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Clichés parisiens sur notre Révolution de velours
Publié dans Le Soir d'Algérie le 10 - 03 - 2019

Entendu dans le métro à Paris, cet échange entre deux types :
- T'as vu comme ça descend dans la rue en Algérie ?
- Ouais, ils se soulèvent contre l'armée !
- C'est comme au Venezuela, les gens sont muselés par les militaires, ils en ont marre !
Une dame qui lisait le dernier numéro de Courrier international titrant en «Une» : «Algérie, place aux jeunes ! », se mêla de la conversation :
- Pas que l'armée, c'est surtout une oligarchie !
Puis elle enchaîna :
- Ce qui se passe au Venezuela, c'est de l'ordre de la souveraineté du pays par rapport aux USA. Ça n'a rien à voir avec l'Algérie.
Cet échange, a priori banal, a ceci d'exceptionnel qu'il s'est déroulé entre des inconnus dans les transports en commun, un lieu où généralement on ne se parle pas, ou si peu. Ces propos illustrent la disproportion entre le grand intérêt qu'éprouvent des Français pour l'Algérie et l'aspect sommaire et même caricatural des informations qui parviennent à l'opinion. Même les journalistes dits «spécialisés» reflètent la doxa.
Depuis le début des manifestations populaires du 22 février, la presse française focalise sur l'Algérie sans se départir des approximations et autres préjugés habituels en la circonstance. Les journaux télévisés, les émissions politiques convoquent le ban et l'arrière-ban des sempiternels «experts» et autres «spécialistes» qui y vont de leurs commentaires très souvent apparentés à des lectures dans le marc de café.
La mitoyenneté dans l'actualité entre la contestation ouvertement soutenue par les Etats-Unis, du Président vénézuélien Maduro légalement élu, et le mouvement spontané qui s'est soulevé en Algérie à l'annonce de la candidature d'un Président impotent à un cinquième mandat, provoque des comparaisons sommaires.
Il s'agit pourtant de situations qui n'ont absolument rien à voir l'une avec l'autre. Au Venezuela, comme au Chili en 1973, on est face à une tentative de déstabilisation d'un pouvoir irrédentiste qui ne veut pas s'aligner sur les intérêts des USA imposant leur diktat.
En Algérie, c'est tout le contraire. Lié à des intérêts néo-libéraux de puissances impérialistes, le pouvoir ne peut se perpétuer que dans la mesure où elles le soutiennent. Il a fallu plusieurs jours de manifestations avant qu'un officiel américain concède un lapidaire droit des Algériens à s'exprimer démocratiquement sans que le gouvernement de Donald Trump conteste la viabilité de la candidature d'Abdelaziz Bouteflika, comme il a contesté presto l'élection démocratique de Maduro.
En France, au nom du sacro-saint principe de non-ingérence, le gouvernement s'est totalement tu devant la révolte des Algériens qui a un écho considérable dans l'immigration. Un silence interrompu, d'abord, par une déclaration de Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères, disant qu'il fallait laisser le processus électoral se dérouler au nom de la stabilité de l'Algérie, «pays-clé en Afrique et en Méditerranée». N'est-ce pas de la duplicité de soutenir le mouvement réactionnaire au Venezuela et de lâcher le mouvement populaire tourné vers le renouveau en Algérie ? Cette position de fausse neutralité, qui profite en fait au pouvoir en place, a été rendue encore plus ambiguë par le Premier ministre Edouard Philippe qui veut rester à équidistance : ni indifférence, ni ingérence. Que ne le font-ils pas aussi pour le Venezuela ?
La liste des clichés charriés par les «spécialistes» et les «experts», relayée par l'opinion publique, est longue. Quelques-unes méritent qu'on s'y arrête. Ainsi de ce préjugé dont témoigne une question d'un auditeur de France Inter, une radio française qui bénéficie de la plus grande audience : «Est-ce que le peuple algérien est conscient de la complexité du système contre lequel il se révolte ?» Ce grief de dépolitisation est malheureusement assez courant en France. Parce que, depuis des années, des jeunes Algériens s'expriment par la fuite – les harraga —, on en a conclu sur l'autre rive, qu'ils n'ont aucune conscience politique, aucun sens de l'initiative protestataire. L'opacité du régime taisant et réduisant toute contestation, sa capacité à fragmenter les révoltes et à réprimer et diaboliser les révoltés, ont imprimé ce préjugé selon lequel les Algériens sont asservis. Ce parti pris coriace a été corroboré par l'échec de la protestation en 2012 des «Printemps arabes». Or, celui-ci n'a pas pris en Algérie pour de toutes autres raisons, dont la lassitude face aux violences et à la mort.
Autre idée préconçue, la violence endémique chez les Algériens. Certains analystes et historiens avaient même diagnostiqué dans les actes barbares de la décennie noire, un atavisme propre à un peuple. Ce n'était pas un moment historique exceptionnel où la conjonction entre l'acuité de la défense d'intérêts et la manipulation d'appareils qui fondait la barbarie, selon eux, mais une propension innée à la violence.
Ces marches, non seulement démontrent le contraire par leur civisme, leur pacifisme et leur maturité, mais elles apportent en plus la preuve que même des jeunes qui ont grandi dans l'horreur de cette barbarie ont été capables de dépasser la haine pour manifester avec un sens politique admirable.
Les manifestations algériennes sont pacifiques. Soit. On a bien fait d'établir un tableau comparatif avec celles des Gilets jaunes. On voit bien que ni la violence, ni la non-violence ne sont innées à aucun peuple, aucune société. Ce sont des conditions historiques particulières qui assurent l'une et produisent l'autre.
Autre question entendue à la radio, à la veille de la marche du 8 mars : «Quelle est la place des femmes dans ce qui se passe actuellement en Algérie ?» Question annexe : «Quand est-ce que ce code infamant de la famille sera aboli ?» Les images qui parviennent des manifestations devraient suffire à répondre à ce préjugé qui postule l'effacement total des femmes dans l'espace public de la protestation. Elles sont très, très nombreuses à manifester particulièrement dans les carrés étudiants où elles sont majoritaires. Elles sont en tee-shirt, cheveux au vent. Elles ont la tête couverte. Et à Alger, certaines ont ressorti le vieux haïk blanc des Algéroises, signe de protestation absolue contre le voile islamique.
La profonde intelligence de ce mouvement sans leader, c'est d'avoir démarré à partir du rejet épidermique du 5e mandat pour très vite s'étendre à la contestation du système Bouteflika, et aspirer, dans une troisième phase, à un renouveau de tous les secteurs de la vie sociale, politique et institutionnelle. Evidemment, ce renouveau sera amputé si le code de la famille infériorisant le statut personnel de la femme algérienne n'est pas abrogé.
Autre cliché rédhibitoire, usité par le pouvoir algérien et allègrement repris par les journalistes spécialisés en France : l'affaiblissement de ce pouvoir profitera forcément à une alternative islamiste. Conclusion : gardons ce système pour éviter le chaos. Là encore, l'approximation est de rigueur. Les composantes des manifestations, les mots d'ordre, tout cela est aux antipodes des démonstrations islamistes. Les manifestants rejettent un système jumeau de l'islamisme. Au contraire, c'est la salafisation de la société encouragée et favorisée par un pouvoir dont le point d'orgue est de construire la plus grande mosquée d'Afrique, qui a conduit aux concomitances avec la corruption, le manque de démocratie, la montée en puissance d'une caste de requins néo-libéraux qui ont asséché la moelle du patrimoine public, et qui ont conduit à la révolte.
A. M.


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