Le Théâtre régional de Biskra est entré, samedi soir à Alger, en compétition du 18e Festival national du théâtre professionnel (Fntp) avec la pièce «Ghadbat El Bey» (La colère du Bey), œuvre théâtrale épique qui retrace une période charnière de l'histoire de l'Algérie à travers la résistance anticoloniale d'Ahmed Bey à Constantine. Mis en scène par Karim Boudechiche sur un texte de Hamid Allaoui et un traitement dramaturgique de Said Boulmerka, le spectacle met en scène la résistance armée de Ahmed Bey en 1836 à Constantine, avant la chute, un an plus tard, de cette ville de l'est algérien aux mains des forces coloniales françaises. Servi par une dizaine de comédiens issus, pour la plupart du T.R de Biskra, ce spectacle qui s'inscrit dans le registre du théâtre de mémoire, établit le lien entre la résistance populaire menée à Constantine par Ahmed Bey, personnage incarné par Tarek Louiz et le déclenchement de la Révolution de novembre 1954. Investis pleinement dans un antagonisme apparent, les comédiens notamment Saïd Djenane, Hamza Diab et Baya Mohamedi, ont porté brillamment un texte dense, déroulé en suivant une chronologie historique, de manière à recréer le conflit et les «prises de bec» entre Ahmed Bey et les autorités coloniales. A travers l'exécution de plusieurs tableaux revoyant à différents situations de la résistance de Ahmed Bey, le spectacle revient sur la victoire de Ahmed Bey de 1836, avant de replier ses troupes dans les Aurès, pour mieux s'organiser aux cotés d'autres résistants de la région. Face au blocus imposé par l'armée coloniale dans les Aurès, Ahmed Bey se rend à Biskra- le temps d'une pause tactique- afin de réorganiser son armée. Empruntant le langage cinématographique, le metteur en scène a adopté une «fusion» des langages cinématographique et théâtral, en utilisant un «découpage technique», inspiré du 7e Art, incluant des notions de format et de cadrage, notamment. Avec une mise en scène privilégiant l'atmosphère et dégageant deux espaces scéniques distincts (le palais et le maquis), la scénographie a consisté en un décor minimaliste et statique, avec comme arrière-plan des arcades suggérant un palais de l'époque. Le metteur en scène a expliqué que sa vision scénique permet des «chevauchements de temps et d'espace» ainsi que des «effets» de distanciation pour permettre aux comédiens une fluidité des mouvements dans l'ensemble de l'espace scénique, dominé par le palais suggéré par une arcade, implantée au milieu de la scène. Soutenu par une bande son, signée Abdelkrim Khomri, qui a brillamment illustré les différentes atmosphères tragiques et les fortes émotions de la trame, avec notamment des chants patriotiques réarrangés, l'éclairage feutré et sombre a participé davantage à recréer les atmosphères et les différentes situations rendues dans le spectacle. Ouvert le 22 décembre, le 18e FNTP se poursuit jusqu'au 1er janvier 2026 sous l'intitulé Le théâtre réduit les distances », avec au programme, 18 pièces en compétition et 8 autres en off, en plus de conférences, master classes et spectacles de rue.