Soixantenaire de la Cour suprême: Consensus sur l'importance de la numérisation et de l'échange d'expériences pour l'amélioration du travail judiciaire    Ahmed Attaf reçu à Riyadh par le président de l'autorité palestinienne Mahmoud Abbas    Première édition du festival des sports d'Alger: la piste dédiée aux sports urbains attire les jeunes à Bab Ezzouar    Un investissement de 10 milliards DA pour renforcer la sécurité et la sûreté dans les aéroports    Agriculture/startups: lancement de la 4e édition du concours Africa Sipsa Innov Award    Lancement officiel du réseau associatif de la Démocratie participative    ALORS, MESSIEURS LES DIRIGEANTS OCCIDENTAUX : NE POUVEZ-VOUS TOUJOURS PAS VOIR LES SIGNES ANNONCIATEURS DUN GENOCIDE A GAZA ?    Megaprojet de ferme d'Adrar : « elmal ou Etfer3ine »    Tournoi international de tennis: l'Algérienne Maria Badache et l'Espagnol Ganzales Galino Valentine sacrés à Tlemcen    Khenchela: 165 étudiants participent à la 14ème édition de la manifestation nationale universitaire "Marcher en Montagne"    L'Emir Abdelkader, un homme d'Etat et de Savoir    Education: toutes les mesures prises pour le bon déroulement des examens de fin d'année    Chargé par le président de la République, Attaf prend part à Riyadh à la réunion du Forum économique mondiale    Algérie : 4,1% de croissance économique en 2023    Ghaza : le bilan de l'agression sioniste s'élève à 34.388 martyrs    Génocide à Ghaza : La plupart des corps découverts dans les fosses communes des hôpitaux ne sont pas identifiables    La Réunion consultative entre les dirigeants de l'Algérie, de la Tunisie et de la Libye, une «réussite»    L'amie de la Révolution algérienne Briou André Alice Jeanne n'est plus    La DSA lance un appel en faveur des agriculteurs pour s'impliquer dans l'opération    Affaire USMA – RSB, la CAF saisit le tribunal international    Algérie Télécom sponsor officiel du tournoi zonal d'escrime de qualification aux Jeux Olympiques 2024    Vers le renouvellement du cadastre des terrains    Sonatrach signe un protocole d'entente avec la société omanaise OQ Exploration & Production    Saisie de 935 comprimés de psychotropes, 287,71 g de kif et 5 suspects arrêtés    Arrestation de 2 voleurs grâce au numéro vert 1548    Arrestation    Espagne: saisie de 25 tonnes de haschich dans un camion de melons en provenance du Maroc    Une porte-parole du Département d'Etat américain démissionne en raison de la politique de Washington    Festival du film méditerranéen à Annaba : "130 ans de cinéma italien à travers le regard des critiques", objet d'une conférence spéciale    Un modèle de l'unité et de la cohésion du peuple algérien dans sa résistance à l'occupation française    Une voix claire et retentissante doit être accompagnée d'un bon niveau de langue pour bien communiquer oralement    Un célèbre acteur néerlandais a embrassé l'islam    La préservation de la mémoire nationale conditionnée par l'utilisation des technologies modernes    Favorable au MCA, lutte acharnée pour le maintien    Ould Ali (JSK) : «Tout mettre en oeuvre pour redorer le blason du club»    Chanegriha impitoyable à la préparation au combat    Les médias conviés à une visite guidée du Centre de formation des troupes spéciales    Le ministre de la Justice insiste sur la fourniture de services de qualité aux citoyens    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80        Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Le diktat des autodidactes    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L�Entretien du mois
YADH BENACHOUR DIRIGE LA HAUTE INSTANCE CHARG�E DES R�FORMES POLITIQUES EN TUNISIE �L�int�grit� morale d�un chef d��tat est un �l�ment-cl� de gouvernement�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 13 - 08 - 2011


R�alis� par Mohamed Chafik Mesbah (1re partie)
Lorsque le peuple tunisien s�est soulev� en provoquant le d�part pr�cipit� de l�ancien pr�sident Zine El Abidine Ben Ali, apr�s un moment d��tonnement o� j�ai �t� d�concert� par la vacuit� de ce pouvoir dictatorial consid�r� inexpugnable, je me suis ressaisi en d�cidant, aussit�t, de consacrer un suppl�ment de �l�Entretien du mois� � une discussion que je souhaitais de niveau acad�mique avec une personnalit� tunisienne repr�sentative dans le bouillonnement qui secouait, de fond en comble, le pays.
TUNISIE
YADH BEN ACHOUR
Pr�sident de la Haute Instance de r�alisation des objectifs de la r�volution, de la r�forme politique et de la transition d�mocratique
Un parcours exceptionnel
Mon souhait initial consistait, initialement, � pouvoir rencontrer le g�n�ral Rachid Ammar, le chef d��tat-major de l�arm�e tunisienne. Par d�formation professionnelle, allais-je dire autant que par propension intellectuelle, j�ai toujours eu tendance � magnifier les militaires qui se transformaient en facilitateurs de processus d�mocratiques. Il en a exist� peu mais ils font sens. Je n�ai pas pu, pour des consid�rations �videntes, r�aliser l�entretien projet�. J�ai, par ailleurs, r�cus�, rapidement, l�hypoth�se de rencontrer M. Abdessalem Djrad, le secr�taire g�n�ral de l�UGTT, car malgr� le r�le du syndicat tunisien dans l�issue du bras de fer avec le r�gime de l�ancien pr�sident Ben Ali, cette personnalit� avait brill� par l�ambigu�t� de sa position ant�rieure vis-�-vis du chef d�Etat d�chu. Il restait, effectivement, la possibilit� d�un entretien avec Rached El Ghannouchi, dirigeant historique du mouvement Ennahdha. J�avais pris contact avec cette personnalit�, mais pour juger, aussit�t, qu�il �tait pr�f�rable de diff�rer ce projet de rencontre afin de revenir de mani�re plus approfondie sur le ph�nom�ne de l�islamisme et de son essor en Tunisie. C�est l�interview publi�e, en son temps, par le quotidien fran�ais le Monde qui a �veill� en moi le d�clic qui a orient� ma prospection vers le professeur Yadh Ben Achour, pr�sident de la Commission de r�formes qui deviendra la �Haute Instance de r�alisation des objectifs de la r�volution, de la r�forme politique et de la transition d�mocratique�. Lorsque j�ai sollicit� l�avis d�Isabelle Mandraud qui avait r�alis� l�interview, elle approuva, sans r�serve, mon choix. Je me suis, attentivement, pench�, alors, sur la biographie du professeur Yadh Ben Achour et j�avais pu noter qu�il avait �t� doyen de la facult� des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis. C�est tout naturellement que je me suis adress� � mon ancien professeur, Ahmed Mahiou, mon directeur de recherche lorsque je pr�parais ma th�se de doctorat en sciences politiques. Je voulais conna�tre son appr�ciation sur la personnalit� du professeur Yadh Ben Achour. J�eus droit non seulement � l�appr�ciation mais, en sus, � une introduction. Il est int�ressant de signaler, � cet endroit, la nature de la r�action du professeur Ahmed Mahiou. D�habitude r�serv� et peu port� aux �panchements �motionnels, le professeur Ahmed Mahiou avait r�agi avec une spontan�it� et une chaleur dans le propos qui m�avaient beaucoup �tonn� : �Bien s�r, le professeur Yadh Ben Achour, qui est un excellent ami et un attachant compagnon