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Sexe, métal, pastis et Hirak
Publié dans Le Soir d'Algérie le 31 - 05 - 2020

Une fois n'est pas coutume, je commence par donner un avis personnel que nul ne me demande. Servitude et privilège du métier. Je n'ai pas été déçu par le documentaire de Mustapha Kessous, Algérie mon amour, diffusé sur France 5 ce mardi 26, qui a suscité une bronca de tous les diables. Question accessoire, mais très sérieuse : il faut qu'on s'attache à étudier pourquoi un simple documentaire provoque ce torrent de haine. Difficile à comprendre. Je n'ai pas été déçu, mais je n'ai pas aimé. On saura saisir la nuance.
Je n'ai pas été déçu, tout simplement parce que je crois qu'il n'existe aucun film-type à l'aune duquel il serait obligatoire de mesurer la pertinence et l'intérêt de tout documentaire sur le sujet.
On notera que le titre, Algérie mon amour, ne fait aucune référence explicite au Hirak, mais tout le matériel promotionnel du film appuie opportunément et avec insistance sur celui-ci. Par contre, on imagine aisément la suggestibilité du mot amour dans le titre.
Dans la situation où se trouve actuellement le mouvement, doublement captif du confinement, d'une part, et d'autre part, du pouvoir algérien qui profite de la crise sanitaire pour le décimer en emprisonnant certains de ses animateurs, on peut concevoir que le film ait été attendu avec autant d'impatience critique que d'exigence parfois inquisitoriale. Chacun sait que ce n'est pas la Télévision algérienne qui réaliserait un film sur le Hirak. Même mauvais ! Et, – fiction de chez fiction ! – si le même docu passait sur Canal Algérie, nul doute qu'il ne donnerait pas lieu à cette avalanche de psychodrames sur le web.
Il passe sur une télé française, publique de surcroît. L'effet miroir agit au quart de tour. Il n'est pas difficile non plus de comprendre qu'il ait pu en décevoir certains, et même beaucoup visiblement, et générer autant de commentaires fielleux dans la blogosphère favorable au Hirak. Tout complotisme mis à part, je ne sais pas comment interpréter le choix de le diffuser un 26 mai sachant que les télés raccrochent en général leur grille de programmation à des opportunités d'actualité. La rediffusion sur la chaîne parlementaire française d'un autre documentaire, Algérie : les Promesses de l'aube, le même jour, à une demi-heure d'intervalle, exacerbe l'interrogation.
Certains internautes y voient carrément une volonté de nuire au Hirak, d'autant qu'en Algérie, des « intellectuels anciennement indépendants » (je chourave la suave expression à un pote qui tient mordicus à garder l'anonymat) se fendent de déclarations qu'ils croient létales contre le Hirak. Un autre doigt dans l'œil ! Ils proclament détenir les preuves que le mouvement aurait été « ourdi» lors d'une réunion tenue à Paris. Mais, au pied du mur, ils renversent la vapeur : non, en fait, c'était bien que la réunion ait eu lieu à Paris ! Ça s'appelle la géolocalisation de la versatilité politique. D'autres voix s'élèvent pour dénigrer le Hirak sous différents chefs d'accusation et donc légitimer la répression au moment où le nombre de prisonniers d'opinion a atteint 159, et que 1 000 citoyens algériens doivent répondre à des convocations.
On a vite fait donc d'interconnecter tous ces éléments en y intégrant la diffusion du film de Kessous pour décréter un complot franco-algérien contre le Hirak. Cependant, cette suspicion de complot a été détournée par les tensions diplomatiques entre l'Algérie et la France. L'Algérie, voyant dans cette diffusion « des attaques contre le peuple algérien et ses institutions », a rappelé son ambassadeur pour consultation. C'est bien de veiller à l'image du Hirak, ma foi !
Le film lui-même ! Ce sont des portraits plus ou moins trash, moins que plus d'ailleurs, de jeunes Algériens dont certains ont un rapport d'activisme avec le Hirak, qui racontent à cœur ouvert, sans aucun filtre, leurs rêves les plus intimes. L'omniprésence discursive et visuelle du mouvement laissait espérer, en effet, que le réalisateur allait savoir hiérarchiser correctement les enjeux et les aspirations du Hirak pour la refondation totale du système algérien, car tel est son but fondamental consensuel, au lieu de quoi il inverse la pyramide pour s'attacher à ce qu'un internaute appelle une vision procédant de la vulgate freudienne : désir, sexe, drogue, alcool et musique métal. Cela dit, ce sont aussi des sujets sérieux et significatifs. Mais l'inconvénient de souligner ces aspects tabous est qu'ils occultent automatiquement par ailleurs tout ce qui se dit d'essentiel – et de très intéressant – sur le Hirak par d'autres personnages. C'est ainsi que le film a été compris.
On peut supposer, ce que le réalisateur lui-même ne reconnaîtra certainement pas même si c'était le cas, qu'il ait cédé au diktat commercial. On peut supposer aussi que le final cut, la décision de montage final, lui ait été confisqué au profit de ses producteurs. La tendance actuelle est de montrer que les sociétés conquises par l'islamisme – l'Algérie en faisant évidemment partie – sont composées, dans un simplisme criant, de frustrés sexuels incapables de dépasser cette pulsion première pour s'élever à la noblesse de la revendication politique. Le choix, imposé ou pas, de Kessous de focaliser sur cet aspect, qui existe par ailleurs, se comprendrait sûrement dans cette perspective de donner aux faiseurs d'opinion occidentaux cet élément qui conforte la doxa.
Indéniablement, Kessous a cherché à faire le buzz. Et il y est arrivé. Des réactions de ses personnages qui disent presque tous avoir été manipulés par le réalisateur après la diffusion du film, corroborent une double suspicion. La première est de n'avoir pas été, au bas mot, très clair sur ses intentions à leur égard, la seconde est de sacrifier leur sécurité pour de probables ambitions personnelles d'accéder à ce statut payant de « spécialiste médiatique de l'Algérie ».
Ceci étant, ces jeunes trahis, livrés en pâture à toutes les hostilités, méritent notre solidarité et certainement pas le lynchage qui leur est infligé. Ce dont on aurait honte, ce n'est pas qu'ils aient livré avec courage ce qu'ils ont sur le cœur en donnant une idée sur la profonde hypocrisie de la société algérienne où tout se fait mais rien ne doit se dire. On aurait honte plutôt qu'on s'attaque à des victimes d'une manipulation au nom d'une prétendue morale qui serait celle du Hirak et dont les contempteurs de ces jeunes seraient les détenteurs.
On leur reproche aussi de ne pas avoir de représentativité. Qui pourrait s'en prévaloir même pour émettre un tel reproche ?
Quoi qu'on ait à redire du film de Kessous, et sous la réserve éthique du respect de ses personnages, il a le droit d'exister. Au lieu de nous exciter les uns les autres dans une sorte d'excommunication aux relents de parti unique et, qui plus est en nous trompant de cible puisque ces jeunes ne sont pas ceux qui ont fait le film, encourageons positivement l'existence de documentaires sur le Hirak. Quel qu'en soit le nombre, aucun ne sera le film-type. Chacun d'entre eux sera le fruit de la subjectivité de son réalisateur.
A. M.
P. S. : décès de Guy Bedos, un courageux et talentueux anti-raciste.


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