d'Algérie. L'ouvrage offre également au lecteur l'occasion d'une irrésistible réminiscence de «Au plus noir de la nuit» publié en 1974 par l'auteur afrikaner, André Brink. A l'époque de l'apartheid en Afrique du Sud, Joseph Malan, un acteur noir est arrêté, torturé et condamné à mort pour avoir aimé une blanche. Enfermé dans sa cellule, il écrit son histoire et celle des siens. Précédant le héros de Hamid Skif qui ne retrouve une identité qu'avec Nicole, le condamné à mort avait écrit : «Quand je suis avec toi, je sais qui je suis (...). Parmi tous les rôles que j'ai joués, tous ceux que je jouerai encore, il y en a un que j'aimerai jouer vraiment, et c'est le seul que je ne jouerai jamais (...) Joseph Malan. Mon rôle. Un homme. Un être humain. Tu es la seule qui m'ait rendu la chose possible». «La géographie du danger» qui débute par le récit du passage des frontières dans une ambiance digne des marches forcées des prisonniers des camps nazis, s'achève sur un voyage en train vers la mort. Entre les deux, le héros aura vécu, une expérience quasi carcérale et quelques moments d'un bonheur de l'urgence. Ce dernier roman de Hamid Skif qui en a écrit six et plusieurs essais et recueils de poèmes, est une véritable introspection dans le monde intérieur des harragas. Il est hors de doute qu'il donnera à réfléchir à plus d'un candidat à l'exil volontaire, tout comme il interpelle tous ceux dont dépend peu ou prou la destinée d'une jeunesse victime d'illusions mortelles. Hamid Skif, de son vrai nom Mohamed Benmebkhout, est né en 1951 à Oran d'une famille originaire de Bou-Saâda. Il a derrière lui un long parcours artistique qui a débuté en 1968 lorsqu'il rejoint «Le Théâtre de la mer» qui deviendra une année après «L'Action culturelle des travailleurs». Il échappe en 1993 et 1994 à deux tentatives d'assassinat à Tipasa, alors que Tahar Djaout et Youcef Sebti font partie des premières victimes. Installé depuis 1997 à Hambourg, il prépare un livre sur Abdelkader Guermaz, artiste peintre et annonce un nouveau roman.
«La géographie du danger» de Hamid Skif
Editons APIC, Alger 2007 et Naïve, 2006, 157 pages.


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