de route, est la personne idoine pour s�exprimer sur la situation actuelle en Tunisie. Votre choix est tr�s heureux. Vous pouvez, d�ailleurs, le contacter, directement, de ma part. Voici ses coordonn�es. � Le contact avec le professeur Yadh Ben Achour, d�abord au t�l�phone, ensuite par courriel et, enfin, lors d�une rencontre au si�ge de la Haute Instance fut, toujours, simple, convivial et chaleureux. A la hauteur de mes attentes, incontestablement. Je ne vais pas m��tendre sur l�itin�raire intellectuel et professionnel du professeur Yadh Ben Achour, par ailleurs fid�lement retrac� dans la bio- express qui accompagne cet entretien. En r�alit�, l�entretien avec le professeur Yadh Ben Achour, autant que son parcours personnel, suscitent l�int�r�t en ce qu�ils permettent d�aborder, � travers une illustration parfaite, la probl�matique de l�intellectuel face � sa soci�t�. Souvent, certains commentateurs nationaux se sont, volontiers, gauss� des d�veloppements que je commets sur le statut de l�intellectuel organique, envisag�, je n�en d�mords pas, au sens gramscien du terme. Ces commentateurs ont confondu, all�grement, entre l�intellectuel organique qui s�impose une discipline d�action au profit de la cat�gorie sociale � laquelle il se rattache et aux id�es qui en d�coulent, intellectuels disciplin�s mais intellectuels tout de m�me, avec ceux qui ne sont que les suppl�tifs des pouvoirs en place, des intellectuels sans �me, guid�s par une conduite de trahison morale, des intellectuels pervertis mus par l�app�t du gain ou la recherche des honneurs, voire, plus prosa�quement, la crainte de repr�sailles de la part des puissants du moment. Le professeur Yadh Ben Achour, illustration parfaite, � mes yeux, de l�intellectuel organique, �voque, dans l�entretien qui suit, avec beaucoup de p�dagogie ce qu�il est convenu d�appeler �la trahison des clercs�. Le professeur Yadh Ben Achour, favoris� par la naissance, d�tenteur d�un statut social et intellectuel des plus valorisants, aurait pu se passer de ce bras de fer avec le r�gime du pr�sident Ben Ali. Lorsque sa conscience avait �t� heurt�e par les choix auxquels l�aurait contraint sa loyaut� au chef de l�Etat qui l�avait nomm�. Il avait, pourtant, pris le pari de d�missionner, non sans �clat, du Conseil constitutionnel. Sa lettre de d�mission, publi�e en annexe de cet entretien, est r�v�latrice du courage qu�il lui aura fallu. Par-del� le statut de �l�intellectuel organique�, son exemple permet d��voquer tout le rapport de l�intellectuel � la politique. C�est le mode de conduite de l�homopoliticus qui nous interpelle. Nous sommes au c�ur de la dualit� d�attitude qui caract�rise le comportement de l�homopoliticus caract�ris� par un balancement jamais tranch� entre ��thique de la conviction� et ��thique de la responsabilit� � selon la remarquable analyse du c�l�bre sociologue allemand Max Weber. En clair, l�homopoliticus peut-il concilier entre le comportement moral et l�efficacit� de l�action ? Tout le drame des �lites arabes se r�sume � ce questionnement essentiel encore sans r�ponse. Une probl�matique qui renvoie, aussi, au libre arbitre comme d�terminant de la volont� de l�intellectuel. L�intellectuel peutil �chapper aux contingences mat�rielles du moment pour adopter une conduite dict�e par le seul crit�re de jugement moral que lui impose sa conscience ? A se r�f�rer � l�itin�raire du professeur Yadh Ben Achour, la r�ponse, indubitablement, est oui. Yadh Ben Achour est l�exemple de cet intellectuel qui est la conscience toujours en �veil de la nation. Sur ce registre, c�est avec �motion que je conserve, enfouie dans mon esprit, cette sentence tragique du l�gendaire colonel Lotfi, commandant de la Wilaya V de l�ALN, lequel, s�adressant dans une missive �crite de sa main appliqu�e � l�intention de son compagnon Si Slimane, feu Ka�d Ahmed : �Le destin de l�intellectuel consiste � mourir pour sa patrie et les id�es auxquelles il croit.� Il m�arrive, � propos de ce libre arbitre qui fait agir l�intellectuel, de me souvenir aussi de l�odyss�e singuli�re de mon cousin chahid, Mesbah Hassen. Brillant �tudiant � l�Institut d��tudes islamiques d�Alger, mais peureux parmi les plus peureux d�entre ses camarades, nul n�aurait pari�, surtout pas sa famille, qu�il prendrait, un jour, le chemin de l�honneur, celui du sacrifice supr�me au service de sa patrie. A l�insu de tous ses proches, r�pondant � quelque appel �motionnel inaccessible � notre rationalit� implacable, il rejoignit, un beau jour, les rangs de l�ALN pour mourir au champ d�honneur � quelques mois de l�ind�pendance annonc�e de l�Alg�rie. Quel est ce m�canisme invisible qui a pu provoquer le d�clic qui transforma l��tudiant Mesbah Hassen, sujet craintif et peureux, en un combattant courageux et d�termin� ? Cette question lancinante n�a cess� de tarauder mon esprit. Dieu, Grand Dieu, qu�est-il advenu de notre patrie, l�Alg�rie, dont les �lites, quasiment toutes r�sign�es au d�sordre des choses, se contentent d�assister passives au mouvement irr�versible de l�Histoire ? Que le professeur Yadh Ben Achour me pardonne cette digression. Ne croyez surtout pas que ces d�veloppements nous �loignent du sujet principal de l�entretien, le parcours intellectuel et professionnel du professeur Yadh Ben Achour et son appr�ciation de la situation actuelle en Tunisie. Encore une fois, j�ai choisi de r�aliser cet entretien avec le professeur Yadh Ben Achour parce qu�il est l�illustration vivante de l�intellectuel partag� entre un �tat d�inqui�tude du monde et une volont� d��uvrer � le transformer positivement. Le professeur Yadh Ben Achour, disons-nous, avait d�missionn�, courageusement, du Conseil constitutionnel, bravant l�autorit� de l�ancien pr�sident Ben Ali. Le voil�, aujourd�hui, assumant courageusement la t�che difficile de conduire � bon port la transition d�mocratique de la Tunisie, de tous c�t�s menac�e. Cet engagement, il s�y r�sout sans concession. Pour preuve, les analyses lucides et courageuses que, dans cet entretien, il d�veloppe � propos, d�une part, du risque de d�g�n�rescence du mouvement islamiste en Tunisie ou de la n�cessit�, au grand dam, sans doute, des puristes de la th�orie d�mocratique, ou, d�autre part, de la n�cessit� de faire de l�arm�e tunisienne un sujet conscient. Il r�siste, vaillamment, aux surench�res compr�hensibles du mouvement Ennahdha. Il semble devoir contenir, efficacement, les vell�it�s des p�les r�siduels de l�ancien r�gime. Saura-t-il, demain, tourner le dos aux sollicitations politiciennes qui, forc�ment, se feront jour pour ne pas alt�rer son engagement d�aujourd�hui ? L�avenir seul nous le dira mais gageons, plut�t, qu�il dit vrai lorsqu�il affirme qu�il se gardera bien de courir le risque de pervertir son parcours parfait pour des honneurs combien factices. Mais je me garde de d�florer la teneur de l�entretien du professeur Yadh Ben Achour que je vous invite, plut�t, � d�couvrir par vous-m�me, avec la plus grande attention. Il est difficile d��tre plus p�dagogue que lui, ni plus �rudit lorsqu�il parle, avec conviction et amour, de son pays.
