Il paraît que Djemaï s'est « fâché ». Oui, le nouveau factotum du FLN boude depuis quelques jours et ralentit drastiquement ses « activités », histoire de montrer qu'il n'est pas content. On ne sait vraiment pas à qui s'adresse ce coup de gueule silencieux puisqu'en interne, il devait quand même savoir qu'il n'est, ni le gourou qui fascine, ni la terreur qui peut frapper, ni l'adoubé intouchable. Option du fait accompli quand il fallait trouver, au pied levé, un successeur à un Ould Abbès qui prenait eau de toutes parts, personne de vraiment significatif ne l'a spontanément pris au sérieux. Le premier cercle de son parti n'avait, certes, pas l'habitude de se rebiffer contre sa désignation sans savoir où il mettait les pieds mais il a quand même pris le temps d'attendre et voir venir. Les cadres du FLN ont compris que dans la conjoncture actuelle, l'oreillette ne pouvait logiquement pas fonctionner aussi rapidement et surtout ne pouvait délivrer ses messages avec autant de précision que par le passé. Alors, ils ont guetté le retour d'écoute aux prétentions de leur nouveau chef qui, lui, a vite fait de suggérer par quelle volonté il est parvenu à son fauteuil et au service de qui il allait se déployer. Manque de pot, Gaïd Salah n'a pas montré le même empressement et le même enthousiasme à prendre sous son aile un homme qui, non seulement ne promet aucune plus value politique mais traîne en plus des casseroles déjà retentissantes. Autant dire que le soutien de Djemaï, comme celui de Ghoul et de Benyounès est de ces sollicitudes dont il se serait passé volontiers. Et si le chef de l'armée n'a pas poussé les choses plus loin, au point de décliner l'offre de service par exemple, c'est simplement parce que cela pouvait insinuer des choix politiques qu'il n'est pas près d'assumer. Au FLN, on comprend très vite ces choses-là et ils n'ont pas attendu longtemps pour le faire savoir. D'abord en travaillant au corps un Djemaï qui ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait, pour le dissuader de briguer la présidence de l'APN. Lui, avait justement conçu cette ambition comme une preuve implicite qu'il n'est pas né de la dernière pluie. Peine perdue, ce qui était décidé là où il prétendait être le favori est programmé sans lui, et peut-être bien contre lui. La totale, comme revers : non seulement on lui a préféré un islamiste d'un parti dont il ne connaît peut-être même pas la dénomination, mais ses propres « frères » députés ont cautionné le choix décidé ailleurs, ce qui l'élimine de facto du cercle des premiers courtisans. Et comme pour mettre du sel dans la plaie, on lui rappelle qu'il n'est que le poulain de… Saâdani ! Vraiment de quoi bouder, en effet, mais ce n'est peut-être pas terminé et c'est sans doute le plus inquiétant pour lui. S. L.