La question revient avec insistance ces derniers temps, surtout après la parution récente d'un « manifeste pour la reconnaissance constitutionnelle d' un statut particulier de la Kabylie »: qu'en est-il de l'autonomie? En ces temps de confusion politiquement programmée, il est important de ramener l'autonomie à sa définition politique, fondamentalement différente de la conception géographique qu'on lui a greffé. Car, pour éviter ce que le Pr Arkoun appelait « le désordre sémantique », il convient de rappeler que la question de l'autonomie, au sens politique, à été posée par les cadres du FFS, durant les années 1970. Seulement, ce concept reposait sur un processus de construction citoyenne allant de la réhabilitation de la souveraineté individuelle à consolidation de la souveraineté nationale. En d'autres termes, il s'agit de construire l'Algérien en citoyen vivant pleinement les différentes composantes et dimensions de sa citoyenneté : sa mémoire individuelle et les différentes mémoires collectives constituant celle du peuple algérien, son histoire, sa souveraineté politique et sociale, ses différents appartenances identitaires, la diversité culturelle de son pays et tous les éléments à même de faire de lui un citoyen maghrébin participant à la construction historique d'un espace méditerranéen des peuples, libéré de toutes les raisons d'Etat qui le tiennent en otage. Donc, cette vision ne porte aucun particularisme ethnique. Par contre, celle présentée sous l'aspect d'une décentralisation administrative et d'une délimitation géographique a fait son chemin au fil des différentes étapes du processus d'élimination de toute conception politique de la citoyenneté en Algérie. Preuve en est, elle a été rendue visible vers la fin des années 1990 et le début des années 2000. C'est-à-dire, après la période des massacres à grande échelle et au coeur de la machination macabre qui a visé la Kabylie en 2001. Cette vision subordonne le concept de l'autonomie à l'appartenance ethnique. Or, cette appartenance n'est qu'un élément, parmi tant d'autres, de l'identité qui, à son tour, n'est qu'un aspect de la citoyenneté. Tout projet politique reposant uniquement sur une réduction de l'identité à une appartenance ethnique ou religieuse, idéologisée et portée par un discours mythifiant une histoire méconnue et aliénant des mémoires individuelles et collectives profondément traumatisées, ne peut échapper à la manipulation de ceux qui œuvrent à une instauration accélérée du Nouvel Ordre Mondial. Un Ordre doté d'une gouvernance consacrant l'hégémonie de l'oligarchie mondiale dont les membres ( certaines sources parlent de 80 familles) détiennent l'équivalent, en argent, de ce qui revient à la moitié de la population planétaire. C'est-à-dire 3,5 milliards de personnes! Aujourd'hui, si on parle de la citoyenneté mondiale et qu'un penseur comme Edgar Morin avance le concept de « la terre-patrie », c'est qu'il est impératif, pour nous, d'éviter le piège des appartenances identitaires primaires.