M. C. M.
Bio-express
Le professeur Yadh Ben Achour est n� le 1er juin 1945 � la Marsa, en Tunisie. Il na�t au milieu d�une famille de la haute bourgeoisie tunisienne p�trie de culture, d�humanisme et de pi�t�. Son p�re Mohamed Fadhel Ben Achour, grande figure intellectuelle et religieuse en Tunisie, a occup� successivement les fonctions de doyen de la facult� de la chari'a et de th�ologie, l'ancienne universit� de la Zitouna et mufti de la R�publique jusqu'� sa mort. Ces attaches familiales expliquent l'attrait de Yadh Ben Achour pour les �tudes. Apr�s avoir suivi les cycles primaire et secondaire � Tunis, il s�inscrit, pour les �tudes sup�rieures, � l�universit� de Paris o�, tour � tour, il obtient la ma�trise de droit (1968), le dipl�me d��tudes sup�rieures de droit public (1969), le dipl�me d��tudes sup�rieures de sciences politiques (1969) et le doctorat d�Etat en droit (janvier 1974). Il est major du concours d�agr�gation en d�cembre 1974. Dans l�intervalle, il entame une brillante carri�re universitaire � Tunis o� il acc�de, successivement, aux grades d�assistant, de ma�tre-assistant, de ma�tre de conf�rences, puis de professeur agr�g�. Le professeur Yadh Ben Achour a occup�, �galement, les fonctions universitaires les plus prestigieuses celles, notamment, de directeur du Centre d��tudes, de recherche et de publications de la facult� de droit et de sciences politiques de Tunis (1980-1987) puis de doyen de la facult� des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis (1993-1999). Le Professeur Yadh Ben Achour a eu, �galement, une intense activit� internationale. Il a �t�, successivement, membre de la Commission arabe de droit international (1982- 1984), membre du conseil d�administration de l�universit� S�dar-Senghor du Caire (1989), conseiller juridique de la Minurso (1991-1992), membre de l�Institut de droit international, juge, puis pr�sident au tribunal administratif de la Banque africaine de d�veloppement (2005) et membre du Comit� d�experts charg� de l��laboration du rapport sur le d�veloppement humain dans le monde arabe �labor� par le Pnud (2007). Le Professeur Yadh Ben Achour a exerc�, par ailleurs, en qualit� de professeur associ� � l�universit� Laurentienne en Ontario, au Canada (2005-2008). Le Professeur Yadh Ben Achour n�a pas �t� en reste dans la participation � la construction de la Tunisie moderne. Il a �t� membre du Conseil �conomique et social (1987-1988) choisi par le pr�sident d�funt Habib Bourguiba, puis membre du Conseil constitutionnel (1991-1992) o� il a �t� d�sign� par le pr�sident d�chu Zine El-Abidine Ben Ali. Il d�missionne, non sans fracas, du Conseil constitutionnel lorsque le pr�sident d�chu a voulu imposer une loi sur les associations destin�e � �touffer, l�galement, la Ligue tunisienne des droits de l�homme. La lettre de d�mission qu�il adresse � l�ancien pr�sident tunisien lui vaut, quasiment, d��tre exil� � l�int�rieur de son pays. Auteur prolifique, ma�trisant parfaitement la culture arabe et fran�aise, le Professeur Yadh Ben Achour a publi� pas moins de douze ouvrages de fond et quatre-vingt-trois articles acad�miques. Pr�sident ou membre de nombreux jury de th�ses de doctorat, il a acquis un statut acad�mique qui en fait une r�f�rence en mati�re de droit et de th�ories politiques. L�int�r�t de son abondante production intellectuelle porte, en particulier, sur les th�mes qu'il aborde, notamment les rapports de l�islam � la pratique politique. Signalons, dans ce contexte les deux ouvrages qu�il a publi� : Aux fondements de l�orthodoxie sunnite (PUF, Paris, 2008) et La deuxi�me Fatiha, l�islam et la pens�e des droits de l�homme� (PUF, Paris, 2011). C�est, pourrions-nous dire, tout naturellement, qu�il a �t� choisi, en janvier 2011, pour pr�sider la Commission nationale des r�formes politiques qui se transforme, dans la m�me ann�e en �Haute Instance de r�alisation des objectifs de la r�volution, de la r�forme politique et de la transition d�mocratique�.
�L�int�grit� morale d�un chef d�Etat est un �l�ment-cl� de gouvernement�
I - Itin�raire individuel :
Mohamed Chafik Mesbah : Commen�ons notre entretien, si vous le voulez bien, par la fin. Dans l�une de vos d�clarations publiques, vous avez d�clar�, je cite : �J�ai toujours pri� Dieu pour qu�il me pr�te vie jusqu�au d�part de ce tyran� non sans pr�ciser que �ce v�u �tait exauc�. Alors que l�ancien pr�sident Ben Ali a �t� chass�, pr�cis�ment, du pouvoir et que vous-m�me pr�sidez la Haute Instance des r�formes politiques, consid�rez-vous que c�est l� le couronnement de votre vie ?
Yadh Ben Achour : Pour avoir une vie agr�able, il ne faut surtout pas se faire d'illusions de ce type. Le couronnement d'une vie, pour nous tous, c'est toujours la mort. Les d�sagr�ments que nous subissons souvent dans le courant de notre existence sont souvent dus � l�oubli de ce fait primordial. La vie est un tapis roulant. Laissez ce tapis se d�rouler, sans chercher � vous substituer au mouvement qui l�anime. Vous n'y arriveriez pas. Mais sachez surtout que vous finirez par tomber. Le malheur d'un homme comme Ben Ali, c'est d'avoir oubli� qu'il �tait mortel. Il s'est comport�, ainsi que son entourage, comme si la mort n'existait pas. Cette fr�n�sie d'accumulation de pouvoir et de richesse ne s'explique pas autrement. Vivre le d�part du tyran constitue un �v�nement heureux de mon existence, comme citoyen autant que juriste. La pr�sidence de la Haute Instance, je ne l�ai pas cherch�e. Elle se trouvait sur le tapis roulant. Je l'ai prise sans savoir avec pr�cision ce que j'�tais en train de faire, ni o� cela me conduirait. Aujourd'hui, je peux affirmer que c'est une �uvre passionnante, exaltante m�me. Dire que c'est un couronnement, c'est nier ma propre philosophie de la vie.
L��vocation des Ben Achour suscite respect et consid�ration sur toute l��tendue du Maghreb. Une famille o� prosp�re le souffle intellectuel avec une rigueur morale unanimement salu�e. Quel pourrait avoir �t� l�impact de ce milieu familial sur votre parcours personnel ?
Laissez-moi, tout d'abord, vous dire que la bonne r�putation d'une famille se gagne par l'�ducation. Pour cela, il est n�cessaire que des principes d'�ducation soient pratiqu�s au fil des g�n�rations. Le principe le plus fondamental que j'ai re�u de ma famille et que j'ai inculqu� � mon tour � mes propres enfants consiste � ne jamais laisser s'installer dans l'esprit d'un jeune enfant qu�il appartient � une �lite sociale quelconque. Sur ce plan, mon p�re �tait, v�ritablement, l'exemple m�me de la modestie et de l'�galitarisme. Le reste d�pend de l'intelligence de chaque individu. Nous savons que cette derni�re, par nature, est, in�galement, r�partie. Il faut donner � cette intelligence le maximum de chances de se d�velopper davantage. Cela se fait par la culture. Je peux dire que le milieu familial dans lequel j'ai v�cu, ses hommes et ses femmes, m'a appris la passion des livres, l'amour du d�bat, en toute chose, y compris les plus futiles d'entre elles, la recherche des id�es neuves et le sens de l'humour. La famille de mon enfance a �t� un v�ritable r�gime d'assembl�e. Mon ascendance appartient au milieu ze�tounien, du c�t� paternel, comme du c�t� maternel. C'est dire que nous �tions extr�mement attach�s au respect des pr�ceptes religieux, quelle que soit leur nature. Pendant le Ramadan, par exemple, la maison se transformait en un v�ritable lieu de culte. Parmi les marques familiales distinctives, nous comm�morions, collectivement, la bataille de Badr, au cours d'une c�r�monie d'une extr�me intensit� �motionnelle. Mais, dans ce climat, la libert� de parole et l'autonomie personnelle faisaient l'objet d'un m�me culte. C'est l�, dans ce milieu tr�s religieux, que j'ai appris que la premi�re religion de l'homme est sa libert�. Evidemment, ce principe de base ne peut �tre ni admis ni compris par les esprits �troits. L�id�e d'un homme �ami de Dieu� et non �esclave de Dieu�, je ne l'ai d'ailleurs pas invent�e. Je l'ai reprise � mon p�re qui surnommait l'un de ses disciples et amis, quasiment son fils, le cheikh Habib Belkhodja, �Habib arrahm�n�. �Il ne faut jamais avoir peur de Dieu, mais toujours l�esp�rer� : voil� ce que j'ai appris dans ma famille.
Comment expliquer cette propension des Benachour � choisir les �tudes juridiques en s�y vouant passionn�ment ? Vous-m�me y avez consacr� toute votre carri�re acad�mique avec, il est vrai, des incursions remarqu�es sur la sociologie et la science politique. C�est plus un h�ritage ou une vocation ?
Le ���lim� qui a en quelque sorte constitu� mon mod�le de r�f�rence n'est pas limit� aux �tudes juridiques. Il s'agit � la fois d'un th�ologien, d'un sp�cialiste du langage, d'un juriste, d'un historien, d'un ex�g�te et, � ses heures, d'un philosophe ou d'un mystique. La formation universitaire moderne que j'ai suivie n'a rien � voir avec ce type de formation traditionnelle. La sp�cialisation y est bien plus pouss�e. Cependant, j'ai gard� de mon milieu familial le sens des �humanit�s�. Ma formation de juriste n'a jamais �t� un obstacle � cette soif de curiosit� pour une culture plus vaste. D'o� mes incursions constantes dans certains champs du savoir qui ne font pas partie de ma sp�cialit�.
C�est sur la base du prestige familial ou de votre expertise scientifique que l�ancien pr�sident Ben Ali vous a choisi pour �tre membre du Conseil constitutionnel et, avant lui, le pr�sident Habib Bourguiba pour �tre membre du Conseil �conomique et social ?
Sur ce terrain, je ne crois pas que le prestige familial ait eu un poids quelconque. Je n'ai jamais su exactement, du temps de Bourguiba, comment je suis entr� au Conseil �conomique et social, dont je n'ai jamais �t� le pr�sident contrairement � ce que pr�tendent certains. Je n�ai, non plus, d'ailleurs jamais su comment j'en suis sorti. Mais cela m'a permis de participer, sous la pr�sidence de si Mohamed Ennaceur, � des d�bats et des projets de r�formes tr�s int�ressants, en particulier ceux relatifs au syst�me �ducatif. Quant au Conseil constitutionnel, dans lequel je suis entr� en 1988, et duquel j'ai d�missionn� en 1992, il faut dire que, par mes centres d'int�r�t, mes cours et mes recherches, je faisais partie naturellement du lot des ��ligibles �. J'y suis entr� � un moment o� on ne se doutait pas encore de ce qui adviendrait par la suite. Je ne suis pas partisan de l'intellectuel isol� dans sa tour d'ivoire. On peut se rendre utile en mettant son exp�rience et ses connaissances au service du bien commun. Les rouages de l'Etat en font partie.
Certains d�tracteurs ne manquent pas, � cet �gard, de vous reprocher de vous �tre accommod� des turpitudes de la dictature sous l�ancien pr�sident Ben Ali. Consid�rez-vous que votre d�mission du Conseil constitutionnel, accompagn�e d�une lettre irr�v�rencieuse diton pour l�ancien chef de l�Etat, a apur� ce passif ? Dans quelles conditions avez-vous �t� amen� � d�missionner ?
Quelles incidences sur votre vie d�apr�s la d�mission ? Quand me suis-je accommod� de ce que vous appelez les turpitudes de la dictature ? Entre 1987 et 1992, le r�gime de Ben Ali n'�tait pas encore apparu sous son v�ritable jour. Il �tait venu en principe mettre un terme aux d�rives catastrophiques du pr�sident Bourguiba. Le coup d'Etat de novembre 1987 a �t� accueilli avec all�gresse par l'ensemble du peuple tunisien. Au cours de ses premi�res ann�es, tout le peuple tunisien avait cru au �changement�, attaghyir. C'�tait l'�poque de la d�claration du 7 novembre, de la proclamation du �Pacte national�, de la r�vision constitutionnelle de 1988, de l'institution du Conseil constitutionnel et de la consolidation apparente des grandes libert�s publiques. Ce qui s'est pass� en 1992, l�ann�e o� j�ai d�missionn� du Conseil constitutionnel, c'est que celui-ci a eu � examiner un projet de loi sur les associations. Ce projet, en fait, �tait destin� � provoquer la mort de la Ligue tunisienne des droits de l'homme. Nous avons �prement discut� mon coll�gue Abdelfattah Amor et moi-m�me la constitutionnalit� de cette loi sc�l�rate. Un certain nombre de nos coll�gues �taient d'accord avec notre analyse sur l'inconstitutionnalit� manifeste de cette loi. Mais, au moment de la d�cision, nous nous sommes retrouv�s, totalement, isol�s. Dans la lettre que j'ai envoy�e au pr�sident de la R�publique, je lui avais signifi� que cette loi �tait non seulement inconstitutionnelle, mais qu'elle contrevenait � la �conscience juridique�.
En vous r�f�rant � la notion de l��intellectuel organique �, si ch�re � Antonio Gramsci, ou � celle de l���thique de la conviction� mise en relief par Max Weber, par distinction � l���thique de la responsabilit�, pensez-vous que les intellectuels arabes, maghr�bins en particulier, ont failli � leur devoir vis-�-vis de leurs peuples ?
Des intellectuels, h�las nombreux, l�ont fait. Ce sont ceux que j'ai appel�s dans �Politique, religion et droit dans le monde arabe�, les �intellectuels administratifs�. Les juristes sont des mod�les du genre. Avec quelques autres coll�gues, nous les avons combattus, dans des confrontations parfois extr�mement p�nibles. Mais il serait erron� de g�n�raliser ce jugement.
II- La Tunisie sous Ben Ali, �tat des lieux :
Lorsque l�ancien pr�sident Ben Ali avait pris la succession du pr�sident Bourguiba, il avait � avec le pacte national, notamment � manifest� de bonnes dispositions pour favoriser l�ancrage d�mocratique de la Tunisie. Comment expliquer sa volte-face ? Ce revirement �tait-il dans la nature du syst�me dont il a h�rit� ? R�sulte-t-il, plut�t, d�une part d�terminante de volontarisme individuel ?
Il ne s'agit pas d'une volte-face. Je pense que Ben Ali �tait anim� aux premiers temps de sa prise du pouvoir par de bonnes intentions. Il a certainement cru � sa mission r�novatrice. Il �tait entour� d'hommes politiques exp�riment�s et intelligents. Mais, apr�s les incertitudes des premiers temps, son installation d�finitive au pouvoir a laiss� � l�homme �r�el� tout le loisir de s'�pancher et de se d�velopper. L'homme �r�el� n'a aucune �l�vation d'esprit, ni culture v�ritable. Il dispose d'une malice �flicardi�re� � excusez le terme � de bas �tage qui ne convient pas � un chef d'Etat. Les meilleurs de l'�quipe qui a pris le pouvoir se sont retir�s. N'ayant plus aucun contre-pouvoir en face de lui, Ben Ali a alors plong�, avec une v�ritable ivresse et une irresponsabilit� totale, dans la jouissance du pouvoir absolu. Sa deuxi�me femme et son entourage n'ont fait qu'aggraver cet instinct irr�pressible de jouissance.
Il serait difficile de nier les aspects positifs de l�h�ritage laiss� par le pr�sident Bourguiba dont le souvenir, au demeurant, semble �tre �voqu� avec respect en Tunisie. Si vous deviez dresser le bilan de la gouvernance sous l�ancien pr�sident Ben Ali, vous consid�reriez que l�h�ritage du pr�sident Bourguiba a �t�, plut�t, fructifi� ou, plut�t, dilapid� ?
Ben Ali n'a pas remis en cause les avanc�es sociales de Bourguiba, notamment le d�veloppement des droits de la femme. Ceci �tant, Bourguiba n'est pas un homme sans faute. Il �tait le seul � disposer de la l�gitimit� n�cessaire, de la profondeur historique, de l'intelligence indispensable, de la culture universelle, pour pr�parer la Tunisie � vivre une vie r�ellement d�mocratique. Il a totalement rat� cette mission qui ne l'int�ressait pas, par rapport au culte de sa personnalit�. Bourguiba, en effet, �tait d�vor� par un instinct narcissique d�mesur�. Cela a englouti toutes les potentialit�s de cet homme exceptionnel. Mais il avait au moins une qualit�, une vertu. Comme tous les vrais et grands politiques, l'argent ne l'int�ressait pas. Cela est revenu aujourd'hui dans la m�moire des Tunisiens. L'homme �aux mains propres�, voil�, pour nous aujourd'hui, la figure de Bourguiba. La le�on que Ben Ali n'a pas su retenir de Bourguiba c'est que l'int�grit� morale d'un chef d�Etat, en politique, est un �l�ment-cl� de son gouvernement. Voil� ce que Ben Ali a totalement dilapid�.
Vous avez souvent d�clar� que l�ancien pr�sident Ben Ali, du moins le syst�me qu�il avait mis en place, �utilisait le droit pour violer le droit�. Pouvez-vous illustrer votre propos en vous r�f�rant � l�organisation institutionnelle du pays sous l�ancien pr�sident Ben Ali et au mode de fonctionnement des pouvoirs durant cette m�me p�riode ?
Utiliser la loi pour vider le droit de sa substance, telle a �t� la m�thode de gouvernement de Ben Ali. Le malheur c'est qu'il a trouv� assez de juristes pour l'aider. Ce sont ces juristes que je ne comprendrai jamais. Notre Constitution, nos lois, sont devenus des pi�ges contre le sens du droit et la mat�rialit� des droits. Prenez l'exemple de la Constitution. Elle a subi un certain nombre de r�visions qui l'ont totalement d�figur�e. Il en est de m�me des grandes lois qui concernent la vie politique, comme le code �lectoral, les lois sur les associations, les partis politiques, la presse, etc.
Entre les instances de consistance politique, tel le RCD, et les institutions bureaucratiques � l�instar de la police et des autres services de s�curit�, o� se sera situ�, selon vous, le centre de gravit� dans le r�gime de Ben Ali?
La police, en particulier la police politique, en �tait le centre de gravit�. Il faut que les chercheurs �laborent une th�orie de �l'Etat policier�, � partir de l'exp�rience de Ben Ali. L'Etat policier induit, dans toute la soci�t�, des effets d'une perversit� compl�te. Il d�truit l'autorit� �tatique. Il provoque le d�sint�ressement de la chose publique. Il favorise, dans l'esprit civique majoritaire, cette mentalit� de la d�brouillardise, de la corruption et de la compromission. Il cultive l'instinct de violence et d'agression. Dans ce type d'Etat, les valeurs sont d�truites, y compris la valeur la plus sacr�e, celle du respect de la vie et de l'int�grit� physique. L'Etat policier, c'est un retour � l'�tat de nature, dans lequel la volont� subjective tient lieu de loi. C'est la n�gation de la soci�t� civile.
Pourquoi, selon vous, l�insurrection du peuple tunisien, ou la r�volution si vous pr�f�rez, fut spontan�e sans r�le essentiel des partis et associations syndicales et professionnelles, encore moins des leaders politiques ? Comment expliquez- vous que cette insurrection intervenue de mani�re intempestive n�ait pu �tre ni contrari�e ni d�voy�e malgr� toutes les tentatives enregistr�es ?
De mani�re spontan�e, et non pas de mani�re intempestive. Il s'agit d'une explosion de fureur et de rage, mais d'une rationalit� et d'une sagesse �tonnante. Explosion de rage et de fureurs contre l'opprobre et la bassesse de l'ancien r�gime. Rationalit� et sagesse, par la nature des slogans, la l�gitimit� des demandes, le sens du sacrifice, l'absence du sentiment de vengeance, la fra�cheur de ses partisans. Sur ce point �galement, il faudra encore quelques ann�es pour th�oriser le sens, la profondeur, les motivations de cette r�volution.
Au total, la chute du r�gime du pr�sident Ben Ali, c�est, selon vous, l��chec d�un syst�me autoritariste parvenu � ses limites ultimes ou la r�sultante de l�influence d�mesur�e de la famille Trabelsi sur le processus de prise de d�cision national ?
Les deux se conjuguent. L'exc�s de pouvoir et l'opprobre moral. Sur tous les fronts, Ben Ali a d�pass� toutes les lignes rouges.
III � La Haute Instance :
Professeur, permettez-moi cette impertinence. Vous n��prouvez pas de g�ne � pr�sider une instance en charge de r�formes politiques essentielles cens�e permettre l�acc�s de la Tunisie au syst�me d�mocratique alors que les instances ex�cutives actuelles jusques, dans une certaine mesure, le Premier ministre lui-m�me constituent un h�ritage de la dictature ? Vous pensez que la d�marche est coh�rente et l�gitime ?
Je suis d�sol�, le Premier ministre ne constitue pas un h�ritage de la dictature. Il fait partie de tous les responsables politiques qui ont observ� r�serve et hostilit� � l'�gard du r�gime de Ben Ali. Il a m�me affirm�, express�ment, que �Ben Ali �tait un tra�tre�. Pour le reste, nous faisons avec ce que nous avons. Cela fait partie de la maturit� du peuple tunisien. Il accepte des solutions boiteuses, sur le plan de la logique abstraite, mais ces solutions sont accept�es en vue du bien commun. La logique du pass� et de l'ancien ordre, celle du nouveau et du r�volutionnaire, resteront en confrontation au cours des prochaines ann�es. Il faudra du temps pour revenir � l'apaisement g�n�ralis� et au retour � la concorde d�finitive.
La Haute Instance que vous pr�sidez a connu bien des difficult�s depuis sa cr�ation. Quelles ont �t� les �tapes essentielles d�une mise en place, apparemment des plus laborieuses ? Quels furent les grands obstacles rencontr�s par la Haute Instance depuis sa cr�ation ?
La Haute Instance a �t� confront�e aux m�mes probl�mes que toutes les institutions de cette p�riode transitoire. Tout s'est fait dans une certaine improvisation et sous la pression des �v�nements. Il a d'abord fallu, � la fin du mois de janvier 2011, concevoir une solution qui tienne compte � la fois de la logique institutionnelle, celle de la premi�re Commission de r�forme politique, � caract�re exclusivement technique, et de la logique r�volutionnaire incarn�e par le �Conseil national de protection de la r�volution�. La Haute Instance, cr��e par le d�cret-loi n� 6 du 18 f�vrier 2011, constitue la synth�se des deux logiques. Cet aboutissement a fait l'objet de n�gociations extr�mement ardues et difficiles entre le Premier ministre de l'�poque, Mohamed Ghanouchi, et les composantes principales du Conseil national de protection de la r�volution. L'appellation si fastidieuse de l'instance est le produit de cette n�gociation difficile. L'instance porte, officiellement, le titre de : �Haute Instance de r�alisation des objectifs de la r�volution, de la r�forme politique et de la transition d�mocratique �. Une fois mise en place, le 17 mars 2011, la Haute Instance a eu � r�soudre la question de sa repr�sentativit�, fortement contest�e. Il a fallu ensuite surmonter toutes les difficult�s d�coulant du caract�re quelque peu h�t�roclite de la Haute Instance. N'oublions pas en effet que nous sommes pass�s successivement d'une simple commission d'une vingtaine d'experts en sciences juridiques, � une Haute Instance compos�e de 72 personnes, pour aboutir enfin � une assembl�e r�unissant plus de 150 personnes, sans compter le groupe des juristes. Le caract�re disparate de l'instance explique un certain nombre de ses probl�mes. Cela a �t� aggrav� par le fait que, travaillant toujours dans l'urgence, la Haute Instance n'a m�me pas eu le temps d'�laborer un r�glement int�rieur. Par ailleurs, la comp�tence de la Haute Instance n'�tait pas d�termin�e avec pr�cision. Enfin, le mode de prise de d�cision n'�tait pas homog�ne. Nous avons pratiqu�, selon les circonstances, le mode de d�cision consensuelle et celui de la votation. La proc�dure de votation a �t� consid�r�e par certains partis qui ne disposaient pas de la majorit� des voix, comme une proc�dure de marginalisation. Ils se sont alors abrit�s sous le parapluie du consensus pour contester un certain nombre de d�cisions. La Nahdha s'est retir�e deux fois de l'instance pour cette raison, une fois � l'occasion du report des �lections de juillet � octobre, une autre fois � l'occasion de la discussion du projet de d�cret-loi sur les partis politiques et leur financement. Malgr� toutes ces difficult�s, la Haute Instance a r�ussi � achever l'essentiel de sa mission, pr�parer le cadre g�n�ral qui servira � l'organisation des �lections pour l'Assembl�e constituante.
Quel est le positionnement de la Haute Instance par rapport � l�environnement institutionnel en place en Tunisie ? De quelles pr�rogatives dispose-t-elle ? Quelles sont ses missions ?
La Haute Instance est une �autorit� publique ind�pendante�. Elle fait partie des institutions de l'�tat. Mais elle doit fonctionner de mani�re tout � fait autonome, sans recevoir d'ordres ou d'instructions de quiconque. Elle a pour t�che d'examiner et de proposer aussi bien les r�formes politiques n�cessaires, que les projets de textes juridiques qui doivent les soutenir. Elle a �galement pour t�che d'examiner et de donner un avis, en coordination avec le Premier ministre, sur l'activit� gouvernementale. Sur dernier point, il faut malheureusement constater que le flux ne passe pas de mani�re appropri�e. Le gouvernement n�accepte pas de bonne gr�ce de se soumettre aux critiques. Les rencontres entre les membres du gouvernement et le Conseil de l'Instance sont, extr�mement, rares. Nous avons re�u deux fois le Premier ministre et une autre fois le ministre des Affaires sociales. Cela est positif, mais pas assez, cependant, pour pouvoir discuter une politique gouvernementale dans son ensemble. Or, les probl�mes politiques de notre pays ne manquent pas. La difficult�, c'est que lorsque l'instance s'occupe de ce qui la regarde, il lui est reproch� d'outrepasser ses comp�tences et m�me de mordre sur celle de la future Assembl�e constituante. Lorsqu'elle n'arrive pas, pour des raisons qui lui sont �trang�res, � exercer ses attributions, comme en mati�re d'examen de la politique gouvernementale, il lui est reproch� alors sa passivit� et sa faiblesse. C'est ainsi que, injustement, l'instance est devenue la cible de toutes les critiques faciles et des points de vue inconsistants. Les textes qui sont � l'ordre du jour de l'Instance ont tous un rapport direct avec la pr�paration des �lections. Il s'agit des projets sur les partis politiques et leur financement, sur les associations, sur les m�dias et la communication audiovisuelle et sur la presse. Cela rentre directement dans les attributions de l'Instance. Par ailleurs, je rappelle que l'Instance n'a pas de pouvoir de d�cision. C'est � l'ex�cutif provisoire de d�cider. Mais ces projets d�rangent �norm�ment certains partis. Ils ont invent� cet argument cousu de fil blanc, selon lequel l'Instance s'est transform�e en Parlement et usurpe les pouvoirs de l'Assembl�e constituante.
Quelle est l�organisation interne de la Haute Instance ? Nonobstant les commissions sp�cialis�es, comment se d�roule la mise en harmonie des travaux d�experts avec avis et recommandations des partis, associations et personnalit�s pr�sents au sein de la Haute Instance ?
La �Haute Instance de r�alisation des objectifs de la r�volution, de la r�forme politique et de la transition d�mocratique� est compos�e de deux organismes. Le �Conseil� constitue l'organisme repr�sentatif et politique. Il est compos� de personnalit�s nationales, d'organismes non gouvernementaux et associatifs, de partis politiques et de repr�sentants des r�gions. Le �Comit� d'experts � constitue l'organisme technique dont la t�che essentielle est de pr�parer les projets de textes juridiques � soumettre � l'examen du conseil. Les experts pr�sents au cours des s�ances du conseil ne participent pas au vote. Cependant, le r�le du comit� d'experts est d�cisif. C'est au sein du Comit� d'experts qu'ont �t� �labor�s tous les textes relatifs � l'�lection de l'Assembl�e constituante. Il en est ainsi de la loi �lectorale proprement dite, du d�cret-loi instituant la Haute Instance �lectorale ind�pendante, et des d�crets d'application de la loi �lectorale. Aujourd'hui, nous sommes en train de discuter de trois projets fondamentaux, en relation avec les �lections. Il s'agit des projets de textes sur les partis politiques et leur financement, sur les associations, sur la communication et les m�dias, et enfin sur la presse.
A propos d�experts, justement, que pensez-vous de ces r�criminations qui �voquent un d�tournement de souverainet� en faisant �tat de l�appropriation du pouvoir de d�cision au sein de la Haute Instance par un groupe de juristes qui vous seraient, personnellement, inf�od�s ?
�D�tournement de souverainet� ! Vous devez poser la question aux membres du Conseil. Ces derniers, d'apr�s mes connaissances, ont le plus grand respect pour le groupe de juristes qu'ils appr�cient non seulement pour leur comp�tence mais �galement pour leur neutralit�. �Juristes qui me seraient personnellement inf�od�s� ! Voil� une accusation totalement d�nu�e de fondement. Les juristes qui font partie du groupe d'experts appartiennent aux diff�rentes facult�s de droit du pays : les deux facult�s de Tunis, la facult� de Sousse, la facult� de Sfax, la facult� de Jendouba et l'institut de Kairouan. Le groupe d'experts comprend, �galement, des juges judiciaires, des juges administratifs et des avocats. Avant de les rencontrer au sein de la Haute Instance, je n'avais, avec plus des deux tiers du groupe d'experts, aucun lien de connaissance personnelle, ni, � fortiori, d'amiti�. Les coll�gues que je connaissais personnellement ont �t� choisis sur la base de leur seule comp�tence. Je peux m�me dire qu'avec ces derniers, dans le pass�, je n'avais pas toujours eu des rapports particuli�rement amicaux. En choisissant les experts, j'ai pr�cis�ment agi dans le sens totalement contraire � celui que l'on veut m'imputer. C'est-�-dire que j'ai fait en sorte de choisir des personnalit�s avec qui je n'avais aucune relation personnelle. Mais que voulez-vous ? Il faut bien trouver un bouc �missaire � ses frustrations. Je dois vous avouer que j'ai refus� d'int�grer dans le groupe des personnes qui me l'avaient express�ment demand� et qui �taient sp�cialement venus me rencontrer pour cela. Sans porter atteinte � la modestie, je pense �tre assez bien plac� pour juger la valeur des juristes. Par ailleurs, parmi les d�tracteurs, il en existe qui ont �chou� plusieurs fois devant des jurys que je pr�sidais il y a fort longtemps. Leur manque de qualification, �videmment, ne peut, d'apr�s leur jugement personnel, leur �tre imput�. Nous connaissons fort bien cette rengaine : ce n'est jamais � cause de soi-m�me qu'on �choue, mais � cause du jury. Ce sont ces personnes-l� qui ont lanc� l�accusation dont vous faites �tat.
Comment se d�roulent les travaux de la Haute Instance ? Vous avez souvent �voqu� le consensus comme fondement essentiel du fonctionnement de cette Haute Instance. Des personnalit�s influentes et des partis importants sur la sc�ne politique ont, �pisodiquement, manifest� leur d�saccord jusqu�� quitter, parfois, la Haute Instance. Quelle �valuation, personnellement, faites-vous de l�esprit d�mocratique, fondement lui-m�me de tout consensus, qui r�gne au sein de la Haute Instance ?
Comme je vous l'ai expliqu� tout � l'heure, le travail de l'Instance s'est fait dans une certaine improvisation. Nous avons, constamment, travaill� dans l'urgence avec un sens tout � fait minimum de la discipline. La r�gle du consensus, sauf exception, a toujours �t� respect�e. Je vous ai expliqu� la raison pour laquelle certains partis politiques ont suspendu leur participation aux travaux de l'Instance. Mais en d�finitive, cette derni�re a �t� le lieu d'�closion de notre premi�re exp�rience d�mocratique dans l'histoire r�cente de notre R�publique. Les d�bats, les votes, les �lections au sein de l'Instance se sont caract�ris�s par le pluralisme, la transparence, le consensus ou parfois le vote majoritaire. Il est important de le noter. La premi�re exp�rience de d�mocratie politique en Tunisie a vu le jour au sein de l'instance de r�alisation des objectifs de la r�volution. C'est un point que les d�tracteurs de l'Instance oublient d'�voquer.
La Haute Instance doit statuer � si elle ne l�a d�j� fait � sur des questions essentielles dans la vie politique et institutionnelle de la Tunisie. Loi �lectorale, loi sur les partis, loi sur la presse, notamment sont � son ordre du jour. La d�marche ne pr�juge-t-elle pas de ce que pourrait d�cider l�Assembl�e constituante, autrement plus l�gitime que la Haute Instance ? Ce ne serait pas risqu� si l�Assembl�e constituante estimait n�cessaire de d�juger la Haute Instance ?
Je r�ponds en premier lieu que nous ne savons encore rien de l'�tendue des comp�tences de l'Assembl�e constituante. Se limitera- t-elle � l'�laboration d'un texte constitutionnel ou bien exercera-t-elle en m�me temps le pouvoir l�gislatif ? Il est par cons�quent aberrant, de ce point de vue, de soutenir que l'Instance empi�te sur les comp�tences de la Constituante. En second lieu, tout ce que l'Instance a produit rentre, strictement, dans les attributions qui lui ont �t� reconnues par le d�cret-loi num�ro 6 du 18 f�vrier 2011 organisant l'instance. Enfin, pourquoi oublie-t-on si souvent de rappeler que l'Instance ne fait que proposer des projets qui doivent �tre adopt�s, en fin de parcours, et conform�ment au texte sur l'organisation provisoire des pouvoirs publics, par le titulaire du pouvoir l�gislatif, le pr�sident de la R�publique.
Finalement quels sont les r�sultats d��tape de la Haute Instance ? Quel est l��ch�ancier adopt� par la Haute Instance pour r�aliser son plan de charges ?
Nous sommes au d�but de l��t�. Sur le plan du cadre �lectoral, la Haute Instance est en train d'achever sa mission. Cela ne veut �videmment pas dire que sa mission est termin�e. Il lui reste � examiner et d�battre sur les questions de politique g�n�rale d'ici le rendez-vous historique du 23 octobre 2011. Nous devons esp�rer que sur ce point le gouvernement fera preuve d'assez de sagesse et de responsabilit� pour accepter ce principe si important dans cette phase transitoire o� n'existe aucune assembl�e repr�sentative �lue, aucun parlement, aucun organe de dialogue. La Haute Instance est le seul lieu o� pourrait s'instaurer le d�bat d�mocratique.
Vous �tes optimiste sur le respect de ces �ch�ances ? Il n�existe pas d�entraves � l�avancement de vos travaux ? Les p�les de pouvoir r�siduels de l�ancien r�gime se sont, donc, r�sign�s au changement d�mocratique ? Certains nouveaux acteurs apparus sur la sc�ne politique ne risquent-ils pas d�entraver le fonctionnement de la Haute Instance ?
Trop de questions en une seule. Je vais me contenter de r�pondre � la question centrale sur �les p�les de pouvoir r�siduel de l'ancien r�gime�. La r�volution signifie l'appropriation par le peuple tunisien d'un certain nombre de principes vitaux pour une vie politique saine, c'est-�-dire une vie d�mocratique. Sans parti dirigeant, cette r�volution ne s'est pas donn�e la possibilit� de proc�der par elle-m�me au travail de r�novation et de purification des �lites gouvernantes, des administrations, de la justice, des services publics, de l'universit�, des syndicats, des organisations nationales, des entreprises publiques. Pour cela elle doit compter sur le gouvernement provisoire. Sans parler de l'hypoth�se dans laquelle un responsable de l'ex�cutif provisoire actuel est lui-m�me un responsable de l'ancien r�gime, il faut reconna�tre que l'ensemble du gouvernement provisoire baigne et travaille dans un milieu encore domin� par des personnes totalement impliqu�es dans le fonctionnement de l'ancien r�gime. La t�che du gouvernement provisoire est donc extr�mement difficile. D'un c�t�, il ne peut proc�der � une �radication syst�matique des administrations et des services, car cela pourrait se retourner contre lui, mais d'un autre c�t�, il doit montrer le maximum de loyalisme et d'engagement du c�t� de la r�volution. Il serait d�sastreux que le gouvernement oublie son devoir de loyaut� envers la r�volution.
Evoquant le risque de d�voiement du processus d�mocratique, vous soulignez que �l�ivresse de la libert� est une mauvaise chose pour le peuple�. Vous insistez, au contraire, sur ce que vous consid�rez le corollaire de la libert� en affirmant que �la libert� n�cessite de la mesure et de la discipline�. A qui s�adresse, exactement, cette mise en garde ?
Libert� et rationalit� doivent aller de concert. La libert� d�mocratique consiste � �laborer, � partir d'un d�bat d'id�es g�n�ralis�, des solutions aux probl�mes du pr�sent et des plans d'action pour la gestion du futur. Cette libert� est une conqu�te difficile qui se situe entre la tendance au d�sordre et la tendance au totalitarisme. Elle n�cessite par cons�quent une discipline sociale qui se manifeste par l'organisation des partis politiques et des associations, par les r�gles du jeu qui nous permettent de d�battre sans violence ni blocage des institutions, par le r�gne de la loi dans un �tat de droit, par l'�quilibre des pouvoirs et l'ind�pendance du pouvoir judiciaire. Effectivement, la libert� d�mocratique n'est pas une ivresse. Elle pr�suppose la discipline. L'ivresse de la libert� conduit � l'anarchie et l'anarchie nous ram�ne � la dictature, sous une forme ou une autre. L'ivresse de la libert� assassine les libert�s.
Quelle innovation essentielle apporte le pacte r�publicain que vient d�adopter la Haute Instance ? S�agit-il d�un consensus av�r� destin� � imprimer la vie politique en Tunisie dans une perspective strat�gique ou tout juste d�un accord de bonne conduite temporaire jusqu�� l��lection de l�Assembl�e constituante ?
Le Pacte r�publicain constitue, pour l'essentiel, un rappel des principes de la r�volution, avec des pr�cisions concernant le caract�re civil de l'Etat, la s�paration de la religion et de la politique, l'�galit� homme-femme, la libert� syndicale et le droit de gr�ve, la libert� totale de croyance et d'expression. A ce titre, il constitue une rupture symbolique d'une grande port�e par rapport � la pratique politique ancienne. Devant les critiques qu'il a suscit�es de la part de la majorit� des membres de l'instance, en particulier au sujet du caract�re excessivement emphatique des dispositions relatives � l'identit� arabe et islamique du pays, et du paragraphe relatif au refus de la normalisation avec �l'entit� sioniste�, le texte initial a fait l'objet de plusieurs modifications. Et ces derni�res ont toujours �t� le fruit de n�gociations et de concessions. Le texte ne coule pas d'une seule source. Pour cette raison, il ne peut satisfaire tout le monde. Il est destin� � �tre sign� par l'ensemble des acteurs de la vie politique en vue d'engager chacun d�eux � respecter les principes d�mocratiques intangibles sur lesquels sera �difi� le futur syst�me politique de la Tunisie.
�En d�mocratie il n�y a pas de victoire ni de d�faite absolue�, dites-vous. Comment vous assurez-vous du respect de ce principe dans le fonctionnement de la Haute Instance ? Comment, selon vous, ce principe pourrait �tre pris en compte dans la nouvelle Constitution ?
Le mode de prise de d�cision par consensus, qui est celui de la Haute Instance, est une application stricte du principe qu'en d�mocratie il n'y a ni d�faite ni victoire absolue. Il ne s'agit pas d'un principe de droit constitutionnel, mais d'un pr�cepte politique. L�affirmation qu'en d�mocratie il n�existe �pas de victoire absolue, ni de d�faite absolue� r�sume les deux principes-cl�s du gouvernement d�mocratique. Le premier, c'est que le parti qui a gagn� les �lections ne doit pas transformer sa victoire �lectorale en une entreprise de domination ou d'exclusion des groupes minoritaires, quelle que soit leur nature. Autrement dit, il lui est interdit de consommer, int�gralement, les fruits de sa victoire, m�me si cela lui �tait, juridiquement, possible. Le deuxi�me principe, c'est que le perdant �lectoral accepte la r�gle du jeu en reconnaissant sa d�faite et en se soumettant � la loi du parti majoritaire. Autrement dit, il lui est interdit d'interrompre le processus d�mocratique, de refuser sa soumission � la loi, encore moins d'entrer en dissidence par l'utilisation de la violence. Tout ce qui lui est reconnu, c'est de s'opposer et de combattre la loi majoritaire par des moyens pacifiques et d�mocratiques tels que la presse, les associations, les partis, l'�dition, les manifestations pacifiques et les r�unions publiques.
M. C. M.
A suivre demain �Nos mani�res d��tre musulmans nous ont souvent emp�ch�s de progresser�


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.